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17/12/2013 | FRANCE | N°10PA02423

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 17 décembre 2013, 10PA02423


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 mai et 12 juillet 2010, présentés pour le département de la Haute-Garonne, dont le siège est 1, boulevard de la Marquette à Toulouse (31090), représenté par le président du conseil général, par la

SCP Lyon-Caen Fabiani Thiriez ; le département de la Haute-Garonne demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0713200/7-3 en date du 18 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du

30 novembre 2006 constatant le montant

du droit à compensation des collectivités territoriales résultant du transfert de la v...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 mai et 12 juillet 2010, présentés pour le département de la Haute-Garonne, dont le siège est 1, boulevard de la Marquette à Toulouse (31090), représenté par le président du conseil général, par la

SCP Lyon-Caen Fabiani Thiriez ; le département de la Haute-Garonne demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0713200/7-3 en date du 18 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du

30 novembre 2006 constatant le montant du droit à compensation des collectivités territoriales résultant du transfert de la voirie nationale au 1er janvier 2006, en application du chapitre Ier du titre II de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2006 susmentionné ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;

Vu le code de général des collectivités territoriales ;

Vu le code de la voirie routière ;

Vu la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 ;

Vu le décret n° 2005-1711 du 29 décembre 2005 ;

Vu la décision n° 342072 du 29 octobre 2010 du Conseil d'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 novembre 2013 :

- le rapport de M. Dellevedove, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;

- les observations de Me Salon, avocat du département de la Haute-Garonne ;

1. Considérant que l'article 18 de la loi susvisée du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a transféré dans le domaine public routier départemental les routes classées dans le domaine public routier national à la date de la publication de cette loi, à l'exception d'un réseau d'autoroutes et de routes d'intérêt national ou européen dont la consistance est précisée par l'article L. 121-1 du code de la voirie routière ; que ce transfert de compétence a été accompagné d'une compensation financière allouée par l'Etat aux départements dans les conditions prévues par les articles 119 et suivants de cette loi et par le décret n° 2005-1711 susvisé du 29 décembre 2005, compensation dont le montant a été globalement fixé à 191 551 384 euros par un arrêté interministériel en date du 30 novembre 2006 ; que ce même arrêté a fixé à 2 134 763 euros le droit à compensation du département de la Haute-Garonne ; que le département de la Haute-Garonne relève appel du jugement du

18 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que le département de la Haute-Garonne soutient que le jugement attaqué est entaché d'un défaut de réponse au moyen tiré de la méconnaissance, par le décret susvisé du 29 décembre 2005 relatif à la compensation financière des charges liées aux routes nationales transférées aux départements et aux régions pour l'application duquel l'arrêté contesté a été pris, des dispositions de l'article 119 de la loi du 13 août 2004 ; que le département reproche en particulier aux premiers juges de n'avoir pas répondu à l'argument selon lequel le décret du 29 décembre 2005 aurait omis de définir les modalités de calcul de la compensation financière des crédits liés à la gestion de l'information du réseau ; qu'il résulte, toutefois, des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'avaient au demeurant pas à répondre à l'ensemble des arguments soulevés par le département à l'appui de ce moyen, ont précisés que la méthode de calcul de la compensation financière attribuée aux départements métropolitains énoncée en annexe du décret du 29 décembre 2005 n'était pas contraire aux dispositions de la loi du 13 août 2004 susmentionnée et doivent être regardés, ce faisant, comme ayant implicitement écarté l'argument précité ; que, dès lors, le moyen tiré de l'omission à statuer ne peut qu'être écarté ;

3. Considérant, en second lieu, qu'en soulignant que l'arrêté contesté se borne à " faire application des formules de calcul qui figurent en annexe du décret, qui n'est pas sur ce point ainsi qu'il a été dit ci-dessus entaché d'erreur manifeste d'appréciation ", les premiers juges ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de ce que les auteurs de l'arrêté contesté auraient omis de prendre en compte certaines dépenses de fonctionnement consacrées par l'Etat à l'exercice des compétences transférées en matière de routes nationales ; que par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'une insuffisance de motivation ;

