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31/05/2013 | FRANCE | N°12PA04893

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 31 mai 2013, 12PA04893


Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2012, présentée par le préfet de police qui demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1211283 du 7 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris, premièrement, a annulé son arrêté en date du 1er juin 2012 refusant de délivrer un titre de séjour à M. G...H..., lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de sa reconduite à la frontière, deuxièmement, lui a fait injonction de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence por

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Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2012, présentée par le préfet de police qui demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1211283 du 7 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris, premièrement, a annulé son arrêté en date du 1er juin 2012 refusant de délivrer un titre de séjour à M. G...H..., lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de sa reconduite à la frontière, deuxièmement, lui a fait injonction de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ", et, troisièmement, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2° de rejeter la demande présentée par M. H...devant le Tribunal administratif de Paris ;

....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mai 2013 :

- le rapport de M. Puigserver, premier conseiller ;

- et les observations de MeB..., représentant M. H...;

1. Considérant que M. G...H..., né le 17 février 1970, ressortissant algérien entré régulièrement en France le 1er mars 2001 sous couvert d'un visa de court séjour, a sollicité, le 10 mai 2012, son admission au séjour sur le fondement du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, par un arrêté du 1er juin 2012, le préfet de police a opposé un refus à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de sa reconduite à la frontière ; que le préfet de police relève régulièrement appel du jugement du 7 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, sur la demande de M.H..., annulé cet arrêté ;

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du

27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit :/ 1° Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;

3. Considérant que M. H...fait valoir qu'il justifie avoir séjourné habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; que toutefois, il ne produit, pour l'année 2005, que deux courriers lui ayant été adressés en janvier et en juin, une attestation manuscrite de domiciliation dans une association établie en avril 2005, un récépissé anonyme d'opération bancaire effectuée en mai, une demande de carte solidarité transport, portant des mentions manuscrites, formulée en juin, et des documents d'ordre médical datés du mois d'octobre ; que, s'agissant de l'année 2006, il verse au dossier des documents bancaires, parmi lesquels deux récépissés anonymes d'opérations bancaires datant de mars et octobre, trois bordereaux de remise de chèques en août et en octobre et divers relevés attestant de retraits effectués entre octobre et décembre, ainsi qu'une carte de solidarité transport valable jusqu'en mai ; que ces pièces ne permettent pas, en raison de leur valeur probante insuffisante, d'établir qu'il résidait habituellement sur le territoire au cours des deux années en cause ; que, par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris s'est fondé, pour annuler son arrêté, sur le motif tiré de ce que l'arrêté attaqué méconnaissait les stipulations précitées ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. H...devant le Tribunal administratif de Paris et la Cour ;

Sur les autres moyens de M.H... :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

5. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté n° 2012-00358 du 17 avril 2012, régulièrement publié au bulletin officiel de la Ville de Paris le 24 avril 2012,

M. D...C..., préfet de police, a donné à M. A...F..., signataire de la décision attaquée en date du 1er juin 2012, délégation pour signer, notamment, les refus de titres de séjour, assortis d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. C...a été nommé préfet hors cadre par un décret en date du 31 mai 2012 ; que, par un décret du même jour, il a été nommé conseiller d'Etat en service extraordinaire, à compter du 7 juin 2012 ; qu'il ressort des pièces du dossier que son successeur, M. E...I..., nommé préfet de police par un décret du même jour, n'a été installé dans ses nouvelles fonctions que le 8 juin 2012 ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, M. C...demeurait compétent pour prendre toutes mesures entrant dans les attributions du préfet de police ; que la délégation consentie à

M. F...était toujours valable à cette même date ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée doit dès lors être écarté comme manquant en fait ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que la décision attaquée mentionne les stipulations du 1° de l'article 6 de l'accord franco algérien et indique que M. H...ne justifie pas du caractère habituel de son séjour en France depuis plus de dix ans, à raison du défaut de valeur probante de pièces produites pour plusieurs des années considérées ; qu'elle précise en outre qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, dès lors que, célibataire et sans charge de famille en France, il n'est pas démuni d'attaches familiales à l'étranger ; qu'ainsi, le refus de titre de séjour opposé à M. H...énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, que le préfet n'est tenu, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions permettant d'obtenir de plein droit un titre de séjour, et non de tous les étrangers qui sollicitent un tel titre ; que M. H...n'établissant pas être en situation de bénéficier de plein droit d'un titre de séjour, le préfet de police n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ; que ce moyen, tiré du vice de procédure, doit être écarté ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ;/ 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du

27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ;

9. Considérant que M. H...fait valoir qu'il réside habituellement en France depuis plus de dix ans, qu'il y a des attaches personnelles, dont il justifie par la production d'attestations, et qu'il est très bien intégré, ainsi qu'en témoignent sa maîtrise de la langue française et sa connaissance des valeurs républicaines ; que toutefois, ainsi qu'il a été dit, l'intéressé ne rapporte pas la preuve de la durée alléguée de son séjour en France ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier que M. H...est célibataire et sans charge de famille en France et n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où vivent ses sept frères et sa soeur, et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 30 ans ; qu'enfin, il ne justifie d'aucune activité professionnelle et d'aucun revenu en France ; qu'ainsi, eu égard aux conditions de son séjour en France, la décision litigieuse n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors que M. H...n'a pas sollicité de titre de séjour sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, il ne peut utilement soutenir que l'arrêté méconnaît ces stipulations ;

10. Considérant, en cinquième et dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.H... ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

11. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte, du défaut de motivation, de la méconnaissance des 1° et 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de l'intéressé, qui reprennent ce qui a été précédemment développé à l'appui des conclusions dirigées contre le jugement et le refus de titre de séjour attaqués, doivent être écartés, ainsi que, pour les mêmes motifs, celui tiré de l'exception d'illégalité ;

12. Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, contrairement à ce que soutient M.H..., que le préfet de police n'aurait pas procédé à l'examen particulier de sa situation ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 1er juin 2012 ; que, par voie de conséquence, les conclusions de M. H... à fin d'injonction, sous astreinte, et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1211283 du Tribunal administratif de Paris en date du

7 novembre 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. H...devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

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N° 12PA04893


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04893
Date de la décision : 31/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Frédéric PUIGSERVER
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : MEUROU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-05-31;12pa04893 ?
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