La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/12/2013 | FRANCE | N°12PA04066

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 06 décembre 2013, 12PA04066


Vu la requête, enregistrée le 12 octobre 2012, présentée par le préfet de police qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1208912 du 20 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris, premièrement, a annulé l'arrêté en date du 20 avril 2012 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A... D..., lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, deuxièmement, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale

" et, troisièmement, a condamné l'Etat à verser à l'intéressé la somme de 1 ...

Vu la requête, enregistrée le 12 octobre 2012, présentée par le préfet de police qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1208912 du 20 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris, premièrement, a annulé l'arrêté en date du 20 avril 2012 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A... D..., lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, deuxièmement, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " et, troisièmement, a condamné l'Etat à verser à l'intéressé la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D...devant le Tribunal administratif de Paris ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2013 :

- le rapport de M. Puigserver, premier conseiller ;

- et les observations de Me Boitel, avocat de M. D... ;

1. Considérant que M. D..., né le 29 mai 1969, ressortissant algérien entré régulièrement en France le 12 mars 2001 sous couvert d'un visa de court séjour, a sollicité, le 7 septembre 2011, son admission au séjour sur le fondement des stipulations du l de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que, par un arrêté du 20 avril 2012, le préfet de police a opposé un refus à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que le préfet de police relève régulièrement appel du jugement du 20 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, sur la demande de M.D..., annulé cet arrêté ;

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du

27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;

3. Considérant que, pour attester de sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté en litige, M. D... ne produit, au titre de l'année 2002, qu'une attestation manuscrite de domiciliation, des attestions de couverture maladie universelle (CMU), dont l'authenticité est contestée par le préfet, et divers documents manuscrits établis à son nom ; qu'il ne produit, pour l'année 2003, qu'une ordonnance médicale et un relevé de l'assurance maladie en date du 24 janvier, une lettre de l'assurance maladie du 1er septembre, un avis et un commandement de payer en date des 1er février et 26 août pour une infraction commise en septembre 2002, un courrier d'un opérateur de téléphonie daté du 24 juillet sur lequel le nom du destinataire n'est pas lisible, six copies d'enveloppes à son nom, un certificat de domicile établi en mai 2012, ainsi que trois quittances de loyer manuscrites ; que, s'agissant de l'année 2004, il a versé au dossier une ordonnance médicale, une copie de carte postale, le certificat de domicile déjà mentionné plus haut, ainsi que quatre quittances de loyer manuscrites, un bulletin d'adhésion à une association et un reçu manuscrit pour le versement d'une somme de cinq euros, quatre attestations d'associations selon lesquelles il aurait suivi des cours de français et participé à plusieurs évènements culturels, une attestation d'élection de domicile établie le 20 octobre et une copie de carte de bibliothèque ; qu'en ce qui concerne l'année 2005, il a versé au dossier une attestation d'élection de domicile établie le 26 octobre, une attestation d'aide médicale d'Etat du 30 novembre, un formulaire de demande de carte solidarité transport rempli de manière manuscrite, une déclaration d'impôt manuscrite enregistrée à l'hôtel des finances le 30 mars, le certificat de domicile mentionné plus haut, ainsi que huit quittances de loyer manuscrites, une attestation établie en 2008 selon laquelle il aurait participé à des cours de français, une attestation établie le 15 avril selon laquelle il aurait assisté à une audition de flûte traversière, une facture d'achat de téléphone mobile et trois reçus manuscrits pour le versement d'une somme totale de vingt-cinq euros ; que, pour 2006, 2007 et 2009, ne sont produits que des courriers lui ayant été adressés, relatifs notamment à la carte de solidarité transports, ainsi que des coupons de transport, des attestations d'aide médicale d'Etat d'octobre, faisant suite à des demandes déposées le même mois, des documents médicaux des mois de janvier, février et novembre 2006, ainsi que des certificats rétrospectifs, et diverses attestations et factures ; que ces pièces ne permettent pas, en raison de leur valeur probante insuffisante, d'établir qu'il résidait habituellement sur le territoire au cours des années en cause ; que, par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris s'est fondé, pour annuler son arrêté, sur le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D...devant le Tribunal administratif de Paris et la Cour ;

Sur les autres moyens invoqués par M.D... :

5. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 2012-00242 en date du

12 mars 2012, régulièrement publié au bulletin municipal de la Ville de Paris le 23 mars 2012, le préfet de police a donné à M. B...C..., attaché principal d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, adjoint au chef du 9ème bureau de la sous-direction de l'administration des étrangers de la direction de la police générale de la préfecture de police, délégation pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le signataire de l'arrêté litigieux n'aurait pas été titulaire d'une délégation de signature régulière, manque en fait ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté en litige mentionne les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco algérien et indique que M. D... ne justifie pas de sa résidence habituelle en France au cours des dix dernières années, à raison du faible nombre et du défaut de valeur probante de pièces produites pour plusieurs des années considérées ; qu'il précise en outre qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, dès lors que, célibataire et sans charge de famille en France, il n'est pas démuni d'attaches familiales à l'étranger ; qu'ainsi, le refus de titre de séjour opposé à M. D... énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant que M. D... fait valoir qu'il réside habituellement en France depuis plus de dix ans, qu'il y a rejoint des membres de sa famille, notamment des cousins, qu'il travaille et qu'il est bien intégré, comme il le prouve par la production de nombreuses attestations ; que toutefois, ainsi qu'il a été dit, l'intéressé ne rapporte pas la preuve de la durée alléguée de son séjour sur le territoire français ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier que M. D...est célibataire et sans charge de famille en France et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où vivent ses parents, et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 32 ans ; qu'enfin, contrairement à ses allégations, il ne justifie d'aucune activité professionnelle et d'aucun revenu en France ; qu'ainsi, eu égard aux conditions de son séjour en France, l'arrêté litigieux n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, cet arrêté n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 20 avril 2012 ; que par voie de conséquence les conclusions de M. D... à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1208912 du Tribunal administratif de Paris en date du

20 septembre 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

''

''

''

''

4

N° 12PA04066


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04066
Date de la décision : 06/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Frédéric PUIGSERVER
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : BOITEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-12-06;12pa04066 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award