Sur la légalité de l'arrêté en litige :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 18 de la loi susvisée du 13 août 2004 modifiant l'article L. 121-1 du code de la voirie routière : " A l'exception des routes répondant au critère prévu par l'article L 121-1 du code de la voirie routière, les routes classées dans le domaine public routier national à la date de la publication de la présente loi, ainsi que leurs dépendances et accessoires, sont transférées dans le domaine public routier départemental (...) " ; qu'aux termes de l'article 119 de cette loi : " I.- Sous réserve des dispositions prévues au présent article et à l'article 121, les transferts de compétences à titre définitif inscrits dans la présente loi et ayant pour conséquence d'accroître les charges des collectivités territoriales ou de leurs groupements ouvrent droit à une compensation financière dans les conditions fixées par les articles L. 1614-1 à L. 1614-7 du code général des collectivités territoriales. / Les ressources attribuées au titre de cette compensation sont équivalentes aux dépenses consacrées, à la date du transfert, par l'Etat, à l'exercice des compétences transférées, diminuées du montant des éventuelles réductions brutes de charges ou des augmentations de ressources entraînées par les transferts. / Le droit à compensation des charges d'investissement transférées par la présente loi est égal à la moyenne des dépenses actualisées, hors taxes et hors fonds de concours, constatées sur une période d'au moins cinq ans précédant le transfert de compétences. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent alinéa, après avis de la commission consultative mentionnée à l'article L. 1211-4-1 du code général des collectivités territoriales. / Le droit à compensation des charges de fonctionnement transférées par la présente loi est égal à la moyenne des dépenses actualisées constatées sur une période de trois ans précédant le transfert de compétences " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 29 décembre 2005 : " Pour déterminer les ressources à attribuer aux départements ou aux régions au titre de la compensation financière des charges afférentes aux routes nationales qui leur sont transférées, sont prises en compte les dépenses de l'Etat constatées par les lois de règlement pendant les périodes de référence prévues respectivement aux troisième et quatrième alinéas du I de l'article 119 de la loi du 13 août 2004 susvisée " ; que l'article 2 de ce même décret dispose : " La méthode de calcul de la compensation financière est précisée en annexe du présent décret " ; que l'arrêté contesté du 30 novembre 2006, pris pour l'application de ce décret, fixe à 2 134 763 euros le droit à compensation du département de la Haute-Garonne ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1614-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté contesté : " Tout accroissement net de charges résultant des transferts de compétences effectués entre l'Etat et les collectivités territoriales est accompagné du transfert concomitant par l'Etat aux communes, aux départements et aux régions des ressources nécessaires à l'exercice normal de ces compétences. / Ces ressources sont équivalentes aux dépenses effectuées, à la date du transfert, par l'Etat au titre des compétences transférées et évoluent chaque année, dès la première année, comme la dotation globale de fonctionnement. Elles assurent la compensation intégrale des charges transférées " ; que l'article L. 1614-3 de ce même code dispose : " Le montant des dépenses résultant des accroissements et diminutions de charges est constaté pour chaque collectivité par arrêté conjoint du ministre chargé de l'intérieur et du ministre chargé du budget, après avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges du Comité des finances locales, dans les conditions définies à l'article L. 1211-4-1 " ; qu'aux termes de l'article L. 1211-4-1 de ce code : " Réuni en formation restreinte, le Comité des finances locales est consulté sur les modalités d'évaluation et sur le montant de la compensation des transferts de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales. Cette formation, dénommée commission consultative sur l'évaluation des charges, est présidée par un représentant élu des collectivités territoriales (...) / La composition et les modalités de fonctionnement de cette commission sont fixées par décret en Conseil d'Etat " ; que l'article R. 1211-19 de ce même code dispose : " La commission [consultative sur l'évaluation des charges du comité des finances locales] est consultée sur : (...) 2° Le projet d'arrêté interministériel prévu au premier alinéa de l'article L. 1614-3 / A ce titre, son examen porte notamment sur : a) Le montant des ressources consacrées par l'Etat ou les collectivités compétentes à l'exercice de la compétence transférée, ainsi que la liste et le montant des dépenses correspondantes ; b) L'équivalence entre le montant de la compensation figurant dans le projet d'arrêté mentionné au troisième alinéa et le montant des ressources consacrées par l'Etat ou par les collectivités compétentes à l'exercice de la compétence transférée " ;

6. Considérant, en premier lieu, que, s'il résulte des dispositions précitées que, s'agissant du transfert de compétence de l'Etat à plusieurs collectivités territoriales, le montant des dépenses résultant des accroissements et diminutions de charges est constaté par arrêté pour chaque collectivité concernée par le transfert, ces dispositions ne font toutefois pas obstacle, contrairement à ce que soutient le département de la Haute-Garonne, à ce qu'un même arrêté fixe, comme en l'espèce, les compensations financières allouées à plusieurs collectivités territoriales, dès lors que le montant de la compensation financière allouée à chaque collectivité y est déterminé ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que le département de la Haute-Garonne fait valoir que l'arrêté contesté a été pris au terme d'une procédure irrégulière en raison des vices affectant l'avis émis le 5 octobre 2006 par la commission consultative sur l'évaluation des charges ; que, contrairement à ce que soutient le département, d'une part, l'avis susvisé du

