Vu la requête, enregistrée le 31 mars 2010, présentée pour la société Tisseyre et Associés, dont le siège est au 16, chemin de Manel à Toulouse (31400), par la SCP Salesse-Destrem ; la société Tisseyre et associés demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0604026/6-2 du 26 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la Ville de Paris à lui verser une somme de 309 965,30 euros en règlement du solde du marché de maîtrise d'oeuvre relatif à la rénovation du théâtre de la Gaîté lyrique à Paris, ainsi qu'une somme de 1 000 000 euros en réparation du préjudice résultant pour elle de la résiliation abusive de ce marché ;
2°) d'ordonner une expertise ;
3°) de condamner la Ville de Paris à lui verser les sommes de 25 760,50 euros hors taxes au titre des situations présentées et non payées, 90 549,76 euros hors taxes au titre des situations non présentées et non payées sur prestations réalisées, 9 300 euros hors taxes au titre des dépenses engagées sur les prestations non réalisées, 184 355,04 euros hors taxes au titre de la perte de marge sur les prestations non réalisées et 1 000 000 euros au titre du préjudice professionnel ;
4°) de débouter la Ville de Paris de l'ensemble de ses demandes ;
5°) de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 2013 :
- le rapport de Mme Sanson, rapporteur,
- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., pour la Ville de Paris ;
1. Considérant qu'en vue de la réhabilitation du théâtre de la Gaîté Lyrique dans le 3ème arrondissement, la Ville de Paris a conclu un marché de maîtrise d'oeuvre avec un groupement d'entreprises ayant pour mandataire le cabinet Manuelle Gautrand, architecte, comprenant notamment la Société Tisseyre et associés, bureau d'études chargé de l'acoustique ; que l'exécution du marché se décomposait en plusieurs phases, l'avant-projet sommaire et l'avant-projet détaillé ayant été approuvés par le maître d'ouvrage avec des réserves concernant notamment l'isolation de la salle de concert, la salle multimédias et la salle d'enregistrement ; que, si le principe d'une structure séparée du reste de la construction, dite " boîte dans la boîte ", recueillait l'accord de tous les intervenants, des divergences ont subsisté sur les caractéristiques techniques précises de l'ouvrage permettant d'insonoriser les locaux afin de prévenir des troubles de voisinage ; que ces désaccords ont conduit la Ville de Paris à prononcer l'ajournement de la phase " projet " ; que la Ville de Paris a finalement retenu une solution tendant à désolidariser entièrement les salles du reste de la construction en les enfermant dans une structure en béton, dite " boîte lourde ", rejetant la solution dite " boîte légère " préconisée par la requérante ; qu'à la suite du courrier adressé le 11 janvier 2006 par la mandataire du groupement au maître de l'ouvrage, qui faisait état d'un refus de la Société Tisseyre et Associés de poursuivre son intervention dans le cadre ainsi défini, la Ville de Paris a prononcé le 25 janvier 2006 la résiliation du contrat la liant à la société requérante ; que la Société Tisseyre et Associés a saisi le 10 mars 2006 le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à la condamnation de la Ville de Paris à lui verser, d'une part, le montant de prestations non payées et, d'autre part, des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par elle du fait de l'illégalité de la résiliation prononcée à son encontre ; que, par un jugement du 26 janvier 2010, dont la Société Tisseyre et associés relève appel, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur la responsabilité :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 37.2 du cahier des clauses administratives générales applicable au marché : " La personne publique peut résilier le marché aux torts du titulaire sans mise en demeure préalable : / a) Lorsque le titulaire déclare ne pas pouvoir exécuter ses engagements, sans qu'il soit fondé à invoquer le cas de force majeure (...) " ;
