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22/11/2011 | FRANCE | N°10PA01373

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 22 novembre 2011, 10PA01373


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 mars et 16 juin 2010, présentés pour la PROVINCE DES ILES LOYAUTE, dont le siège est à Lifou (98820) BP 50 Wé, en Nouvelle-Calédonie, représentée par son président en exercice, par la SCP Ancel Couturier-Heller ; la PROVINCE DES ILES LOYAUTE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0900127 du 17 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, d'une part, a annulé le titre exécutoire, d'un montant de 54 456 396 F CFP, émis le 2 mars 2009 par le trésorier de la PRO

VINCE DES ILES LOYAUTE à l'encontre de la société Dumez-GTM Calédonie et, ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 mars et 16 juin 2010, présentés pour la PROVINCE DES ILES LOYAUTE, dont le siège est à Lifou (98820) BP 50 Wé, en Nouvelle-Calédonie, représentée par son président en exercice, par la SCP Ancel Couturier-Heller ; la PROVINCE DES ILES LOYAUTE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0900127 du 17 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, d'une part, a annulé le titre exécutoire, d'un montant de 54 456 396 F CFP, émis le 2 mars 2009 par le trésorier de la PROVINCE DES ILES LOYAUTE à l'encontre de la société Dumez-GTM Calédonie et, d'autre part, l'a condamnée à verser à cette même société la somme de 12 841 901 F CFP au titre du solde du marché de travaux du port de plaisance de Wé ;

2°) de rejeter les demandes de la société Dumez-GTM Calédonie ;

3°) de mettre à la charge de la société Dumez-GTM Calédonie le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la délibération n° 136 du 1er mars 1967 modifiée portant réglementation des marchés publics en Nouvelle-Calédonie, modifiée par la délibération n° 64/CP du 10 mai 1989, et l'annexe 1 à cette délibération fixant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 novembre 2011 :

- le rapport de M. Boissy, rapporteur,

- les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public,

- et les observations de Me Waquet, pour la société Dumez-GTM Calédonie ;

Considérant que, par un marché signé le 9 juillet 2001, la PROVINCE DES ILES LOYAUTE a confié à un groupement conjoint ayant comme mandataire la société SCR/ Fondacal la construction d'un port de plaisance à Wé, sur l'île de Lifou ; que ce marché, alloti, était divisé en deux tranches, une tranche ferme et une tranche conditionnelle ; qu'au sein de ce groupement, la société Dumez-GTM Calédonie avait pour mission d'assurer l'exécution du lot n°2, concernant des prestations de voirie et réseaux divers (V.R.D.), qui faisait partie de la tranche conditionnelle, et du lot n°3, relatif aux travaux de terrassements et d'endigage, qui faisait partie de la tranche ferme ; que les montants de ces lots n°2 et n°3, initialement d'un montant respectif de 66 938 325 F CFP et 123 280 040 F CFP, ont été portés, en vertu des avenants n°2 et 3, à 80 666 749 F CFP et 135 492 333 F CFP ; que, dans le décompte général du marché établi en mai 2007, le maître d'ouvrage a appliqué à la société Dumez-GTM Calédonie des pénalités d'un montant de 67 249 196 F CFP au titre du lot n°3 et a fixé la révision des prix à un montant de 5 160 522 F CFP ; que, compte tenu des acomptes déjà versés pour les lots n° 2 et n° 3, la PROVINCE DES ILES LOYAUTE a émis à l'encontre de la société Dumez-GTM Calédonie, le 2 mars 2009, un titre exécutoire d'un montant de 54 456 396 F CFP au titre du solde du marché ; que, par la présente requête, la PROVINCE DES ILES LOYAUTE fait appel du jugement du 17 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a annulé ce titre exécutoire et l'a condamnée à verser à la société Dumez-GTM Calédonie la somme de 12 841 901 F CFP au titre du solde du marché ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, contrairement à ce que soutient la PROVINCE DES ILES LOYAUTE, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a suffisamment justifié, dans le jugement attaqué, les raisons pour lesquelles il a estimé, d'une part, que la réclamation contentieuse de la société Dumez-GTM Calédonie n'était pas entachée de forclusion et, d'autre part, que les pénalités de retard avaient été infligées à tort ; qu'en statuant ainsi, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments des parties, n'ont omis de statuer sur aucun des moyens opérants soulevés devant eux et ont respecté l'obligation de motivation imposée par les dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ;