5 octobre 2006 n'était soumis à aucune obligation de motivation ; que, d'autre part, les dispositions susmentionnées n'imposent pas à la commission consultative sur l'évaluation des charges de se prononcer sur la situation particulière de chaque collectivité concernée par le transfert de compétence ; qu'enfin, il ressort des pièces du dossier que la commission a bénéficié, pour rendre son avis, d'informations suffisamment complètes et précises pour lui permettre d'apprécier la situation de chacun des départements concernés par le transfert de compétence et qu'elle a pris en compte l'existence des particularités de chacun d'entre eux ; que, si le département de la Haute-Garonne soutient cependant qu'il n'a pas été suffisamment tenu compte de sa situation particulière, ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé ;

8. Considérant, en troisième lieu, que le département de la Haute-Garonne soutient que l'arrêté contesté est illégal par voie de conséquence de l'inconstitutionnalité du III de l'article 121 de la loi susvisée du 13 août 2004 ; que, toutefois, par sa décision n° 342072 du 29 octobre 2010, le Conseil d'Etat, saisi par la Cour de céans, a estimé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ainsi soulevée par le département de la Haute-Garonne au motif que cette question ne présentait pas un caractère sérieux et n'était pas nouvelle ; que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant, en quatrième lieu, que le décret susvisé du 29 décembre 2005, pour l'application duquel l'arrêté contesté a été pris, définit les modalités de calcul de la compensation financière des charges liées aux routes nationales transférées aux départements et aux régions et décrit, avec une précision suffisante, contrairement à ce que soutient le département de la Haute-Garonne, les différents éléments pris en compte pour la détermination de cette compensation financière ; que le renvoi aux dépenses de l'Etat constatées par les lois de règlement pendant les périodes de référence prévues par le I de l'article 119 de la loi susvisée du 13 août 2004 est à cet égard suffisant ; que, si le département requérant soutient que le décret attaqué est entaché d'une erreur de droit en ce qu'il calcule la compensation financière des charges liées aux routes nationales transférées en fonction de ratios financiers nationaux qui ne permettraient pas de prendre en compte les particularités attachées à chaque département, il ressort, au contraire, des pièces du dossier que les ratios financiers en cause intègrent divers paramètres liés notamment aux catégories de voies, à leur localisation ou encore au type d'équipement qu'elles comportent ; qu'enfin, si le département requérant fait valoir que les crédits nécessaires au développement et à la modernisation des infrastructures auraient dû être pris en compte dans le calcul de la compensation financière octroyée aux départements et aux régions, il ressort toutefois des dispositions précitées de l'article 121 de la loi du 13 août 2004 que la loi n'avait pas prévu que de telles dépenses devaient être prises en compte ; qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité de l'arrêté contesté par voie de conséquence de l'illégalité du décret susvisé du 29 décembre 2005 ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, en dernier lieu, que le département de la Haute-Garonne soutient que l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article 1er du décret susvisé du

29 décembre 2005 et de l'article 119 de la loi susvisée du 13 août 2004 en ce que la compensation financière qui lui a été allouée ne prend pas en compte l'ensemble des dépenses de fonctionnement consacrées par l'Etat aux routes nationales transférées telles qu'elles sont inscrites dans le " vert " budgétaire annexé à la loi de finance pour 2005 intitulé " Transports et sécurité routière " ; qu'il ressort, toutefois, des dispositions précitées et plus particulièrement de l'article 1er du décret du 29 décembre 2005, que la compensation financière allouée aux départements doit prendre en compte les seules dépenses de l'Etat effectivement constatées par les lois de règlement ; qu'en outre, le département de la Haute-Garonne n'établit ni même n'allègue que certaines dépenses constatées par les lois de règlement pendant les périodes de référence n'auraient pas été prises en compte au sein de la compensation financière fixée par l'arrêté contesté ; que, par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que le département de la Haute-Garonne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 novembre 2006 constatant le montant du droit à compensation des collectivités territoriales résultant du transfert de

la voirie nationale au 1er janvier 2006, en application du chapitre Ier du titre II de la loi

n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement d'une quelconque somme au titre des frais exposés par le département de la Haute-Garonne et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE

Article 1er : La requête du département de la Haute-Garonne est rejetée.

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N° 10PA02423


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA02423
Date de la décision : 17/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : LYON-CAEN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-12-17;10pa02423 ?
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