3. Considérant que, pour écarter la responsabilité de la Ville de Paris, le tribunal s'est fondé sur le circonstance qu'aucune solution précise en matière acoustique n'avait été arrêtée avant la phase PRO du projet, l'approbation de l'avant-projet sommaire et de l'avant-projet détaillé ayant été assortie de réserves sur la pertinence de l'option proposée par la Société Tisseyre et associés, et que celle-ci avait, selon la mandataire du groupement, exprimé son refus de poursuivre sa mission sur le fondement de l'option retenue par le maître de l'ouvrage ; que, dans sa lettre du 4 janvier 2006 qu'elle produit en appel, la société indiquait que : " le nouveau projet intégrant une option acoustique qui n'a pas mon agrément (...) j'en tirerai les conclusions afin de ne pas pénaliser l'équipe de maîtrise d'oeuvre dans la mesure où elle accepterait de poursuivre le nouveau projet " ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, il résulte des termes de ce courrier qu'elle refusait de poursuivre l'exécution du marché suivant les orientations retenues par le maître d'ouvrage qualifiées par elle de " nouveau projet " ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la réalisation d'une structure du type " boîte légère " préconisée par la société requérante aurait été prévue dans le marché de définition ou approuvé ultérieurement par la Ville de Paris ; qu'il suit de là que cette dernière a pu légalement résilier le contrat la liant à la Société Tisseyre et associés sur le fondement de l'article 37.2 a) précité du cahier des clauses administratives générales et n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité ;
Sur le solde du marché :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 37.5 du cahier des clauses administratives générales : " Sauf stipulation particulière du marché, le décompte de liquidation comprend (...) / b) Au crédit du titulaire : / La valeur contractuelle des prestations reçues, y compris, s'il y a lieu, les intérêts moratoires ; / La valeur des prestations fournies éventuellement en application du 3 de l'article 35.(...) " ; qu'aux termes de l'article 35.3 : " En cas de résiliation du marché, la personne publique se réserve le droit d'exiger du titulaire :/ La remise des prestations en cours d'exécution, des matières et des objets approvisionnés en vue de l'exécution du marché " ;
5. Considérant que la Société Tisseyre et associés demande la condamnation de la Ville de Paris à lui verser une somme de 25 760,50 euros au titre de " situations présentées et non payées " ; qu'elle fait état de l'exécution à 85 % de la mission de base PRO ainsi que de l'exécution partielle de missions complémentaires ; qu'il résulte toutefois de l'instruction et notamment de l'avenant n° 2 au marché de maîtrise d'oeuvre que la Ville de Paris a estimé à 75 % la part de l'exécution du marché au titre de la phase PRO, à 40 % celle de la mission complémentaire VDI, et à 34 % celle de la mission complémentaire n° 10 ; que la requérante, qui s'est bornée à produire un projet de décompte final, ne présente aucun élément de nature à établir que l'exécution de la mission de base et des missions complémentaires représentait un pourcentage supérieur à celui retenu par le maître de l'ouvrage ;
6. Considérant que la Société Tisseyre et associés demande la condamnation de la Ville de Paris à lui verser une somme de 90 549,76 euros en règlement de situations non présentées et non payées sur prestations réalisées ; qu'elle ne produit toutefois aucune pièce attestant de l'exécution des prestations non rémunérées dont elle demande le paiement ;
7. Considérant que la Société Tisseyre et associés demande la condamnation de la Ville de Paris à lui verser une somme de 9 300 euros au titre de prestations non réalisées, ainsi qu'une somme de 139 935,04 euros au titre de la perte sur marge ; que la société requérante ne tient ni des articles précités du cahier des clauses administratives générales, ni des stipulations du marché le droit de se faire rembourser des dépenses engagées en vue de prestations non réalisées ainsi que des pertes sur marge ;
Sur le préjudice :
8. Considérant qu'en l'absence de faute du maître de l'ouvrage la Société Tisseyre et associés n'est pas fondée à demander la condamnation de la Ville de Paris à réparer les conséquences dommageables de la perte de notoriété qu'elle soutient avoir subie du fait de la résiliation du marché ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Société Tisseyre et associés n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Ville de Paris qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la Société Tisseyre et associés une quelconque somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Société Tisseyre et associés la somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature exposés par la Ville de Paris ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la Société Tisseyre et associés est rejetée.
Article 2 : La Société Tisseyre et associés versera à la Ville de Paris une somme de 1 500 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
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N° 10PA01624