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12/11/2012 | FRANCE | N°12PA01587

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 12 novembre 2012, 12PA01587


Vu la requête, enregistrée le 6 avril 2012, présentée pour M. Drissa B, demeurant chez M. Adama C ... à Paris (75015), par Me Cécile Ostier ; M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1119044/2-2 du 27 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du

13 juillet 2011 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de délivrance de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit

enjoint au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention "vie p...

Vu la requête, enregistrée le 6 avril 2012, présentée pour M. Drissa B, demeurant chez M. Adama C ... à Paris (75015), par Me Cécile Ostier ; M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1119044/2-2 du 27 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du

13 juillet 2011 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de délivrance de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire, à ce qu'il soit enjoint au préfet de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions d'astreinte et dans le délai d'un mois suivant la notification du jugement, enfin, à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de

1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention "vie privée et familiale" dans un délai de quinze jours suivant la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, en application des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation à fin de délivrance d'une carte de séjour temporaire mention "vie privée et familiale", sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, en application des articles

L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 octobre 2012 :

- le rapport de Mme Bailly, rapporteur,

- et les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B, né le 5 avril 1976, de nationalité ivoirienne, entré en France selon ses dires en juin 2001, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-14 et L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 13 juillet 2011, le préfet de police a rejeté sa demande, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ; que M. B relève régulièrement appel du jugement du 27 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein

droit : 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police ... " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 11 mai 1998, dont sont issues les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du même code, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B est soigné depuis février 2008 pour une psychose chronique qui a nécessité des hospitalisations et a pu être stabilisée avec un traitement de Leponex ; que, par avis du 25 mars 2011, le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, a estimé que si l'état de santé de M. B nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celui-ci pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

5. Considérant que si le préfet de police a soutenu dans son mémoire en défense en première instance que le neuroleptique Leponex était disponible en Côte d'Ivoire et utilisé pour les malades atteints de troubles psychotiques dans les hôpitaux de ce pays, il n'a pas produit au soutien de son mémoire les éléments annoncés permettant de justifier ces affirmations alors que M. B a produit plusieurs attestations démontrant l'indisponibilité de ce traitement en Côte d'Ivoire ; que par suite, M. B doit être regardé comme établissant, ainsi qu'il le soutient, ne pouvoir bénéficier effectivement en Côte d'Ivoire d'un accès aux soins que son état de santé nécessite ; que le préfet de police a dès lors méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2011 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

8. Considérant qu'eu égard aux motifs énoncés ci-dessus et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation de M. B se serait modifiée, en droit ou fait, depuis l'intervention de l'arrêté contesté, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance d'un titre de séjour à l'intéressé ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'enjoindre au préfet de police de délivrer à M. B, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une carte de séjour temporaire en application du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1119044/2-2 du 27 février 2012 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police du 13 juillet 2011 refusant l'octroi d'un titre de séjour et faisant obligation à M. B de quitter le territoire français sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. B une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", sur le fondement de l'article 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. B la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA01587
Date de la décision : 12/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MILLE
Rapporteur ?: Mme Pascale BAILLY
Rapporteur public ?: M. LADREYT
Avocat(s) : OSTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-11-12;12pa01587 ?
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