La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/12/2012 | FRANCE | N°11PA05423

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 21 décembre 2012, 11PA05423


Vu la requête, enregistrée le 30 décembre 2011, présentée pour M. C... A..., demeurant..., par Me B... ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107065/6-3 du 24 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 mars 2011 par lequel le préfet de police lui a retiré son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour assortie

d'une autorisation de travail et de procéder au réexamen de sa situation administrative, ...

Vu la requête, enregistrée le 30 décembre 2011, présentée pour M. C... A..., demeurant..., par Me B... ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107065/6-3 du 24 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 mars 2011 par lequel le préfet de police lui a retiré son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail et de procéder au réexamen de sa situation administrative, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article

L.761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention relative au droit de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 décembre 2012 :

- le rapport de Mme Bailly, rapporteur,

- les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., pour M.A... ;

1. Considérant que M. C...A..., né en 1972 et de nationalité chinoise, entré en France en 1996 selon ses déclarations, s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " ; qu'à la suite d'un contrôle des services de police au sein du restaurant dont il est le gérant de fait, des faits de travail dissimulé et d'emploi d'étrangers démunis de titres de travail ont été découverts ; que sur le fondement de l'article L. 313-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sa carte de séjour lui a été retirée par un arrêté du préfet de police du 15 mars 2011 ; que M. A...relève régulièrement appel du jugement du

24 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La carte de séjour temporaire peut (...) être retirée à tout employeur, titulaire de cette carte, en infraction avec l'article L. 341-6 du code du travail " ; que selon l'article L. 8251-1 du code du travail, qui a repris les dispositions de l'article L. 341-6, aujourd'hui abrogé, du même code : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France " ; que selon l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que la sanction prévue à l'article L. 313-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a pour effet, sauf lorsqu'elle n'est pas assortie d'une obligation de quitter le territoire français et s'accompagne de la délivrance d'un autre titre de séjour, de mettre fin au droit au séjour de l'étranger concerné ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales peut être utilement invoqué à l'appui d'un recours dirigé contre une telle sanction ;

4. Considérant que si M.A..., gérant de fait d'un établissement dans lequel ont été interpellés des salariés étrangers démunis d'un titre de séjour, pouvait faire l'objet de la sanction de retrait de la carte de séjour temporaire, prévue à l'article L. 313-5 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il résulte de l'instruction que l'intéressé vit en France avec son épouse, avec qui il est marié depuis 1993 ; qu'il a bénéficié d'un titre de séjour en raison de son état de santé de 2007 à 2010 puis, à compter de 2010, d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ; que son épouse est également titulaire d'une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " ; que leurs quatre enfants, nés en 1993, 2000, 2001 et 2007, les trois derniers sur le sol français et tous régulièrement scolarisés dans des établissements parisiens, résident avec eux ; que, dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour de M. A...en France, la mesure de retrait de sa carte de séjour temporaire, assortie d'une obligation de quitter le territoire français, qui l'a privé de tout droit au séjour en France, a porté au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée à la gravité des faits qui lui étaient reprochés et pour lesquels le préfet de police n'apporte aucun élément permettant d'établir qu'il aurait été condamné pénalement ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 mars 2011 par lequel le préfet de police lui a retiré son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

7. Considérant qu'il y a lieu, en application de ces dispositions, et ainsi que le demande M.A..., d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de celui-ci et de le munir, durant cette instruction, d'une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 24 novembre 2011 et l'arrêté du 15 mars 2011 du préfet de police sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de M. A...et de le munir, durant cette instruction, d'une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail.

Article 3: L'Etat versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

''

''

''

''

2

N° 11PA05423


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA05423
Date de la décision : 21/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme STAHLBERGER
Rapporteur ?: Mme Pascale BAILLY
Rapporteur public ?: M. LADREYT
Avocat(s) : BARDET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-12-21;11pa05423 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award