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31/07/2013 | FRANCE | N°12PA04796

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 31 juillet 2013, 12PA04796


Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2012, présentée par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1211087/2-2 du 29 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 5 juin 2012 refusant à M. C...A...la délivrance d'une carte de séjour temporaire et l'obligeant à quitter le territoire français en fixant le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

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Vu les autres pièc...

Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2012, présentée par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1211087/2-2 du 29 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 5 juin 2012 refusant à M. C...A...la délivrance d'une carte de séjour temporaire et l'obligeant à quitter le territoire français en fixant le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2013 :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur ;

1. Considérant que M.A..., de nationalité ivoirienne, a fait l'objet le 5 juin 2012 d'un arrêté du préfet de police lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que le préfet de police fait appel du jugement du 29 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté aux motifs qu'il portait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé et était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : / [...] 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant est âgé de dix-huit à vingt et un ans ou dans les conditions prévues à l'article L. 311-3 ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; / [...] " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / [...] ; / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; / [...] " ;

3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des termes même du jugement attaqué, nonobstant quelques maladresses dans sa rédaction, que les premiers juges ont entendu rejeter la demande de M.A..., présentée sur le fondement des dispositions sus-rappelées du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif qu'il ne remplissait pas la condition tirée de la production d'un visa de long séjour ; que le Tribunal n'a, toutefois, pas considéré que cette circonstance était dirimante au point de rejeter sa demande au titre de la vie privée et familiale dès lors que M. A...pouvait justifier du caractère privilégié des liens familiaux qui l'unissaient à sa mère, de nationalité française, sur le territoire national ; que, par suite, le préfet de police ne peut faire grief au tribunal administratif d'avoir non seulement commis une erreur quant au champ d'application respectif des dispositions précitées, à supposer qu'un tel moyen ait été soulevé, mais, également, une erreur quant à la nature du contrôle à exercer au titre de ces dernières ;

4. Considérant, d'autre part, ainsi que cela a été dit plus haut, que les premiers juges ont annulé l'arrêté contesté au motif que le préfet de police avait porté une atteinte disproportionnée au droit de M. A...à mener une vie privée et familiale normale et entaché ledit arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, cependant, il ressort des pièces versées au dossier que M. A... est entré en France au cours de l'année 2011 soit quelques mois avant que le préfet de police ne prenne à son encontre l'arrêté querellé ; qu'il n'est pas contesté qu'il a été élevé par sa grand-mère jusqu'à l'âge de 19 ans avant de partir, en 2010, en Tunisie afin de poursuivre ses études ; que si M. A...produit des documents établissant que sa mère adressait régulièrement des mandats cash " Western union " à sa grand-mère ainsi qu'à des tiers, cette circonstance n'est pas suffisante pour ouvrir un droit au séjour à son profit alors que, d'une part, il a été séparé longtemps de sa mère et que, d'autre part, les démarches engagées par cette dernière pour obtenir un visa à son bénéfice afin de lui rendre visite ont été rejetées en 2005 et 2007 au motif que l'acte d'état civil produit était un faux et qu'il n'était pas possible d'établir une filiation ; que par ailleurs, célibataire et sans charge de famille sur le territoire français, il ne peut être regardé comme dépourvu de tous liens dans son pays d'origine ; que, par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé son arrêté au motif qu'il avait porté une atteinte disproportionnée au droit de M. A...à mener une vie privée et familiale normale et qu'il avait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la vie personnelle de l'intéressé ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur la légalité de la décision portant refus d'admission au séjour :

6. Considérant, d'une part, que la décision en litige a été signée par M.B..., attaché principal d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, en vertu d'un arrêté n° 2012-00358 accordant délégation de la signature préfectorale au sein de la direction de la police générale du 17 avril 2012, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris le 24 avril suivant ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire manque en fait et doit, en conséquence, être écarté ;

7. Considérant, d'autre part, que la décision litigieuse comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision manque en fait et doit, en conséquence, être écarté ;

8. Considérant, enfin, que M. A...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où il n'a pas sollicité son admission au séjour sur le fondement de ces dispositions ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant, en premier lieu, que la décision en litige a été signée par M.B..., attaché principal d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, en vertu d'un arrêté

n° 2012-00358 accordant délégation de la signature préfectorale au sein de la direction de la police générale du 17 avril 2012 régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris le 24 avril suivant ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire manque en fait et doit, en conséquence, être écarté ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 12 de la directive 2008/115/C.E. : " 1. Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " [...]. / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. / [...] " ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction applicable au présent litige, la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond, s'agissant du principe d'une telle obligation, avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences des stipulations de l'article 12 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 aux termes duquel les décisions d'éloignement indiquent leurs motifs de fait et de droit ;

11. Considérant qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté litigieux, qui oppose également un refus d'admission au séjour motivé à M.A..., vise au demeurant les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui fondent l'obligation de quitter le territoire français, lesquelles ne sont pas incompatibles avec les objectifs fixés par les dispositions précitées de l'article 12 de la directive 2008/115/C.E. du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 et suffisent ainsi à motiver en droit cette dernière décision ; qu'en tout état de cause, M. A...ne peut utilement, à cet égard, se prévaloir directement de l'article 12 de cette directive au soutien de son moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 5 juin 2012 dès lors qu'à cette date, ladite directive avait été transposée en droit interne ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté serait insuffisamment motivée et méconnaîtrait, pour ce motif, les dispositions de l'article 12 de la directive n° 2008/115/C.E. ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions du I de l'article

L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, éclairées par les travaux préparatoires, que le préfet ne peut prendre une décision obligeant un étranger à quitter le territoire français sans lui avoir dans la même décision refusé, de manière explicite, un titre de séjour ; que ces dispositions ne font, en revanche, pas obstacle à ce que le préfet décide de ne pas assortir son refus de titre de séjour d'une telle obligation ; qu'en l'espèce et contrairement à ce que soutient M.A..., il ne ressort pas des pièces versées que le préfet de police, après avoir refusé à l'intéressé son admission au séjour, se serait cru à tort en situation de compétence liée pour prendre la décision litigieuse à son encontre ;

13. Considérant, en, quatrième et dernier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que la décision refusant d'admettre M. A...au séjour n'étant pas entachée d'illégalité, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 29 octobre 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.

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N° 12PA04796


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04796
Date de la décision : 31/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme VIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-07-31;12pa04796 ?
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