Vu, I, sous le n° 12PA02372, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés le 1er juin et le 13 août 2012, présentés pour la chambre de commerce et d'industrie de Paris et la société immobilière du palais des congrès, par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano ; elles demandent à la Cour :
1°) d'annuler, en tant qu'il ne fait que partiellement droit à leur demande, le jugement n° 1107202/7-1 et n° 1107207/7-1 du 3 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à la chambre de commerce et d'industrie de Paris une somme de 1 702 703,54 euros, outre intérêts au taux légal et capitalisation ;
2°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 1 956 073,46 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 22 décembre 2008 et capitalisation, et une somme de 300 000 euros à titre de dommages-intérêts compensatoires ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................
Vu, II, sous le n° 12PA02416, le recours enregistré le 5 juin 2012, présenté par le ministre de l'égalité des territoires et du logement et par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ; ils demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1107202/7-1 et n° 1107207/7-1 du 3 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris, accueillant partiellement la demande de la société immobilière du palais des congrès et de la chambre de commerce et d'industrie de Paris, a condamné l'Etat à verser à cette dernière une somme de 1 702 703,54 euros, outre intérêts au taux légal et capitalisation ;
2°) de rejeter la demande présentée au Tribunal administratif de Paris par la chambre de commerce et d'industrie de Paris et par la société immobilière du palais des congrès ;
3°) de mettre à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de Paris une somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification ;
Vu le décret n° 99-1060 du 16 décembre 1999 relatif aux subventions de l'Etat pour des projets d'investissement ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2013 :
- le rapport de M. Bergeret, rapporteur,
- les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public,
- et les observations de Me B...pour la chambre de commerce et d'industrie de Paris et la société immobilière du palais des congrès (SIPAC), et de M. A...représentant le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre de l'égalité du territoire et du logement ;
1. Considérant que dans le cadre de l'aménagement du secteur sud de l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, un protocole d'accord, valant contrat particulier au sens de l'article 11 de la loi susvisée du 29 juillet 1982, a été conclu sous l'égide du préfet de la Région Ile-de-France, le 25 juin 1998, par lequel l'Etat, les communes de Tremblay-en-France et Villepinte, l'Agence foncière et technique de la région parisienne, Aéroports de Paris, et la Chambre de commerce et d'industrie de Paris s'engageaient sur les modalités de réalisation et de financement d'une première tranche de travaux d'aménagement comportant la réalisation, en deux phases, dans une Z.A.C. à créer sur le territoire des deux communes, d'une extension de 70 000 m² de SHON du parc des expositions de Villepinte, géré par la société immobilière du palais des congrès (SIPAC), filiale de la chambre de commerce et d'industrie de Paris ; que ce protocole prévoyait plusieurs ouvrages routiers dont l'un devait être préfinancé par la chambre de commerce et d'industrie de Paris à hauteur de 24 millions de francs, le remboursement de ce préfinancement incombant à l'Etat à hauteur de 17 millions de francs à verser sous forme de subvention, et, pour le surplus, aux deux communes signataires ; que l'Etat ayant refusé, par lettre du 25 août 2010, de procéder à ce remboursement contractuellement prévu, la chambre de commerce et d'industrie de Paris et la SIPAC ont saisi le Tribunal administratif de Paris, le 19 avril 2011, de deux demandes de condamnation de celui-ci sur le fondement de la responsabilité contractuelle et extracontractuelle ; que par jugement du 3 avril 2012, le Tribunal a joint ces deux requêtes, a partiellement fait droit, à hauteur de 1 702 703,54 euros, à la demande contractuelle et a rejeté les surplus des demandes ; que par la requête susvisée n° 12PA02372, la chambre de commerce et d'industrie de Paris et la SIPAC relèvent appel de ce jugement en tant qu'il ne fait que partiellement droit à leurs demandes ; que par la requête susvisée n° 12PA02416, le ministre de l'égalité des territoires et du logement et le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie relèvent également appel de ce jugement en tant qu'il a accueilli partiellement les demandes ; qu'il y a lieu de joindre ces deux requêtes, qui sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune, pour y statuer par un seul arrêt ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'examen des pièces des deux procédures de première instance que les mémoires en défense produits par l'administration et contenant des observations utiles ont été communiqués aux requérantes, qui ont été mises à même d'y répondre, et que tous les mémoires utiles au débat ont été visés par le jugement ; que celui-ci, par ailleurs, répond suffisamment au moyen tiré de ce que l'Etat aurait engagé sa responsabilité en rompant sa promesse de conclure un nouveau contrat, et ne comporte pas l'omission à statuer qui semble évoquée par les appelantes qui reprochent aux premiers juges une méconnaissance de leur office ou une dénaturation des pièces du dossier ; que celles-ci ne sont donc pas fondées à soutenir que le jugement est irrégulier ;
