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04/10/2013 | FRANCE | N°13PA00393

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 04 octobre 2013, 13PA00393


Vu la requête, enregistrée le 29 janvier 2013, présentée pour M. C... B..., demeurant..., par Me D... ; M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202511 du 22 mars 2012 en tant que, par ce jugement, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de police en date du 6 janvier 2012 lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivre

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Vu la requête, enregistrée le 29 janvier 2013, présentée pour M. C... B..., demeurant..., par Me D... ; M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202511 du 22 mars 2012 en tant que, par ce jugement, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de police en date du 6 janvier 2012 lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 20 euros par jour de retard ;

4°) subsidiairement, de lui enjoindre de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 20 euros par jour de retard et, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail pour la durée de cet examen ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me D...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 20 septembre 2013, le rapport de M. Couvert-Castéra, président assesseur ;

1. Considérant que M. C... B..., ressortissant mauritanien né en 1974, est entré en France le 4 mars 2002 selon ses déclarations et a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile ; que, par une décision du 7 novembre 2003, confirmée le 12 juillet 2004 par la Commission des recours des réfugiés, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) lui a refusé la qualité de réfugié ; que la demande de réexamen formée par l'intéressé a été rejetée le 11 janvier 2011 par l'OFPRA, décision confirmée le

28 septembre 2011 par la Cour nationale du droit d'asile ; que, par un arrêté en date du 6 janvier 2012, le préfet de police a refusé de délivrer à M. B...un titre de séjour au titre des articles L. 314-11, 8° et L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à la frontière à l'expiration d'un délai de trente jours ; qu'en outre, le préfet des Hauts-de-Seine, par un arrêté en date du 19 mars 2012, a placé l'intéressé en rétention administrative ; que M. B... relève appel du jugement n° 1202511 rendu le 22 mars 2012 par le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun en tant seulement que, par ce jugement, celui-ci a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 janvier 2012 par laquelle le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'un refus de séjour, d'un refus de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour ou d'un retrait de titre de séjour, de récépissé de demande de carte de séjour ou d'autorisation provisoire de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination peut, dans le délai d'un mois suivant la notification, demander l'annulation de ces décisions au tribunal administratif (...) " ; qu'il incombe à l'administration, lorsqu'elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'action introduite devant la juridiction administrative, d'établir que le requérant a reçu notification régulière de la décision qu'il conteste ; qu'en cas de retour à l'administration du pli contenant la notification, cette preuve peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le préposé du service postal, conformément à la réglementation en vigueur, d'un avis d'instance prévenant le destinataire de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le pli contenant l'arrêté litigieux du préfet de police du 6 janvier 2012 a été présenté, le 10 janvier suivant, à l'adresse que M. B... avait indiquée à l'administration puis a été retourné aux services de la préfecture avec les mentions " destinataire non identifiable - anomalie d'adresse - voie " ; que, si l'avis de réception du pli recommandé comporte en outre les mentions " NPAI " et " avisé ", le préposé en charge de sa distribution a également indiqué " n'existe pas " ; qu'au regard de ces mentions contradictoires, et en l'absence de tout autre élément de preuve émanant de l'administration, l'arrêté contesté ne peut être regardé comme ayant été régulièrement notifié au requérant et la prétendue présentation de la lettre recommandée à son domicile n'a donc pu faire courir à son encontre le délai de recours contentieux d'un mois ; que, dès lors, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté, comme tardive, la demande de M. B... tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que par suite, son jugement doit être annulé sur ce point ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Melun et dirigées contre l'arrêté du 6 janvier 2012 du préfet de police en tant qu'il a fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire français ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté n° 2011-00824 du 24 octobre 2011 régulièrement publié le 28 octobre 2011 au bulletin municipal officiel de la ville de Paris, le préfet de police a donné délégation à M. A... E..., attaché d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, à l'effet de signer notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties de l'obligation de quitter le territoire français ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision litigieuse doit être écarté comme manquant en fait ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que la décision par laquelle le préfet de police a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B..., qui énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée ; que l'autorité administrative a par ailleurs mentionné les dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui permettent d'assortir un refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français ; que par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

8. Considérant que M. B... fait valoir qu'il est entré en France le 4 mars 2002 et y réside habituellement depuis lors, qu'il maîtrise la langue française et s'est intégré à la société française ; que, toutefois, s'il fait état de l'exercice d'une activité professionnelle et du suivi d'une formation professionnelle, il ressort des pièces du dossier qu'il n'a travaillé, en tant que commis de cuisine, que de décembre 2007 à mai 2008 et de janvier 2009 à novembre 2010, ainsi que quelques jours comme plongeur en 2003 et en 2006 ; qu'en outre, l'intéressé, célibataire et sans charge de famille sur le territoire français, n'est pas dépourvu d'attaches familiales à l'étranger, dès lors qu'il ressort des procès-verbaux d'audition par les services de police, versés au dossier de première instance, que sa mère, son frère et sa soeur vivent au Sénégal ; qu'enfin, M. B...ne serait arrivé sur le territoire qu'à l'âge de vingt-huit ans, et ne justifie pas de la continuité de son séjour, notamment au cours de la période allant de février 2005 à décembre 2007 ; que, dans ces conditions, la décision litigieuse n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vues desquels elle a été prise et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations précitées ;

9. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B... ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 6 janvier 2012 du préfet de police en tant qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions présentées par M. B... en vue de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 6 janvier 2012 par le préfet de police, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions ci-dessus analysées doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1202511 du 22 mars 2012 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. B... dirigées contre l'arrêté du préfet de police du 6 janvier 2012 en tant qu'il a fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire français.

Article 2 : Les conclusions de la demande de M. B... devant le Tribunal administratif de Melun dirigées contre l'arrêté du préfet de police du 6 janvier 2012 en tant qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français et le surplus de ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

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N° 13PA00393


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA00393
Date de la décision : 04/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : BROCARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-10-04;13pa00393 ?
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