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06/11/2012 | FRANCE | N°09PA00803

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 06 novembre 2012, 09PA00803


Vu, I, la requête, enregistrée le 20 février 2009 sous le n° 09PA00803, présentée pour l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée (Epamarne), dont le siège est au 5 boulevard Pierre Carle BP 01 Noisiel à Marne la Vallée cedex 2 (77426), par Me Gilli ; l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305143/2 du 5 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a condamné, conjointement et solidairement avec la région Île-de-France, à verser à

la Société de viabilité, assainissement et transports (Sovatra) une somme...

Vu, I, la requête, enregistrée le 20 février 2009 sous le n° 09PA00803, présentée pour l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée (Epamarne), dont le siège est au 5 boulevard Pierre Carle BP 01 Noisiel à Marne la Vallée cedex 2 (77426), par Me Gilli ; l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305143/2 du 5 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a condamné, conjointement et solidairement avec la région Île-de-France, à verser à la Société de viabilité, assainissement et transports (Sovatra) une somme de 99 871,03 euros avec intérêts de retard à compter du 10 janvier 2002 ;

2°) de rejeter la demande de la Société de viabilité, assainissement et transports ;

3°) de mettre à la charge de la société Sovatra une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................................

Vu, II, la requête, enregistrée le 2 mars 2009 sous le n° 09PA01160, présentée pour la région Île-de-France, représentée par le président du conseil régional, par Me Falala ; la région Île-de-France demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305143/2 du 5 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun a condamné solidairement la région Île-de-France et l'Etablissement public d'aménagement de Marne-la-Vallée à payer à la Société de viabilité, assainissement et transports, sous astreinte, la somme de 99 871,03 euros en principal, ainsi que la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et l'a condamnée à garantir l'Epamarne de la condamnation prononcée à son encontre ;

2°) de rejeter la demande de la Société de viabilité, assainissement et transports ;

3°) de mettre à la charge de la Société de viabilité, assainissement et transports une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 modifiée ;

Vu l'arrêté du 17 janvier 1991 relatif aux intérêts moratoires dus en application du code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2012 :

- le rapport de Mme Sanson, rapporteur,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- les observations de Me Sirat, substituant Me Gilli, représentant l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-La-Vallée, et celles de Me Passet, substituant Me Falala, pour la région Île-de-France ;

- et connaissance prise de la note en délibéré enregistrée le 17 octobre 2012, présenté pour l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-La-Vallée, par Me Gilli ;

1. Considérant que les requêtes n° 09PA00803 présentée pour l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-La-Vallée et n° 09PA01160 présentée pour la région Île-de-France sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que, dans le cadre du marché de construction du lycée de Lognes, l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-La-Vallée, maître d'ouvrage délégué de la région Île-de-France, a agréé la Société de viabilité, assainissement et transports en qualité de sous-traitant de l'entreprise Bec Construction, titulaire du marché, au titre du lot n° 19 " aménagements extérieurs, voirie et réseaux divers ", pour un montant de 823 224 euros, par acte spécial annexé à l'acte d'engagement du constructeur ; qu'à la suite de la résiliation du marché par l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-La-Vallée, la Société de viabilité, assainissement et transports a transmis à la société Bec Construction, les 28 juin et 23 juillet 2001, les situations de travaux n° 9 et 10 correspondant aux prestations effectuées sur le chantier pour un montant de 99 871,03 euros ; que l'Epamarne a reçu le 2 octobre 2001 un courrier par lequel la Société de viabilité, assainissement et transports, sur le fondement de la procédure en paiement direct, lui réclamait la somme de 99 871,03 euros et lui interdisait de régler cette somme à la société Bec Construction ; que le paiement a néanmoins été effectué entre les mains du constructeur le 15 octobre 2001 ; que, par courrier du 12 décembre 2001, l'Epamarne a été sommé par la Société de viabilité, assainissement et transports de procéder au mandatement des sommes dues au titre des situations n° 9 et 10 ; que, par ailleurs, la même société a adressé à la société Bec Construction, à sa demande, un mémoire définitif, un état récapitulatif poste par poste des travaux exécutés et un projet de décompte général, faisant apparaître un solde créditeur de 108 226,67 euros ; que la société Sovatra a porté devant le Tribunal administratif de Melun le refus du maître de l'ouvrage de procéder au règlement de sa créance ; que, par le jugement attaqué, le tribunal a condamné solidairement l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-La-Vallée et la région Île-de-France à payer à la société Sovatra la somme demandée ;

