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21/06/2012 | FRANCE | N°11PA03353

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 21 juin 2012, 11PA03353


Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2011, présentée pour M. Ahmed A, demeurant ..., par Me Adam-Ferreira ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1008628/3-1 du 22 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 29 avril 2010 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français en fixant le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer un titre de

séjour sous astreinte ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté...

Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2011, présentée pour M. Ahmed A, demeurant ..., par Me Adam-Ferreira ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1008628/3-1 du 22 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 29 avril 2010 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français en fixant le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juin 2012 :

- le rapport de M. Treyssac, rapporteur ;

Considérant que M. A, de nationalité marocaine, né en 1981, et qui est entré en France en 1997 selon ses déclarations, a sollicité le 28 janvier 2010 un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 29 avril 2010, le préfet de police a opposé un refus à sa demande de titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. A relève appel du jugement du 22 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté susmentionné ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

Considérant que la décision attaquée énonce les considérations de fait et de droit sur lesquelles le préfet de police s'est fondé pour rejeter la demande de titre de séjour de M. A ; que cette décision est par suite suffisamment motivée, alors même qu'elle ne précise pas dans tous les détails la situation personnelle et familiale de l'intéressé ; que, par ailleurs il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...). " ;

Considérant que si M. A soutient être entré en France en 1997, il ne l'établit pas ; que pour justifier de sa présence en France au titre de l'année 2000, il produit six pièces bancaires du Crédit du Maroc, un résultat d'examen médical, un courrier France Télécom et un courrier de La Poste ; qu'au titre de l'année 2001, il ne produit que deux échanges de courriers avec un magasin d'électroménager, sept pièces bancaires du Crédit du Maroc, une preuve de dépôt d'un objet recommandé de La Poste, un imprimé de France Télécom concernant un envoi de télécartes défectueuses et une ordonnance médicale ; que les pièces ainsi produites au titre des années 2000 et 2001 sont trop peu nombreuses et insuffisamment probantes pour attester de la réalité de sa présence en France au titre de ces années et, par suite, d'un séjour habituel et ininterrompu sur le territoire français depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; qu'ainsi, pour rejeter sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'erreur de fait en considérant que M. A n'est pas en mesure d'attester de façon probante d'une ancienneté de résidence en France de plus de dix ans ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;

Considérant que si M. A soutient qu'il réside en France depuis plus de dix ans, il ne l'établit pas ; qu'il est célibataire sans charge de famille en France ; que s'il fait valoir que l'ensemble des membres de sa famille, dont certains ont la nationalité française, résident en France, il ne justifie pas de la réalité et de la nature des liens qui l'unissent avec les personnes dont il produit la copie du titre de séjour ou de la carte nationale d'identité ; que s'il produit également l'acte de décès de sa mère au Maroc le 23 janvier 2009 ainsi qu'une attestation de charge de famille, en date du 18 août 2010 au demeurant postérieure à la date de la décision contestée, établie par le président du conseil municipal de Berkane, sa ville d'origine, précisant qu'il n'a aucun soutien au Maroc et que toute sa famille vit en France, ces documents ne suffisent pas à établir qu'il est dépourvu de toute attache dans son pays d'origine ; que, par suite, la décision de refus du 29 avril 2010 n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, cette décision n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire serait illégale en raison de l'illégalité de la décision qui la fonde doit, dès lors, être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : " L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. " ;

Considérant que contrairement aux allégations du requérant, et ainsi qu'il vient d'être dit, la décision portant refus de séjour énonce les circonstances de fait et les considérations de droit propres à la situation de l'intéressé qui en constituent le fondement et répond ainsi aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ; que les prescriptions de la loi du 20 novembre 2007 selon lesquelles l'obligation de quitter le territoire n'a pas à faire l'objet d'une motivation ne peuvent être regardées comme méconnaissant les stipulations des articles 13 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que les motifs de la décision portant obligation de quitter le territoire se confondent avec ceux de la décision portant refus de séjour qui est en l'espèce, suffisamment motivée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui reprend ce qui a été développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés ;

Considérant, enfin, qu'aucune des circonstances ci-dessus mentionnées n'est de nature à faire regarder la décision contestée comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ni de celle de la décision portant obligation de quitter le territoire français pour demander l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi ;

Considérant, en deuxième lieu, que la décision par laquelle le préfet fixe le pays de destination auprès duquel sera reconduit l'étranger s'il ne satisfait pas à l'obligation de quitter le territoire français constitue une mesure de police qui doit, en principe, être motivée en fait comme en en droit en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;

Considérant que si la motivation de fait de la décision fixant le pays de destination ne se confond pas nécessairement avec celle obligeant l'étranger à quitter le territoire, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes du I précité de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le législateur ayant décidé par l'article 41 de la loi susvisée du 20 novembre 2007 de dispenser l'administration de viser la disposition législative qui fonde l'obligation de quitter le territoire, cette dispense s'attache, dans la même mesure, à la décision fixant le pays de destination, fondée sur la même disposition législative ; qu'ainsi, le requérant n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination n'est pas suffisamment motivée en droit, les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ayant pas, quant à elles, à être visées dès lors qu'elles ne s'attachent qu'aux modalités d'exécution de la mesure ; que cette décision est, en outre, suffisamment motivée en fait dès lors qu'elle mentionne que M. A pourra être reconduit d'office à la frontière à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays pour lequel il établit être légalement admissible ; qu'ainsi, la motivation, claire et précise, de la décision fixant la destination de l'éventuel éloignement d'office de M. A satisfait aux exigences de la loi précitée du 11 juillet 1979 ;

Considérant enfin que si M. A soutient que la décision contestée ne mentionne aucun pays de destination, cette décision indique à l'article 3 de son dispositif que l'intéressé pourra être reconduit d'office à la frontière à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays pour lequel il établit être légalement admissible ; le préfet de police doit, dès lors, contrairement à ce que soutient M. A être regardé comme ayant fixé le Maroc comme pays de destination ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 29 avril 2010 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions présentées par M. A en vue de l'annulation de l'arrêté du 29 avril 2010 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions ci-dessus analysées doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 10PA03855

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N° 11PA03353


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA03353
Date de la décision : 21/06/2012
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Jean-François TREYSSAC
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : ADAM-FERREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-06-21;11pa03353 ?
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