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24/06/2013 | FRANCE | N°11PA05397

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 24 juin 2013, 11PA05397


Vu la requête, enregistrée le 28 décembre 2011, présentée pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), dont le siège est situé 36 avenue du Général de Gaulle Tour Galliéni 2 à Bagnolet Cedex (93175), par Me A... ; l'ONIAM demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0912222/6-1 du 28 octobre 2011 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) à son égard

sur le fondement des dispositions de l'article L. 1142-21 du code de la san...

Vu la requête, enregistrée le 28 décembre 2011, présentée pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), dont le siège est situé 36 avenue du Général de Gaulle Tour Galliéni 2 à Bagnolet Cedex (93175), par Me A... ; l'ONIAM demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0912222/6-1 du 28 octobre 2011 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) à son égard sur le fondement des dispositions de l'article L. 1142-21 du code de la santé publique ;

2°) de condamner l'AP-HP à lui verser une somme totale de 443 480,79 euros en remboursement des frais qu'il a exposés pour la réparation des préjudices subis par les consortsB..., augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à venir ;

3°) à titre subsidiaire, après avoir jugé que les manquements commis par l'AP-HP ont fait perdre à M. B...une chance d'éviter le dommage subi, évaluée à 90%, de condamner l'AP-HP à lui verser une somme de 399 132,71 euros en remboursement des mêmes frais, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à venir ;

4°) de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 2013 :

- le rapport de M. Sorin, rapporteur,

- les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., pour l'AP-HP ;

1. Considérant qu'après la découverte fortuite le 8 septembre 2003 d'un anévrisme de l'aorte abdominale sous-rénale et d'une tumeur rénale gauche, M.B..., alors âgé de cinquante-six ans, a été hospitalisé à l'hôpital Henri Mondor où il a subi le 15 janvier 2004 une intervention chirurgicale consistant en la cure de l'anévrisme par la mise en place d'une endo-prothèse ; que l'apparition d'une thrombose de l'axe iliaque externe gauche dans les jours qui ont suivi cette intervention a nécessité la réalisation d'une nouvelle intervention chirurgicale le

20 février 2004 consistant en une thrombectomie iliaque gauche avec endartériectomie localisée et fixation de l'endartère à la paroi ; que, le 16 mars 2004, la tumeur rénale gauche dont souffrait M. B...a été traitée par néphrectomie élargie gauche à l'hôpital Tenon ; qu'en raison d'une brusque dégradation de son état de santé, une nouvelle intervention chirurgicale destinée à drainer la cellulite pariétale sous-cutanée identifiée a été pratiquée le 18 mars 2004 ; que les suites de cette intervention ont été marquées par la survenue d'une défaillance multi-viscérale aboutissant au décès de M. B...le 20 mars 2004 ; que la commission régionale de conciliation et d'indemnisation d'Ile-de-France (CRCI) a ordonné une expertise dont le rapport, remis le 30 juillet 2005, a conclu au caractère nosocomial de l'infection contractée au cours de la néphrectomie du 16 mars 2004 et ayant provoqué la défaillance multi-viscérale de M.B... ; que, par un jugement du 28 octobre 2011, le Tribunal administratif de Paris a reconnu l'origine nosocomiale de l'infection et mis à la charge de l'ONIAM la réparation des préjudices subis par les ayants droit de l'intéressé ; que ledit établissement public interjette régulièrement appel de ce jugement en tant seulement qu'il a rejeté ses conclusions récursoires dirigées contre l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) sur le fondement des dispositions de l'article L. 1142-21 du code de la santé publique ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué en tant qu'il rejette l'action récursoire de l'ONIAM :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-21 du code de la santé publique dans sa rédaction applicable en l'espèce : " I.- Lorsque la juridiction compétente, saisie d'une demande d'indemnisation des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins dans un établissement de santé, estime que les dommages subis sont indemnisables au titre (...) de l'article L. 1142-1-1, l'office est appelé en la cause s'il ne l'avait pas été initialement. Il devient défendeur en la procédure. / Lorsqu'il résulte de la décision du juge que l'office indemnise la victime ou ses ayants droit au titre de l'article L. 1142-1-1, celui-ci ne peut exercer une action récursoire contre le professionnel, l'établissement de santé, le service ou l'organisme concerné ou son assureur, sauf en cas de faute établie à l'origine du dommage, notamment le manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales. L'office signale sans délai l'infection nosocomiale à l'autorité compétente mentionnée à l'article L. 6115-3 " ; qu'il ne résulte pas de ces dispositions qu'en l'absence d'éléments permettant à l'établissement de santé de prouver que les règles d'hygiène et d'asepsie auxquelles il doit se soumettre ont été mises en oeuvre, il doive être présumé que celles-ci n'ont pas été respectées ;