Sur la régularité du jugement ;

3. Considérant que, si la région soutient avoir été informée du jour où l'affaire serait appelée à l'audience devant le tribunal administratif moins de sept jours avant celle-ci, en méconnaissance de l'article R. 711-2 du code de justice administrative, il ressort de la minute du jugement contesté que la collectivité a été représentée et a pu présenter ses observations à cette même audience ; que le manquement allégué n'a pas eu d'influence sur la régularité de la procédure suivie devant le tribunal ;

4. Considérant toutefois que, dans un mémoire en défense la région Île-de-France a appelé la société Bec Construction à la garantir des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre ; que le tribunal, qui n'a pas analysé le moyen soulevé à l'appui de ces conclusions, s'est borné à indiquer, sans autre précision, que " par le moyen qu'elle invoque la région Île-de-France n'est pas fondée à demander que la société Bec Construction la garantisse de la condamnation prononcée à son encontre " ; que, par suite, la région Île-de-France est fondée à soutenir que le jugement est insuffisamment motivé et doit être annulé en tant qu'il a statué sur son appel en garantie ;

5. Considérant qu'il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur ces conclusions de la région Île-de-France et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions présentées par la région et l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée devant le tribunal administratif ;

6. Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article 1er de la loi susvisée du 31 décembre 1975 , relative à la sous-traitance, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Au sens de la présente loi, la sous-traitance est l'opération par laquelle un entrepreneur confie par un sous-traité, et sous sa responsabilité, à une autre personne appelée sous-traitant tout ou partie de l'exécution du contrat d'entreprise ou du marché public conclu avec le maître de l'ouvrage " ; que l'article 6 de la même loi dispose que : " Le sous-traitant qui a été accepté et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître de l'ouvrage, est payé directement par lui pour la part du marché dont il assure l'exécution. (...) Ce paiement est obligatoire même si l'entrepreneur principal est en état de liquidation des biens, de règlement judiciaire ou de suspension provisoire des poursuites " ; qu'aux termes de l'article 186 ter du code des marchés publics alors en vigueur " Au vu des pièces justificatives fournies par le sous-traitant et revêtues de l'acceptation du titulaire du marché, l'ordonnateur mandate les sommes dues au sous-traitant et, le cas échéant, envoie à ce dernier l'autorisation définie au I de l'article 178 bis./ Dès réception de ces pièces, l'administration avise le sous-traitant de la date de réception de la demande de paiement envoyée par le titulaire et lui indique les sommes dont le paiement à son profit a été accepté par ce dernier./ Dans le cas où le titulaire d'un marché n'a ni opposé un refus motivé à la demande de paiement du sous-traitant dans le délai de quinze jours suivant sa réception, ni transmis celle-ci à l'administration, le sous-traitant envoie directement sa demande de paiement à l'administration par lettre recommandée avec avis de réception postal ou la lui remet contre un récépissé dûment daté et inscrit sur un registre tenu à cet effet./ L'administration met aussitôt en demeure le titulaire, par lettre recommandée avec avis de réception postal, de lui faire la preuve, dans un délai de quinze jours à compter de la réception de cette lettre, qu'il a opposé un refus motivé à son sous-traitant. Dès réception de l'avis, elle informe le sous-traitant de la date de cette mise en demeure./ A l'expiration de ce délai, au cas où le titulaire ne serait pas en mesure d'apporter cette preuve, l'administration contractante dispose du délai prévu au I de l'article 178 pour mandater les sommes dues aux sous-traitants à due concurrence des sommes restant dues au titulaire ou du délai prévu au I de l'article 178 bis pour envoyer au sous-traitant l'autorisation d'émettre une lettre de change-relevé à due concurrence des sommes restant dues au titulaire " ; qu'aux termes de l'article 178 du même code : " I. - L'administration contractante est tenue de procéder au mandatement des acomptes et du solde dans un délai qui ne peut dépasser trente-cinq jours ; (...) Le délai de mandatement est précisé dans le marché. (...) II. - Le défaut de mandatement dans le délai prévu au I ci-dessus fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant, des intérêts moratoires, à partir du jour suivant l'expiration dudit délai jusqu'au quinzième jour inclus suivant la date du mandatement du principal " ;

