Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 juin 2009 et
30 septembre 2009, présentés pour Mme Françoise A, demeurant ..., par la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0607181/5 en date du 9 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant d'une part, à l'annulation de la décision du
7 mars 2006 du président de l'Assemblée nationale rejetant sa demande d'indemnisation des différents préjudices qu'elle estime avoir subi et, d'autre part, à la condamnation de l'Assemblée nationale à lui verser la somme de 515 294 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter de sa demande ;
2°) d'annuler ladite décision ;
3°) de condamner l'Assemblée nationale à lui verser la somme de 515 294 euros sauf à parfaire, outre les intérêts de droit et les intérêts capitalisés ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2011 :
- le rapport de M. Vinot, rapporteur,
- les conclusions de M. Dewailly, rapporteur public,
- les observations de Me Baloul, représentant la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, pour Mme A,
- et les observations de Me de Geoffroy, représentant la SCP de Bore et Salve de Bruneton, pour l'Assemblée nationale ;
Considérant que Mme A, qui a exercé pendant plusieurs années les fonctions de sténographe auprès de l'Assemblée nationale, a cessé d'être employée par cette dernière à la suite d'une réorganisation du service des comptes rendus ; qu'elle a présenté une requête à caractère indemnitaire devant le Tribunal administratif de Paris qui a fait l'objet d'un rejet par un jugement en date du 9 avril 2009 ; que la requérante demande à la Cour administrative d'appel d'annuler ce jugement et de faire droit à ses demandes pécuniaires ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que la requérante soutient que le jugement est insuffisamment motivé, faute d'avoir précisé en quoi l'Assemblée nationale aurait valablement infirmé l'existence des promesses de recourir encore à ses services à l'avenir et en quoi elle n'aurait pas justifié de l'importance des préjudices allégués par elle et que par suite ce jugement encourt l'annulation ; que toutefois le tribunal administratif a indiqué de manière détaillée pour quelles raisons elle ne pouvait pas valablement se prévaloir d'avoir occupé un emploi à caractère permanent en vertu d'un engagement contractuel durable ; qu'en outre, en l'absence d'un tel engagement, la requérante ne pouvait utilement invoquer l'existence de promesses tendant à le proroger ; que par suite elle n'est pas fondée à soutenir que le jugement doit être regardé comme irrégulier par insuffisance de motivation ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
Considérant que la requérante soutient qu'en déduisant l'inexistence du besoin d'un emploi permanent du seul caractère variable des horaires qu'elle effectuait, le tribunal a commis une erreur de droit ; qu'en effet seules peuvent être qualifiés de vacataires les agents recrutés pour accomplir des tâches précises et ponctuelles ; qu'elle a exercé pendant plus de vingt ans ans les fonctions de rédacteur des débats au sein de l'Assemblée nationale, y compris entre 1985 et 1988, contrairement à ce qu'a retenu le jugement de première instance ; qu'elle doit dès lors être regardée comme un agent contractuel de l'Assemblée nationale, ayant fait l'objet au terme de son engagement d'une mesure de licenciement ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que la requérante ne justifie pas avoir perçu de vacations de manière continue, tous les mois, pendant la période d'une vingtaine d'années au cours de laquelle elle prétend avoir exercé des fonctions en tout point comparables à celles des rédacteurs des débats titulaires ; qu'en particulier les fiches de paye fournies n'établissent pas une parfaite continuité de travail et de rémunération dans cet emploi, contrairement à la situation desdits rédacteurs des débats titulaires ; que les attestations de personnels titulaires de l'Assemblée nationale ayant travaillé avec la requérante ne démontrent pas davantage une telle continuité, quand bien même elles permettent de considérer que la requérante a effectué assez régulièrement des vacations pendant ces années ; que par suite
Mme A n'est pas fondée à soutenir qu'elle occupait en fait un emploi à caractère permanent, devant être pérennisé, au lieu d'accomplir une série de vacations à caractère ponctuel ;
Considérant que la requérante fait valoir que contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, l'emploi d'un vacataire pour satisfaire un besoin permanent constitue une faute de la part de la personne publique, de nature à engager sa responsabilité ; qu'il en va de même de l'attitude consistant à l'employer en qualité de travailleur indépendant ; que toutefois il résulte de ce qui précède que sa situation était fort différente de celle des titulaires et qu'elle ne pouvait prétendre occuper un emploi permanent à temps complet, les tâches qu'elle accomplissait ayant finalement été transférées à des personnels titulaires ; que par suite elle n'est pas fondée à soutenir que la rupture de cet engagement présente un caractère fautif ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que ses activités au profit de l'Assemblée nationale ont pris fin à la suite d'un licenciement ; que par suite les différents moyens tirés du caractère irrégulier d'une supposée décision de licenciement doivent être regardés comme inopérants ;
Considérant, ensuite, que la requérante soutient qu'elle est fondée à revendiquer l'indemnisation du préjudice financier lié à son travail dans le cadre d'un statut juridiquement irrégulier, pendant plus de vingt ans, qui l'a privée d'allocations de chômage, de ses droits à congés maladie et maternité ; que toutefois elle ne justifie pas avoir été privée à une période de son travail de sténographe de tels avantages sociaux, alors qu'elle a touché des indemnités de chômage de l'Assemblée nationale, ainsi qu'il a été dit plus haut ; qu'elle n'est par suite pas fondée à rechercher la responsabilité de l'Assemblée nationale pour ce motif ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction, et notamment des documents à caractère pécuniaire produits par Mme A, que celle-ci ne justifie avoir perçu des vacations, que de manière irrégulière et pour des montants parfois très différents d'un mois à l'autre ; qu'elle a par ailleurs perçu des indemnités de chômage de l'Assemblée nationale pour certaines périodes, ce qui exclut l'hypothèse d'un travail à caractère permanent comparable à celui d'un fonctionnaire titulaire ou d'un contractuel en contrat à durée indéterminée ; qu'ainsi le moyen ne peut être retenu ;
Considérant, en dernier lieu, que la requérante soutient que la promesse de l'Assemblée nationale de continuer à faire appel aux anciens vacataires pour remplir les fonctions de sténographes n'a pas été tenue ; que toutefois le courrier de l'Assemblée nationale envoyé aux sténographes pour indiquer que seuls ceux qui acceptaient d'être rémunérés sous forme d'honoraires se verraient confier d'autres missions n'impliquait pas que de telles missions leur seraient confiées pendant plusieurs années après le changement de mode de rémunération ; que par suite la requérante n'est pas fondée à se prévaloir de promesses de l'Assemblée nationale qui n'auraient pas été tenues ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à demander la condamnation de l'Assemblée nationale à lui verser les dommages et intérêts demandés ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Assemblée nationale, qui n'est pas, en l'espèce, la partie perdante, la somme que la requérante demande à ce titre ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la requérante la somme que l'Assemblée nationale demande à ce titre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'Assemblée nationale tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 09PA03446