3. Considérant, en second lieu, que les premiers juges, après avoir relevé que la condition posée par le protocole d'accord du 25 juin 1998 pour le remboursement par l'Etat du préfinancement assuré par la chambre de commerce et d'industrie de Paris n'avait pas été intégralement remplie à l'échéance fixée par l'article 11 de ce protocole, ont reconnu que la chambre de commerce et d'industrie de Paris pouvait prétendre à une indemnité correspondant à un remboursement partiel ; que le jugement ainsi rédigé n'est pas entaché de la contradiction de motifs, ou de la contradiction entre ses motifs et son dispositif, lesquelles relèveraient au demeurant du fond du litige, que les ministres appelants lui reprochent ;
Au fond :
Sur la responsabilité contractuelle :
4. Considérant qu'en vertu de son préambule et de ses articles 1, 2.2, 3.3, 3.4 et 6.2, le protocole d'accord du 25 juin 1998, relatif à la réalisation d'une première tranche de l'aménagement du secteur sud de l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, prévoit que la chambre de commerce et d'industrie de Paris doit réaliser deux bâtiments d'une surface totale de 70 000 m², en extension du parc des expositions de Villepinte, le premier de ces deux bâtiments, d'une superficie de 30 000 m², devant être achevé dès le mois d'avril 1999 ; qu'en vertu de l'article 2.2 de ce protocole, la chambre de commerce et d'industrie de Paris s'engage " à prendre une décision concernant la réalisation des extensions au-delà de la première tranche de 70 000 m² de SHON au plus tard un an avant la fin du prochain contrat de plan Etat / région " ; qu'aux termes de l'article 4.2.3. de ce protocole, consacré au financement de l'aménagement de la partie nord-ouest du boulevard périphérique sud de l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle : " Ces ouvrages, estimés à 36 MF HT toutes dépenses confondues seront préfinancés par la CCIP à hauteur de 24 MF et financés par Aéroports de Paris à hauteur de 12 MF (...) A l'occasion de la construction d'un second bâtiment d'extension de 40 000 m² de SHON, l'Etat s'engage à apporter à la CCIP une subvention de 17 MF représentative du montant de sa participation au financement de cet ouvrage. L'arrêté attributif de subvention sera pris par le représentant de l'Etat dès la délivrance du permis de construire (...) A la réception de ce second bâtiment, les communes de Tremblay-en-France et de Villepinte s'engagent à verser à la CCIP, à parts égales, la somme de 7 millions de francs " ; qu'aux termes de l'article 11 du protocole : " Le présent protocole est conclu pour la durée du contrat de plan Etat Région Ile-de-France en cours et du prochain. L'entrée en vigueur du protocole est fixée par la signature des parties " ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la chambre de commerce et d'industrie de Paris, ou sa filiale la SIPAC, a réalisé dans le délai prévu le premier bâtiment d'extension du parc des expositions, d'une surface de 30 000 m² ; que le second bâtiment d'extension, pour lequel un permis de construire a été délivré en mars 2006, était d'une surface de 16 000 m², et ne permettait donc pas de respecter l'engagement de réaliser au cours de la période couverte par le protocole en vertu de son article 11, qui prenait fin le 31 décembre 2006, l'engagement de réaliser une première tranche d'extensions à hauteur de 70 000 m² ; qu'ainsi, et dès lors qu'il résulte de la combinaison des stipulations contractuelles précitées que les parties avaient entendu subordonner le remboursement par l'Etat d'une partie du préfinancement de l'ouvrage routier assuré par la chambre de commerce et d'industrie de Paris à l'obtention, avant l'expiration du protocole d'accord, d'un second permis de construire portant la surface des extensions à 70 000 m², ce remboursement ne pouvait être contractuellement dû qu'à concurrence de la réalisation de cet objectif dans le délai fixé ; qu'en revanche, la construction en 2008, postérieurement à l'échéance fixée au contrat, d'extensions supplémentaires, bien que réalisées par la chambre de commerce et d'industrie de Paris ou sa filiale en vertu de l'engagement, pris conformément à l'article 2.2 du protocole, de réaliser une seconde tranche d'extensions, n'a pu ouvrir aucun droit à un remboursement intégral du préfinancement accepté par la chambre de commerce et d'industrie de Paris dans les conditions rappelées ci-dessus ;
6. Considérant, par ailleurs, d'une part, que si les parties au protocole du 25 juin 1998, qui, à compter de l'année 2006 et sous l'égide du préfet de région, ont élaboré un projet d'un nouveau contrat devant encadrer la poursuite de l'aménagement du secteur sud de l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et devant régler notamment la question du remboursement à la chambre de commerce et d'industrie de Paris, par l'Etat et les communes de Villepinte et Tremblay-en-France, du préfinancement assuré par elle, ces démarches n'ont pas abouti et n'ont pu créer, même de façon tacite, aucune obligation contractuelle dont la chambre de commerce et d'industrie de Paris et la SIPAC pourraient se prévaloir pour réclamer un remboursement intégral ;