7. Considérant que les dispositions précitées ont pour objet de permettre au sous-traitant de s'adresser directement à la personne publique, maître de l'ouvrage, pour obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues au titre du contrat de sous-traitance, lorsque le titulaire du marché ne s'est pas acquitté de ses obligations dans un délai de quinze jours ; qu'il résulte de l'instruction que la société Sovatra a saisi Epamarne d'une demande de paiement direct de ses prestations le 2 octobre 2010, soit en temps utile pour obtenir ce paiement, le solde du marché ayant été réglé à la société Bec construction le 15 octobre suivant ;

8. Considérant que, dès lors le sous-traitant n'était pas tenu par les dispositions précitées de transmettre au maître d'ouvrage des pièces justificatives à l'appui de sa demande de paiement direct, il appartenait à l'Epamarne de mettre en demeure le titulaire du marché d'apporter la preuve qu'il avait opposé un refus motivé à la société Sovatra, sans qu'ait pu y faire obstacle la circonstance, au demeurant non établie, que les pièces dont la production était annoncée dans la demande de paiement direct du 2 octobre 2001 n'étaient pas annexées à ce courrier ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-La-Vallée et la région Île-de-France ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun les a condamnés solidairement à verser à la société Sovatra une somme de 99 871,03 euros au titre du paiement direct du sous-traitant ;

Sur les intérêts ;

10. Considérant qu'il appartenait à l'Epamarne d'adresser à la société Bec construction la mise en demeure prévue à l'article 186 ter précité dès réception, le 3 octobre 2001, de la demande de paiement direct présentée par la société Sovatra; que, par suite, le délai de quinze jours imparti au titulaire de marché pour opposer un refus motivé à ce paiement doit être regardé comme ayant expiré le 18 octobre 2001 ; qu'il résulte des dispositions de l'article 178 du code des marchés publics que le mandatement de la somme de 99 871,03 euros aurait dû intervenir au plus tard le 22 novembre 2001 ; qu'ainsi la société Sovatra a droit aux intérêts contractuels à compter du 23 novembre 2001 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Société de viabilité, assainissement et transports est fondée à demander, par la voie de l'appel incident, la réformation du jugement attaqué en tant qu'il statue sur les intérêts ;

Sur l'appel en garantie présenté par la région Île-de-France :

11. Considérant que la région Île-de-France fait valoir qu'elle a versé à la société Bec construction les sommes correspondant au règlement des sous-traitants et qu'une condamnation les mettant à sa charge reviendrait à lui faire payer deux fois les mêmes prestations ; que, toutefois, il est constant que le paiement au titulaire du marché est intervenu le 15 octobre 2001 au vu d'un décompte général visé par le maître d'oeuvre et approuvé par le maître de l'ouvrage ; qu'il en ressort que la totalité des sommes dues au titre du lot n° 19, sous-traité à la société Sovatra, a été réglée à Bec construction ; que le caractère intangible du décompte fait obstacle à la condamnation de la société Bec construction au remboursement des sommes perçues par elle au titre des prestations réalisées par le sous-traitant ; que, par suite, la région n'est pas fondée à appeler le titulaire du marché à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Société de viabilité, assainissement et transports, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée et à la région Île-de-France la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée et de la région Île-de-France une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature exposés par la Société de viabilité, assainissement et transports ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun en date du 5 novembre 2008 est annulé en tant qu'il statue sur l'appel en garantie présenté par la région Ile-de-France.

Article 2 : L'appel en garantie présenté par la région Île-de-France est rejeté.

Article 3 : La somme de 99 871,03 euros due par l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée et la région Île-de-France portera intérêt au taux légal majoré de deux points à compter du 23 novembre 2001.

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée et la région Île-de-France verseront solidairement à la Société de viabilité, assainissement et transports une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Les conclusions présentées par l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée et par la région Île-de-France tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N°s 09PA00803, 09PA01160


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA00803
Date de la décision : 06/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-03-01-02-03 Marchés et contrats administratifs. Exécution technique du contrat. Conditions d'exécution des engagements contractuels en l'absence d'aléas. Marchés. Sous-traitance.


Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: Mme Michelle SANSON
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : GILLI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-11-06;09pa00803 ?
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