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31/05/2012 | FRANCE | N°10PA04737

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 31 mai 2012, 10PA04737


Vu le recours, enregistré le 17 septembre 2010, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler les article 1 à 3 du jugement n° 0711610/2-3 du 20 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a réduit à 16 % le taux du prélèvement libératoire auquel M. Jean-Michel A a été soumis, au titre de l'année 2004, à raison de la cession de parts dans les sociétés Parfon et Wilson Montjoie et déchargé l'intéressé à due concurrence ;

2°) de rétablir à 33,1/3 % le taux du prélèveme

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Vu le recours, enregistré le 17 septembre 2010, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler les article 1 à 3 du jugement n° 0711610/2-3 du 20 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a réduit à 16 % le taux du prélèvement libératoire auquel M. Jean-Michel A a été soumis, au titre de l'année 2004, à raison de la cession de parts dans les sociétés Parfon et Wilson Montjoie et déchargé l'intéressé à due concurrence ;

2°) de rétablir à 33,1/3 % le taux du prélèvement libératoire auquel M. Jean-Michel A a été soumis, au titre de l'année 2004, sur le fondement de l'article 244bis A du code général des impôts ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention conclue entre la France et la Suisse le 9 septembre 1966 en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2012 :

- le rapport de M. Lercher,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

- et les observations de Me Dadi pour M. A ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Jean-Michel A, résident fiscal en Suisse, a été assujetti, en 2004, au prélèvement prévu à l'article 244 bis du code général des impôts à raison du profit qu'il a réalisé à l'occasion de la cession, en octobre 2004, de titres de participations dans les sociétés françaises à prépondérance immobilière, Parfon, soumise à l'impôt sur les sociétés, et Wilson Montjoie, soumise aux dispositions de l'article 8 du même code ; qu'après s'être acquitté de l'impôt sur les plus-values immobilières afférentes à ces cessions, l'intéressé a demandé, par réclamation contentieuse en date du 27 décembre 2006, le remboursement partiel du prélèvement auquel il a été assujetti au motif que le taux d'imposition de 16 % aurait du être appliqué à ces plus-values immobilières et non celui de 33,33 % ; que par décision en date du 16 mai 2007, le service a rejeté sa demande ; que par jugement du 20 mai 2010, le Tribunal administratif de Paris, faisant droit à la demande de M. A, a réduit à 16 % le taux du prélèvement libératoire auquel ce contribuable a été soumis et déchargé l'intéressé à due concurrence, au motif que les stipulations du paragraphe 4 de l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse font obstacle à l'application de l'article 244 bis du code général des impôts ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT fait appel de ce jugement ;

Considérant que si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition ; que, par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification ; qu'il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 150 U du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " I- (...) les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH " ; qu'aux termes de l'article 150 UB du même code dans sa version alors en vigueur : " I. - Les gains nets retirés de cessions à titre onéreux de droits sociaux de sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, dont l'actif est principalement constitué d'immeubles ou de droits portant sur ces biens, sont soumis exclusivement au régime d'imposition prévu au I et au 1° du II de l'article 150 U (...) " ; qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 30 décembre 2003 de finances pour 2004 : " IV. - Les dispositions de l'article 150 UB du même code s'appliquent aux gains nets tirés de cessions à titre onéreux de valeurs mobilières et de droits sociaux de sociétés non cotées soumises à l'impôt sur les sociétés dont l'actif satisfait aux conditions prévues au I dudit article, acquis avant le 21 novembre 2003 et cédés entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2004 (...) " ; qu'aux termes, enfin, de l'article 200 B dudit code dans sa rédaction issue de la loi de finances précitée pour 2004 : " Les plus-values réalisées dans les conditions prévues aux articles 150 U à 150 UB sont imposées au taux forfaitaire de 16 % " ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 244 bis A du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux impositions litigieuses : " I. Sous réserve des conventions internationales, les personnes physiques qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B, (...) sont soumis à un prélèvement d'un tiers sur les plus-values résultant de la cession d'immeubles, de droits immobiliers ou d'actions et parts de sociétés non cotées en bourse dont l'actif est constitué principalement par de tels biens et droits. (...) Par dérogation au premier alinéa, les personnes physiques et associés personnes physiques de sociétés ou groupements dont les bénéfices sont imposés au nom des associés, résidents d'un Etat membre de la Communauté européenne sont soumis à un prélèvement de 16 % (...) " ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes des articles 200 B et 244 bis A précités du code général des impôts que le taux de prélèvement de 16 % étant réservé aux résidents de France ou d'un Etat membre de la Communauté européenne, M. A, résident suisse, ne peut prétendre à en bénéficier ; que, par suite, au regard des dispositions de droit interne, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a fait application du taux de 33,1/3 % ;

Considérant, cependant, qu'aux termes de l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 modifiée : " 1. Les gains provenant de l'aliénation des biens immobiliers, tels qu'ils sont définis à l'alinéa 1er du paragraphe 2 de l'article 6, sont imposables dans l'Etat contractant où ces biens sont situés. / 2. Les gains provenant de l'aliénation d'actions, parts ou autres droits dans une société, une fiducie ou une institution comparable, dont l'actif ou le patrimoine est principalement constitué, directement ou indirectement, de biens immobiliers définis au paragraphe 2 de l'article 6 et situés dans un Etat contractant ou de droits portant sur de tels biens sont imposables dans cet Etat. (...) / 4. Les gains provenant de l'aliénation des biens mentionnés aux paragraphes 1, 2 et 3, tels qu'ils sont retenus pour l'assiette de l'impôt sur les plus-values, sont calculés dans les mêmes conditions, que le bénéficiaire soit résident de l'un ou l'autre Etat contractant. Si ces gains sont soumis dans un Etat contractant à un prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, ce prélèvement est calculé dans les mêmes conditions, que le bénéficiaire soit résident de l'un ou de l'autre Etat contractant (...) " ; que ces stipulations imposent que le calcul du prélèvement libératoire soit effectué par l'application d'un même taux à une même assiette ; que ledit calcul ainsi entendu doit donc être effectué dans les mêmes conditions que le bénéficiaire soit résident de l'un ou de l'autre Etat contractant ; que le § 4 de l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 modifiée fait ainsi obstacle à l'application du taux d'un tiers réservé, en vertu des dispositions précitées de l'article 244 bis A du code général des impôts, aux personnes physiques qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France ; que, contrairement à ce que fait valoir le ministre, la clause de non discrimination prévue à l'article 26 de la convention fiscale franco-suisse ne peut être interprétée comme faisant obstacle à l'application des stipulations de l'article 15 de la même convention ; que la circonstance que les résidents fiscaux en France sont également imposés au titre des contributions sociales est sans effet sur la situation de M. A, l'imposition au titre des contributions sociales n'étant pas visée par les stipulations de l'article 15 et l'intéressé ne bénéficiant pas, en tout état de cause, de la couverture sociale en France correspondant à cette imposition ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. A et réduit de 33,1/3 à 16 % le taux du prélèvement libératoire auquel ce dernier a été soumis, au titre de l'année 2004, sur le fondement de l'article 244 bis A du code général des impôts, à raison de la cession de parts dans les sociétés Parfon et Wilson Montjoie ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de M. A et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E:

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 10PA04737


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA04737
Date de la décision : 31/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Plus-values de cession de droits sociaux, boni de liquidation.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: M. Alain LERCHER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : STEHLIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-05-31;10pa04737 ?
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