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24/02/2011 | FRANCE | N°10PA03854

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 24 février 2011, 10PA03854


Vu la requête, enregistrée le 29 juillet 2010, présentée pour M. Dramane A, demeurant ..., par Me Cosme ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001310/7 en date du 13 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 26 octobre 2009 par laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

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°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour temporai...

Vu la requête, enregistrée le 29 juillet 2010, présentée pour M. Dramane A, demeurant ..., par Me Cosme ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001310/7 en date du 13 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 26 octobre 2009 par laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour temporaire, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2011 :

- le rapport de Mme Renaudin, rapporteur,

- et les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public ;

Considérant que M. A, de nationalité malienne, entré en France le 12 novembre 2001 selon ses déclarations, a bénéficié d'autorisations provisoires de séjour en qualité d'étranger malade de septembre 2008 à septembre 2009 ; que le 26 octobre 2009 le préfet du Val-de-Marne a pris à son encontre un arrêté portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le pays de destination ; que M. A relève appel du jugement du 13 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision susmentionnée du 26 octobre 2009 du préfet du Val-de-Marne ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté contesté comporte dans ses visas et ses motifs les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde et qui permettent de vérifier que l'administration préfectorale a procédé à un examen de la situation particulière de M. A au regard des stipulations conventionnelles et des dispositions législatives et réglementaires applicables ; que par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que cette décision serait insuffisamment motivée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas de la décision du préfet du Val-de-Marne que celui-ci se serait à tort cru lié par l'avis donné par le médecin inspecteur de santé publique ; qu'il a au contraire lui-même, au vu des pièces du dossier et après avoir mentionné l'avis du médecin inspecteur de santé publique, porté une appréciation sur l'état de santé du requérant ;

Considérant, en troisième lieu, que l'avis susmentionné exprimé le 12 juin 2009 par le médecin inspecteur de santé publique, produit par le préfet en première instance, a été communiqué au requérant dans le cadre de l'instruction ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure en l'absence de communication de l'avis du médecin inspecteur de santé publique à l'intéressé manque en fait ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. ; que l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prévoit que l'avis mentionné ci-dessus est émis dans les conditions fixées par arrêté interministériel ; que l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999 pris pour l'application de ces dispositions prévoit que : Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - si l'intéressé peut effectivement ou non bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ; / - et la durée prévisible du traitement. / Il indique, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi. /. Cet avis est transmis au préfet par le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales. ;