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 49 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux en Nouvelle-Calédonie (CCAGT- NC), relatif aux règlements des différends et litiges : 49.1. Intervention de la personne responsable du marché : / 49.11. Si un différend survient entre le maître d'oeuvre et l'entrepreneur, sous la forme de réserves faites à un ordre de service ou sous toute autre forme, l'entrepreneur remet au maître d'oeuvre, aux fins de transmission à la personne responsable du marché, un mémoire exposant les motifs et indiquant les montants de ses réclamations. / 49.12. Après que ce mémoire a été transmis par le maître d'oeuvre, avec son avis, à la personne responsable du marché, celle-ci notifie ou fait notifier à l'entrepreneur sa proposition pour le règlement du différend, dans un délai de deux mois à compter de la date de réception par le maître d'oeuvre du mémoire de réclamation. / L'absence de proposition dans ce délai équivaut à un rejet de la demande de l'entrepreneur / 49.2. Intervention du maître d'oeuvre : / 49.21. Lorsque l'entrepreneur n'accepte pas la proposition de la personne responsable du marché ou le rejet implicite de sa demande, il doit, sous peine de forclusion, dans un délai de trois mois à compter de la notification de cette proposition ou de l'expiration du délai de deux mois prévu au 12 du présent article, le faire connaître par écrit à la personne responsable du marché en lui faisant parvenir, le cas échéant, aux fins de transmission au maître de l'ouvrage, un mémoire complémentaire développant les raisons de son refus. / 49.22. Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de l'ouvrage. 49.23. La décision à prendre sur les différends prévus aux 21 et 22 du présent article appartient au maître de l'ouvrage. / Si l'entrepreneur ne donne pas son accord à la décision ainsi prise, les modalités fixées par cette décision sont appliquées à titre de règlement provisoire du différend, le règlement définitif relevant des procédures décrites ci-après. / 49.3. Procédure contentieuse : / 49.31. Si, dans le délai de trois mois à partir de la date de réception par la personne responsable du marché de la lettre du mémoire de l'entrepreneur mentionné aux 21 et 22 du présent article, aucune décision n'a été notifiée à l'entrepreneur, ou si celui-ci n'accepte pas la décision qui lui a été notifiée, l'entrepreneur peut saisir le tribunal administratif compétent. II ne peut porter devant cette juridiction que les chefs et motifs de réclamation énoncés dans la lettre ou le mémoire remis à la personne responsable du marché. / 49.32. Si, dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur la réclamation auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable ;

