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18/10/2011 | FRANCE | N°10PA02215

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 18 octobre 2011, 10PA02215


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés les 3 mai et 2 août 2010, présentés par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0915863/3-1 du 24 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 juin 2009 refusant de délivrer à M. Khaled A un certificat de résidence d'algérien, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit à la frontière ;

2°) de rejeter la demande de M. A ;

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Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés les 3 mai et 2 août 2010, présentés par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0915863/3-1 du 24 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 juin 2009 refusant de délivrer à M. Khaled A un certificat de résidence d'algérien, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit à la frontière ;

2°) de rejeter la demande de M. A ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2011 :

- le rapport de M. Rousset, rapporteur,

- les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public,

- et les observations de Me Madre, substituant Me Costamagna, pour M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant algérien né en 1951 qui déclare être entré en France en 1970, a bénéficié de certificats de résidence algérien régulièrement renouvelés entre 1984 et 1999 ; qu'il a été condamné, le 4 décembre 1998, par la Cour d'assises de Seine Saint Denis à huit ans d'emprisonnement pour viol en réunion ; qu'il a été incarcéré du 26 décembre 1996 au 28 décembre 2001 ; que l'arrêté préfectoral d'expulsion pris à son encontre le 10 février 2000 n'a pas été exécuté et a été abrogé le 5 février 2009 ; que la demande de titre de séjour qu'il a présentée sur le fondement des articles 6 1° et 6 5° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 a été rejetée par un arrêté préfectoral du 9 juin 2009 ; que le PREFET DE POLICE fait appel du jugement du 24 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 juin 2009 refusant de délivrer à M. A un certificat de résidence algérien, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit à la frontière ;

Sur le désistement allégué du PREFET DE POLICE :

Considérant qu'aux termes de l'article R 612-5 du code de justice administrative : Devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, si le demandeur, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée, n'a pas produit le mémoire complémentaire dont il avait expressément annoncé l'envoi ou, dans les cas mentionnés au second alinéa de l'article R. 611-6, n'a pas rétabli le dossier, il est réputé s'être désisté ; qu'aux termes de l'article R 775-5 du code de justice administrative : Lorsqu'une requête sommaire mentionne l'intention du requérant de présenter un mémoire complémentaire, la production annoncée doit parvenir au greffe du tribunal administratif dans un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la requête a été enregistrée. / Si ce délai n'est pas respecté, le requérant est réputé s'être désisté à la date d'expiration de ce délai, même si le mémoire complémentaire a été ultérieurement produit. Il est donné acte de ce désistement ;

Considérant que l'article R. 775-5 du code de justice administrative précité est spécifiquement et exclusivement applicable aux demandes formées devant les tribunaux administratifs contre les décisions relatives au séjour mentionnées au I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assorties d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'il s'ensuit que M. A ne peut invoquer utilement le bénéfice de ces dispositions pour soutenir que le PREFET DE POLICE, qui a déposé son mémoire complémentaire plus de quinze jours après l'enregistrement de sa requête, se serait désisté de son appel ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ;

Considérant que M. A faisait valoir devant le tribunal, qui a fait droit à ce moyen, qu'il réside habituellement en France depuis 1970, que sa fille et ses petits enfants ont la nationalité française, qu'il reste très lié à son ex-épouse également française, qu'il a toujours travaillé et poursuivi des études depuis qu'il vit en France, qu'il s'est investi dans de nombreuses activités associatives, qu'il a fait preuve d'une conduite exemplaire durant son incarcération et qu'ainsi, alors qu'il est parfaitement intégré à la société française et qu'il y a le centre de ses intérêts personnels et familiaux, l'arrêté contesté a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que toutefois, s'il n'est pas sérieusement contestable que M. A réside, au moins depuis 1991, de manière habituelle en France, il est également constant que ce dernier est divorcé, qu'il ne subvient pas aux besoins de sa fille unique qui est majeure, et qu'il est ainsi sans charge de famille ; qu'il n'est, par ailleurs, pas dépourvu d'attaches familiales en Algérie, pays où réside sa fratrie et dans lequel il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 20 ans ; qu'en outre, il ressort de la synthèse socio-éducative établie le 18 avril 2002 par la conseillère d'insertion et de probation du service pénitentiaire de l'Oise, produite par M. A et non sérieusement contredite par les autres pièces du dossier, que l'intimé est retourné en Algérie de 1979 à 1984 ; qu'enfin, M. A ne saurait soutenir qu'il est parfaitement intégré à la société française alors qu'il a été condamné à huit ans d'emprisonnement pour viol en réunion, qu'il n'occupe pas d'emploi stable depuis sa sortie de prison en 2001, qu'il ne conteste pas, comme le faisait valoir le PREFET DE POLICE devant le tribunal, n'avoir jamais déclaré ses revenus lorsqu'il exerçait, avant son incarcération, une activité professionnelle en France et qu'il n'apporte pas la preuve de son assiduité et de sa réussite aux stages et formations auxquels il soutient avoir participé ; que, dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que, contrairement à ce qui a été jugé, l'arrêté contesté n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 6 5° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 6 5° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 pour annuler l'arrêté du 9 juin 2009 en litige ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : 1° au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant... ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'extrait K d'immatriculation au registre du commerce et du relevé de cotisations retraite des commerçants et industriels produits par l'intéressé, que M. A, qui a bénéficié de titres de séjour régulièrement renouvelés entre 1984 et 1999, résidait habituellement en France, au moins entre 1991, date à laquelle il a repris l'exploitation d'un débit de boissons à Bondy et le 26 décembre 1996, date à laquelle il a été incarcéré ; que si la période qu'il a passé en détention jusqu'au 28 décembre 2001 ne peut s'imputer être prise en compte dans le calcul de la durée de résidence mentionnée par les dispositions de l'article 6 1° de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968, il est en revanche admis par le PREFET DE POLICE que l'intéressé était présent, de manière effective et continue, sur le territoire national, entre sa sortie de prison et le 9 juin 2009, date de l'arrêté en litige ; qu'il s'ensuit que le PREFET DE POLICE a méconnu les stipulations de l'article 6 1° de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 en refusant de délivrer à M. A, qui justifiait, compte non tenu de son temps d'incarcération, d'une résidence habituelle en France depuis plus de dix ans, le certificat de résidence qu'il sollicitait sur le fondement de ces dispositions ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la demande, que le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 juin 2009 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :

Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Costamagna renonce à percevoir la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de ce dernier une somme de 1 000 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Me Costamagna une somme de 1 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

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N° 10PA02215


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA02215
Date de la décision : 18/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Olivier ROUSSET
Rapporteur public ?: Mme DESCOURS GATIN
Avocat(s) : COSTAMAGNA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-10-18;10pa02215 ?
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