Vu la requête, enregistrée le 5 novembre 2012, présentée pour Mme B...C..., demeurant..., par MeD... ; Mme C...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1100364/1 du 3 juillet 2012 par lequel le président du Tribunal administratif de la Polynésie française, faisant partiellement droit à la demande de la Polynésie française, l'a condamnée à procéder dans un délai d'un mois à la remise en état du domaine public maritime par enlèvement d'un remblai édifié au droit de la terre Te Oopa, PK 11,7 côté Ouest, commune associée de Tapuamu, commune de Tahaa ;
2°) de débouter la Polynésie française des fins de poursuite ;
3°) de mettre les dépens à la charge de la Polynésie française, ainsi qu'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;
Vu la loi n° 96-313 du 12 avril 1996 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;
Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;
Vu la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;
Vu la délibération n° 2004-34 du 12 février 2004 de l'assemblée de la Polynésie française portant composition et administration du domaine public en Polynésie française ;
Vu le code civil ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2013 :
- le rapport de M. Bergeret, rapporteur,
- les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public,
- et les observations de Me A...pour MmeC... ;
1. Considérant que la Polynésie française a déféré devant le Tribunal administratif de la Polynésie française, comme prévenue d'une contravention de grande voirie, Mme B...C...à qui il était reproché, aux termes d'un procès-verbal dressé le 14 avril 2011, d'avoir procédé, sans autorisation administrative, à la réalisation d'un remblai sur le domaine public maritime, au droit de la terre Te Oopa, située PK 11.6 côte Ouest, sur le territoire de la commune associée de Tapuamu, commune de Tahaa ; que Mme C...relève appel du jugement du 3 juillet 2012 par lequel le président de ce Tribunal l'a condamnée à procéder dans un délai d'un mois à la remise en état du domaine public maritime, par enlèvement du remblai non autorisé ;
Sur la recevabilité :
2. Considérant que si la requête d'appel de Mme C...énonce de nouveau, dans des termes similaires, ses moyens de défense présentés au tribunal administratif, elle n'en constitue pas la reproduction littérale et tend explicitement à l'annulation du jugement précité ; que la Polynésie française n'est donc pas fondée à soutenir qu'elle serait irrecevable, comme non motivée, par application des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;
Au fond :
3. Considérant, en premier lieu, que la condamnation prononcée par le Tribunal se fonde sur les dispositions de la délibération n° 2004-34 de l'assemblée de la Polynésie française du 12 février 2004, qui dispose, en son article 2 : " Le domaine public naturel comprend : le domaine public maritime qui se compose notamment des rivages de la mer, des lais et relais de mer, des étangs salés communiquant librement ou par infiltration ou par immersion avec la mer, du sol et du sous-sol des eaux intérieures dont les havres et rades non aménagés et les lagons (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 de cette délibération : " Nul ne peut sans autorisation préalable délivrée par l'autorité compétente, effectuer aucun remblaiement, travaux, extraction, installation et aménagement quelconque sur le domaine public, occuper une dépendance dudit domaine ou l'utiliser dans les limites excédant le droit d'usage qui appartient à tous (...) " ; que son article 27 dispose : " Les infractions à la réglementation en matière de domaine public (...) constituent des contraventions de grande voirie et donnent lieu à poursuite devant le tribunal administratif (...) Les contrevenants pourront être punis des peines d'amende ou des peines privatives ou restrictives de droit, telles que définies dans le code pénal pour les contraventions de la cinquième classe (...) En outre, l'auteur d'une contravention de grande voirie pourra être tenu de réparer le dommage causé, au besoin sous astreinte " ;
4. Considérant, d'une part, que Mme C...se prévaut de l'autorité absolue de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt rendu le 18 octobre 2007 par la Cour de céans, qui, relevant un défaut de base légale, a annulé le jugement du 5 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française, faisant partiellement droit à une précédente poursuite pour contravention de grande voirie engagée à son encontre par la Polynésie française pour les mêmes faits, l'avait condamnée à remettre le domaine public maritime en état, dans un délai de deux mois sous astreinte ; que toutefois, alors que la précédente poursuite en contravention de grande voirie se fondait sur une délibération du 29 décembre 1977 de l'assemblée territoriale de Polynésie française et sur une délibération du 3 août 1978 de la commission permanente de l'assemblée territoriale qui, en son article 2, définit un domaine public maritime du territoire et, en son article 7, prévoit un régime de protection de grande voirie de ce domaine, la présente poursuite se fonde sur la délibération susvisée du 12 février 2004 de l'assemblée de la Polynésie française portant composition et administration du domaine public en Polynésie française et organisant un régime de protection de grande voirie de ce domaine ; que dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt précité du 18 octobre 2007 doit être écarté ;
