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17/01/2012 | FRANCE | N°09PA02554

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 17 janvier 2012, 09PA02554


Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2009, présentée pour la SA EDD, dont le siège est 28 boulevard de Port-Royal à Paris (75005), par la Selas de Gaulle Fleurance ; la SA EDD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0514385/3-1 du 18 février 2009 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) et de la société Coface-Services à lui verser la somme de 1 412 381 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis ;

2°) de condamner l'INPI et

la société Coface-Services à lui verser la somme de 1 412 381 euros, assortie d...

Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2009, présentée pour la SA EDD, dont le siège est 28 boulevard de Port-Royal à Paris (75005), par la Selas de Gaulle Fleurance ; la SA EDD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0514385/3-1 du 18 février 2009 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) et de la société Coface-Services à lui verser la somme de 1 412 381 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis ;

2°) de condamner l'INPI et la société Coface-Services à lui verser la somme de 1 412 381 euros, assortie des intérêts à compter du 30 août 2005 et de la capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'INPI et de la société Coface-Services le versement d'une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la propriété intellectuelle ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 2011 :

- le rapport de M. Boissy, rapporteur,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- et les observations de Me Destal, pour la SOCIETE EDD, de Me Prigent, substituant Me Martin, et celles de Me Durupty, pour la société Cofage-services venant aux droits de la société Coface-Ort ;

Considérant que l'INPI a signé avec la société OR Télématique, devenue la société Coface-ORT puis la société Coface-Services, le 20 juillet 1993, une convention de concession, d'une durée initiale de dix ans prorogée jusqu'au 31 décembre 2005 par un avenant n° 19 du 5 décembre 2003, concernant l'ensemble des opérations de saisie sur informatique, de stockage, de traitement et de diffusion des informations relatives au registre du commerce et des sociétés (RCS) ; qu'en vertu du cahier des charges annexé à cette convention, l'INPI, saisi d'une demande en ce sens et après avoir recueilli l'avis favorable du comité des licences, consent des licences non exclusives pour une durée d'un an avec tacite reconduction ; que les contrats de licence, établis sur la base d'un contrat type, sont proposés par le concessionnaire et approuvés par l'INPI tandis que le concessionnaire, dans le cadre de ses obligations, signe les contrats de licence, en assure l'exécution et la gestion technique, commerciale et financière ; que deux catégories de licences sont proposées, la " licence 1 ", dite " licence d'usage interne et personnel ", qui comporte pour le licencié le droit non exclusif d'utilisation personnelle des informations sans activité de redistribution et la " licence 2 ", dite " licence de distribution ", qui emporte pour le licencié le droit non exclusif de commercialiser les informations auxquelles il aura apporté une valeur ajoutée ; que la société OR Télématique, en plus de sa qualité de concessionnaire, était également titulaire d'une " licence 2 " en vertu d'une convention signée le 3 décembre 1993 avec l'INPI ;

Considérant que la SA EDD, qui disposait des données du RCS communiquées par la société OR Télématique, agissant alors non en qualité de concessionnaire mais en vertu de sa licence de redistribution, a commercialisé au printemps 2000 un produit, dénommé CA2, élaboré notamment par l'exploitation des données du RCS, proposant aux entreprises une base de données comportementale " business to business " ; que, le 13 septembre 2002, elle a conclu avec l'INPI et la société Coface-ORT une convention de " licence 1 ", pour un tarif annuel de 99 081,86 euros HT, lui permettant d'obtenir les comptes annuels des sociétés françaises inscrites au RCS ; qu'elle a également sollicité l'INPI, le 17 mars 2003, afin que ce dernier mette en oeuvre des " licences partielles " plus adaptées à ses besoins ; qu'au mois de janvier 2004, la SA EDD a cessé de commercialiser le produit CA2 pour des raisons liées, selon elle, au coût de production trop important, résultant en particulier du coût de la licence 1, et à un différend avec une société partenaire, la société Oktos, et, parallèlement, a demandé à la société Coface-ORT, le 6 janvier 2004, de " surseoir à la fourniture des données recueillies au titre de l'année 2003 " ;