Considérant que les stipulations des articles 49-11 et 49-12 précitées concernent le règlement de différends survenus entre le maître d'oeuvre et l'entrepreneur et ne s'appliquent dès lors pas au différend qui survient dans l'établissement du décompte général qui constitue un différend entre l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage ; que si, en vertu de l'article 49.31, l'entrepreneur qui a contesté le décompte général peut saisir le tribunal administratif dès l'expiration du délai de trois mois suivant la réception, par le maître d'ouvrage, de sa réclamation lorsque ce dernier ne lui a notifié aucune décision, il n'est cependant réputé avoir définitivement accepté la décision du maître d'ouvrage, en application de l'article 49.32, qu'après l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification de la décision expresse du maître de l'ouvrage statuant sur sa réclamation ; que, dès lors, faute pour le maître d'ouvrage d'avoir statué expressément sur la réclamation de l'entrepreneur formée contre le décompte général, le délai de six mois prévu à l'article 49.32 n'est contractuellement pas opposable à l'entrepreneur ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le décompte général du marché en litige a été notifié à la société SCR/Fondacal, mandataire du groupement attributaire, le 4 septembre 2007 ; que, le 22 octobre 2007, la PROVINCE DES ILES LOYAUTE a reçu le mémoire de réclamation de la société Dumez-GTM Calédonie, présenté par le mandataire du groupement ; qu'il ne résulte pas de l'instruction et n'est même pas allégué que la PROVINCE DES ILES LOYAUTE aurait, par la suite, explicitement statué sur cette réclamation ; qu'à supposer même que le courrier du 19 février 2009 adressé par le secrétaire général de la PROVINCE DES ILES LOYAUTE à la société Dumez-GTM Calédonie puisse être analysé comme la décision de rejet de cette réclamation, la société Dumez-GTM Calédonie a saisi le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du litige contractuel l'opposant à la PROVINCE DES ILES LOYAUTE le 28 avril 2009, soit, en tout état de cause, avant l'expiration du délai de six mois prévu par l'article 49-32 du CCAGT-NC ; que la PROVINCE DES ILES LOYAUTE n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir contractuelle qu'elle avait opposée sur le fondement des dispositions précitées du CCAGT-NC ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 19 du CCAGT-NC, relatif à la fixation et prolongation des délais : 19.1. Délais d'exécution : / 19.11. Le délai d'exécution des travaux fixé par le marché s'applique à l'achèvement de tous les travaux prévus incombant à l'entrepreneur y compris, sauf stipulation différente du marché, le repliement des installations de chantier et la remise en état des terrains et des lieux. / Sauf stipulation différente du marché, le délai part de la date de la notification du marché. Cette notification vaut alors ordre de commencer les travaux (...) / 19.12. Les dispositions du 11 du présent article s'appliquent aux délais distincts du délai d'exécution de l'ensemble des travaux, qui peuvent être fixés par le marché pour l'exécution de certaines tranches de travaux, ou de certains ouvrages, partie d'ouvrages, ou ensembles de prestations. (...) / 19.2 - Prolongation des délais d'exécution : / 19.21. Lorsqu'un changement de la masse des travaux ou une modification de l'importance de certaines natures d'ouvrages, une substitution à des ouvrages initialement prévus d'ouvrages différents, une rencontre de difficultés imprévues au cours du chantier, un ajournement des travaux décidé par la personne responsable du marché ou encore un retard dans l'exécution d'opérations préliminaires qui sont à la charge du maître de l'ouvrage ou de travaux préalables qui font l'objet d'un autre marché, justifie soit une prolongation du délai d'exécution de l'ensemble des travaux ou d'une ou plusieurs tranches de travaux, soit le report du début des travaux, l'importance de la prolongation ou du report est débattue par le maître d'oeuvre avec l'entrepreneur, puis elle est soumise à l'approbation de la personne responsable du marché, et la décision prise par celle-ci est notifiée à l'entrepreneur par ordre de service. (...) / 19.23. En dehors des cas prévus aux 21 et 22 du présent article, la prolongation du délai d'exécution ne peut résulter que d'un avenant. /19.3. Prolongation ou report des délais en matière de tranches conditionnelles / Lorsque le délai imparti par le C.C.A.P. pour la notification de l'ordre de service d'exécuter une tranche conditionnelle est défini par rapport à l'origine du délai d'exécution d'une autre tranche, il est, en cas de prolongation dudit délai d'exécution, ou de retard du fait de l'entrepreneur constaté dans cette exécution, prolongé d'une durée égale à celle de cette prolongation ou de ce retard (... ; qu'aux termes de l'article 20 du même CCAGT-NC, relatif aux pénalités et aux retenues : 20.1. En cas de retard dans l'exécution des travaux, qu'il s'agisse de l'ensemble du marché ou d'une tranche pour laquelle un délai d'exécution partiel ou une date limite a été fixé, il est appliqué, sauf stipulation différente du C.C.A.P., une pénalité journalière de 1/3000 du montant de l'ensemble du marché ou de la tranche considérée. Ce montant est celui qui résulte des prévisions du marché, c'est-à-dire du marché initial éventuellement modifié ou complété par les avenants intervenus ; il est évalué à partir des prix de base définis au 11 de l'article 13. / Les pénalités sont encourues du simple fait de la constatation du retard par le maître d'oeuvre (...) ; qu'aux termes de l'article 40 dudit CCAGT-NC, relatives à la réception des travaux : 40.1. L'entrepreneur avise à la fois la personne responsable du marché et le maître d'oeuvre, par écrit, de la date à laquelle il estime que les travaux ont été achevés ou le seront. / Le maître d'oeuvre procède, l'entrepreneur ayant été convoqué, aux opérations préalables à la réception des ouvrages dans un délai qui, sauf stipulation différente du C.C.A.P. est de vingt jours à compter de la date de réception de l'avis mentionné ci-dessus ou de la date indiquée dans cet avis pour l'achèvement des travaux si cette dernière date est postérieure. / La personne responsable du marché, avisée par le maître d'oeuvre de la date de ces opérations, peut y assister ou s'y faire représenter. Le procès-verbal prévu au 2 du présent article mentionne, soit la présence de la personne responsable du marché ou de son représentant soit, en son absence, le fait que le maître d'oeuvre l'avait dûment avisée. / En cas d'absence de l'entrepreneur à ces opérations, il en est fait mention audit procès-verbal et ce procès-verbal lui est alors notifié. / 40.2. Les opérations préalables à la réception comportent : /- La reconnaissance des ouvrages exécutés, / - Les épreuves éventuellement prévues par le C.C.A.P., / - La constatation éventuelle de l'inexécution de prestations prévues au marché, / - La constatation éventuelle d'imperfections ou malfaçons. /Sauf stipulation différente du C.C.A.P. prévue au 11 de l'article 19, la constatation du repliement des installations de chantier et de la remise en état des terrains et des lieux. / -Les constatations relatives à l'achèvement des travaux. / Ces opérations font l'objet d'un procès-verbal dressé sur-le-champ par le maître d'oeuvre et signé par lui et par l'entrepreneur ; si ce dernier refuse de le signer, il en est fait mention. / Dans le délai de cinq jours suivant la date du procès-verbal, le maître d'oeuvre fait connaître à l'entrepreneur s'il a ou non proposé à la personne responsable du marché de prononcer la réception des ouvrages et, dans l'affirmative, la date d'achèvement des travaux qu'il a proposé de retenir ainsi que les réserves dont il a éventuellement proposé d'assortir la réception. / 40.3. Au vu du procès-verbal des opérations préalables à la réception et des propositions du maître d'oeuvre, la personne responsable du marché décide si la réception est ou non prononcée ou si elle est prononcée avec réserves. Si elle prononce la réception, elle fixe la date qu'elle retient pour l'achèvement des travaux. La décision ainsi prise est notifiée à l'entrepreneur dans les quarante-cinq jours suivant la date du procès-verbal. / A défaut de décision de la personne responsable du marché notifiée dans le délai précisé ci-dessus, les propositions du maître d'oeuvre sont considérées comme acceptées. / La réception, si elle est prononcée, ou réputée comme telle, prend effet à la date fixée pour l'achèvement des travaux. / (...) 40.5. Sil apparaît que certaines prestations prévues au marché et devant encore donner lieu à règlement n'ont pas été exécutées, la personne responsable du marché peut décider de prononcer la réception, sous réserve que l'entrepreneur s'engage à exécuter ces prestations dans un délai qui n'excède pas trois mois. La constatation de l'exécution de ces prestations doit donner lieu à un procès-verbal dressé dans les mêmes conditions que le procès-verbal des opérations préalables à la réception. / 40.6. Lorsque la réception est assortie de réserves, l'entrepreneur doit remédier aux imperfections et malfaçons correspondantes dans le délai fixé par la personne responsable du marché ou, en l'absence d'un tel délai, trois mois avant l'expiration du délai de garantie défini au 1 de l'article 44. / Au cas où ces travaux ne seraient pas faits dans le délai prescrit, la personne responsable du marché peut les faire exécuter aux frais et risques de l'entrepreneur. / 40.7. Si certains ouvrages ou certaines parties d'ouvrages ne sont pas entièrement conformes aux spécifications du marché, sans que les imperfections constatées soient de nature à porter atteinte à la sécurité, au comportement ou à l'utilisation des ouvrages, la personne responsable du marché peut, eu égard à la faible importance des imperfections et aux difficultés que présenterait la mise en conformité, renoncer à ordonner la réfection des ouvrages estimés défectueux et proposer à l'entrepreneur une réfaction sur les prix. / Si l'entrepreneur accepte la réfaction, les imperfections qui l'ont motivée se trouvent couvertes de ce fait et la réception est prononcée sans réserve. / Dans le cas contraire, l'entrepreneur demeure tenu de réparer ces imperfections, la réception étant prononcée sous réserve de leur réparation (...) ; qu'aux termes de l'article 41 du même CCAGT-NC, relatif aux réceptions partielles : 41.1. La fixation par le marché pour une tranche de travaux, un ouvrage ou une partie d'ouvrage, d'un délai d'exécution distinct du délai global d'exécution de l'ensemble des travaux implique, sauf stipulation différente du C.C.A.P., une réception partielle de cette tranche de travaux ou de cet ouvrage ou de cette partie d'ouvrage. / Les dispositions de l'article 41 s'appliquent aux réceptions partielles, sous réserve des 3 et 4 du présent article. / 41.2. La prise de possession par le maître de l'ouvrage, avant l'achèvement de l'ensemble des travaux, de certains ouvrages ou parties d'ouvrages, doit être précédée d'une réception partielle dont les conditions sont, à défaut d'indications figurant dans le C.C.A.P., fixées par la personne responsable du marché et notifiées par ordre de service. Ces conditions doivent au moins comporter l'établissement d'un état des lieux contradictoires. / 41.3. Pour les tranches de travaux, ouvrages ou parties d'ouvrages ayant donné lieu à une réception partielle, le délai de garantie court, sauf stipulation différente du C.C.A.P. à compter de la date d'effet de cette réception partielle. / 41.4. Dans tous les cas, le décompte général est unique pour l'ensemble des travaux, la notification de la dernière décision de réception partielle faisant courir le délai prévu au 32 de l'article 13 ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces stipulations que les pénalités de retard ont pour seul objet de sanctionner le retard pris par les constructeurs dans la réalisation des travaux que le maître d'ouvrage leur a contractuellement demandé d'exécuter ; qu'en décidant, au terme des opérations préalables, de prononcer la réception des travaux, avec ou sans réserves, le maître d'ouvrage, qui déclare de ce fait accepter l'ouvrage, estime nécessairement que les constructeurs ont exécuté, pour l'essentiel, les prestations contractuelles leur incombant ; que si, lorsque la réception de l'ouvrage a été prononcée sous réserve de l'exécution de certains travaux ou prestations ou de la reprise d'imperfections et de malfaçons, le maître d'ouvrage conserve la possibilité de mettre en oeuvre le régime de sanction organisé par les stipulations de l'article 40.6 du CCAGT-NC et d'inclure dans le décompte général du marché, le cas échéant, l'ensemble des préjudices subis postérieurement à la réception des travaux en raison de la défaillance ou du retard des constructeurs à lever les réserves émises, il ne peut plus, en revanche, décider d'appliquer aux constructeurs, pour la période postérieure à la réception de l'ouvrage, sauf clause contraire prévue dans les pièces particulières du marché, les pénalités dues à un retard dans l'exécution des travaux, quelle que soit l'importance des éléments réservés ;