3. Considérant que, pour obtenir l'engagement de la responsabilité de l'AP-HP à son égard sur le fondement de ces dispositions, l'ONIAM invoque plusieurs dysfonctionnements fautifs en matière de lutte contre les infections nosocomiales, qui seraient à l'origine de la contraction, par M.B..., au cours de l'intervention chirurgicale du 16 mars 2004, d'un streptocoque ayant conduit à l'aggravation de son état de santé puis à son décès le

20 mars suivant ;

4. Considérant, en premier lieu, que l'ONIAM soutient que, eu égard à l'état clinique présenté par M.B..., une antibioprophylaxie préopératoire aurait dû être pratiquée ; que, toutefois, si à l'appui de cette allégation est invoquée une étude réalisée par la Société française d'anesthésie et de réanimation en 1992 et réactualisée en 1999 et en 2010, il résulte des conclusions mêmes de cette étude qu'en principe les néphrectomies n'ont pas à être précédées d'une antibioprophylaxie ; que si l'ONIAM soutient que M. B...présentait, en raison de son obésité, de son diabète et de son tabagisme, des facteurs aggravant les risques d'infections opératoires, il résulte de l'étude citée qu'" aucune transgression des protocoles proposés n'est justifiée chez [les] patients " présentant ces caractéristiques ; que, par ailleurs, contrairement à ce que soutient l'ONIAM, il n'est pas établi, et il est du reste contesté par l'AP-HP, qu'un traitement antibiotique ait été administré à M. B...à la suite de l'intervention chirurgicale du 20 février 2004 ; que l'ONIAM ne conteste pas plus l'attestation produite par l'AP-HP le

4 mai 2012 selon laquelle la complication identifiée au lendemain de cette intervention ne constituait pas " un risque infectieux mais un hématome fréquent au niveau de la racine de la cuisse consécutif à la ponction nécessaire à la thrombectomie iliaque gauche " ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi que le défaut de réalisation d'une antibioprophylaxie préalablement à l'intervention chirurgicale du 16 mars 2004 ait été constitutif d'un manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales au sens des dispositions précitées de l'article L. 1142-21 ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que contrairement à ce que soutient l'ONIAM, il ne résulte pas de l'instruction que les règles d'hygiène et d'asepsie concernant la préparation de

M. B...à l'intervention du 16 mars 2004 auraient été méconnues ; que l'AP-HP produit à cet égard le protocole de préparation cutanée concernant ladite intervention dont il résulte que

M. B...a subi avant l'opération, puis au bloc opératoire, les traitements aseptiques nécessaires ; que le compte-rendu opératoire mentionné par le rapport d'expertise évoque également la " désinfection cutanée à la polyvidone iodée " réalisée préalablement à l'intervention ; que, dans ces conditions, et à défaut de tout document de l'ONIAM susceptible de contredire les éléments produits par l'AP-HP, le moyen tiré d'un manquement caractérisé aux règles relatives à la préparation physique du patient préalablement à l'intervention litigieuse ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, enfin, que, ainsi qu'il a été dit, il n'est pas établi que M. B...ait contracté une infection lors de l'intervention du 20 février 2004 qui visait à remédier à l'anévrisme ; que l'ONIAM n'apporte pas non plus d'élément de nature à établir qu'indépendamment même de cette opération, M. B...aurait présenté un foyer infectieux d'une quelconque nature préalablement à l'intervention chirurgicale du 16 mars 2004 ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de vérification de l'absence de tout foyer infectieux préalablement à cette intervention ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ONIAM n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions récursoires tendant à l'engagement de la responsabilité de l'AP-HP à son égard ; que, par suite, sa requête doit être rejetée, ainsi que les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dont elle est assortie ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'ONIAM est rejetée.

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N° 11PA05397


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA05397
Date de la décision : 24/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MILLE
Rapporteur ?: M. Julien SORIN
Rapporteur public ?: M. LADREYT
Avocat(s) : WELSCH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-06-24;11pa05397 ?
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