La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/03/2012 | FRANCE | N°11PA02025

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 30 mars 2012, 11PA02025


Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2011, présentée pour Mme Manana B épouse A, demeurant chez M. C ..., par Me Lipietz ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004334-1 en date du 23 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mars 2010 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a retiré son récépissé de demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois en fixant le pays dont elle a la nationalité comme pays de

destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du V...

Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2011, présentée pour Mme Manana B épouse A, demeurant chez M. C ..., par Me Lipietz ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004334-1 en date du 23 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mars 2010 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a retiré son récépissé de demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois en fixant le pays dont elle a la nationalité comme pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son avocat au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve pour ce dernier de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

...............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mars 2012 :

- le rapport de Mme Pons-Deladrière ;

- les conclusions de M. Blanc, rapporteur public ;

- les observations de Maître Lipietz ;

Considérant que, par jugement du 30 juin 2009, le Tribunal administratif de Melun a annulé la décision implicite de refus de titre de séjour, opposée par le préfet du Val-de-Marne à Mme A, ressortissante géorgienne et a enjoint audit préfet de délivrer à l'intéressée un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de 75 jours ; que, le 20 juillet 2009, le préfet du Val-de-Marne a délivré à la requérante un récépissé de demande de titre de séjour qui a été renouvelé jusqu'au 28 avril 2010 ; que, par arrêté du 19 mars 2010, le préfet du Val-de-Marne a retiré à Mme A son récépissé de demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois ; que Mme A relève appel du jugement du 23 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté susmentionné ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, que Mme A soutient que le tribunal n'a pas répondu à son moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français ne pouvait pas être prise sans décision expresse de refus de titre de séjour ; qu'il ressort toutefois du jugement attaqué que le tribunal a répondu au moyen en cause en visant les dispositions de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en mentionnant qu'il résultait des termes mêmes de cet article que le préfet peut assortir une décision de retrait d'un récépissé d'une demande de carte de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que contrairement aux allégations de Mme A, le jugement attaqué est suffisamment motivé ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation dudit jugement ne peut qu'être écarté ;

Considérant que si Mme A reproche au tribunal d'avoir inversé la charge de la preuve, une telle circonstance est en tout état de cause sans incidence sur la régularité du jugement ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne :

Considérant que, par un arrêté du 26 août 2009, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du Val-de-Marne du 19 au 31 août 2009, le préfet du

Val-de-Marne a donné à Mme Dominique Fournier délégation pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties de l'obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le signataire de la décision attaquée n'aurait pas été titulaire d'une délégation régulière, manque en fait ;

Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales... "

Considérant que Mme A fait valoir que le préfet était tenu de l'inviter à présenter ses observations dès lors que le retrait de son récépissé de demande de titre de séjour doit être regardé comme un retrait de titre de séjour ; que, toutefois, le récépissé en cause ne lui a été délivré que dans l'attente de l'examen de la demande de titre de séjour qu'elle avait déposée; qu'en vertu de leurs termes mêmes, les dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ne peuvent pas être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé ; que, par suite, celle-ci ne peut utilement soutenir que le préfet du Val-de-Marne a méconnu ces dispositions ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa (...) ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes de l'article précité que le préfet peut assortir une décision de retrait d'un récépissé d'une demande de carte de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français ne pouvait pas être prise sans une décision expresse de refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté ;

Considérant que Mme A fait valoir qu'en lui délivrant un récépissé de demande de carte de séjour le 20 juillet 2009, le préfet du Val-de-Marne n'a pas exécuté le jugement du 30 juin 2009 qui lui avait enjoint de délivrer un titre de séjour dans un délai de soixante quinze jours ; que, toutefois, l'autorité de chose jugée qui s'attache à ce jugement, non frappé d'appel, ne dispensait pas le préfet du Val-de-Marne d'examiner les circonstances de droit et de fait existant à la date à laquelle il a statué sur la demande ; qu'il est constant qu'à la date de la décision attaquée le mari de la requérante ne se trouvait plus en situation régulière sur le territoire, sa carte de séjour temporaire étant venue à expiration avant la fin du délai imparti par le juge, sans que la requérante établisse qu'il en avait demandé le renouvellement en temps utile ; que, dans ces conditions, le préfet du Val-de-Marne a pu, sans méconnaître l'autorité de la chose jugée, procéder à une nouvelle appréciation du droit au séjour de l'intéressée ;

Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant, ainsi qu'il vient d'être dit, qu'il appartenait au préfet d'examiner la situation de l'intéressée à la date de son arrêté du 19 mars 2010 ; qu'à cette date l'époux de la requérante n'étant plus en possession d'une carte de séjour en qualité d'étranger malade, Mme A ne pouvait plus elle-même prétendre à la délivrance d'un titre de séjour pour l'accompagner ; que si elle fait valoir que son époux a sollicité son admission au séjour sur le fondement d'un autre article du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est constant que son époux n'était pas en situation régulière à la date de l'arrêté attaqué ; que, par suite, Mme A n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Val-de-Marne a entaché son arrêté d'une erreur de fait ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que Mme A fait valoir que son époux est en attente d'une décision suite à la demande d'admission au séjour qu'il a formulée soit en qualité d'étranger malade soit en qualité de salarié ; que leurs deux premiers enfants sont scolarisés en France et que le troisième y est né ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, l'époux de l'intéressée était en situation régulière sur le territoire français ; qu'ainsi, rien ne s'oppose à ce qu'elle reconstitue sa cellule familiale dans son pays d'origine avec son époux et leurs trois enfants ; que, par suite, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris ; qu'ainsi, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1° de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : "Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale" ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que Mme A fait valoir que ses deux premiers enfants sont scolarisés en France ; que la possibilité pour ses enfants de rester avec le parent en situation régulière ou de partir avec l'autre parent dans le pays d'origine priverait manifestement ses enfants d'un de leurs deux parents ; que, toutefois, comme il a été dit précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'époux de la requérante était en situation régulière à la date de l'arrêté attaqué ; qu'ainsi, rien ne s'oppose à ce que l'intéressée reparte avec son époux et ses trois enfants dans son pays d'origine où ses deux premiers enfants sont nés et pourront poursuivre leur scolarité ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la violation de l'article 3-1° de la convention des droits de l'enfant susvisée doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal Administratif de Melun a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

''

''

''

''

2

N° 11PA02025


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA02025
Date de la décision : 30/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-05-03 Étrangers. Réfugiés et apatrides. Effets de l'octroi de la qualité de réfugié.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: Mme Geneviève PONS DELADRIERE
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : LIPIETZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-03-30;11pa02025 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award