Considérant que le démarrage des travaux de la tranche ferme de la construction du port de plaisance de Wé, d'une durée initiale de 8 mois, a été notifié au mandataire du groupement le 1er août 2001 par un ordre de service n° 1 du 24 juillet 2001 ; que la durée d'exécution de cette tranche ferme a été prolongée de 123,5 jours ouvrés, soit environ 4 mois et demi, par un avenant n° 3 signé le 8 décembre 2003 ; que, le 18 septembre 2002, le président de la PROVINCE DES ILES LOYAUTE a décidé de prononcer, avec effet au 20 août 2002, la réception de la tranche ferme des travaux sous réserve, notamment, que le titulaire du lot n° 3, d'une part, procède à la finition des enrochements pour la carapace extérieure du musoir, du parapet à base d'enrochement sur la digue et de l'enrochement du quai d'avitaillement, au repiquage et à la reprise des aciers apparents sur les ouvrages d'entonnement diam.1000 , au dynamitage de l'éperon existant à l'entrée du chenal et, d'autre part, lui produise les récolements finaux des enrochements et ouvrages précisant en particulier la côte hydrographique des fonds de bassins et les épaisseurs des carapaces ; que, le 20 mai 2003, il a prononcé la réception de la tranche conditionnelle du marché, avec effet au 11 avril 2003, assortie, notamment, de certaines réserves concernant le lot n°3 en a demandé au titulaire de ce lot de régler le problème des dépôts en fond de bassin, ainsi que certaines côtes des terrassements qui ne sont pas à la côte du projet ; que, le 3 septembre 2004, un procès-verbal des réserves à lever a été établi mentionnant notamment toujours les mêmes réserves, à l'égard du titulaire du lot n°3, que celles émises le 20 mai 2003 et indiquant les propositions de la société Dumez-GTM Calédonie pour régler ce problème ; que les réserves concernant la tranche ferme ont été levées le 3 septembre 2004 par un procès-verbal établi le 10 septembre 2004 ; qu'enfin, à la suite de l'analyse conduite le 5 octobre 2006 par le maître d'oeuvre des plans de récolement produits par la société Dumez-GTM Calédonie, un procès-verbal de réception définitive du lot n°3 a été dressé le 13 octobre 2006 qui faisait état des travaux repris , des travaux encore à reprendre et des travaux à laisser en l'état ; qu'il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que la société Dumez-GTM Calédonie a ensuite repris, au cours des mois suivants, l'essentiel des travaux de dragage et de creusement qu'il lui restait à accomplir sans que ni le maître d'oeuvre ni le maître d'ouvrage ne prennent ensuite l'initiative de constater ces travaux par un nouveau procès-verbal ;