Considérant que, conformément aux dispositions précitées, l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique mentionne que l'état de santé de M. A nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas toutefois entraîner actuellement de conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il ne pourrait avoir accès dans son pays d'origine à un traitement approprié si celui-ci devenait nécessaire ; que, tenu par le secret médical, le médecin inspecteur de santé publique n'avait pas à préciser les éléments particuliers relatifs à la pathologie de l'intéressé ni les prescriptions médicales nécessaires et les possibilités d'en bénéficier dans le pays d'origine ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'avis du médecin inspecteur doit être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des certificats médicaux produits par M. A, que ce dernier souffre d'une hépatite B diagnostiquée en septembre 2005 et pour laquelle il est régulièrement suivi à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière ; que, par son avis en date du 12 juin 2009, le médecin inspecteur de la santé publique a considéré que l'état de santé de M. A ne nécessitait une prise en charge médicale qu'à titre de surveillance biologique, dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité dans son état de santé actuel ; que si M. A a produit au dossier plusieurs certificats médicaux, dont ceux établis par le médecin du centre hospitalier qui le suit, ceux-ci confirment que si la forme de l'hépatite est à virus mutant, elle ne nécessite pas depuis 2005, et encore à la date de la décision contestée, de traitement antiviral, mais une surveillance régulière de manière à déceler une éventuelle évolution négative ; que les ordonnances, au demeurant postérieures à la décision contestée, produites par le requérant à l'appui de son dernier mémoire, ne suffisent pas à démontrer, que, comme il l'allègue, il fait désormais l'objet d'un traitement antiviral ; qu'un seul certificat du médecin du centre hospitalier qui le suit en date du 16 juin 2006 fait état de ce que la surveillance qui lui est nécessaire ne pourrait être réalisée dans son pays d'origine, sans apporter toutefois aucun élément de nature à corroborer cette affirmation ; que si des certificats émanant d'un médecin du comité médical de soutien pour les exilés (COMEDE) mentionnent qu'il existe un risque que M. A ne puisse pas bénéficier d'une prise en charge au Mali, ils se bornent à se référer aux indicateurs généraux des soins dans ce pays établis par l'organisation mondiale de la santé (OMS) et le programme des nations unies pour le développement (PNUD) ; que ces documents ne suffisent pas à remettre en cause l'avis du médecin inspecteur de santé publique ; que si M. A se prévaut d'un certificat du COMEDE en date du 19 février 2010, ce dernier ne peut avoir d'incidence sur la décision contestée dès lors qu'il lui est postérieur ; qu'en tout état de cause, ce certificat mentionne à nouveau que dans le cas de M. A le traitement antiviral n'est pas actuellement indiqué, mais qu'il doit effectuer de façon bi-annuelle un bilan clinique et biologique ; que le requérant ne produit aucun document médical de nature à démontrer qu'il n'aurait pas la possibilité de faire pratiquer ces examens dans son pays d'origine ; que de même, il se borne à affirmer qu'il ne dispose pas des ressources suffisantes pour accéder aux soins dans son pays, sans toutefois étayer cette allégation d'aucune précision ; que, par suite, en l'absence de pièces au dossier démontrant que l'état de santé de M. A se serait gravement détérioré et nécessiterait un traitement antiviral, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Val-de-Marne a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) et qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent du bénéfice de ces dispositions ; que M. A ne justifiant pas de la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Val-de-Marne n'était pas tenu de consulter cette commission avant de statuer sur sa demande de titre de séjour ; que, dans ces conditions, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté aurait été pris à la suite d'une procédure irrégulière ;

Considérant, en septième lieu, que selon les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. A fait valoir que, résidant en France depuis huit ans à la date de la décision contestée, il y a établi des liens personnels ; que les pièces qu'il verse au dossier ne justifient cependant aucunement, malgré l'ancienneté de sa présence en France, de l'intensité d'une vie sociale ou même professionnelle de l'intéressé ; qu'il est célibataire sans charge de famille ; que, dans ces circonstances, la décision contestée ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le préfet du Val-de-Marne n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

En ce qui concerne la décision contestée en tant qu'elle porte obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen, invoqué à l'encontre de la décision distincte portant obligation de quitter le territoire et tiré de l'illégalité du refus de titre de séjour, doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste commise par le préfet dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. A, qui reposent sur les mêmes arguments que ceux avancés à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment ;

Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut utilement être invoqué à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, laquelle n'impose pas à M. A de retourner dans son pays d'origine ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays à destination duquel M. A pourrait être reconduit d'office :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen, invoqué à l'encontre de la décision distincte fixant le pays de destination et tiré de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire, doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. (...) et qu'aux termes de l'article 3 de la même convention : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants (...) ;

Considérant que M. A fait valoir que son éloignement impliquerait qu'il soit exposé à un risque de mortalité en raison de sa maladie en violation des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que toutefois il ne démontre pas que son éloignement aurait, par lui-même, de telles conséquences alors que comme il a été dit précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne pourrait bénéficier d'une surveillance appropriée au Mali ; que, par suite, le moyen ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Val-de-Marne en date du 26 octobre 2009 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le pays de destination ; que, le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation doivent également être rejetées, de même que celles visant à mettre à la charge de l'Etat le versement de frais irrépétibles ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 10PA03854


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA03854
Date de la décision : 24/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Mathilde RENAUDIN
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : COSME

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-02-24;10pa03854 ?
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