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22/11/2011 | FRANCE | N°11PA03309

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 22 novembre 2011, 11PA03309


Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2011, présentée pour Mme Khadidja A, demeurant ... par Me Cerf ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0911493, 1015605 du 24 mars 2011 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juin 2010 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement d'un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjo

indre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour soll...

Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2011, présentée pour Mme Khadidja A, demeurant ... par Me Cerf ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0911493, 1015605 du 24 mars 2011 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juin 2010 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement d'un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le pacte international de New York relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 novembre 2011 :

- le rapport de M. Magnard, rapporteur,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

Considérant que Mme A fait appel du jugement nos 0911493, 1015605 du 24 mars 2011 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juin 2010 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement d'un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision de refus de renouvellement du certificat de résidence :

Considérant, en premier lieu, que la décision attaquée, qui cite le 5 et le 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et précise les éléments relatifs à l'état de santé et à la situation privée et familiale de Mme A, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle satisfait ainsi aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 susvisé ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit, dès lors, être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 7. au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur de la santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de

l'intéressé. (...) ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations et de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre des stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale ; que, lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe dans le pays d'origine des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause ; que, si de telles possibilités existent mais que le ressortissant algérien fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie ;

Considérant que Mme A indique avoir été prise en charge en 1995 par l'institut Curie pour le traitement d'un cancer du cavum, puis à nouveau à compter de 2002 en raison d'une récidive traitée sans succès en Algérie ; que le médecin, chef du service médical de la préfecture, a estimé que son état nécessitait une prise en charge dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que le traitement approprié était disponible en Algérie ; que Mme A produit un certificat médical qui fait état de la nécessité d'une surveillance mensuelle, de la prise régulière d'antalgiques, ainsi que d'un traitement pour l'asthme et qui se borne à affirmer, sans fournir la moindre précision à cet égard, que la prise en charge ne pourrait être effectuée en Algérie ; que, toutefois, il existe en Algérie, un système de soins ouvert à tous, où les traitements pour l'asthme et les antalgiques sont disponibles, et où les patients ayant été atteints d'un cancer peuvent bénéficier d'un suivi ; que l'assurance-maladie prend en charge les coûts des consultations, des hospitalisations et des traitements, l'Etat supportant les dépenses de soins des personnes ne disposant pas d'assurance sociale et les soins étant gratuits dans le secteur public ; que la production par la requérante, qui ne fournit d'ailleurs aucune précision sur les coûts des soins qui lui sont nécessaires, d'un document général sur les modalités de fonctionnement du régime d'assurance-maladie applicable en Algérie ne saurait suffire à remettre en cause les constatations qui précèdent ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que Mme A ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 12 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, en vertu duquel la France s'est engagée à prendre toute mesure permettant à chacun de bénéficier du meilleur état de santé physique et mentale qu'il soit capable d'atteindre, ces stipulations ne produisant pas d'effet direct à l'égard des particuliers ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; que, si Mme A fait valoir que deux de ses cousins sont titulaires de la nationalité française, il est constant qu'elle est célibataire et n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où réside sa mère et où elle-même a vécu jusqu'en 2002, soit jusqu'à l'âge de 38 ans ; qu'elle n'apporte pas d'élément de nature à démontrer l'intensité et l'ancienneté des liens privés qu'elle soutient avoir construits sur le territoire français ; que, dans ces conditions et en dépit de la durée du séjour régulier en France de l'intéressée, la décision attaquée ne peut être regardée comme portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales et des droits de l'homme ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

Considérant, enfin, qu'il ne résulte pas des faits précédemment décrits que la décision attaquée soit entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de Mme A ; que ce moyen doit, par suite, être écarté ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I.-L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté du 8 juillet 1999 susvisé relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades, pris pour l'application des dispositions précitées de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, impose au médecin, chef du service médical de la préfecture de police, d'émettre un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays, quelle est la durée prévisible du traitement, et indiquant si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers le pays de renvoi ; que, toutefois, si l'avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, qui a été produit aux débats, ne comporte pas d'indication sur la possibilité pour Mme A de voyager sans risque vers son pays d'origine, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de l'intéressée pouvait susciter des interrogations sur sa capacité à supporter ce voyage ; que le moyen tiré de l'irrégularité dudit avis ne peut, par suite, qu'être écarté ;

Considérant, enfin, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le moyen tiré de l'atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale, ainsi que le moyen tiré de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation, qui reprennent ce qui a été précédemment développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de renouvellement du certificat de résidence, doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales et des droits de l'homme : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier que

Mme A ne pourrait bénéficier des soins appropriés à son état de santé en cas de retour en Algérie ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales et des droits de l'homme ne peut, dès lors, et en tout état de cause, qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt, par lequel la Cour rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions attaquées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susanalysées ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans les présentes instances la partie perdante, le versement de la somme demandée par Mme A au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

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N° 08PA04258

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N° 11PA03309


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA03309
Date de la décision : 22/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : CERF

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-11-22;11pa03309 ?
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