Vu la requête, enregistrée le 5 avril 2013, présentée pour M. A...F..., demeurant..., par MeC... ; M. F...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1202144/6-3 du 8 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 février 2012 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 octobre 2013, le rapport de M. Vincelet, premier conseiller ;
1. Considérant que par l'arrêté attaqué du 2 février 2012, pris sur le fondement du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police a obligé M. F..., ressortissant algérien, à quitter le territoire français au motif qu'il n'avait pu justifier être entré régulièrement en France et qu'il était dépourvu de titre de séjour en cours de validité ; qu'il a également fixé le pays de destination de son éloignement ; que M. F... fait appel du jugement du 8 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en annulation de cet arrêté ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, d'une part, que M. F...avait établi, par la production en première instance de son passeport et de son visa, être régulièrement entré en France le 24 janvier 2001 et, d'autre part, qu'il s'y était maintenu au-delà de la durée de validité de ce visa ; qu'il s'ensuit que l'arrêté attaqué ne pouvait être légalement fondé sur les dispositions précitées du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais relevait du 2° de ce même article ; que, par suite, en ne relevant pas d'office ce moyen d'ordre public, le Tribunal administratif de Paris a entaché son jugement d'irrégularité ; que ce jugement doit, dès lors, être annulé et qu'il y a lieu pour la Cour de statuer par la voie de l'évocation sur la demande présentée par M. F...au Tribunal administratif de Paris ;
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de police :
4. Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, M. F...s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français à l'expiration de son visa ; qu'il se trouvait ainsi dans la situation où, en application du 2° du I de l'article L. 511-1, le préfet de police pouvait décider qu'il serait éloigné du territoire français ; que cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer les dispositions du 1° ou du 2° de l'article L. 511-1, I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que par arrêté du 24 octobre 2011, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris le 28 octobre suivant, le préfet de police a donné à M. D...E..., attaché d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, signataire de l'arrêté attaqué, délégation à l'effet de signer, en cas d'absence ou d'empêchement de M. Philippe Sitbon, conseiller d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, chef du 8ème bureau, les actes relevant des attributions de ce dernier aux nombres desquels figurent les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le supérieur de M. E...et, en particulier M. B..., n'auraient pas été absents ou empêchés ; que l'absence de mention sur l'arrêté de l'absence ou de l'empêchement du sous-directeur de l'administration des étrangers, de l'adjointe de ce dernier et du chef du 8ème bureau de cette sous-direction, est sans incidence sur sa régularité ; qu'il suit de là que l'incompétence alléguée du signataire de l'arrêté n'est pas fondée et doit être écartée ;
6. Considérant, en troisième lieu, que l'arrêté contesté mentionne les nom, prénom et qualité de son signataire ; que l'absence de ces mêmes mentions concernant le signataire du courrier informant M. F...des modalités de versement de l'aide au départ volontaire et celui du formulaire de notification des voies et délais de recours est sans incidence sur la régularité de l'arrêté ;
7. Considérant, en quatrième lieu, qu'indépendamment de l'énumération donnée à l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement l'autorité administrative ne saurait prendre légalement une telle mesure à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;
8. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;
9. Considérant que M.F..., entré en France le 24 janvier 2001, ne produit aucun justificatif de sa présence sur le territoire national pour les années 2002 et 2003 et ne produit, pour les années 2004 à 2007, que quelques pièces insusceptibles d'établir sa présence continue durant ces années ; que, par suite, M. F...n'établit pas avoir eu 10 ans de résidence habituelle en France à la date de l'arrêté attaqué ; qu'il pouvait, dès lors, faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;
10. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
11. Considérant que M.F..., né en 1969, n'est pas dépourvu d'attaches en Algérie, où réside une partie de sa famille et où il a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans ; qu'il ne peut utilement se prévaloir de la naissance en France de son enfant dès lors qu'elle est postérieure à l'arrêté contesté ; que, dans ces conditions, en dépit de la présence sur le territoire français d'une partie de sa fratrie, l'obligation de quitter le territoire en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs de son intervention ; qu'elle n'a, en conséquence, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation de l'intéressé ;
12. Considérant, enfin, s'agissant de la décision fixant le pays de renvoi, que le requérant se borne à soutenir que du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, cette décision serait privée de base légale ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que ce moyen n'est pas fondé ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. F... devant le Tribunal administratif de Paris n'est pas fondée et doit être rejetée ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
14. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de M.F..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;
Sur les conclusions à fin d'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans le présent litige, le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. F... et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris du 8 novembre 2012 est annulé.
Article 2 : La demande de M. F... devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.
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N° 13PA01318
Classement CNIJ :
C