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16/12/2011 | FRANCE | N°09PA06147

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 16 décembre 2011, 09PA06147


Vu le recours, enregistré par télécopie le 23 octobre 2009, et confirmé par courrier le

27 octobre 2009, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602252 du 16 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle audit impôt, et des pénalités correspondantes, auxquelles la société Garnier Choiseul Holding, venant aux droits de la société Urab,

a été assujettie au titre des exercices clos le

31 décembre 2000, le 31 décemb...

Vu le recours, enregistré par télécopie le 23 octobre 2009, et confirmé par courrier le

27 octobre 2009, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602252 du 16 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle audit impôt, et des pénalités correspondantes, auxquelles la société Garnier Choiseul Holding, venant aux droits de la société Urab, a été assujettie au titre des exercices clos le

31 décembre 2000, le 31 décembre 2001 et le 31 juillet 2002 ;

2°) de remettre ces impositions à la charge de la société Garnier Choiseul Holding ;

......................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2011 :

- le rapport de M. Ladreit de Lacharrière, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Blanc, rapporteur public ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Urab a acquis, le 14 décembre 2000, la moitié des titres composant le capital de la société de droit néerlandais Lepma BV ; qu'à la suite de cette acquisition, la société Urab a perçu de la société Lepma BV des dividendes d'un montant total de 56 555 459 francs (8 621 824 euros), versés au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2000 ; que ces dividendes ont été retranchés de ses bénéfices en application du régime des sociétés mères prévu aux articles 145 et 216 du code général des impôts ; que la société Urab a également déduit, pour la détermination de son résultat imposable, une provision pour dépréciation de la société Lepma BV et a ainsi dégagé des résultats nuls ou déficitaires au titre des exercices 2000, 2001 et 2002 ; que l'administration a estimé que la combinaison de ces éléments révélait un montage fiscal constitutif d'un abus de droit au sens des dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales et a, en conséquence, remis en cause la déduction des dividendes opérée sur le fondement des articles 145 et 216 du code général des impôts ; que, par jugement du 16 mai 2008, le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société Garnier Choiseul Holding venant aux droits de la société Urab, des cotisations d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle audit impôt, et des pénalités correspondantes, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2000, 31 décembre 2001 et 31 juillet 2002 ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT relève appel de ce jugement ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 145 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : 1. Le régime fiscal des sociétés mères, tel qu'il est défini aux articles 146 et 216, est applicable aux sociétés et autres organismes soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal qui détiennent des participations satisfaisant aux conditions ci-après : a. Les titres de participations doivent revêtir la forme nominative ou être déposés dans un établissement désigné par l'administration ; b. les titres de participation doivent représenter au moins 5 % du capital de la société émettrice ; ce pourcentage s'apprécie à la date de mise en paiement des produits de la participation. Si, à la date mentionnée au premier alinéa, la participation dans le capital de la société émettrice est réduite à moins de 5 % du fait de l'exercice d'options de souscription d'actions dans les conditions prévues à l'article L. 225-183 du code de commerce, le régime des sociétés mères lui reste applicable si ce pourcentage est à nouveau atteint à la suite de la première augmentation de capital suivant cette date et au plus tard dans un délai de trois ans ; c. Les titres de participations doivent avoir été souscrits à l'émission. A défaut, la personne morale participante doit avoir pris l'engagement de les conserver pendant un délai de deux ans ; qu'aux termes du I de l'article 216 du même code : Les produits nets des participations, ouvrant droit à l'application du régime des sociétés mères et visées à l'article 145, touchés au cours d'un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges.(...) ; qu'aux termes de l'article 219, I, a ter, troisième alinéa, du code général des impôts : Pour l'application des premier et deuxième alinéas, constituent des titres de participation les parts ou actions de sociétés revêtant ce caractère sur le plan comptable. Il en va de même des actions acquises en exécution d'une offre publique d'achat ou d'échange par l'entreprise qui en est l'initiatrice ainsi que des titres ouvrant droit au régime des sociétés mères ou, lorsque leur prix de revient est au moins égal à 22 800 000 euros, qui remplissent les conditions ouvrant droit à ce régime autres que la détention de 5 % au moins du capital de la société émettrice, si ces actions ou titres sont inscrits en comptabilité au compte de titres de participation ou à une subdivision spéciale d'un autre compte du bilan correspondant à leur qualification comptable ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : ... b) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus... L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel. Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors que ces actes ont un caractère fictif, ou, que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Urab et la société Lepma BV existaient antérieurement à l'opération de distribution des dividendes, sans que le bénéfice de l'avantage fiscal ait été permis par l'interposition d'une société spécialement créée à cet effet ; que, dans les circonstances dans lesquelles elle a été réalisée, l'exonération des dividendes n'a pas méconnu les objectifs des auteurs de l'article 216 du code général des impôts, issu de la codification de l'article 2-I du décret n° 52-804 du 30 juin 1952 pris en application de l'article 45 de la loi n° 52-401 du 14 avril 1952, dès lors qu'il n'est pas contesté que la société Lepma BV, qui a versé les dividendes à la société Urab, avait été imposée à raison des bénéfices qui avaient donné lieu à ces distributions et que l'absence d'option pour le régime des sociétés mères aurait conduit à une seconde imposition des sommes distribuées ; que si, pour l'application des dispositions de l'article 219, I, a, ter du code général des impôts, relatif à l'application du régime des plus-values et moins-values à long terme, les titres de participation sont ceux qui revêtent ce caractère sur le plan comptable, en revanche, la détention de titres pour l'application du régime des sociétés mères n'est pas subordonnée à cette condition par les dispositions précitées de l'article 145 du code général des impôts et les auteurs de l'article 216 de ce code n'ont pas, contrairement à ce que soutient le ministre, entendu réserver le bénéfice de l'avantage que prévoit cet article aux seules sociétés mères qui entendent, par la prise de participation dans une société émettrice, s'assurer, de manière durable, du contrôle de celle-ci aux fins de prendre part à la gestion de son activité économique ; que, dans ces conditions, l'administration n'est pas fondée à soutenir que les opérations en cause seraient constitutives d'un abus de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de la société Garnier Choiseul Holding ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Garnier Choiseul Holding et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la société Garnier Choiseul Holding une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 09PA06147


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA06147
Date de la décision : 16/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-083 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Relations entre sociétés d'un même groupe.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTERA
Rapporteur ?: M. Pierre LADREIT DE LACHARRIERE
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : BELOUIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-12-16;09pa06147 ?
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