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02/10/2013 | FRANCE | N°12PA01800

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 02 octobre 2013, 12PA01800


Vu la requête, enregistrée le 23 avril 2012, présentée pour la SARL Jean-Louis Sorant, dont le siège est 50 rue de Chabrol à Paris (75010), par MeA... ; la SARL Jean-Louis Sorant demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1014377 du 6 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sur cet impôt auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2003 et 2004, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période a

llant du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 et de l'amende fiscale établi...

Vu la requête, enregistrée le 23 avril 2012, présentée pour la SARL Jean-Louis Sorant, dont le siège est 50 rue de Chabrol à Paris (75010), par MeA... ; la SARL Jean-Louis Sorant demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1014377 du 6 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sur cet impôt auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2003 et 2004, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 et de l'amende fiscale établie au titre des années 2003 et 2004, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 15 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2013 :

- le rapport de M. Magnard, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

1. Considérant que la SARL Jean-Louis Sorant fait appel du jugement n° 1014377 du 6 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sur cet impôt auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2003 et 2004, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 et de l'amende fiscale établie au titre des années 2003 et 2004, ainsi que des pénalités y afférentes ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que, par une décision du 12 octobre 2012, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à hauteur de 283 021 euros, de l'impôt sur les sociétés et de l'amende prévue à l'article 1763 A du code général des impôts mis à la charge de la SARL Jean-Louis Sorant au titre des années 2003 et 2004 ; que les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments soulevés par la société requérante à l'appui de ses moyens, ont répondu au moyen qui leur était soumis tiré de l'absence de débat contradictoire lors la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet et de l'irrégularité de la procédure de redressement ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient la SARL Jean-Louis Sorant, le jugement attaqué est suffisamment motivé sur ce point ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. Considérant, en premier lieu, que, si le siège de la SARL Jean-Louis Sorant est sis 50 rue de Chabrol à Paris (75010), les opérations de contrôle sur place se sont déroulées dans un local sis au n° 51 de la même rue, à la demande expresse du gérant, arguant, dans une lettre remise au vérificateur le 22 février 2006, de l'absence de locaux audit siège social ; que, par suite, la société vérifiée est présumée avoir bénéficié d'un débat oral et contradictoire ; qu'en se bornant à avancer, sans d'ailleurs en apporter la moindre preuve, qu'elle n'aurait connu " la position de l'administration sur le passif injustifié " qu'à la lecture de la proposition de rectification qui lui a été adressée, la SARL Jean-Louis Sorant ne combat pas valablement ladite présomption ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que, si la proposition de rectification du 13 juillet 2006 indique que les redressements et rappels sont notifiés selon une procédure d'office, alors qu'il est constant que les conditions requises pour la mise en oeuvre d'une telle procédure n'étaient pas remplie, il résulte de l'instruction que la procédure contradictoire a effectivement été mise en oeuvre, dès lors que la SARL Jean-Louis Sorant a bénéficié de toutes les garanties y attachées, ayant été admise à produire des observations en réponse à la proposition de rectification, à recourir à l'interlocuteur départemental et à saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que le moyen, qui manque d'ailleurs en fait ainsi qu'il a été dit ci-dessus, tiré de ce qu'au cours du contrôle, l'intéressée n'aurait pu bénéficier de la garantie liée à l'existence d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur est sans influence sur la régularité de la procédure de redressement contradictoire, laquelle commence avec l'envoi de la proposition de rectification ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la remise en cause des écritures de passif :

6. Considérant que les opérations de contrôle ont permis de constater qu'au cours de l'exercice clos en 2003, la SARL Jean-Louis Sorant avait, notamment par débit du compte de report à nouveau, inscrit diverses sommes, d'un montant total de 269 578 euros, au crédit d'un compte courant "Missistrano" et de divers comptes ouverts dans ses livres au nom de plusieurs SCI et d'une indivision ; que le service, estimant que ce passif était injustifié, en a réintégré le montant dans les résultats imposables de la société requérante au titre de cet exercice ;

7. Considérant qu'aux termes des dispositions du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés " ; qu'il appartient toujours aux contribuables de justifier de la régularité et du bien-fondé de celles de leurs écritures de passif qui minorent leurs résultats imposables ; qu'il suit de là que le service pouvait, sans avoir recours au motif de redressement tiré de l'existence d'un acte anormal de gestion, réintégrer dans les résultats imposables de la SARL Jean-Louis Sorant les sommes figurant à son passif dont le caractère de dettes à l'égard de tiers n'était pas établi par l'intéressée ;