Considérant que s'il n'est pas sérieusement contesté que les travaux exécutés par la société Dumez-GTM Calédonie avant la réception du marché, et qui devaient faire l'objet d'une reprise, étaient importants et excédaient, par leur ampleur, les réserves généralement émises lors de la réception d'un marché de travaux, il ne résulte toutefois pas de l'instruction, et notamment pas des procès-verbaux des 3 et 10 septembre 2004, que les parties, après la réception de la tranche ferme, aient réellement manifesté la volonté de revenir sur la réception du lot n°3 ; que, dès lors, le procès-verbal du 13 octobre 2006 doit seulement être analysé comme un procès-verbal supplémentaire mentionnant les réserves levées et celles restant à lever et non comme la décision de réception du lot n°3 ; que, par suite, la réception du lot n°3 doit être regardée comme étant intervenue avec la tranche ferme du marché, le 20 août 2002, soit avant l'expiration du délai contractuel d'exécution des travaux fixés en dernier lieu à la mi-septembre 2002 ; qu'il ne résulte par ailleurs d'aucune stipulation des pièces particulières du marché que des pénalités de retard étaient encore susceptibles d'être infligées postérieurement à la réception des travaux ; que, dans ces conditions, la PROVINCE DES ILES LOYAUTE, qui ne pouvait pas appliquer des pénalités de retard d'un montant de 67 249 196 F CFP pour la période allant du 15 septembre 2002 au 13 octobre 2006, ne pouvait donc pas légalement émettre à l'encontre de la société Dumez-GTM Calédonie un titre exécutoire de 54 456 396 F CFP correspondant à la différence entre les acomptes déjà versés et le montant réel du marché après application desdites pénalités ;

