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08/04/2013 | FRANCE | N°12PA01762

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 08 avril 2013, 12PA01762


Vu la requête, enregistrée le 20 avril 2012, présentée par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement, rendu après jonction des demandes n°s 1120205 et 1120206, du 16 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a fait droit aux demandes de

Mme D...A...et de M. C...A..., d'une part, en annulant les deux arrêtés du

10 août 2011 par lesquels il a rejeté leur demande de titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, en lui enjoi

gnant de délivrer aux époux A...un titre de séjour portant la mention "vie privée ...

Vu la requête, enregistrée le 20 avril 2012, présentée par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement, rendu après jonction des demandes n°s 1120205 et 1120206, du 16 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a fait droit aux demandes de

Mme D...A...et de M. C...A..., d'une part, en annulant les deux arrêtés du

10 août 2011 par lesquels il a rejeté leur demande de titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, en lui enjoignant de délivrer aux époux A...un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, enfin, en mettant à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à MeB..., leur conseil, au titre des articles

L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

2°) de rejeter les demandes présentée par M. et Mme A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

.....................................................................................................................

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 22 janvier 2013, présentés par MeB..., pour M. A...et MmeA..., qui concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

M. et Mme A...soutiennent que :

- les décisions de refus de séjour ont été prises en méconnaissance des articles

L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que le préfet de police aurait dû saisir la commission du titre de séjour au regard des articles L. 312-1 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- que les décisions de refus de séjour sont insuffisamment motivées ;

- que le préfet de police a entaché ses décisions d'erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur leur situation personnelle ;

- que le préfet de police a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- que les décisions portant obligation de quitter le territoire français sont illégales en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- qu'elles ont été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Vu les décisions du 29 novembre 2012 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris, accordant à M. et Mme A...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale dans le cadre de la présente instance, à la suite de leurs demandes du 3 juillet 2012 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le

26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2013 :

- le rapport de Mme Bailly, rapporteur,

- et les observations de MeB..., pour M. et MmeA... ;

1. Considérant que M. C...A...et Mme D...A..., de nationalité chinoise, ont sollicité le 8 juillet 2011 leur admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article

L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par deux arrêtés du 10 août 2011, le préfet de police a refusé de leur délivrer un titre de séjour et les a obligés à quitter le territoire français ; que le préfet de police relève régulièrement appel du jugement du 16 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé ces arrêtés ;

Sur le bien fondé du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. (...) " ;

3. Considérant que pour annuler les arrêtés du 10 août 2011 rejetant les demandes d'admission au séjour de M. et MmeA..., le Tribunal administratif de Paris a considéré que ces arrêtés avaient été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, s'il ressort des pièces du dossier que M. A...réside en France depuis 2001, rejoint en 2004 par sa future épouse, le couple s'est maintenu sur le territoire national en dépit de mesures d'éloignement prises à son encontre en 2005 ; qu'étant tous les deux en situation irrégulière en France, rien ne s'opposait, à la date de la décision attaquée, à ce que M. et Mme A...reconstituent leur cellule familiale dans leur pays d'origine, eu égard notamment au jeune âge de leurs trois enfants, nés en 2005, 2007 et 2011 ; qu'en outre, les intéressés ne sont pas dépourvus de toute attache familiale en Chine où résident notamment leurs parents ; que, par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés précités du 10 août 2011 pour méconnaissance de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et MmeA..., devant le Tribunal administratif de Paris et devant la Cour ;

Sur la légalité des décisions de refus de titre de séjour :

5. Considérant, en premier lieu, que le préfet n'est tenu, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions permettant d'obtenir de plein droit un titre de séjour, et non de tous les étrangers qui sollicitent un tel titre ; que M. et Mme A...n'établissant pas être en situation de bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en France, le préfet de police n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ; qu'en outre, si M. et Mme A...soutiennent que le préfet de police aurait dû saisir cette commission en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que M. A...justifie résider habituellement en France depuis plus de dix ans, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils auraient sollicité leur admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de ces dispositions ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de saisine de la commission du titre de séjour ne peut utilement être invoqué et doit, par suite, être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que les décisions litigieuses visent la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elles indiquent que M. et Mme A...se sont maintenus en France de façon irrégulière, respectivement depuis 2001 et 2004 ; qu'elles mentionnent en outre qu'ils ne sont pas dépourvus de toute attache familiale dans leur pays d'origine et qu'aucun obstacle juridique ne s'oppose à ce qu'ils emmènent leur enfant dans leur pays d'origine nonobstant leur scolarisation ; qu'enfin, elles précisent que les intéressés n'établissent pas être exposés à des peines ou traitements contraires à la convention précitée ; qu'elles comportent ainsi les considérations de fait et de droit sur lesquelles elles sont fondées ; que, par suite, le moyen tiré de leur insuffisante motivation doit être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, que les décisions du 10 août 2011 font état, contrairement à ce que soutiennent les intéressés, de ce qu'ils sont parents de deux enfants nés en France, conformément à ce qu'ils avaient indiqué lors de leur demande de titre de séjour ; qu'ils ne sont par suite pas fondés à soutenir que la décision serait entachée d'une erreur de fait, leur troisième fille n'étant née que le 25 juillet 2011 et n'ayant donc pas été mentionnée dans leur demande de titre de séjour ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

9. Considérant que si M. et Mme A...soutiennent que leurs enfants sont nés et scolarisés en France, ils n'établissent pas que ceux-ci seraient dans l'impossibilité de poursuivre leur scolarité en Chine, eu égard notamment à leur jeune âge ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant susvisée doit être écarté ;

10. Considérant, enfin, que si M. et Mme A...ont obtenu le diplôme initial de langue française en février 2011, ils n'établissent pas, par ce seul élément, qu'ils seraient particulièrement intégrés dans la société française, professionnellement ou personnellement ; que, par suite, le préfet de police n'a pas entaché ses décisions d'erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle des intéressés ;

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :

11. Considérant que, les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour ayant été écartés, le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté par voie de conséquence ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, qui reprend ce qui a été développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doit être écarté pour les mêmes motifs ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé ses arrêtés du 10 août 2011 refusant de délivrer un titre de séjour à M. et Mme A...et les obligeant à quitter le territoire ; que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de ces arrêtés, n'impliquent aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. et Mme A...doivent être rejetées ; qu'enfin, les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante en la présente instance, verse à M. et Mme A...une somme au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 16 mars 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme A...devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.

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N° 12PA01762


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA01762
Date de la décision : 08/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MILLE
Rapporteur ?: Mme Pascale BAILLY
Rapporteur public ?: M. LADREYT
Avocat(s) : STAMBOULI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-04-08;12pa01762 ?
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