8. Considérant que, s'il est constant que les écritures de passif litigieuses trouvent leur origine dans des transferts de fonds en provenance de personnes physiques ou morales identifiées, la Cour ne trouve au dossier aucun document permettant d'établir que les fonds en cause avaient, pour la société requérante, un caractère de dette à l'égard desdites personnes, qui justifierait leur inscription au passif ; que, si la société requérante soutient qu'elle exerçait une activité de holding financière et que les sommes en cause correspondraient à des fonds confiés à elle dans le cadre d'une gestion groupée de trésorerie, elle ne l'établit pas, en l'absence de convention ou de mandat de gestion ayant date certaine, par la seule production d'attestations et de procès-verbaux établis pour les besoins de la cause postérieurement à l'engagement du contrôle ou de courriers ne faisant pas référence aux prêts qui lui auraient été consentis ; qu'il résulte d'ailleurs de l'instruction qu'elle n'a comptabilisé au titre des exercices clos en 2003 et 2004 aucun produit d'exploitation, ni aucun produit financier, à l'exception, en 2004, de produits de cessions de titres pour un montant de 1 149 euros, de nature à établir la réalité de l'activité de holding financier dont elle se prévaut ; que la réalité des dettes existantes à la clôture de l'exercice clos en 2003 ne saurait être justifiée par la production de pièces établissant l'existence d'un virement émis par la société requérante le 26 juillet 2002 ; que l'existence de conventions ou de mandats tacites n'étant pas établie, le moyen tiré de ce que l'article 1985 du code civil n'exige pas qu'une convention de prêt ou un mandat fassent l'objet d'un document écrit est inopérant ; qu'en l'absence de preuve de l'existence des prêts allégués, le moyen tiré de ce que l'administration ne pouvait que tirer les conséquences du défaut de déclaration de ces prêts en mettant en oeuvre les sanctions prévues dans cette hypothèse est, en tout état de cause, également inopérant ; que l'existence d'un actif comptabilisé à tort compensant le passif injustifié en litige n'est pas établie par la société requérante ;

En ce qui concerne les charges remises en cause :

S'agissant de l'impôt sur les sociétés :

9. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ;

10. Considérant que la SARL Jean-Louis Sorant a déduit de ses résultats imposables, à titre de charges d'exploitation, des dépenses de loyers, d'assurance et d'électricité afférentes à un studio d'habitation utilisé à titre personnel par son gérant associé, ainsi que des charges afférentes à un local situé 51 rue de Chabrol à Paris (75010) ; qu'en se bornant à avancer que " ces dépenses sont relatives à la gestion ou à l'exercice de celle-ci par le gérant, dont la présence régulière sur Paris est indispensable ", sans apporter la moindre précision et le moindre justificatif relatif à l'usage effectif de l'appartement en cause dans le cadre de l'exploitation de la société, cette dernière ne justifie pas du principe même de la déductibilité de ces dépenses ; que la circonstance que ledit gérant n'aurait pas été rémunéré est sur ce point sans incidence ; qu'en l'absence de tout élément permettant d'établir que le local en cause a été effectivement utilisé pour l'activité, quelle qu'elle soit, de la société, le moyen tiré de ce que la position du service serait contradictoire en ce qui concerne l'identification de cette activité est en tout état de cause inopérant ;

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée :

11. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures " ;

12. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, aucun élément n'établit que le studio d'habitation à usage personnel et le local susmentionnés auraient été utilisés par la SARL Jean-Louis Sorant pour les besoins de ses opérations imposables à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, et pour les mêmes motifs que précédemment, l'administration était fondée à rappeler la taxe indûment déduite à raison des dépenses dont s'agit ;

Sur les pénalités :

13. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré " ;

14. Considérant qu'en relevant que le représentant de la société requérante ne pouvait ignorer qu'en inscrivant indûment et de manière répétée des dettes de montants importants au passif de son bilan, ou en comptabilisant en charges des dépenses de nature personnelle exposées au profit de son gérant, l'administration établit les manquements délibérés et justifie ainsi l'application des pénalités prévues par les dispositions précitées, sans même qu'il soit nécessaire d'opposer à l'intéressée la non-coïncidence entre son activité statutaire et sa prétendue activité effective de holding financier ; que, contrairement à ce qui est soutenu, ces manquements ont permis à la société requérante d'éluder l'impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée correspondant d'une part aux bases taxables non déclarées à l'impôt sur les sociétés et d'autre part à la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort ;

15. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales : " La juridiction saisie peut, lorsqu'une erreur non substantielle a été commise, dans la procédure d'imposition, prononcer sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes, à l'exclusion des droits dus en principal et des intérêts de retard " ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions précitées en raison de l'erreur non substantielle qu'a commise le service en faisant référence, dans la proposition de rectification, à la procédure de taxation d'office ;

16. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SARL Jean-Louis Sorant n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus restant en litige de sa demande ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SARL Jean-Louis Sorant à concurrence du dégrèvement prononcé par le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris pour un montant en droits et pénalités de 283 021 euros au titre des années 2003 et 2004.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL Jean-Louis Sorant est rejeté.

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N° 08PA04258

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N° 12PA01800


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA01800
Date de la décision : 02/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : SELARL AVANTIA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-10-02;12pa01800 ?
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