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05/04/2012 | FRANCE | N°11PA01478

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 05 avril 2012, 11PA01478


Vu la requête, enregistrée le 23 mars 2011, présentée pour Mlle Amoin Brigitte A, demeurant ..., par Me Bruézière, avocat ; Mlle A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1022351/8 du 21 février 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 29 décembre 2010 décidant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lu

i délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai d...

Vu la requête, enregistrée le 23 mars 2011, présentée pour Mlle Amoin Brigitte A, demeurant ..., par Me Bruézière, avocat ; Mlle A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1022351/8 du 21 février 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 29 décembre 2010 décidant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois semaines à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter d'un délai de trois semaines suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 88-1 ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 modifiés ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mars 2012 :

- le rapport de M. Niollet, rapporteur ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable en l'espèce : " L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3º Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français exécutoire prise depuis au moins un an (...) " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Amoin Brigitte A qui est de nationalité ivoirienne et est née le 1er janvier 1984 à Tokro Bocanda (Côte d'Ivoire) a fait l'objet, le 4 novembre 2008, d'une décision du préfet de police rejetant sa demande de titre de séjour, assortie d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois, qui lui a été notifiée le 10 novembre 2008 ; que l'obligation de quitter le territoire français étant exécutoire depuis au moins un an à la date à laquelle le préfet de police a décidé qu'elle serait reconduite à la frontière, elle entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur les conclusions à fin d'annulation dirigées contre la reconduite à la frontière à la frontière :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 7 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 susvisée relatif au "départ volontaire" : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les Etats membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les Etats membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. (...) / 4. S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours " ; qu'aux termes de l'article 8 de la même directive intitulé " éloignement " : " 1. Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n 'a été accordé pour un départ volontaire conformément à l'article 7, paragraphe 4, ou si l 'obligation de retour n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7. / 2. Si un État membre a accordé un délai de départ volontaire conformément à l'article 7, la décision de retour ne peut être exécutée qu'après expiration de ce délai, à moins que, au cours de celui-ci, un risque visé à l'article 7, paragraphe 4, apparaisse. / 3. Les États membres peuvent adopter une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l'éloignement " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la mesure d'obligation de quitter le territoire français dont Mlle A a fait l'objet le 4 novembre 2008 comportait un délai de retour d'un mois à compter de sa notification, le 10 novembre 2008 ; que Mlle A ne conteste pas qu'elle a été prise conformément aux exigences de forme et de fond prévues par les dispositions de l'article 7 de la directive ; que l'obligation de retour faite à Mlle A par cette décision n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7 de la directive ; qu'ainsi, en application des dispositions précitées de l'article 8 de la directive, le préfet de police n'était, contrairement à ce qu'elle soutient, pas tenu d'accorder un nouveau délai de départ volontaire à Mlle A lorsqu'il a pris l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant, que Mlle A n'établit pas la continuité de son séjour en France depuis 1999 ; qu'elle s'y maintient en situation irrégulière depuis la mesure de refus de titre de séjour et d'éloignement précitée prise à son encontre le 4 novembre 2008 et dont la légalité a été confirmée par un arrêt de la Cour le 22 septembre 2010 ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier qu'elle est célibataire, sans charge de famille en France, et qu'elle ne justifie pas être démunie de toute attache familiale dans son pays d'origine où résident ses frères et soeurs ; que, dans ces conditions et alors même qu'elle aurait été accueillie par un ami de sa famille qui aurait subvenu à ses besoins jusqu'en 2007, que ses parents sont décédés, qu'elle a suivi des cours de français et qu'elle est en contrat d'apprentissage en vue d'obtenir un certificat d'aptitude professionnelle de coiffure, l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, en méconnaissance des stipulations précitées ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que ce dernier texte énonce que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

Considérant que Mlle A ne fait état d'aucun élément probant permettant d'établir qu'en cas de retour en Côte d'Ivoire, elle y serait personnellement menacée ou exposée à des risques de traitements prohibés par les dispositions précitées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mlle A est rejetée.

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N° 11PA01478


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA01478
Date de la décision : 05/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. GOUES
Avocat(s) : BRUEZIERE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-04-05;11pa01478 ?
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