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23/10/2012 | FRANCE | N°12PA00515

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 23 octobre 2012, 12PA00515


Vu la requête, enregistrée le 27 janvier 2012, présentée pour M. Sofiane B, demeurant ...), par Me Novat ; M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1122795/8 en date du 29 décembre 2011 par laquelle le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 27 décembre 2011 par lesquelles le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé ;

2°) d'annuler les décisions du 27 décembre 2011 susmentionnée

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3°) d'enjoindre au préfet de police, sur le fondement des articles L. 911-1 et L...

Vu la requête, enregistrée le 27 janvier 2012, présentée pour M. Sofiane B, demeurant ...), par Me Novat ; M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1122795/8 en date du 29 décembre 2011 par laquelle le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 27 décembre 2011 par lesquelles le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé ;

2°) d'annuler les décisions du 27 décembre 2011 susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, sur le fondement des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, lui accorder le bénéfice des dispositions relatives au délai de départ volontaire mentionné au II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2012, le rapport de M. Boissy, rapporteur ;

1. Considérant que, par des décisions du 27 décembre 2011, le préfet de police a fait obligation à M. B, de nationalité algérienne, de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il était renvoyé ; que, par la présente requête, M. B fait appel de l'ordonnance du 29 décembre 2011 par laquelle le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 27 décembre 2011 susmentionnées ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B a reçu notification des décisions contestées le 27 décembre 2011 à 14h21 et que la dernière page de la demande qu'il a formée, par télécopie, contre ces décisions a été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Paris le 29 décembre 2011 à 14h15, avant l'expiration du délai de quarante-huit heures prévu par le II de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la circonstance que les pièces produites à l'appui de ce recours n'aient été reçues, pour les dernières d'entres elles, que le 29 décembre 2011 à 14h26, reste sans incidence sur la recevabilité de ce recours ; que, dès lors, la demande formée par M. B devant le Tribunal administratif de Paris n'était pas tardif ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme tardive et donc irrecevable et à demander l'annulation de cette ordonnance ;

5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I- L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B est entré régulièrement en France, le 24 octobre 2010, sous couvert d'un visa " Etats Schengen " d'une durée de trente jours ; que, dès lors, le préfet de police ne pouvait légalement décider d'éloigner l'intéressé du territoire français, le 27 décembre 2011, sur le fondement des dispositions précitées du 1° de l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant, toutefois, que lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point ;

9. Considérant qu'en l'espèce, la décision litigieuse trouve son fondement légal dans les dispositions précitées du 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui peuvent être substituées à celles du 1° du II, dès lors en premier lieu que, s'étant maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa, M. B se trouvait dans la situation où, en application du 2° du II de l'article L. 511-1, le préfet pouvait décider qu'il serait éloigné du territoire français, en deuxième lieu que cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et, en troisième lieu, que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation dans l'application de l'une ou de l'autre de ces deux dispositions ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que la décision contestée a été signée par Mme C, à laquelle le préfet de police a délégué sa signature, notamment pour toutes les décisions et arrêtés en matière d'admission ou de refus d'admission au séjour et d'obligation de quitter le territoire français des étrangers, en vertu d'un arrêté n° 2011-00705 du 24 août 2011 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de Paris et de la préfecture de police le 30 août 2010, en cas d'absence ou d'empêchement de M. E, sous-directeur de l'administration des étrangers, de Mme D, adjointe au sous-directeur de l'administration des étrangers, et de M. Sitbon, chef du 8ème bureau ; que M. B n'établit ni même n'allègue que M. E, Mme D et M. Sitbon n'auraient pas été absents ou empêchés ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée manque en fait ;

11. Considérant, en troisième lieu, que la décision contestée vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et notamment ses articles 3 et 8, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle précise également que M. B n'est pas entré régulièrement sur le territoire français et est dépourvu de titre de séjour en cours de validité, qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et enfin que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou des traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'il suit de là que le préfet de police a suffisamment exposé les faits et les considérations de droit sur lesquels il s'est fondé ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, aucun élément du dossier ne permet d'estimer que sa situation personnelle n'aurait pas fait l'objet de la part de l'administration d'un examen particulier ; qu'ainsi, alors même que certaines mentions sont rédigées avec des formules stéréotypées, cette décision répond aux exigences de motivation des actes administratifs ;

12. Considérant, en quatrième lieu, que M. B ne peut utilement invoquer, à l'appui de sa demande tendant à l'annulation d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, ce moyen est inopérant et doit, en tout état de cause, être écarté ;

13. Considérant, en cinquième lieu, que la circonstance que la mention des voies et délais de recours serait ambigüe, à la supposer même établie, reste par elle-même sans incidence sur la légalité de la décision contestée ;

14. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

15. Considérant qu'en se bornant à faire état de son projet de travailler avec son cousin d'abord en qualité de plombier puis au sein d'une société qu'il compte créer avec lui, M. B n'établit nullement que, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, la décision l'obligeant à quitter le territoire français aurait en l'espèce porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise ; que, par suite, M. B n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dans les circonstances de l'espèce, le préfet de police n'a pas davantage entaché la décision contestée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

16. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus, les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de la décision et de ce que le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la gravité des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B doivent être écartés ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de M. B tendant à l'annulation des décisions du 27 décembre 2011 contestées doit être rejetée ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

18. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande tendant à l'annulation des décisions contestées, n'appelle, par lui-même, aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. B doivent être rejetées ;

Sur les conclusions subsidiaires relatives au bénéfice des dispositions relatives au délai de départ volontaire mentionné au II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

19. Considérant, d'une part, qu'il n'appartient pas en principe au juge administratif de faire oeuvre d'administrateur ; que, dès lors les conclusions tendant à ce que la Cour " accorde " à M. B le bénéfice des dispositions relatives au délai de départ volontaire mentionné au II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas recevables et doivent être rejetées ;

20. Considérant, d'autre part, qu'en dehors des cas expressément prévus par les dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à l'administration ; que M. B n'ayant pas demandé l'annulation de la décision lui refusant le bénéfice du délai de départ volontaire, le présent arrêt n'implique dès lors aucune mesure d'exécution en ce sens ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande M. B au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 1122795/8 en date du 29 décembre 2011 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. B et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

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N° 12PA00515


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA00515
Date de la décision : 23/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : NOVAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-10-23;12pa00515 ?
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