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06/04/2011 | FRANCE | N°10PA00839

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 06 avril 2011, 10PA00839


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 février 2010, présentée par le PREFET DE POLICE ; le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0912915 du 31 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 2 juillet 2009 par lequel il a refusé à Mme née Mino Torres la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un titre de séjour et, enfin, a mis à la charge de l

'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice a...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 février 2010, présentée par le PREFET DE POLICE ; le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0912915 du 31 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 2 juillet 2009 par lequel il a refusé à Mme née Mino Torres la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un titre de séjour et, enfin, a mis à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme devant le Tribunal administratif de Paris ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mars 2011 :

- le rapport de Mme Dhiver, rapporteur,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

Considérant que, par la présente requête, le PREFET DE POLICE fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 2 juillet 2009 refusant à Mme le renouvellement de son titre de séjour au motif qu'il méconnaissait les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision de refus de délivrance d'un titre de séjour, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme , de nationalité colombienne, vit maritalement depuis mai 2008 avec un compatriote, titulaire d'une carte de résident, avec lequel elle a eu un enfant, né le 5 août 2008 ; qu'il ressort également des pièces du dossier que l'intimée est aussi mère de deux enfants mineurs, âgés de 16 et 10 ans à la date de la décision litigieuse, résidant dans son pays d'origine ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment au caractère récent de la vie commune de l'intéressée avec son compagnon, au fait qu'ils sont ressortissants du même pays et à la présence en Colombie de deux enfants mineurs dont l'un n'est âgé que de 10 ans, la décision du PREFET DE POLICE refusant à Mme la délivrance d'un titre de séjour n'a pas insuffisamment pris en considération l'intérêt supérieur de son fils vivant en France protégé par les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ; que, par suite, le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a annulé pour ce motif son arrêté du 2 juillet 2009 ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur la légalité externe de l'arrêté litigieux :

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 2 juillet 2009 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination a été signé par M. , qui avait reçu délégation pour signer de tels actes, par un arrêté du PREFET DE POLICE du 5 juin 2009 régulièrement publié au Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris le 12 juin suivant ;

Considérant, en second lieu, que, d'une part, l'arrêté litigieux par lequel le PREFET DE POLICE a refusé à Mme le renouvellement de son titre de séjour comporte l'énoncé circonstancié des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il est ainsi suffisamment motivé au regard des exigences de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ; qu'il résulte, d'autre part, des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007, que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation ;

Sur la légalité interne de l'arrêté litigieux :

Considérant, en premier lieu, qu'en précisant dans son arrêté que Mme était entrée en France le 29 septembre 2001 selon ses déclarations, le PREFET DE POLICE n'a pas fondé ses décisions sur des faits inexacts ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de résident peut être accordée : (...) 3° A l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du même code : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ;

Considérant que Mme s'est mariée le 9 octobre 2004 avec un ressortissant de nationalité française ; qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que les époux sont séparés depuis au moins le mois de mai 2008 et qu'une ordonnance de non conciliation a été rendue le 23 septembre 2008 ; que, par suite, en l'absence de communauté de vie à la date de la décision querellée, l'intimée n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions précitées du 3° de l'article L. 314-9 et du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, Mme s'est mariée le 9 octobre 2004 avec un ressortissant français, dont elle est désormais séparée ; qu'elle vit maritalement depuis mai 2008 avec un compatriote titulaire d'une carte de résident, avec lequel elle a eu un enfant, né le 5 août 2008 ; que, toutefois, elle est également mère de deux enfants mineurs vivant en Colombie ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la durée de la vie commune avec son compagnon et au fait qu'elle a conservé des attaches familiales fortes dans son pays d'origine, et nonobstant la circonstance qu'elle a occupé des emplois en contrats à durée indéterminée depuis juin 2005 et qu'elle a suivi une formation civique et linguistique, les décisions refusant à Mme la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français n'ont pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; qu'ainsi, ces décisions n'ont pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le PREFET DE POLICE n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions sur la situation de l'intéressée ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de résident peut être accordée : (...) 2° A l'étranger qui est père ou mère d'un enfant français résidant en France et titulaire depuis au moins trois années de la carte de séjour temporaire mentionnée au 6° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il remplisse encore les conditions prévues pour l'obtention de cette carte de séjour temporaire et qu'il ne vive pas en état de polygamie (...) ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du même code : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ; que, l'enfant de Mme né en France le 5 août 2008 n'ayant pas la nationalité française, l'intimée ne peut pas se prévaloir de ces dispositions ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 31 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 2 juillet 2009 et lui a enjoint de délivrer à Mme un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale et le rejet de la demande présentée par celle-ci devant ce tribunal ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0912915 du 31 décembre 2009 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris par Mme est rejetée.

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N° 08PA04258

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N° 10PA00839


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA00839
Date de la décision : 06/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. EGLOFF

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-04-06;10pa00839 ?
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