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17/10/2013 | FRANCE | N°12PA02162

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 17 octobre 2013, 12PA02162


Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2012, présentée pour l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Cotard, ayant son siège social 54 rue René Boulanger à Paris (75010), par MeA... ; l'entreprise Cotard demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1017334 du 14 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle, ainsi que des intérêts de retard y afférents, auxquels elle a été assujettie au ti

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Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2012, présentée pour l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Cotard, ayant son siège social 54 rue René Boulanger à Paris (75010), par MeA... ; l'entreprise Cotard demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1017334 du 14 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle, ainsi que des intérêts de retard y afférents, auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2004 et, d'autre part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005 et 2006 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 septembre 2013 :

- le rapport de Mme Bernard, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public ;

1. Considérant que l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Cotard a abandonné au cours de l'exercice 1999 la totalité de la créance de 2 886 282 F (440 010 euros) qu'elle détenait sur la société French Production ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité portant sur ses exercices 2000 et 2001 et de contrôles sur pièces portant sur ses exercices 2003 à 2006, l'administration a estimé que cet abandon de créance était constitutif d'un acte anormal de gestion et a annulé le déficit qui en résultait, qui avait été reporté sur les exercices précités par l'EURL Cotard ; que l'EURL Cotard relève appel du jugement du 14 mars 2012, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle, ainsi que des intérêts de retard y afférents, auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2004 à l'issue d'une procédure contradictoire et, d'autre part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005 et 2006 par voie de taxation d'office ;

2. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale ; que les abandons de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ;

3. Considérant que l'EURL Cotard, qui a une activité de holding et de gestion de droits cinématographiques, a consenti en 1994 des aides financières à sa filiale, la société French Production, qui exerce une activité de production de films cinématographiques ; que, par acte du 17 novembre 1994, elle a également promis d'affecter et d'hypothéquer au profit de deux créanciers de sa filiale le bien immobilier qu'elle détient par l'intermédiaire d'une société civile immobilière ; que ces aides s'étant avérées insuffisantes, le Tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société French Production par jugement du 15 décembre 1997 ; que, dans le cadre de cette procédure, l'EURL Cotard a consenti à sa filiale l'abandon de la totalité de sa créance de 2 886 282 F (440 010 euros), avec clause de retour à meilleure fortune ; que six autres créanciers ont consenti un abandon de la totalité ou des trois-quarts du montant de leurs créances ; que, prenant acte de ces abandons de créances, le Tribunal de commerce de Paris a, par jugement du 25 mai 1999, déclaré la société French Production en situation de redressement judiciaire assorti d'un plan de continuation sur dix années ;

4. Considérant que, pour annuler le déficit imputé par l'EURL Cotard sur ses exercices clos en 2004, 2005 et 2006 à raison de l'abandon de créance consenti en 1999 à la société French Production, l'administration fiscale a considéré que cet acte relevait d'une gestion commerciale anormale ; que, toutefois, la circonstance que l'EURL ne détenait que 30 % du capital de la société French Production ne permet pas à elle seule d'exclure l'existence d'un intérêt financier, pour l'EURL Cotard, à consentir un tel abandon de créance ; qu'à cet égard, il résulte de l'instruction, ainsi que le fait valoir l'entreprise requérante, que l'abandon de créance litigieux, consenti dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, était nécessaire à la survie de la société French Production et, par suite, à la sauvegarde du patrimoine immobilier de l'EURL, donné en garantie à d'autres créanciers de la société French Production en 1994 ; que, par ailleurs, en se bornant à faire valoir que le montant de l'abandon de créance litigieux était sans commune mesure avec celui du chiffre d'affaires de l'EURL, tiré de son activité de location immobilière, qui n'était que de 54 256 euros en 2000 et de 8 503 euros en 2001, l'administration n'établit pas que cet abandon a fait courir un risque manifestement excessif à l'EURL, alors que la majorité des créanciers de la société French Production a également procédé à des abandons de créances, pour un montant total de près de 2 300 000 euros, et que le plan de continuation de la société French Production a permis l'apurement total du passif de cette société ; que, dans ces conditions, l'entreprise requérante établit qu'en consentant l'abandon de créance litigieux, elle a bénéficié en retour de contreparties, sans prendre de risque manifestement exagéré, et a ainsi agi dans son propre intérêt financier ; que c'est par conséquent à tort que l'administration a regardé ledit abandon de créance comme constitutif d'un acte anormal de gestion et a annulé le déficit reportable qui en résultait ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que l'EURL Cotard est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'EURL Cotard et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1017334 du 14 mars 2012 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : L'EURL Cotard est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle, ainsi que des intérêts de retard y afférents, auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2004, ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005 et 2006.

Article 3 : L'Etat versera à l'EURL Cotard une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 12PA02162


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA02162
Date de la décision : 17/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-082 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Aurélie BERNARD
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : SELARL GUIDET ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-10-17;12pa02162 ?
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