Vu la requête, enregistrée le 2 décembre 2011, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) Hôtel Labat, dont le siège est 16 rue Labat à Paris (75018), par Me Guilloux ; la société Hôtel Labat demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1017354/1-1 du 5 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2006 et 2007, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période allant du
1er janvier 2006 au 31 décembre 2007 et des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2013 :
- le rapport de Mme Appèche, rapporteur,
- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public,
- et les observations de Me Rivet, pour la société Hôtel Labat ;
Et connaissance prise de la note en délibéré produite le 28 mars 2013 pour la société requérante ;
1. Considérant que la société Hôtel Labat, qui exploite un fonds de commerce d'hôtel-bar appartenant à M. X... P..., relève appel du jugement n° 1017354/1-1 du 5 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2006 et 2007, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007 et des pénalités y afférentes ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité du recours à la procédure de taxation d'office :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : (...) 2° A l'impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n'ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 68 ; 3° Aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes (...) " et qu'aux termes de l'article L. 68 du même livre : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure (...) " ;
3. Considérant qu'il est constant que la société Hôtel Labat n'a souscrit dans les délais légaux ni ses déclarations de chiffres d'affaires au titre des années 2006 et 2007, ni ses déclarations de résultats au titre des exercices clos en 2006 et en 2007 ; que, bien que le service l'ait mise en demeure de souscrire ces deux dernières déclarations, par courriers respectivement des 9 juillet 2007 et 18 juin 2008, la société Hôtel Labat n'a déposé ses déclarations de résultat que le 23 août 2007 pour l'exercice clos en 2006 et le 5 décembre 2008 pour l'exercice clos en 2007, soit plus de trente jours après les mises en demeure ; que, par ailleurs, aucune mise en demeure n'est requise pour recourir à la taxation d'office en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, l'administration était en droit de recourir à la procédure de taxation d'office tant en matière d'impôt sur les sociétés que de taxe sur la valeur ajoutée ; que, dès lors, si la société a entendu invoquer devant la Cour un moyen tiré de l'irrégularité de la taxation d'office, ce moyen doit être écarté ;
En ce qui concerne la régularité de la vérification de comptabilité :
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que l'administration a adressé à la société Hôtel Labat un avis de vérification de sa comptabilité daté du 18 juin 2008 et portant sur les exercices clos en 2005, 2006 et 2007 ; que la date de première intervention, qui a eu lieu le 3 septembre suivant, a été proposée par courrier du 7 juillet 2008, à la suite de la remise au vérificateur, le 3 juillet 2008, d'un mandat de représentation ; que le service ayant, comme il a été dit supra, mis en demeure l'intéressée dès le 9 juillet 2007 de souscrire sa déclaration de résultats au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2006 et dès le 18 juin 2008 celle au titre de l'exercice suivant, la situation de taxation d'office de la société Hôtel Labat n'a par conséquent pas été révélée à l'administration à l'occasion de la vérification de comptabilité ; qu'il suit de là que les irrégularités alléguées dont serait entachée cette vérification sont, en tout état de cause, sans influence sur la régularité des impositions supplémentaires litigieuses, établies par voie de taxation d'office ;
En ce que concerne la régularité des avis de mise en recouvrement :
5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. / Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications. (...) " ;
6. Considérant que les deux avis de mise en recouvrement des impositions litigieuses adressés à la société requérante et concernant l'un la taxe sur la valeur ajoutée et les majorations y afférentes, l'autre l'impôt sur les sociétés et les majorations y afférentes indiquent, pour chacun de ces impôts, le montant des droits, des majorations et des pénalités ; que chacun de ces avis mentionne, en face de la ligne "origine de la créance", la proposition de rectification du
