Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2009, présentée pour l'ETABLISSEMENT PUBLIC DE MAITRISE D'OUVRAGE DES TRAVAUX CULTURELS, dont le siège est situé 30 rue Château des Rentiers à Paris cedex 13 (75647), par la Selarl Molas ; l'ETABLISSEMENT PUBLIC DE MAITRISE D'OUVRAGE DES TRAVAUX CULTURELS (EMOC) demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0512404/3-3 en date du 24 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la condamnation solidaire des sociétés Eurovia, anciennement dénommée Cochery-Bourdin-Chaussée, et Suburbaine de canalisations et de grands travaux, composant le groupement d'entreprises du lot n° 402-01 traitement de surface-VRD du marché d'aménagement du rond-point du Carrousel du Louvre, et de la société d'architectes Pei-Cobb-Freed et Partners et de la société SETEC Travaux publics et industriels, composant le groupement de maîtrise d'oeuvre, à lui verser la somme de 73 237,13 euros TTC et, d'autre part, à la condamnation solidaire de la société Eurovia, de la société Auxiliaire de travaux publics et de la SA Entreprise H. Chevalier, composant le groupement d'entreprises du lot n° 503-00 chaussée pavée du marché, et de la société d'architectes Pei-Cobb-Freed et Partners et de la société SETEC Travaux publics et industriels, composant le groupement de maîtrise d'oeuvre, à lui verser la somme de 335 949 euros TTC, en réparation des désordres affectant les ouvrages de voirie ;
2°) de condamner solidairement la société Eurovia, anciennement dénommée Cochery-Bourdin-Chaussée, la société Auxiliaire de travaux publics, la société d'architectes Pei-Cobb-Freed et Partners et la société SETEC Travaux publics et industriels à lui verser la somme de 73 237,13 euros TTC, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 juillet 2005 et de la capitalisation de ces intérêts ;
3°) de condamner solidairement la société Eurovia, la société Auxiliaire de travaux publics, la SA Entreprise H. Chevalier, la société d'architectes Pei-Cobb-Freed et Partners et la société SETEC Travaux publics et industriels à lui verser la somme de 335 949 euros TTC, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 juillet 2005 et de la capitalisation de ces intérêts ;
4°) de mettre à la charge solidaire des sociétés précitées la somme de 56 966,63 euros TTC, au titre des dépens ;
5°) de mettre à la charge solidaire des mêmes sociétés la somme de 10 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code des assurances ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 ;
Vu la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985
Vu le décret n° 83-958 du 2 novembre 1983 ;
Vu le décret n° 98-387 du 19 mai 1998 ;
Vu le décret n° 2010-818 du 14 juillet 2010 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2011 :
- le rapport de M. Dellevedove, rapporteur,
- les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public,
- les observations de Me Coget, substituant Me Molas, pour l'OPERATEUR DU PATRIMOINE ET DES PROJETS IMMOBILIERS DE LA CULTURE, de Me Chevalier, substituant Me Renaud Roustan, pour la SA Entreprise H. Chevalier, et celles de Me Lévy, substituant Me Foussard, pour la Ville de Paris ;
- et connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 7 juillet 2011, présentée pour l'OPPIC et l'État, par Me Molas, et celle, enregistrée le 21 juillet 2011, présentée pour la SA Entreprise H. Chevalier, par la SCP Renaud-Roustan ;
Considérant que, dans le cadre de l'opération d'aménagement du rond-point du Carrousel du Louvre, l'Etablissement public du Grand Louvre (EPGL) a, par un marché en date du 3 juin 1993, confié l'exécution du lot n° 402.01 traitement de surface VRD au groupement d'entreprises solidaires formé par les sociétés Cochery-Bourdin-Chaussée, dénommée désormais Eurovia, et Suburbaine de canalisations et de grands travaux, aux droits de laquelle vient la société SPAC, pour le prix global et forfaitaire de 10 973 274,05 francs TTC, et l'exécution du lot n° 503-Chaussée pavée au groupement d'entreprises solidaires constitué des sociétés Cochery-Bourdin-Chaussée, société Auxiliaire de travaux publics et SA Entreprise H. Chevalier, pour un prix global et forfaitaire de 20 677 218,56 francs TTC ; que, par un marché en date du 22 septembre 1992 modifié par l'avenant n° 1 du 8 octobre 1993, la maîtrise d'oeuvre et la coordination du chantier ont été confiées au groupement solidaire constitué de l'agence Pei-Cobb-Freed et Partners, société d'architectes, et de la société SETEC Travaux publics et industriels, bureau d'études ; que les travaux ont été réceptionnés avec réserves le 12 juillet 1994, les réserves ayant été levées le 6 novembre 1995 ; qu'à la suite de l'apparition au début de l'année 1996 de désordres affectant les ouvrages de voirie ainsi réalisés, le Tribunal administratif de Paris, sur requête de l'Etablissement public du Grand Louvre, enregistrée le 9 mai 1996, a diligenté, par une ordonnance de référé en date du 29 mai 