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26/04/2012 | FRANCE | N°11PA03071

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 26 avril 2012, 11PA03071


Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2011, présentée pour M. Laurent A, demeurant ..., par Me Maruani ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0910242/3-3 du 10 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à réparer le préjudice qu'il estime avoir subi du fait de sa chute d'un hublot de plafond dans les locaux de l'hôpital Tenon le 11 août 2007 ;

2°) de déclarer l'AP-HP responsable des conséquences dommageables de son accident ;

) de surseoir à statuer sur l'indemnisation définitive de ses préjudices dans l'atte...

Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2011, présentée pour M. Laurent A, demeurant ..., par Me Maruani ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0910242/3-3 du 10 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à réparer le préjudice qu'il estime avoir subi du fait de sa chute d'un hublot de plafond dans les locaux de l'hôpital Tenon le 11 août 2007 ;

2°) de déclarer l'AP-HP responsable des conséquences dommageables de son accident ;

3°) de surseoir à statuer sur l'indemnisation définitive de ses préjudices dans l'attente du rapport d'expertise du docteur B, expert désigné par ordonnance du Tribunal administratif de Paris en date du 7 octobre 2009 ;

4°) de lui allouer une indemnité provisionnelle de 40 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 avril 2008 ;

5°) de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 avril 2012 :

- le rapport de Mme Renaudin, rapporteur,

- les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public,

- et les observations de Me Maruani, pour M. A et celles de Me Turschwell, pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, au cours d'une visite à sa mère hospitalisée à l'hôpital Tenon, le 11 août 2007, a accédé au toit-terrasse situé au premier étage du bâtiment Lavoisier de cet établissement pour y fumer et a fait une chute de plusieurs mètres, le hublot de plafond sur lequel il s'appuyait s'étant brisé ; qu'il s'en est suivi de graves dommages corporels ; que M. A imputant ces dommages à un défaut d'entretien de ce hublot, a recherché la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) devant le Tribunal administratif de Paris ; que par jugement du 10 mai 2011 dont l'intéressé relève régulièrement appel, ce tribunal a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation de ses préjudices ; que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne intervient en appel pour demander la condamnation de l'AP-HP à lui verser la somme de 27 673, 79 euros au titre des débours qu'elle a exposés dans l'intérêt de M. A ;

Sur l'irrégularité du jugement attaqué :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, le juge administratif, qui dirige l'instruction, est tenu de mettre en cause la caisse de sécurité sociale qui a servi des prestations à l'assuré social victime d'un accident dont il impute la responsabilité à un tiers ; qu'il résulte de l'instruction que, devant le Tribunal administratif de Paris, M. A demandait à l'AP-HP la réparation du préjudice qu'il avait subi du fait de l'accident dont il avait été victime le 11 août 2007 ; que le tribunal qui, ainsi qu'il vient d'être dit, était tenu, en vertu de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, de procéder à la mise en cause de la caisse de sécurité sociale dont dépendait l'intéressé, n'a pas communiqué la demande de ce dernier à cette caisse ; qu'il y a lieu, pour ce motif d'irrégularité, d'annuler le jugement attaqué ;

Considérant que la Cour a mis en cause la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur l'affaire présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur les conclusions aux fins d'indemnisation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par l'AP-HP à la requête de M. A et à la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne ;