5. Considérant, d'autre part, que Mme C...ne peut utilement faire valoir qu'en application du principe " non bis in idem ", une nouvelle poursuite ne pouvait être engagée à son encontre pour les mêmes faits dès lors que la première poursuite avait donné lieu à relaxe ; qu'en effet, la poursuite domaniale, objet unique du présent litige, n'entre pas dans le champ d'application du principe ainsi invoqué, limité aux sanctions pénales ou aux sanctions assimilables à des sanctions pénales ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que l'atteinte au domaine public maritime représentée par le remblai litigieux se poursuivant sans pouvoir conférer aucun droit à l'occupant sans titre, eu égard à l'imprescriptibilité du domaine public, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la poursuite engagée à son encontre, qui n'a pour seul objet que la remise en état du domaine public, serait prescrite ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort de l'instruction que le remblai litigieux a été réalisé au cours de l'année 2002 ; qu'ainsi, en tout état de cause, Mme C...ne peut soutenir qu'une poursuite en contravention de grande voirie ne pouvait être engagée contre elle en vue de la remise en état du domaine public maritime dès lors que le remblai aurait été, lui-même, intégré à ce domaine public maritime en application de l'article 7 de la loi organique susvisée du 12 avril 1996 qui a transféré à la Polynésie française, dans l'état où il se trouvait à la date d'entrée en vigueur de cette loi, ledit domaine public ; que par ailleurs, à supposer même que le passage ouvert au public évoqué par Mme C...ait été effectivement réalisé sur ce remblai, en bordure du lagon, il ne pourrait résulter d'une telle circonstance une incorporation de l'ouvrage litigieux dans le domaine public maritime et par suite l'illégalité de la poursuite domaniale objet du présent litige ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la consistance de l'atteinte au domaine public maritime représentée par le remblai litigieux est suffisamment déterminée par les termes du procès-verbal précité, n° 392/GEC/CP en date du 14 avril 2011, auquel se réfère le jugement attaqué, qui se borne à ordonner l'enlèvement du remblai en vue de la remise des lieux en état ; qu'il n'est d'ailleurs pas allégué que la délimitation du domaine public maritime au droit du remblai aurait donné lieu à une incertitude ou à une contestation sérieuse ; que dans ces conditions, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la condamnation prononcée par les premiers juges aurait été privée de base légale en l'absence d'une définition suffisamment précise de l'empiètement illégal sur le domaine public auquel le jugement ordonne de mettre fin par l'enlèvement du remblai litigieux ;
9. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que la remise en état ordonnée par le Tribunal pourrait être techniquement impossible, ou d'un coût déraisonnable compte tenu des travaux nécessaires pour prévenir toute atteinte aux remblais voisins, situés à proximité immédiate ; que dès lors, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'expertise suggérée par MmeC..., celle-ci n'est en tout état de cause pas fondée à demander par ce motif l'annulation du jugement attaqué ;
10. Considérant, enfin, que Mme C...fait valoir que la Polynésie française, en la poursuivant pour contravention de grande voirie et en lui refusant une autorisation permettant de régulariser l'ouvrage litigieux, aurait porté atteinte au principe d'égalité, dès lors que la propriétaire de la parcelle voisine a été quant à elle autorisée, au cours de l'année 2002, à édifier un remblai similaire sur le domaine public maritime, au droit de sa propre parcelle ; que toutefois, d'une part, la poursuite en contravention de grande voirie ne saurait caractériser en elle-même une telle rupture du principe d'égalité, dés lors qu'il est constant que les deux propriétaires ne sont pas dans la même situation au regard de la régularité de leur occupation du domaine public maritime ; que d'autre part, si Mme C...évoque l'existence d'une demande de régularisation en date du 25 janvier 2012, qui aurait donné lieu à une décision de rejet le 14 février 2012, elle ne produit copie ni de cette demande ni de cette décision de rejet ; que dans ces conditions, l'illégalité de cette décision de rejet dont l'existence même n'est pas avérée n'étant pas établie, Mme C...n'est en tout état de cause pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en se prévalant d'une discrimination illégale ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par Mme C...doivent dès lors être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions par lesquelles la Polynésie française demande l'application de ces dispositions à son bénéfice ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la Polynésie française tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 12PA04306