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27/06/2013 | FRANCE | N°12PA04824

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 27 juin 2013, 12PA04824


Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés les 10 et 28 décembre 2012, présentés par le préfet de police de Paris, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1210220/3-2 du 10 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 7 juin 2012 refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme E...A..., épouse F...en lui faisant obligation de quitter le territoire français et en fixant le pays de sa destination, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un certificat de résidence algérien portant la mention "vie privée

et familiale" dans un délai de trois mois à compter de la notification du juge...

Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés les 10 et 28 décembre 2012, présentés par le préfet de police de Paris, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1210220/3-2 du 10 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 7 juin 2012 refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme E...A..., épouse F...en lui faisant obligation de quitter le territoire français et en fixant le pays de sa destination, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un certificat de résidence algérien portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme F...devant le Tribunal administratif de Paris ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;

Vu la convention de New York du 26 janvier 1990 sur les droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 pris pour l'application du chapitre II du titre II de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et relatif à l'accusé de réception des demandes présentées aux autorités administratives ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2013 :

- le rapport de Mme Tandonnet-Turot, président-rapporteur,

- et les observations de MeB..., pour MmeF... ;

1. Considérant que MmeF..., de nationalité algérienne, née en 1974 et entrée en France, selon ses déclarations, le 6 janvier 2007, a sollicité du préfet de police de Paris le 1er février 2012 son admission au séjour dans le cadre des stipulations du 5. de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que, par un arrêté du 7 juin 2012, le préfet de police de Paris a rejeté cette demande, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que, par la présente requête, le préfet relève régulièrement appel du jugement n° 1210220/3-2 du 10 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris, à la demande de MmeF..., a annulé son arrêté, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un certificat de résidence algérien portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions principales présentées par le préfet de police :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que les premiers juges ont annulé l'arrêté du 7 juin 2012 au motif qu'il avait porté au droit au respect de la vie familiale de Mme F...une atteinte disproportionnée aux buts en vie desquels il avait été pris et avait ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, si MmeF..., qui est entrée en France, selon ses dires, le 6 janvier 2007, se prévaut de l'ancienneté de son séjour et soutient qu'elle s'est mariée le 28 novembre 2009 avec un compatriote en situation régulière, qu'un enfant est né de cette union le 13 septembre 2010 et que sa mère, dont elle s'occupe, est actuellement soignée à l'hôpital Saint-Louis, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'elle ne justifie pas être dépourvue de toutes attaches dans son pays d'origine, où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de 33 ans et où résident quatre de ses cinq frères et soeurs ; qu'elle n'établit pas le caractère indispensable de sa présence aux côtés de sa mère, alors qu'il est constant que l'une de ses soeurs vit à Paris ; que, compte tenu du caractère récent de son mariage et du jeune âge de son enfant, l'arrêté en litige n'a pas porté, à la date à laquelle il a été pris, au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que l'arrêté en litige n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé l'arrêté du 7 juin 2012 comme ayant méconnu lesdites stipulations ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme F...devant le tribunal administratif et en appel ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de police du 7 juin 2012 :

5. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 2012-00358 du 18 avril 2012, régulièrement publié au Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris du 23 mars 2012, le préfet de police a donné à M. C...D..., attaché principal d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, adjoint au chef du 9ème bureau, délégation pour signer, notamment, les décisions de refus de titre de séjour ; qu'il n'est, en outre, pas établi par Mme F...que le préfet de police n'était pas absent ou empêché ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté en litige manque en fait ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté en litige comporte dans ses visas et ses motifs les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et fait notamment état du mariage conclu le 28 novembre 2009 par l'intéressée avec un compatriote ; que, par suite, Mme F...n'est pas fondée à soutenir que cet arrêté serait insuffisamment motivé ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 relatif à l'accusé de réception des demandes présentées aux autorités administratives : " Lorsque la demande est incomplète, l'autorité administrative indique au demandeur les pièces manquantes dont la production est indispensable à l'instruction de la demande (...). " ; que ces dispositions n'avaient pas à recevoir application en l'espèce, dès lors qu'ainsi que le fait valoir le préfet, la demande de Mme F...a été considérée comme complète et a bien été instruite par les services préfectoraux ; qu'elle ne nécessitait ainsi aucune mesure d'instruction au sens des dispositions précitées du décret du 6 juin 2001 ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ", que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme F... est mariée à un compatriote qui séjourne régulièrement en France sous couvert d'une carte de séjour valable dix ans en cours de validité à la date de l'arrêté ; qu'elle entre, dès lors, dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial et ne pouvait, par suite, se voir délivrer un certificat de résidence sur le fondement des stipulations précitées de l'accord, quand bien même, n'étant pas entrée en France sous couvert d'un visa de long séjour, elle ne satisferait pas à toutes les conditions auxquelles est subordonné, en principe, le droit effectif au regroupement et que le préfet peut renoncer à opposer au demandeur dans le cadre de son pouvoir de régularisation ; que le préfet de police a pu ainsi, sans commettre d'erreur de droit, rejeter la demande de délivrance de titre de séjour que Mme F...avait présentée sur le fondement du 5. de l'article 6 de l'accord franco-algérien, au motif que l'intéressée entrait dans une catégorie d'étrangers ouvrant droit au regroupement familial ;

9. Considérant, en cinquième lieu, d'une part, que l'admission au séjour des ressortissants algériens est entièrement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que, par suite, MmeF..., de nationalité algérienne, ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

10. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention de New York du 26 janvier 1990 sur les droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; que, dans les circonstances de l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prenant l'arrêté en litige, le préfet de police n'aurait pas accordé une attention primordiale à l'intérêt supérieur de l'enfant de Mme F..., âgé seulement de huit mois à la date de cet arrêté ; qu'ainsi, il n'a pas méconnu les stipulations précitées ;

11. Considérant, enfin, que, compte tenu de ce qui précède, le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle et familiale de MmeF... ;

12. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le préfet de police est fondé, d'une part, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 7 juin 2012 refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme F... en lui faisant obligation de quitter le territoire français et en fixant le pays de sa destination, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un certificat de résidence algérien portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'autre part, à demander en conséquence le rejet de la demande présentée par Mme F...devant ce tribunal ; que, par voie de conséquence, les conclusions d'appel de Mme F...à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1210220/3-2 du 10 octobre 2012 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme F...devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

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N° 12PA04824


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04824
Date de la décision : 27/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: Mme Suzanne TANDONNET-TUROT
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : LERAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-06-27;12pa04824 ?
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