Considérant que, par une convention de service signée le 15 avril 2004, la société Coface-ORT, en sa qualité de titulaire d'une " licence 2 ", s'est engagée à fournir à la société Cegedim un fichier informatique contenant un certain nombre des postes de bilan, précisément identifiés dans une annexe, de l'ensemble des entreprises françaises ayant publié un bilan et figurant sur la base de données de la société Coface-ORT, pour un montant annuel de 36 000 euros par an ; que la SA EDD a alors estimé que le différentiel du tarif pratiqué par la société Coface-ORT avec la société Cegedim par rapport au tarif qui lui a été appliqué dans le cadre de sa convention de " licence 1 " n'était pas justifié dès lors que les données communiquées étaient sensiblement les mêmes, que ce désavantage tarifaire avait été directement à l'origine de l'abandon de son produit CA2, avait au contraire permis à une entreprise concurrente, la société Cegedim, de commercialiser un produit similaire au sien, et que les fautes ainsi commises par l'INPI et par la société Coface-services lui avaient causé un préjudice financier et commercial ;

Considérant que, par la présente requête, la SA EDD fait appel du jugement du 18 février 2009 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'INPI et de la société Coface-Services à lui verser la somme de 1 412 381 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison des fautes commises par l'INPI et la société Coface-Services ; que, par la voie de l'appel incident, la société Coface-Services demande à la Cour d'annuler ce même jugement en tant qu'il a rejeté sa demande indemnitaire dirigée contre la SA EDD, chiffrée en appel à 121 959,21 euros, au titre du préjudice subi du fait de la résiliation unilatérale du contrat que la SA EDD avait conclu avec elle ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Considérant, en premier lieu, que le service de diffusion, par la voie de licences consenties aux usagers, des informations techniques, commerciales et financières contenues dans les instruments centralisés de publicité légale détenus par l'INPI en vertu du 2° de l'article L. 411-1 du code de la propriété intellectuelle, est exercé sur le marché concurrentiel de l'information ; que le financement de ce service repose exclusivement sur les redevances versées par les usagers ; qu'enfin, la gestion technique, commerciale et financière et l'exécution de ce service sont confiées à un concessionnaire privé à ses risques et périls ; que, dans ces conditions, ce service doit être regardé comme un service public industriel et commercial ;

Considérant que les litiges opposant un service public industriel et commercial à ses usagers relèvent de la compétence du juge judiciaire ; qu'il en va notamment ainsi des litiges tendant à la réparation des préjudices nés de contrats conclus avec les usagers de ce service ou de fautes commises par la personne publique dans l'organisation de ce service ;

Considérant, dès lors, que litige, décrit plus haut, opposant la SA EDD, usager de ce service public industriel et commercial, avec l'INPI et la société Coface-Services, qui tend à la réparation des préjudices que la SA EDD soutient avoir subis en raison des fautes commises par ceux-ci dans l'exécution du contrat signé le 13 septembre 2002 et dans l'organisation de ce service, relève de la compétence du juge judiciaire ; qu'il en va de même pour le litige indemnitaire, soulevé à titre reconventionnel par la société Coface-Services, par lequel celle-ci demande la réparation des préjudices qu'elle aurait subis en raison des fautes commises par la SA EDD dans l'exécution du contrat signé le 13 septembre 2002 ;

Considérant, en second lieu, qu'à supposer que la SA EDD ait également entendu rechercher la responsabilité de la société Coface-services au titre des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison du contrat conclu avec la société Cegedim, qui porterait, selon elle, sur la fourniture de données, sensiblement identiques à celle qu'elle obtenait en vertu de sa convention de " licence 1 ", à des conditions financières nettement plus avantageuses, un tel litige, relatif aux préjudices nés de la conclusion et de l'exécution d'un contrat de droit privé, ne relève pas davantage de la compétence du juge administratif ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le litige opposant la SA EDD à l'INPI et à la société Coface-services ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative ; que, dès lors, en s'estimant compétent pour en connaître, le Tribunal administratif de Paris a entaché le jugement attaqué d'irrégularité ; que ce jugement doit par suite être annulé ;

Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître des demandes indemnitaires respectivement exposées par la SA EDD et la société Coface-services ; que ces demandes ne peuvent dès lors qu'être rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société Coface-Services et de l'INPI, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement de la somme demandée par la SA EDD au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SA EDD le versement des sommes que demandent respectivement la société Coface-Services et l'INPI sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 18 février 2009 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : Les demandes indemnitaires présentées par la SA EDD et la société Coface-Services sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par les parties est rejeté.

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N° 09PA02554


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA02554
Date de la décision : 17/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-01-02-02 Marchés et contrats administratifs. Notion de contrat administratif. Nature du contrat. Contrats n'ayant pas un caractère administratif.


Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : SELAS DE GAULLE FLEURANCE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-01-17;09pa02554 ?
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