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21/09/2011 | FRANCE | N°10PA03335

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 21 septembre 2011, 10PA03335


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juillet et 19 août 2010, présentés par le PREFET DE POLICE, qui demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0914791/6-2 du 28 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris, d'une part, a annulé l'arrêté du 26 août 2009 refusant de délivrer un titre de séjour à M. Diadié A et lui faisant obligation de quitter le territoire français, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de sa notification et, enfin, a mis à la charge de

l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juillet et 19 août 2010, présentés par le PREFET DE POLICE, qui demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0914791/6-2 du 28 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris, d'une part, a annulé l'arrêté du 26 août 2009 refusant de délivrer un titre de séjour à M. Diadié A et lui faisant obligation de quitter le territoire français, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de sa notification et, enfin, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 septembre 2011 :

- le rapport de M. Magnard, rapporteur,

- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public,

- et les observations de Me Elbaz, pour M. A ;

Considérant que, par un arrêté du 26 août 2009, le PREFET DE POLICE a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que le Tribunal administratif de Paris, saisi par M. A, a annulé cet arrêté par un jugement du 28 mai 2010, a enjoint au PREFET DE POLICE de délivrer à M. A un titre de séjour dans un délai de deux mois suivant la notification de ce jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement à l'intéressé de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que le PREFET DE POLICE fait appel de ce jugement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M. A :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 775-10 du code de justice administrative relatif au contentieux des décisions relatives au séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français : Le délai d'appel est d'un mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification du jugement lui a été faite ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le jugement du Tribunal administratif de Paris du 28 mai 2010 a été notifié le 4 juin 2010 au PREFET DE POLICE ; que le délai d'appel d'un mois prévu par les dispositions précitées, qui est un délai franc, expirait le 4 juillet 2010 ; que, ce jour étant un dimanche, le délai a été prolongé jusqu'au premier jour ouvrable suivant cette date ; que, par suite, la requête du PREFET DE POLICE, enregistrée au greffe de la Cour le lundi 5 juillet 2010, n'est pas tardive ;

Sur les conclusions principales du PREFET DE POLICE :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, entré en France en septembre 1999 selon ses déclarations, à l'âge de 26 ans, a fait l'objet d'un rejet définitif de sa demande d'asile, le 18 février 2000, par la Commission des recours des réfugiés ; que l'intéressé a fait usage d'une fausse carte de résident mentionnant une validité courant jusqu'en 2008, grâce à laquelle il a pu exercer illégalement les activités professionnelles dont il entend se prévaloir devant la Cour ; qu'en outre, les bulletins de salaire versés en première instance comportant des numéros de sécurité sociale différents, rien ne permet d'établir qu'ils concernent dans leur totalité la personne de l'intéressé ; que M. A est célibataire et sans charge de famille en France ; que sa relation avec une ressortissante allemande n'est pas démontrée ; qu'il n'est pas dépourvu d'attache au Mali, où réside l'intégralité de sa famille, en particulier sa mère et sa fratrie ; qu'ainsi, et alors même que M. A travaille en France en qualité de cuisinier et qu'il y aurait fait des efforts d'intégration, le PREFET DE POLICE ne saurait être regardé comme ayant commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ; qu'il suit de là que c'est à tort que les premiers juges ont annulé pour ce motif son arrêté du 26 août 2009 ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A, tant devant le Tribunal administratif de Paris, que devant elle ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers justifiant résider habituellement en France depuis plus de dix ans, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, qui a soutenu devant les premiers juges résider habituellement en France depuis 1998, a fait usage, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, d'une fausse carte de résident mentionnant une validité courant jusqu'en 2008 ; que, les pièces produites au titre de la période comprise entre 2000 et 2009, qui consistent notamment en des bulletins de salaire comportant des numéros de sécurité sociale différents, ainsi que des avis de non-imposition et des attestations Assedic, ne présentent pas un caractère suffisamment probant, compte tenu, en particulier, des faux documents sur lesquels ils s'appuient et dont l'usage n'est pas contesté par l'intéressé ; qu'il résulte, en outre, des demandes d'autorisation de séjour présentées par l'intéressé que celui-ci a déclaré être entré en France le 20 septembre 1999 ; que les attestations dépourvues de valeur probantes et les courriers d'une banque malienne, dont il n'est d'ailleurs pas contesté qu'ils s'adressent à un homonyme, produits au dossier de première instance, ne permettent en tout état de cause pas d'établir un séjour habituel en France antérieur à la date susmentionnée ; qu'ainsi, M. A ne justifie pas qu'à la date de l'arrêté litigieux, soit le 26 août 2009, il résidait habituellement en France depuis plus de dix ans ; que, dans ces conditions, le PREFET DE POLICE n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de refuser de lui délivrer le titre de séjour sollicité ; que, d'autre part, en se bornant à se prévaloir, dans les circonstances susrappelées, de son séjour en France depuis 1999 et de l'exercice régulier d'une activité professionnelle de cuisinier, M. A n'établit pas que son admission au séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance, par l'arrêté litigieux, des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l' intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ; que, pour les mêmes motifs que ceux indiqués précédemment en ce qui concerne le motif d'annulation retenu par les premiers juges, l'arrêté préfectoral du 26 août 2009 ne peut être regardé comme portant au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il ne peut donc être regardé comme ayant été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 26 août 2009, lui a enjoint de délivrer à M. A un titre de séjour dans un délai de deux mois suivant la notification de ce jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement à l'intéressé de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ; qu'en vertu de ces dispositions, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. A doivent, dès lors, être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0914791/6-2 du 28 mai 2010 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ainsi que ses conclusions devant la Cour sont rejetées.

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N° 10PA03335


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA03335
Date de la décision : 21/09/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : ELBAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-09-21;10pa03335 ?
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