7. Considérant, d'autre part, que la chambre de commerce et d'industrie de Paris et la SIPAC font valoir que l'absence de délivrance d'un permis de construire pour le bâtiment d'extension de 40 000 m² visé à l'article 4.2.3 du protocole avant l'échéance du 31 décembre 2006 était imputable à l'absence de création de la Z.A.C. où devait être implanté ce bâtiment, ou à des retards pris par les communes de Villepinte et Tremblay-en-France dans l'adaptation de leurs documents d'urbanisme ; qu'il ne ressort cependant pas de l'instruction que ces circonstances ont constitué un obstacle insurmontable et par suite pouvaient revêtir le caractère d'évènements constitutifs de force majeure empêchant l'Etat de se prévaloir du non respect par la chambre de commerce et d'industrie de Paris de la condition contractuellement mise à sa charge pour le remboursement par l'Etat d'une partie du préfinancement accepté par elle ;
8. Considérant, enfin, que si la chambre de commerce et d'industrie de Paris et la SIPAC font valoir que l'Etat, en ne faisant pas diligence pour obtenir en temps utile le déplacement du circuit Carole qui aurait été nécessaire pour la réalisation des extensions de 70 000 m² dans le délai contractuellement prévu, aurait commis une faute contractuelle l'empêchant de se prévaloir du non respect d'une obligation par son cocontractant, il ne résulte de l'instruction ni que ce déplacement était nécessaire pour la réalisation de la première tranche des extensions du parc des expositions de Villepinte, ni que l'Etat, qui a réalisé un certain nombre de démarches pour le déplacement du circuit, aurait par son inertie commis la faute alléguée ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ni la chambre de commerce et d'industrie de Paris et la SIPAC, ni les deux ministres appelants ne sont fondés à demander l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Paris en ce qu'il a condamné l'Etat, en application du protocole du 25 juin 1998, à verser à la chambre de commerce et d'industrie de Paris une somme calculée au prorata de la surface de 46 000 m² des extensions réalisées ou autorisées au 31 décembre 2006 rapportée à celle de 70 000 m² contractuellement prévue à la même échéance, soit 65,7 % de la somme de 2 591 634 euros représentant 1 702 703,54 euros, outre intérêts et capitalisation ;
Sur la responsabilité quasi-délictuelle :
10. Considérant que la chambre de commerce et d'industrie de Paris et la SIPAC font valoir que l'Etat a rompu sa promesse de signer le nouveau protocole évoqué ci-dessus, comprenant notamment de nouvelles modalités pour le remboursement intégral par l'Etat et les deux communes intéressées du préfinancement par la chambre de commerce et d'industrie de Paris de l'ouvrage routier, lequel a été achevé en 2003 ;
11. Considérant toutefois qu'il ne résulte pas de l'instruction que le préfet de la Région Ile-de-France, ou d'autres représentants de l'Etat, s'étaient engagés effectivement, de manière ferme et non ambiguë, à signer le projet de protocole élaboré en 2006 et finalisé en 2007, qui comprenait un engagement de l'Etat de procéder à un remboursement intégral de l'équivalent des 17 millions de francs visés au protocole du 25 juin 1998 ; que notamment, si le préfet de région a transmis aux diverses parties intéressées ledit projet finalisé, par des courriers en date du 6 mars et du 13 novembre 2007 dans lesquels il demandait à celles-ci de prendre les décisions ou délibérations nécessaires pour la signature du nouveau protocole, ces courriers, alors même qu'ils n'évoquaient pas la possibilité que l'Etat ne signe pas lui-même le protocole, ne peuvent s'analyser comme un engagement formel de le signer ; que dans ces conditions, la demande de la chambre de commerce et d'industrie de Paris et de la SIPAC fondée sur la responsabilité pour faute de l'Etat ne peut être accueillie ;
Sur la responsabilité quasi-contractuelle :
12. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la réalisation de la partie litigieuse du boulevard périphérique sud de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, dont il est constant qu'il s'agit d'une voirie départementale, aurait procuré un enrichissement à l'Etat ; que dès lors, la demande de la chambre de commerce et d'industrie de Paris et de la SIPAC, en tant qu'elle se fonde sur l'enrichissement sans cause de l'Etat, ne peut être accueillie ;
Sur la demande de dommages et intérêts compensatoires :
13. Considérant que si la chambre de commerce et d'industrie de Paris et la SIPAC réclament à l'Etat une somme de 300 000 euros au titre de dommages et intérêts compensatoires, elles n'établissent pas la réalité du préjudice invoqué à ce titre, en se bornant à faire valoir que le " mauvais vouloir caractérisé " de l'Etat leur a causé un préjudice distinct de celui du retard de remboursement du préfinancement et que les sommes non versées leur ont manqué pour réaliser " des projets importants entrant dans leurs missions " ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit aux demandes de la chambre de commerce et d'industrie de Paris et de la SIPAC et a rejeté le surplus des conclusions des demandeurs ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu de faire droit ni aux conclusions de la chambre de commerce et d'industrie de Paris et de la SIPAC, ni à celles des ministres de l'égalité des territoires et du logement et de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes présentées d'une part par la chambre de commerce et d'industrie de Paris et la SIPAC, et d'autre part par le ministre de l'égalité des territoires et du logement et le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
''
''
''
''
2
N° 12PA02372, 12PA02416