Vu la requête, enregistrée le 8 février 2011, présentée pour Mme Maliheh A, demeurant ..., par Me Kidari ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'infirmer le jugement n° 0814434/6-3 en date du 10 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite née le 1er avril 2008 par laquelle le ministre de la santé a rejeté son recours hiérarchique et rejeté ainsi sa demande d'inscription au tableau de l'ordre des sages-femmes et d'autorisation à exercer la profession de sage-femme sur le territoire français, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à l'administration de procéder à son inscription sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir, enfin, et à titre subsidiaire, à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui délivrer une autorisation d'exercer la profession de sage-femme sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir ;
2°) d'annuler la décision implicite de refus en date du 1er avril 2008 de la demande d'autorisation d'inscription au tableau de l'ordre des sages-femmes de Paris et d'autorisation d'exercer la profession de sage-femme en France, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;
3°) d'enjoindre à l'administration de lui accorder une autorisation d'exercer la profession de sage-femme en France sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) d'enjoindre à l'administration de lui accorder son inscription au tableau de l'ordre des sages-femmes de Paris sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu les directives 80/154/CEE et 80/155/CEE du 21 janvier 1980 du Conseil des communautés européennes ;
Vu la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 93/1420 du 31 décembre 1993 sur la liberté d'établissement ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 février 2012 :
- le rapport de M. Treyssac, rapporteur,
- et les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public ;
Considérant que Mme A, ressortissante d'origine iranienne et de nationalité française depuis le 19 mai 2005, a intégré en 1988 l'école des sages-femmes de la faculté libre de médecine de Lille en qualité de candidate étrangère, sans passer le concours d'entrée ; que le 21 septembre 1992 elle a obtenu un certificat de scolarité, le diplôme d'État de sage-femme ne pouvant pas lui être délivré en raison de son statut extracommunautaire ; qu'elle a exercé des fonctions d'aide-soignante et d'auxiliaire de puériculture dans plusieurs établissements publics de santé français entre 1999 et 2006, le certificat de la requérante étant enregistré auprès des services de la Croix-Rouge suisse lui donnant le titre de sage-femme diplômée ; que cette équivalence, conforme à la directive 80/154/CEE du 21 janvier 1980 du Conseil des communautés européennes, lui permet d'exercer les fonctions de sage-femme au sein d'établissements de santé en Suisse ; qu'elle a demandé à être inscrite au tableau de l'ordre des sages-femmes afin de pouvoir exercer en France en vertu de l'article L. 4111-1 du code de la santé publique ; que le conseil départemental des sage-femmes lui a opposé une fin de non-recevoir au motif qu'elle devait obtenir au préalable une autorisation d'exercice émanant des autorités françaises ; que par courrier du 28 janvier 2008, reçu le 31 janvier 2008, elle a demandé au ministre chargé de la santé son inscription au tableau de l'ordre des sages-femmes en France et à titre subsidiaire une autorisation d'exercer la profession de sage-femme en France ; qu'en l'absence de réponse, elle a demandé par courrier du 30 mai 2008, reçu le 3 juin 2008, à connaître les motifs du refus implicite du ministre de la santé ; que, le 29 août 2008, elle a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite née le 1er avril 2008 par laquelle le ministre chargé de la santé a rejeté son recours hiérarchique et a ainsi rejeté sa demande d'inscription au tableau de l'ordre des sages-femmes et d'autorisation d'exercer la profession de sage-femme en France ; que par jugement du 10 novembre 2010, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; qu'elle interjette appel dudit jugement devant la Cour de céans ;
Sur le refus d'inscription au tableau de l'ordre des sages-femmes :
