Vu la requête, enregistrée le 4 juillet 2012, présentée pour M. C... A..., demeurant..., par Me E... ; M. A...demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1119330 du 29 mai 2012 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 15 juillet 2011 du préfet de police rejetant sa demande de titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet, en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de réexaminer sa situation au regard du séjour, enfin, à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de
1 300 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
2°) de renvoyer l'affaire devant le Tribunal administratif de Paris dans sa formation normale ;
3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
4°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation au regard du séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
......................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision du 20 décembre 2012 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris, accordant au requérant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale dans le cadre de la présente instance, à la suite de sa demande du 19 juillet 2012 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive 2005/85/CE du conseil du 1er décembre 2005 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2013 :
-le rapport de M. Sorin,
- et les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public ;
1. Considérant que M. C... A..., de nationalité guinéenne, né le 12 janvier 1980, entré en France selon ses déclarations en 2009, a sollicité le 28 octobre 2009 un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 314-11 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 8 janvier 2010, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 4 avril 2011 ; que par un arrêté du 15 juillet 2011, le préfet de police a opposé un refus à sa demande de titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. A... relève appel de l'ordonnance du 29 mai 2012 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du Tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : .../ 5° Statuer sur les requêtes qui ne présentent plus à juger de questions autres que la condamnation prévue à l'article L. 761-1 ou la charge des dépens ; ... / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé " ;
3. Considérant que le vice-président Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur les dispositions de l'article R. 222-1 7° du code de justice administrative précitées pour rejeter par ordonnance la demande de M. A...tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juillet 2011 du préfet de police et considérer que les moyens soulevés par le requérant étaient inopérants ou manifestement infondés ou n'étaient assortis que de faits ou d'allégations manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ; que, cependant, ce dernier précisait notamment dans sa requête que l'arrêté était signé par une autorité incompétente et qu'il était insuffisamment motivé, que le préfet de police avait entaché sa décision de refus de titre de séjour d'erreur d'appréciation de sa situation en s'estimant lié par la décision de l'OFPRA et de la CNDA et que cette décision avait été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que la décision fixant le pays de destination avait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que les termes dans lesquels ces moyens sont exprimés, qui permettent d'en saisir le sens et la portée, les rendent suffisamment intelligibles pour que le juge exerce son office en appréciant le bien-fondé au regard des pièces produites ou de celles qui viendraient à l'être ; que, dans ces conditions, le vice-président du Tribunal administratif de Paris, ne pouvait, comme il l'a fait par l'ordonnance attaquée, rejeter cette demande en application des dispositions précitées de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ordonnance du vice-président du Tribunal administratif de Paris du 29 mai 2012 doit être annulée ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris et devant la Cour ;
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de police du 15 juillet 2011 :
5. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 2011-412 du 8 juin 2011, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 14 juin 2011, le préfet de police a donné à Mme B...D..., attachée d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, délégation pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la signataire de la décision attaquée n'aurait pas été titulaire d'une délégation régulière doit être écarté ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté litigieux vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 511-1 I ; qu'il mentionne que la demande d'asile de M. A...a été rejetée par l'OFPRA et la CNDA et qu'ainsi, l'intéressé ne peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour ni sur le fondement de l'article L. 314-11 8° ni sur le fondement de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en outre, le préfet a indiqué que l'arrêté ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale et que ce dernier n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; que cet arrêté comporte ainsi les considérations de fait et de droit sur lesquelles il est fondé ; que, par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté ;
7. Considérant, en troisième lieu, que si M. A...soutient que le préfet de police aurait détourné la procédure dès lors qu'il sollicitait une autorisation provisoire de séjour et non une carte de résident, il ressort des pièces du dossier que le requérant a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 314-11 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui régissent la délivrance d'une carte de résident en qualité de réfugié ; que, dès lors, le détournement de procédure allégué n'est pas établi ;
En ce qui concerne la légalité de la décision de refus de titre de séjour :
8. Considérant, en premier lieu, que le requérant, qui s'est vu refuser le statut de réfugié par une décision de l'OFPRA du 8 janvier 2010, confirmée par une décision de la CNDA du 4 avril 2011, ne saurait soutenir que le préfet de police s'est estimé, à tort, en situation de compétence liée, dès lors qu'en application des dispositions précitées, l'administration est tenue de refuser la délivrance de la carte de résident régie par l'article L. 314-11 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à un étranger qui s'est vu refuser la carte de réfugié ;
9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 10 de la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 susvisée : " En ce qui concerne les procédures prévues au chapitre III, les États membres veillent à ce que tous les demandeurs d'asile bénéficient des garanties suivantes : a) ils sont informés, dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu'ils la comprennent, de la procédure à suivre et de leurs droits et obligations au cours de la procédure ainsi que des conséquences que pourrait avoir le non-respect de leurs obligations ou le refus de coopérer avec les autorités (...) " ;
10. Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient l'intéressé, les dispositions précitées de l'article 10 de la directive, qui imposent aux Etats membres d'informer, dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu'ils la comprennent, les demandeurs d'asile qui se sont vu opposer les décisions par lesquelles l'autorité compétente accorde ou refuse l'asile, ne s'appliquent pas à la décision prise par le préfet sur le fondement des dispositions de l'article L. 314-11 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que les dispositions susvisées de la directive 2005/85/CE ne prévoient pas elles-mêmes la traduction de la décision en litige ; que, d'autre part, le requérant reconnaît lui-même dans ses écritures avoir eu accès à un interprète en peul durant la procédure d'instruction de sa demande d'asile ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté ;
11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
12. Considérant que M. A... soutient qu'il est arrivé sur le territoire français en 2009, qu'il parle le français, qu'il présente des garanties d'insertion en France et qu'il y a développé un important réseau social ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans charge de famille sur le territoire français ; qu'en outre, d'une part, il n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans et d'autre part, il n'établit pas être particulièrement intégré en France ; que, par suite, la décision litigieuse n'a pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, le préfet de police n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
13. Considérant, en quatrième lieu, que le requérant ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour dès lors que cette décision n'a pas pour objet de fixer le pays de destination ;
En ce qui concerne la légalité de l'obligation de quitter le territoire :
14. Considérant que les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour ayant été écartés, le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté par voie de conséquence ;
En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :
15. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
16. Considérant que M. A... soutient qu'il a été victime de menaces et de violences graves dans son pays d'origine en raison de son engagement politique comme militant de l'opposition du parti au pouvoir ; que, toutefois, comme il a été dit précédemment, la demande d'asile de M. A...a été rejetée par une décision de l'OFPRA, confirmée par la CNDA ; qu'il ne produit aucun élément de nature à établir qu'il encourrait un risque personnel, certain et actuel en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi le moyen qu'il invoque, tiré de ce que l'arrêté attaqué, en tant qu'il fixe la Guinée comme pays de destination, méconnaîtrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 15 juillet 2011 lui refusant un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français à destination de la Guinée ; qu'ainsi la demande d'annulation soumise au tribunal administratif par M. A... doit être rejetée ; que doivent être également rejetées par voie de conséquence ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E
Article 1er : L'ordonnance du vice-président du Tribunal administratif de Paris du 29 mai 2012 est annulée.
Article 2 : La demande soumise au Tribunal administratif de Paris par M. A... est rejetée.
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N° 12PA02892