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07/06/2011 | FRANCE | N°10PA01991

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 07 juin 2011, 10PA01991


Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2010, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 0705863-0705864-0913736-0913738/3-1 en date du 2 février 2010, en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Paris a annulé ses arrêtés en date du 29 avril 2009 refusant de délivrer un titre de séjour à M. Wenbin A et à Mme Hongrui A, leur faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits et a enjoint à l'administration de leur délivr

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Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2010, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 0705863-0705864-0913736-0913738/3-1 en date du 2 février 2010, en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Paris a annulé ses arrêtés en date du 29 avril 2009 refusant de délivrer un titre de séjour à M. Wenbin A et à Mme Hongrui A, leur faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits et a enjoint à l'administration de leur délivrer des cartes de séjour temporaires portant la mention vie privée et familiale ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. et Mme A devant le Tribunal administratif de Paris ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mai 2011 :

- le rapport de M. Dellevedove, rapporteur,

- les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public,

- et les observations de Me Stambouli, pour M. et Mme A ;

Considérant que M. et Mme A, nés respectivement les 24 avril 1972 et 17 novembre 1973, de nationalité chinoise, déclarent être entrés en France en 1995 et 1996 ; qu'ils ont sollicité le 29 octobre 2008 leur admission exceptionnelle au séjour en qualité de salariés sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le PREFET DE POLICE fait appel du jugement en date du 2 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé ses arrêtés en date du 29 avril 2009 refusant le séjour à M. et Mme A, leur faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être reconduit et a enjoint à l'administration de leur délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ;

Sur les conclusions du préfet de police :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. et Mme A ont fait valoir devant les premiers juges l'ancienneté de leur entrée en France et la vie privée et familiale qu'ils mènent avec leur enfant né en 2001 et scolarisé sur le territoire national ainsi que la présence de la soeur et des parents de M. A ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que leur résidence habituelle en France n'est pas établie avant l'année 2000, dès lors qu'ils se bornent à produire pour les années antérieures quelques documents épars et, en particulier, pour l'année 1999, seulement deux factures au nom de M. A datés des mois de juillet et août ; que les parents de M. A sont également en situation irrégulière et que, ainsi que le fait valoir à juste titre le préfet, rien ne faisait obstacle, aux dates d'intervention des arrêtés contestés, à ce que la cellule familiale composée du couple avec leur enfant encore jeune se reconstitue dans leur pays d'origine où ils ont toujours vécu au moins jusqu'à 22 et 23 ans, où ils se sont mariés en 1996 et où résident les parents et la fratrie de Mme A ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire, les arrêtés susvisés n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ils ont été pris ; que, dès lors, les arrêtés contestés n'ont pas méconnu les stipulations susmentionnées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le motif tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler les arrêtés susvisés en date du 29 avril 2009 refusant à M. et Mme A les titres de séjour qu'ils avaient sollicités, les obligeant de quitter le territoire français et fixant le pays de destination et pour enjoindre à l'administration de leur délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ; que, toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme A devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur la légalité des arrêtés du 29 avril 2009 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2 (...) ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail, qui s'est substitué à l'article L. 341-2 de ce code : Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ; qu'aux termes de l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse : La situation de l'emploi ou l'absence de recherche préalable de candidats déjà présents sur le marché du travail n'est pas opposable à une demande d'autorisation de travail présentée pour un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse souhaitant exercer une activité professionnelle dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur la liste annexée au présent arrêté ;

Considérant que M. et Mme A font valoir l'ancienneté de leur séjour en France et les emplois de cuisinier et de vendeuse qu'ils souhaitent respectivement exercer ; que, toutefois, les intéressés n'établissent pas résider habituellement en France avant l'année 2000, ainsi qu'il a été dit ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des décisions de refus d'autorisation de travail prises par le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Paris, saisi par le préfet de police des dossiers des époux A, que les emplois de cuisinier et de vendeuse, ne font pas partie des métiers reconnus en tension sur le marché du travail et ne figurent pas sur la liste annexée à l'arrêté susmentionné pour l'Île-de-France ; que, dès lors, d'une part, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en refusant de régulariser la situation administrative des époux au regard de l'admission exceptionnelle au séjour, le PREFET DE POLICE n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ; que, d'autre part, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour sur le fondement des dispositions susmentionnées, les intéressés n'établissant pas résider en France habituellement depuis plus de 10 ans à la date d'intervention des arrêtés contestés ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ; qu'aux termes de l'article R. 313-21 du code précité : Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ; que, d'une part, dans les circonstances exposées ci-dessus à propos du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et pour les mêmes motifs, les arrêtés litigieux n'ont pas méconnu les dispositions précitées ; que les mêmes circonstances ne sont pas davantage de nature à faire regarder lesdits arrêtés comme entachés d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle des intéressés ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention susvisée relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intérêt supérieur de l'enfant aurait été méconnu dès lors notamment qu'il était encore jeune à la date des arrêtés contestés et que rien ne faisait obstacle à ce qu'il poursuive sa scolarité dans le pays d'origine de ses parents.

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé ses arrêtés en date du 29 avril 2009 refusant à M. et Mme A les titres de séjour qu'ils avaient sollicités, les obligeant de quitter le territoire français et fixant le pays de destination et a enjoint à l'administration de leur délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris en date du 2 février 2010 est annulé en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif a annulé les arrêtés en date du 29 avril 2009 refusant de délivrer un titre de séjour à M. et Mme A, leur faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits et a enjoint à l'administration de leur délivrer des cartes de séjour temporaires portant la mention vie privée et familiale .

Article 2 : Les demandes présentées par M. et Mme A devant le Tribunal administratif de Paris tendant à l'annulation desdits arrêtés et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de leur délivrer des titres de séjour sont rejetées.

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N° 10PA01991


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA01991
Date de la décision : 07/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PIOT
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: Mme DESCOURS GATIN
Avocat(s) : STAMBOULI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-06-07;10pa01991 ?
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