Considérant, en premier lieu, que contrairement à ce qu'elle allègue, Mme A n'était pas recevable à contester directement devant le Tribunal administratif de Paris la décision implicite de rejet de sa demande d'inscription au tableau de l'ordre des sages-femmes dans la mesure où si cette demande devait être transmise par le ministre, en application des dispositions de l'article 20 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, au président du conseil de l'ordre du département dans lequel elle voulait établir sa résidence professionnelle, seul compétent pour en connaître en vertu de l'article R. 4112-1 du code de la santé publique, la décision implicite de rejet née du silence gardé sur sa demande ne pouvait faire l'objet dans un premier temps, en application de l'article R. 4112-4 du même code, que d'une contestation devant le conseil régional ou interrégional dans le ressort duquel se trouve le conseil départemental devant être regardé comme ayant ainsi implicitement refusé son inscription ;
Sur le refus d'autorisation d'exercer la profession de sage-femme :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 4111-1 du code de la santé publique : " Nul ne peut exercer la profession de médecin, de chirurgien-dentiste ou de sage-femme s'il n'est : 1° Titulaire d'un diplôme, certificat ou autre titre mentionné aux articles L. 4131-1, L. 4141-3 ou L. 4151-5 ; 2° De nationalité française, de citoyenneté andorrane ou ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, du Maroc ou de la Tunisie, sous réserve de l'application, le cas échéant, soit des règles fixées au présent chapitre, soit de celles qui découlent d'engagements internationaux autres que ceux mentionnés au présent chapitre ; 3° Inscrit à un tableau de l'ordre des médecins, à un tableau de l'ordre des chirurgiens-dentistes ou à un tableau de l'ordre des sages-femmes sous réserve des dispositions des articles L. 4112-6 et L. 4112-7. " ; qu'aux termes de l'article L. 4151-5 du même code " Les titres de formation exigés en application du 1° de l'article L. 4111-1 sont pour l'exercice de la profession de sage-femme : 1° Soit le diplôme français d'Etat de sage-femme ; 2° Soit, si l'intéressé est ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen : a) Un diplôme, certificat ou autre titre de sage-femme délivré par l'un de ces Etats conformément aux obligations communautaires ou à celles résultant de l'accord sur l'Espace économique européen et figurant sur une liste établie par arrêté interministériel (...) d) Un titre de formation de sage-femme délivré par un Etat, membre ou partie, sanctionnant une formation de sage-femme commencée dans cet Etat antérieurement aux dates figurant dans l'arrêté mentionné au a) et non conforme aux obligations communautaires, s'il est accompagné d'une attestation de l'un de ces Etats certifiant que le titulaire du titre de formation s'est consacré dans cet Etat de façon effective et licite aux activités de sage-femme pendant au moins trois années consécutives au cours des cinq années précédant la délivrance de cette attestation " ;
Considérant, en premier lieu, que la décision refusant à Mme A l'autorisation d'exercer en France la profession de sage-femme qu'elle avait demandée sur le fondement du 1° de l'article L. 4111-1 du code de la santé publique n'entre dans aucune des catégories définies par l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée relative à la motivation des actes administratifs ; qu'en particulier elle ne restreint l'exercice d'aucune liberté publique et ne refuse pas un avantage dont l'attribution constitue un droit dès lors que Mme A ne remplit pas les conditions légales pour exercer sa profession en France ; que la décision litigieuse n'avait pas, dès lors, à être motivée en vertu des dispositions de ladite loi ;
Considérant, en deuxième lieu, que Mme A fait valoir qu'elle détient un certificat du 21 septembre 1992 attestant qu'elle a suivi les mêmes enseignements et examens que les autres étudiants de l'école de sages-femmes de la faculté libre de médecine de Lille, reconnus équivalents au grade d'accoucheuse par le gouvernement de la communauté française belge ainsi qu'une attestation du ministère français de l'éducation nationale indiquant que ce certificat peut être reconnu de valeur scientifique équivalente au diplôme français, mais ne permet pas l'exercice de la profession en France ; que les documents produits par la requérante, qui n'a jamais exercé l'activité de sage-femme ni en France ni dans un autre pays de l'Union européenne, ne relèvent toutefois d'aucune des catégories de titres de formation requis énumérés par l'article L. 4151-5 précité du code de la santé publique ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'erreur de droit ou de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article L. 4111-1 du code de la santé publique ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique dans sa rédaction applicable à l'espèce : " I. - Le ministre chargé de la santé peut, après avis d'une commission comprenant notamment des délégués des conseils nationaux des ordres et des organisations nationales des professions intéressées, choisis par ces organismes, autoriser individuellement à exercer les personnes titulaires d'un diplôme, certificat ou autre titre permettant l'exercice de la profession de médecin, chirurgien-dentiste ou sage-femme dans le pays d'obtention de ce diplôme, certificat ou titre. Ces personnes doivent avoir satisfait à des épreuves anonymes de vérification de leur maîtrise de la langue française et des connaissances, organisées par profession, discipline ou spécialité (...) I bis. - Le ministre chargé de la santé peut également, après avis de la commission mentionnée au I, autoriser individuellement à exercer des ressortissants d'un Etat autre que ceux membres de l'Union européenne ou parties à l'accord sur l'Espace économique européen, titulaires des titres de formation obtenus dans l'un de ces Etats et dont l'expérience professionnelle est attestée par tout moyen. Le nombre maximum de candidats susceptibles d'être autorisés à exercer pour chaque profession et, en ce qui concerne la profession de médecin, pour chaque discipline ou spécialité, est fixé par arrêté du ministre chargé de la santé. II. - Le ministre chargé de la santé peut également, selon des modalités prévues par décret en Conseil d'Etat, autoriser individuellement à exercer la profession de médecin, de chirurgien-dentiste ou de sage-femme les ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne titulaires d'un diplôme, certificat ou autre titre délivré par un Etat tiers, mais qui a été reconnu dans un Etat membre autre que la France et permet d'y exercer légalement la profession, après avoir examiné les connaissances et qualifications attestées par ce diplôme et par l'ensemble de la formation et de l'expérience professionnelle acquises dans un Etat membre au regard de celles exigées par les règles en vigueur pour l'accès et l'exercice de cette profession " ;
Considérant que Mlle A ne relève pas du I de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique car elle n'est pas titulaire d'un titre lui permettant d'exercer la profession de sage-femme dans le pays d'obtention, la France en l'espèce ; que le certificat de fin de scolarité détenu par la requérante ne constitue pas un diplôme reconnu par les autorités belges compétentes, seul susceptible de permettre l'exercice de la profession de sage-femme en France, en vertu de l'article 23.6 de la directive du 7 septembre 2005 ; qu'elle ne relève pas davantage du I bis du même article qui ne s'applique qu'aux ressortissants étrangers, puisqu'elle a acquis la nationalité française en 2005 ; qu'enfin les possibilités offertes au ministre de la santé par le II de l'article ne sont pas adaptées au cas de la requérante car, d'une part, le certificat dont elle se prévaut n'a pas été acquis dans un Etat tiers mais en France et, d'autre part, l'attestation établie par les autorités belges, fut elle régulière, n'est accompagnée d'aucun état de service dans ce pays ou dans un autre pays de la communauté européenne ; que dans ces conditions, et dans le respect des directives 80/154 et 80/155 CEE du 21 janvier 1980 sur la reconnaissance mutuelle des diplômes et de la loi n° 93/1420 du 31 décembre 1993 sur la liberté d'établissement, le ministre était tenu de refuser à la requérante une autorisation d'exercer la profession de
sage-femme sur le fondement des dispositions de l'article L. 4111-2 du code la santé publique ; qu'il s'ensuit que la requérante n'est pas fondée à exciper d'une erreur manifeste d'appréciation qu'auraient commise les premiers juges dans leur appréciation des faits ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tord que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur l'application des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative :
Considérant, par voie de conséquence du rejet de sa requête, que les conclusions de Mme A aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions de la requérante tendant au versement par l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, d'une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens, doivent être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
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N° 10PA03855
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N° 11PA00671