21 juillet 2009, ainsi que la réponse aux observations du contribuable du 21 septembre 2009 ; que, par suite, et alors même qu'en face de la ligne "majorations", où figure un renvoi à la proposition de rectification du 21 juillet 2009, n'a pas été à nouveau mentionnée la réponse aux observations du contribuable par laquelle l'administration avait accepté de réduire le montant des pénalités, ces avis de recouvrement répondent aux exigences de motivation posées par les dispositions susrappelées ; que par suite la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les impositions litigieuses auraient été irrégulièrement assorties de majorations ;
Sur le bien-fondé des impositions :
7. Considérant, en premier lieu, que la société Hôtel Labat soutient que, le service n'ayant pas rejeté sa comptabilité comme étant dénuée de toute valeur probante, il ne pouvait légalement pas reconstituer son chiffre d'affaires ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que le vérificateur a, les 3 et 13 décembre 2008, dressé des procès-verbaux pour défaut de présentation de comptabilité ;
8. Considérant, en deuxième lieu, que, si la société requérante, d'une part, se prévaut de ce que les procès-verbaux susmentionnés ont été signés par M. T... P..., qui n'était plus le gérant de la société depuis une décision de son assemblée générale du 14 janvier 2008, publiée au journal d'Annonces Légales les 20 et 21 mai 2008 et, d'autre part, allègue sans toutefois l'établir que sa comptabilité aurait été tenue à la disposition du vérificateur, le 13 mai 2009, date prévue pour une intervention de celui-ci, finalement annulée, elle ne produit devant la Cour, pas plus qu'elle ne l'a fait devant le tribunal administratif, des éléments de sa comptabilité de nature à démontrer, comme elle en a la charge, l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration ; que celle-ci, qui s'est limitée à rehausser les bases imposables de l'intéressée du montant des recettes omises, en les évaluant à partir des éléments de la procédure pénale engagée à l'encontre de M. T... P..., de son frère et du barman de l'Hôtel Labat, poursuivis pour proxénétisme aggravé et dont l'administration a pris connaissance par l'usage de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, a ainsi déterminé le montant des recettes non déclarées retirées de la mise à disposition tant des chambres dédiées à l'activité de proxénétisme que de celles utilisées pour l'activité hôtelière normale sur les exercice clos en 2006 et 2007 ;
9. Considérant, en troisième lieu, que la société Hôtel Labat ne peut utilement, pour contester les impositions consécutives à ces rehaussements de recettes, se prévaloir de ce que le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Paris le 13 novembre 2008 à l'issue de la procédure susmentionnée et devenu définitif, condamne M. T... P... pour proxénétisme aggravé et non elle-même en tant que personne morale, dès lors que les procédures pénale et fiscale sont indépendantes et qu'il ressort des constatations de fait opérées par le juge pénal dans ce jugement, que l'activité de proxénétisme en cause se déroulait dans l'établissement, à raison de 30 à 40 "passes" par jour, que la clientèle provenait pour l'essentiel du bar de l'hôtel, que trois chambres étaient réservées à cette activité moyennant le paiement d'une somme comprise entre 20 et 30 euros, à quoi s'ajoutait le paiement de la prestation de prostitution dont le prix n'a pas été inclus dans les rectifications opérées par le service et qu'enfin, ainsi qu'il a été dit supra, les personnes reconnues coupables de proxénétisme aggravé étaient le gérant et le barman de l'hôtel ; que les recettes en cause provenaient ainsi de l'activité de l'hôtel géré par la société requérante, exercée grâce à l'utilisation d'une partie des moyens d'exploitation, et non d'une activité qu'à son insu, son gérant et son barman auraient poursuivie à titre personnel ; que par suite, et nonobstant la circonstance que la société Hôtel Labat, en tant que personne morale, n'a pas fait l'objet d'une condamnation pénale pour faits de proxénétisme, c'est à bon droit que le service a réintégré dans ses bases imposables les sommes correspondantes qui ne pouvaient être considérées comme des revenus provenant d'une activité d'entremise que M. T... P... aurait exercée pour son propre compte en dehors de ses fonctions de gérant et à l'insu de la société requérante ;
10. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Hôtel Labat n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2006 et 2007, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007 et des pénalités y afférentes ; que les conclusions aux fins d'annulation du jugement et de décharge présentées par la société Hôtel Labat dans sa requête doivent, par suite, être rejetées ; qu'il en va, par voie de conséquence, de même de ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Hôtel Labat est rejetée.
''
''
''
''
7
N° 08PA04258
2
N° 11PA04983