Considérant qu'il appartient à l'usager victime d'un dommage de rapporter la preuve du lien de causalité entre l'ouvrage public et le dommage dont il se plaint ; que la collectivité en charge de l'ouvrage public doit alors, pour que sa responsabilité ne soit pas retenue, établir que l'ouvrage public faisait l'objet d'un entretien normal ou que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'espace où M. A a été fumer, alors qu'il avait connaissance des panneaux interdisant de fumer dans l'ensemble de l'hôpital, est un toit-terrasse couvert de graviers et comportant une série de hublots éclairant les pièces situées en dessous, qui n'est donc pas aménagé pour s'y tenir ; que si cet espace était accessible au moment des faits, il fallait, à partir d'un escalier, enjamber une fenêtre à vantaux coulissants pour y descendre ; qu'à supposer que, comme il l'a déclaré à l'huissier auquel il a demandé de dresser un constat le 8 novembre 2007, M. A y ait vu des infirmières qui fumaient, et que ce lieu ait fait l'objet d'un usage inapproprié par le personnel de l'établissement hospitalier, il ne pouvait, par sa nature et ses difficultés d'accès, être destiné à accueillir des usagers du service hospitalier ; que le constat d'huissier précité produit par M. A, s'il relève la présence de mégots en nombre, ne démontre aucunement que ce lieu était utilisé par des usagers ; que, compte tenu des caractéristiques du lieu, M. A ne pouvait ignorer qu'il n'était pas autorisé à y pénétrer ; que le requérant a ainsi fait un usage anormal de l'ouvrage public constitué par cet espace ; qu'un tel comportement est constitutif d'une première faute ; que, par ailleurs, si M. A incrimine la défectuosité du hublot de plafond sur lequel il s'est assis et qui a cédé sous son poids, entraînant sa chute, un tel dispositif en plexiglas n'est manifestement pas destiné non plus à l'usage qu'il en a fait, M. A ne pouvant ignorer, compte tenu en outre de sa corpulence et des caractéristiques visibles de l'ouvrage, les risques qu'il prenait en s'y asseyant ; qu'au demeurant, le requérant ne démontre aucunement qu'il se serait seulement assis sur le rebord dudit hublot, alors que dans le constat susmentionné, l'huissier relate que M. A lui a exposé s'être assis sur le skydôme ; que l'utilisation du toit-terrasse où il n'aurait pas dû se trouver et, de surcroît, du hublot de plafond, résultent, bien qu'aucun panneau ne signalait l'interdiction d'accéder à cet espace et de s'asseoir sur les hublots, d'usages anormaux des ouvrages, exclusivement imputables à la victime, dont l'imprudence est en l'espèce de nature à exonérer totalement l'AP-HP de toute responsabilité ;

Considérant que ni la pose de serrures sur les vantaux coulissants de la fenêtre qui permettait d'accéder au toit-terrasse, ni le remplacement des châssis vitrés des hublots, ultérieurement à l'accident en cause, ce dernier ayant au demeurant été rendu nécessaire en raison des dégradations commises par le frère du requérant quelques jours après la chute de ce dernier, ne sont davantage de nature à révéler une faute de l'établissement hospitalier ;

Considérant que M. A ne peut utilement invoquer, en l'absence de travaux sur le toit-terrasse au moment des faits, les dispositions des articles R. 4534-86 et suivants du code du travail au soutien du moyen tiré de ce que l'AP-HP aurait méconnu ses obligations de sécurité, les dispositions en cause étant relatives aux prescriptions techniques de protection des travailleurs dans l'exécution des travaux sur des toitures ; qu'il ne peut pas davantage utilement faire état des indications contenues dans une brochure de l'INRS (Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles) relatives à la solidité des hublots de plafond, qui n'ont aucun caractère normatif ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris, tendant, d'une part, à ce que l'AP-HP soit déclarée responsable des conséquences dommageables de son accident, et, d'autre part, à ce qu'elle soit condamnée à lui verser une indemnité provisionnelle dans l'attente qu'il soit statué sur l'indemnisation définitive de ses préjudices après que l'expertise diligentée par ordonnance du Tribunal administratif de Paris en date du 7 octobre 2009 ait été réalisée, doit en conséquence être rejetée ; que, de même, les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne tendant à la condamnation de l'AP-HP à lui verser la somme de 27 673, 79 euros au titre de ses débours doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'AP-HP, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes demandées tant par M. A que par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'AP-HP et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 10 mai 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : La demande présentée à la Cour par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne est rejetée.

Article 4 : M. A versera à l'AP-HP la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 10PA03855

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N° 11PA03071


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA03071
Date de la décision : 26/04/2012
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Mathilde RENAUDIN
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : MARUANI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-04-26;11pa03071 ?
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