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22/03/2012 | FRANCE | N°10PA01183

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 22 mars 2012, 10PA01183


Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2010, présentée pour M. Lucien A, demeurant ..., par Me Belouis, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601256/2-3 du 21 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2001, 2002 et 2003 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euro

s au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2010, présentée pour M. Lucien A, demeurant ..., par Me Belouis, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601256/2-3 du 21 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2001, 2002 et 2003 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2012 :

- le rapport de M. Niollet, rapporteur,

- et les conclusions de M. Gouès, rapporteur public ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Lucien A s'est vu notifier des redressements pour les années 2001 à 2003, au titre des revenus distribués, à la suite d'une vérification de la comptabilité de la société SDF Matériel qui exerce une activité d'installation et d'aménagement de matériels de boulangerie et dont il avait été le dirigeant ; qu'au cours de ce contrôle, l'administration avait notamment remis en cause la déduction, pour la détermination des résultats de la société, de charges de réception et de location de véhicules utilitaires avec chauffeur ; qu'elle a regardé le rehaussement d'assiette en résultant comme constitutif de revenus distribués en application du 1 de l'article 109 du code général des impôts ; qu'ayant interrogé la société dans le cadre de la procédure prévue par les dispositions de l'article 117 du même code, et celle-ci ayant désigné M. A comme le bénéficiaire de ces distributions, l'administration les a soumises à l'impôt entre ses mains ; que M. A relève appel du jugement du 21 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires qui ont été ainsi établies ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

Considérant qu'il résulte de la proposition de rectification du 12 décembre 2004 qu'elle comporte l'indication des impositions et de la période d'imposition concernées, ainsi que des bases d'imposition retenues, et énonce les éléments de droit et de fait fondant la remise en cause de la déduction des charges de la société SDF Matériel ; qu'elle précise en particulier que les frais de réception ne peuvent être considérés comme exposés dans l'intérêt de l'entreprise en l'absence de renseignement relatif aux contrats conclus grâce à ces invitations, et que le fait de louer des véhicules utilitaires n'est pas justifié par les intérêts de l'exploitation, la société disposant de véhicules en nombre suffisant ; qu'elle comporte en annexe la liste de ces charges et leur montant ; qu'elle indique enfin que la société a désigné M. A comme le bénéficiaire des distributions correspondantes ; qu'ainsi, alors même qu'elle n'était pas accompagnée d'une copie de la proposition de rectification adressée à la société, cette proposition permettait à M. A de prendre connaissance des redressements en litige, et de présenter ses observations de manière entièrement utile ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition légale ou règlementaire en vigueur ne s'opposait à ce que l'administration exerçât son droit de communication auprès de la SARL Transactions Automobiles qui avait donné en location à la société SDF Matériel les véhicules mentionnés ci-dessus, après avoir notifié les redressements à cette dernière société et à M. A ; que M. A, qui a d'ailleurs fait l'objet d'un contrôle sur pièces de son dossier, ne saurait se plaindre de ce que l'administration n'aurait pas engagé avec lui un débat oral et contradictoire sur les éléments qu'elle avait ainsi obtenus de la SARL Transactions Automobiles ;

Considérant, en troisième lieu, que M. A, à l'égard de qui l'administration a mis en oeuvre la procédure de redressement contradictoire, ne saurait utilement invoquer le principe des droits de la défense ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant, d'une part, qu'aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) " ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du même code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutient M. A, la plupart des factures relatives aux frais de réception dont l'administration a remis en cause la déduction, telles qu'elles sont présentées dans le procès-verbal de constat d'huissier qu'il produit, ne mentionnent pas les noms des invités de la société ; que les autres factures, telles que présentées dans ce procès-verbal, ne comportent que des annotations vagues ; que les noms d'invités mentionnés dans ce même procès-verbal ont en grande partie été indiqués à l'huissier par M. A lui-même au cours du constat ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant que ces frais n'ont pas été exposés dans l'intérêt de la société ; qu'elle était donc fondée à en refuser la déduction ;

Considérant, en deuxième lieu, que, pour justifier la remise en cause de la déduction des charges exposées pour la location de deux véhicules utilitaires avec chauffeur, le ministre se fonde dans le dernier état de ses écritures sur les éléments obtenus par l'administration dans l'exercice de son droit de communication, dont il résulte que la SARL Transactions Automobiles qui avait délivré les factures correspondantes, avait pour activité la vente de véhicules et non la location, qu'elle ne disposait pas de véhicules utilitaires, qu'à l'exception de son gérant, elle n'employait aucun salarié et en particulier aucun chauffeur, que la mention " avec chauffeur " n'apparaissait pas sur les exemplaires des factures qu'elle avait conservés et qu'elle n'avait pas encaissé, ni enregistré en comptabilité les produits correspondants ; que M. A qui se borne à soutenir, sans précision, que, les six véhicules utilitaires de la société étaient affectés aux dépannages effectués par ses techniciens, que ses deux autres véhicules étaient utilisés par ses commerciaux et que la location était financièrement avantageuse, n'a pas contesté la réalité des éléments ainsi avancés par le ministre et n'a produit aucune pièce de nature à établir la réalité des prestations facturées ; qu'ainsi, il n'apporte pas de justification suffisante de la réalité de ces prestations ; que l'administration était donc fondée à refuser la déduction des charges correspondantes ;

Considérant, en troisième lieu, que, pour établir que M. A a effectivement appréhendé les distributions correspondant aux dépenses mentionnées ci-dessus dont la déduction a été remise en cause, le ministre fait valoir que la société l'a désigné dans le cadre de la procédure de l'article 117 du code général des impôts, et soutient sans être contredit qu'il était le président directeur général de la société, qu'il détenait avec son épouse 67 % du capital et que sa fille en détenait 20 % ; qu'en se référant à ces dernières circonstances qui ne sont pas contestées par M. A, le ministre établit qu'il était le maitre de l'affaire, et apporte la preuve de l'appréhension des distributions en discussion ; que, dans ces conditions, M. A ne saurait utilement faire état du différend qui l'a opposé à l'acquéreur de la société après la cession de ses titres survenue le 14 mai 2003, ni invoquer la référence 4-J-1121, n° 15, de la documentation administrative de base à jour au 1er novembre 1995 qui ne comporte pas une interprétation différente de la loi fiscale ; que, s'il soutient que, compte tenu de cette cession, il n'aurait plus été le maitre de l'affaire après le 1er janvier 2003, il ne conteste pas en être resté le directeur commercial jusqu'au 31 décembre 2003, date de son licenciement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des impositions contestées ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 10PA01183

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA01183
Date de la décision : 22/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-082 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. GOUES
Avocat(s) : BELOUIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-03-22;10pa01183 ?
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