1996, une expertise dont le rapport a été déposé le 14 avril 2003 ; que l'EPGL a remis les espaces du Carrousel du Louvre à l'État à compter du 31 décembre 1996 ; que l'ETABLISSEMENT PUBLIC DE MAITRISE D'OUVRAGE DES TRAVAUX CULTURELS (EMOC), succédant dans ses droits et obligations à l'EPGL conformément au décret du 19 mai 1998 qui en porte création, a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner solidairement les constructeurs à l'indemniser des conséquences dommageables des désordres en cause sur le fondement de la responsabilité décennale ; que l'ETABLISSEMENT PUBLIC DE MAITRISE D'OUVRAGE DES TRAVAUX CULTURELS, désormais dénommé OPERATEUR DU PATRIMOINE ET DES PROJETS IMMOBILIERS DE LA CULTURE (OPPIC), fait appel du jugement en date du 24 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme irrecevable pour défaut de qualité à agir ;
Sur les conclusions présentées par le ministre de la culture et de la communication :
Considérant que l'Etat, qui n'était pas partie en première instance, n'a pas qualité pour faire appel du jugement entrepris ; que, dès lors, ces conclusions sont irrecevables ;
Sur les conclusions présentées par l'EMOC :
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les premiers juges se sont bornés à répondre au moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande pour défaut de qualité à agir de l'EMOC, qui avait été soulevé en défense par les constructeurs, et n'ont pas soulevé ce moyen d'office ; que, dès lors, l'EMOC n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité, faute pour le tribunal administratif d'avoir communiqué aux parties un moyen soulevé d'office ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 12 juillet 1985 susvisée relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée : Les dispositions de la présente loi sont applicables à la réalisation de tous ouvrages de bâtiment ou d'infrastructure (...) dont les maîtres d'ouvrage sont : / 1° L'État et ses établissements publics (...) ; qu'aux termes de l'article 2 de cette loi : Le maître de l'ouvrage est la personne morale, mentionnée à l'article premier, pour laquelle l'ouvrage est construit. Responsable principal de l'ouvrage, il remplit dans ce rôle une fonction d'intérêt général dont il ne peut se démettre (...) ; qu'aux termes du dernier alinéa de ce même article 2 ajouté par l'ordonnance n° 2004-566 du 17 juin 2004 : III- Lorsque l'Etat confie à l'un de ses établissements publics la réalisation d'ouvrages ou de programmes d'investissement, il peut décider que cet établissement exercera la totalité des attributions de la maîtrise d'ouvrage ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : Dans la limite du programme et de l'enveloppe financière prévisionnelle qu'il a arrêtés, le maître de l'ouvrage peut confier à un mandataire, dans les conditions définies par la convention mentionnée à l'article 5, l'exercice, en son nom et pour son compte, de tout ou partie des attributions suivantes de la maîtrise d'ouvrage : (...) Le mandataire représente le maître de l'ouvrage à l'égard des tiers dans l'exercice des attributions qui lui ont été confiées jusqu'à ce que le maître de l'ouvrage ait constaté l'achèvement de sa mission dans les conditions définies par la convention mentionnée à l'article 5. Il peut agir en justice. ; qu'aux termes de l'article 6 de cette loi : ... Le maître de l'ouvrage peut recourir à l'intervention d'un conducteur d'opération pour une assistance générale à caractère administratif, financier et technique (...) / La mission de conduite d'opération (...) fait l'objet d'un contrat ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 2 novembre 1983 susvisé portant création de l'Etablissement public du Grand Louvre : L'établissement public du Grand Louvre a pour mission de concevoir et de conduire l'aménagement du domaine national du Louvre et des Tuileries (...) / A cette fin : / L'établissement réalise ou coordonne, selon le cas, les études, consultations ou concours à caractère national ou international nécessaires. Il propose au ministre chargé de la culture le schéma d'aménagement, d'organisation et de fonctionnement du Grand Louvre. / Il réalise ou coordonne, selon le cas, le programme de l'ensemble des travaux neufs, d'entretien et de restauration à réaliser sur le domaine, arrêté sur sa proposition par le ministre chargé de la culture (...) ; qu'aux termes de l'article 3 de ce décret : L'établissement remettra au ministre de tutelle, au fur et à mesure de leur agencement, les parties du domaine qu'il aura aménagées (...) ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 19 mai 1998 susvisé portant création de l'Etablissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels : L'établissement [public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels] a pour mission d'assurer, à la demande et pour le compte de l'Etat, tout ou partie des attributions, telles qu'elles sont définies par les articles 3 et 6 de la loi du 12 juillet 1985 susvisée, de la maîtrise d'ouvrage des opérations de construction, d'aménagement, de réhabilitation, de restauration, de gros entretien ou de réutilisation d'immeubles appartenant à l'Etat, y compris d'immeubles remis en dotation à des établissements publics de l'Etat, et présentant un intérêt culturel (...) ; qu'aux termes de l'article 4 de ce décret : Pour les immeubles affectés à l'État, les opérations mentionnées au premier alinéa de l'article 2 sont confiées à l'Etablissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels par une convention de mandat conclu entre celui-ci et le ministre chargé de la culture (...) ; qu'aux termes de l'article 17 du même décret : A compter du premier jour du quatrième mois suivant la date de publication du présent décret (...) l'Etablissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels se substitue aux droits et obligations résultant des conventions, autres que les contrats de travail, passées par l'Etablissement public du Grand Louvre ; que le décret du 14 juillet 2010 susvisé relatif à l'OPPIC a notamment, par son article 14, modifié la dénomination de l'EMOC ;
Considérant qu'en vertu des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, l'action en garantie décennale appartient au maître ou à l'acquéreur de l'ouvrage ; qu'il s'ensuit, d'une part, qu'à la date d'introduction de la demande, le 25 juillet 2005, l'EMOC n'avait qualité pour mettre en jeu la responsabilité décennale des constructeurs ni sur le fondement de l'article 17 du décret constitutif du 19 mai 1998 susmentionné au titre des droits et obligations qu'il tenait de l'EPGL, dès lors que les ouvrages objets du litige avaient été remis à l'État par ce dernier dès le 31 décembre 1996, ni au titre des dispositions spéciales combinées de la loi du 12 juillet 1985 susvisée et de l'article 2 du décret du 19 mai 1998 précité, dans la mesure où la convention de mandat prévue à l'article 4 de ce décret n'est intervenue que le 4 août 2006 ; qu'il s'ensuit, d'autre part, que si, par cette convention, l'État a entendu expressément donner mandat à l'EMOC, comme il lui appartenait de le faire en vertu des dispositions précitées, pour exercer toutes actions en justice concernant les désordres affectant la voirie du Carrousel du Louvre et pour recouvrer les indemnités éventuelles correspondantes sur un compte d'attente ouvert dans sa comptabilité, cette convention n'a pu régulariser l'action de l'EMOC, devenu l'OPPIC, au regard de sa qualité à agir au titre de la garantie décennale des constructeurs dès lors qu'à la date d'intervention de la convention de mandat le délai de garantie décennale était expiré, celui-ci n'ayant été interrompu que par la demande en référé ayant donné lieu à l'ordonnance du 29 mai 1996 ; qu'en tout état de cause, contrairement à ce que soutient l'OPPIC, l'intervention des ordonnances de référé du 7 avril 1998 et du 27 août 2002 étendant la mission d'expertise susmentionnée n'a pu interrompre à nouveau le délai de garantie décennale au profit de l'EMOC, devenu l'OPPIC, dès lors que ces demandes d'extension d'expertise ont été formulées successivement par la Ville de Paris et par la société SETEC Travaux publics et industriels et non par l'Etat, alors que l'EMOC ne pouvait à ces dates accomplir aucun acte de nature à interrompre ce délai dans les conditions prévues par l'article 2244 du code civil ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'EMOC, devenu l'OPPIC, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a jugé son action irrecevable et a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des constructeurs, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme demandée par l'OPPIC au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'OPPIC des sommes de 2 000 euros à verser chacune respectivement à la société Eurovia, à la société SPAC, à la société Auxiliaire de travaux publics, à la SA Entreprise H. Chevalier et à la société SETEC Travaux publics et industriels, au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
Considérant, en second lieu, que la Ville de Paris, qui n'a été appelée en la cause que pour produire des observations et qui n'aurait pas eu qualité pour former tierce-opposition si elle n'avait pas été présente à l'instance, ne peut être regardée comme partie à l'instance au sens des dispositions précitées ; que, dès lors, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête susvisée de l'EMOC est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées pour l'Etat (ministre de la culture et de la communication) sont rejetées.
Article 3 : L'OPPIC versera à chacune des sociétés Eurovia, SPAC, société Auxiliaire de travaux publics, SA Entreprise H. Chevalier et SETEC Travaux publics et industriels, une somme de 2 000 euros, au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.
Article 4 : Les conclusions de la Ville de Paris présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 09PA02505