La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/10/2013 | FRANCE | N°12PA04395

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 16 octobre 2013, 12PA04395


Vu la requête, enregistrée le 9 novembre 2012, présentée pour M. A... E..., demeurant..., par Me D... ; M. E... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1210054/5-4 du 9 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er juin 2012 par lequel préfet de police de Paris lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de sa destination ;

2°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer le titre de séjour sollicité, sou

s astreinte journalière qu'il plaira à la Cour de fixer ou, à défaut, de réexaminer...

Vu la requête, enregistrée le 9 novembre 2012, présentée pour M. A... E..., demeurant..., par Me D... ; M. E... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1210054/5-4 du 9 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er juin 2012 par lequel préfet de police de Paris lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de sa destination ;

2°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer le titre de séjour sollicité, sous astreinte journalière qu'il plaira à la Cour de fixer ou, à défaut, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République démocratique populaire d'Algérie du 27 décembre 1968, modifié ;

Vu la loi n°79-587 du 11 juillet 1979, modifiée ;

Vu la loi nº 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2013 :

- le rapport de Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

- et les observations de MeD..., pour M.E... ;

1. Considérant que M.E..., né en 1960 en Algérie, pays dont il a la nationalité, entré en France, selon ses déclarations, le 28 janvier 2001, a sollicité pour la première fois, le 6 janvier 2012, un titre de séjour sur le fondement du 1. de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; qu'il demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1210054/5-4 du 9 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er juin 2012 par lequel préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de sa destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué du 1er juin 2012 portant à l'encontre de M. E...refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi a été signé par M. B... C..., adjoint au chef du 9ème bureau de la sous-direction de l'administration des étrangers à la direction de la police générale de la préfecture de police chargé de l'application de la réglementation relative au séjour des étrangers ; que M. B... C...disposait d'une délégation de signature, consentie par un arrêté du 17 avril 2012 du préfet de police, publié le 24 avril 2012 au Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris, pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'étaient pas absentes ou empêchées lors de la signature de la décision litigieuse ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que cet arrêté aurait été signé par une autorité incompétente manque en fait ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté attaqué comporte clairement dans ses visas et ses motifs l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et qui permettent de vérifier que l'administration préfectorale a procédé à un examen de la situation particulière de M. E...au regard des stipulations et des dispositions législatives et réglementaires applicables ; que cet arrêté précise que M. E...ne remplit pas les conditions prévues au 1. de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et qu'il n'a pu attester de manière probante et satisfaisante du caractère ancien et habituel de sa résidence en France au cours des quinze dernières années ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté doit, par suite, être écarté ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) " ;

5. Considérant que M. E...soutient qu'il n'a pas été mis en mesure de présenter ses observations préalablement à l'édiction de l'arrêté en litige ; qu'à supposer que l'intéressé entende invoquer la méconnaissance du principe du contradictoire garanti par l'article 24 précité de la loi susvisée du 12 avril 2000, il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que, dès lors, les dispositions de l'article 24 de la loi précitée ne sauraient être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé ; que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

7. Considérant que M. E...soutient être entré en France en janvier 2001 et y avoir résidé habituellement depuis lors, soit depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; que, toutefois, afin d'attester sa présence en France depuis 2001, l'intéressé se borne à produire pour l'année 2001 un certificat médical daté du 1er avril 2001 et une quittance de loyer manuscrite datée du 1er octobre 2001, pour les années 2002 à 2005 une quittance de loyer manuscrite datée du 1er septembre 2002, quelques bulletins de salaires pour certains incomplets, des relevés de compte comportant peu de mouvements, quelques ordonnances médicales, une attestation relative à l'aide médicale de l'Etat, ainsi qu'une déclaration des revenus 2005 renseignée de façon manuscrite ; que les documents produits pour les années 2006 à 2011, dès lors qu'ils ne se rapportent qu'à certains mois des années en cause, ne sont pas de nature à présumer un séjour habituel en France ; que, dans ces conditions, ces pièces, insuffisantes par leur nombre et leur teneur et, pour certaines, dépourvues de valeur probante, ne permettent pas d'établir la présence effective de M. E...en France au cours de ces années et, par suite, le séjour habituel de l'intéressé sur le territoire français depuis plus de dix ans ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1. de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, l'arrêté attaqué n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces stipulations ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que, si M. E...soutient qu'il pouvait bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort de la fiche renseignée par ses soins le 6 janvier 2012 lors de sa demande de titre auprès de la préfecture de police qu'il n'a pas sollicité un titre de séjour sur ce fondement ; qu'au demeurant, à supposer que la demande de titre ait également été faite sur ce fondement, M. E...ne pouvait en invoquer le bénéfice, l'article L. 313-14 n'étant pas applicable aux ressortissants algériens ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour [...] " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 ou, dans le cas d'un ressortissant algérien, par les stipulations de portée équivalente de l'article 6 de l'accord franco-algérien, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. E...n'établit pas être en situation de bénéficier de plein droit d'un titre de séjour au titre des 1. et 5. de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que, par suite, le préfet de police n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de statuer sur la demande de titre de séjour de l'intéressé ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure en l'absence de la saisine de cette commission doit, dès lors, être écarté ;

10. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. E...est sans charges de famille en France et qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 41 ans et dans lequel résident sa femme et ses huit enfants ; qu'il ne produit aucune pièce probante de nature à justifier d'une intégration d'une particulière intensité dans la société française ; qu'il ne justifie pas non plus du caractère indispensable de sa présence en France ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de l'intéressé en France, l'arrêté contesté n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 5. de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que, par suite, cet arrêté, en tant qu'il comporte refus d'octroi d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire et fixation du pays de destination n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. E...au regard de ces stipulations ;

12. Considérant, en huitième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, la décision portant refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas été prise sur le fondement d'une décision portant refus de titre de séjour illégale ; que le moyen tiré d'une telle exception d'illégalité ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

13. Considérant que la loi du 16 juin 2011, qui avait notamment pour objet la transposition en droit interne de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008, est entrée en vigueur antérieurement à l'édiction des décisions en litige ; que, dans ces conditions, M. E... ne peut utilement se prévaloir directement des dispositions du 4 de l'article 6 de la directive susvisée du 16 décembre 2008, aux termes duquel : " (...) A tout moment, les Etats membres peuvent décider d'accorder un titre de séjour autonome ou une autre autorisation conférant un droit de séjour pour des motifs charitables, humanitaires ou autres à un ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire. Dans ce cas, aucune décision de retour n'est prise. Si une décision de retour a déjà été prise, elle est annulée ou suspendue pour la durée de validité du titre de séjour ou d'une autre autorisation conférant un droit de séjour (...) " ; qu'en tout état de cause il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, qui s'était limité à demander la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article 6.1 de l'accord franco-algérien susvisé, n'a fait valoir expressément aucun motif charitable ou humanitaire ou autre de nature à lui ouvrir le bénéfice de ces dispositions ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que ce serait à tort que le préfet aurait refusé de prendre en considération des motifs de cette nature avant de rejeter sa demande ;

14. Considérant, enfin, que l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet de police dans les conséquences de ses décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sur la situation personnelle de l'intéressé n'est pas établie ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

16. Considérant que le présent arrêt, par lequel la Cour rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de M.E..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement d'une quelconque somme au bénéfice de M. E... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

''

''

''

''

7

N° 08PA04258

2

N° 12PA04395


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04395
Date de la décision : 16/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: Mme Anne MIELNIK-MEDDAH
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : LADJOUZI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-10-16;12pa04395 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award