Considérant en revanche qu'il résulte de l'instruction, et en particulier de l'état des sommes dues du 17 février 2009 et du tableau annexe indiquant précisément les numéros de mandats et les montants de ces mandats, qui ne sont pas sérieusement contestés, que les acomptes qu'a versés la PROVINCE DES ILES LOYAUTE à la société Dumez-GTM Calédonie au titre des lots n° 2 et 3 du marché en cause se sont élevés, en définitive, à la somme de 208 526 804 F CFP ; que, compte tenu du montant total des lots n°2 et n°3, qui s'élève, sans les pénalités, à 221 319 604 F CFP (80 666 749 F CFP + 135 492 333 F CFP + 5 160 522 F CFP ), la société Dumez-GTM Calédonie a seulement droit, au titre du solde du marché, à la somme de 12 792 800 F CFP, assortie des intérêts moratoires à la date non contestée du 25 juin 2007 et non à la somme de 12 841 901 F CFP comme elle le soutient ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la PROVINCE DES ILES LOYAUTE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie l'a condamnée à verser à la société Dumez-GTM Calédonie, au titre du solde du marché, une somme excédant 12 792 800 F CFP et à demander, dans cette mesure, l'annulation de ce jugement ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Dumez-GTM Calédonie, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante pour l'essentiel, verse à la PROVINCE DES ILES LOYAUTE la somme demandée par celle-ci au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a en revanche lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la PROVINCE DES ILES LOYAUTE le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Dumez-GTM Calédonie et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0900127 du 17 novembre 2009 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, en tant qu'il condamne la PROVINCE DES ILES LOYAUTE à verser à la société Dumez-GTM Calédonie une somme excédant 12 792 800 F CFP, est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la PROVINCE DES ILES LOYAUTE est rejeté.

Article 3 : La PROVINCE DES ILES LOYAUTE versera à la société Dumez-GTM Calédonie une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 10PA01373


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA01373
Date de la décision : 22/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: Mme DESCOURS GATIN
Avocat(s) : ANCEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-11-22;10pa01373 ?
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