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19/06/2012 | FRANCE | N°11PA04802

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 19 juin 2012, 11PA04802


Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 2011, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105625/3-1 en date du 11 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 1er mars 2011 refusant de délivrer à M. Habib A un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de son éloignement et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour ;

2°) de rejeter la demande présent

e par M. A ;

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Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 2011, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105625/3-1 en date du 11 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 1er mars 2011 refusant de délivrer à M. Habib A un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de son éloignement et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mai 2012 :

- le rapport de M. Boissy, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;

Considérant que M. A, de nationalité tunisienne, entré en France, selon ses déclarations, le 21 décembre 1999, s'est marié le 16 mars 2002 avec Mme B, de nationalité française, et a obtenu une carte de séjour temporaire portant la mention " conjoint de français " valable du 17 mars 2004 au 16 mars 2005 ; que la demande de renouvellement de cette carte de séjour temporaire a été rejetée par le PREFET DE POLICE le 6 février 2006 ; que, par un arrêt du 13 mars 2008, la Cour administrative d'appel de Paris a annulé cette décision du 6 février 2006 et ordonné au PREFET DE POLICE de procéder au réexamen de la situation de M. A ; qu'en exécution de cet arrêt, le PREFET DE POLICE, après avoir, les 11 avril, 4 juillet, 24 novembre et 8 décembre 2008, mis l'intéressé en possession d'autorisations provisoires de séjour, a décidé de délivrer à M. A une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " valable du 26 février 2009 au 25 février 2010 ; qu'en mars 2010, M. A a ensuite demandé au PREFET DE POLICE de lui délivrer le titre de séjour prévu par l'article 10 1. a) de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié et sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 1er mars 2011, le PREFET DE POLICE a refusé de délivrer à M. A le titre de séjour sollicité et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire en fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que, par la présente requête, le PREFET DE POLICE fait appel du jugement du 11 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 1er mars 2011 et lui a ordonné de délivrer un titre de séjour à M. A ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié : " 1. Un titre de séjour d'une durée de dix ans, ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle, est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français : a) Au conjoint tunisien d'un ressortissant français, marié depuis au moins un an, à condition que la communauté de vie entre époux n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé sa nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ;

Considérant qu'alors qu'il n'est pas contesté que M. A et son épouse ont une résidence séparée, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que, malgré cette résidence séparée, les époux auraient cependant conservé une communauté de vie à la date de l'arrêté contesté ; que, dans ces conditions, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 1er mars 2011 en se fondant sur la violation du a° du 1. de l'article 10 de l'accord franco-tunisien modifié ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l' exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que si M. A fait état de l'intensité de sa vie privée en France depuis 1999, il n'apporte toutefois aucun élément significatif sur la nature et l'intensité des liens qu'il aurait tissés pendant les années au cours desquelles il a vécu en France et se borne à indiquer qu'il exerce le métier de peintre en bâtiment sans établir le caractère continu ou, à tout le moins, régulier, des emplois qu'il a occupés en cette qualité ; que, par ailleurs, M. A, sans charge de famille, et dont la communauté de vie a cessé avec son épouse, ainsi qu'il a été dit, n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans, et n'apporte pas davantage d'élément particulier sur les liens qu'il entretiendrait avec ses deux frères résidant en France ; que, dans ces circonstances, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. A n'établit ni même n'allègue avoir présenté, à un quelconque moment de la procédure d'examen de sa situation, une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-tunisien, applicable, à l'exclusion de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux ressortissants tunisiens souhaitant obtenir un titre de séjour pour une activité salariée ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le PREFET DE POLICE ait, d'office, accepté d'examiner sa situation sur ce fondement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code précité et l'article 3 de l'accord franco-tunisien est inopérant et doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit-ci dessus, le PREFET DE POLICE, en estimant que l'admission exceptionnelle au séjour de l'intéressé ne répondait pas à des considérations humanitaires et ne se justifiait pas davantage au regard de motifs exceptionnels, n'a pas entaché sa décision refusant de lui délivrer une carte portant la mention " vie privée et familiale " d'une erreur manifeste d'appréciation ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit par suite être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des dispositions des articles L. 312-1, L. 312-2 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le PREFET DE POLICE n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent du bénéfice de ces dispositions ou qui, ayant présenté une demande sur le fondement de l'article L. 313-14 de ce code, justifient d'une résidence habituelle en France depuis plus de dix ans ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. A n'a présenté aucune demande tendant à obtenir une carte de séjour temporaire sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne justifie pas davantage résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté compte-tenu, en particulier, de l'absence de documents probants pour ce qui concerne les années 1999, 2000 et 2001 ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de consultation de la commission de titre de séjour est inopérant et doit être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, que l'arrêté contesté, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquels il se fonde, n'est entaché d'aucune insuffisance de motivation au regard de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 1er mars 2011 et lui a ordonné de délivrer à M. A un titre de séjour et à demander l'annulation de ce jugement et le rejet des demandes de M. A ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement n° 1105625/3-1 du 11 OCTOBRE 2011 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. A devant le Tribunal administratif de Paris sont rejetées.

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N° 11PA04802


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA04802
Date de la décision : 19/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: M. ROUSSET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-06-19;11pa04802 ?
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