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07/02/2011 | FRANCE | N°09PA04601

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 07 février 2011, 09PA04601


Vu la requête, enregistrée le 24 juillet 2009, présentée pour la société anonyme AZUR NET, prise en la personne de son représentant légal, société membre du groupe Atalian, dont le siège social est 107 rue Edith Cavell à Vitry-Sur-Seine (94400), par Me Heizmann ; la SA AZUR NET demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0615540/3-3 du 26 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a accueilli la demande de M. A tendant à l'annulation de la décision en date du 18 août 2006, par laquelle le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a a

nnulé la décision du 24 février 2006 de l'inspecteur du travail de Paris...

Vu la requête, enregistrée le 24 juillet 2009, présentée pour la société anonyme AZUR NET, prise en la personne de son représentant légal, société membre du groupe Atalian, dont le siège social est 107 rue Edith Cavell à Vitry-Sur-Seine (94400), par Me Heizmann ; la SA AZUR NET demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0615540/3-3 du 26 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a accueilli la demande de M. A tendant à l'annulation de la décision en date du 18 août 2006, par laquelle le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a annulé la décision du 24 février 2006 de l'inspecteur du travail de Paris, section 15A, et autorisé le licenciement de celui-ci ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris, et de confirmer la décision ministérielle susmentionnée du 18 août 2006 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 janvier 2011 :

- le rapport de M. Privesse, rapporteur,

- les conclusions de Mme Seulin, rapporteur public,

- et les observations de Me Heizmann, représentant la société AZUR NET ;

Considérant que, par une décision du 18 août 2006 rendue sur recours hiérarchique présenté le 14 avril précédent, le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a annulé la décision de l'inspecteur du travail de Paris du 24 février 2006, refusant à la société AZUR NET l'autorisation de licencier M. A, membre titulaire du comité d'entreprise et du comité d'hygiène et de sécurité, et autoriser le licenciement de celui-ci ; que le Tribunal administratif de Paris, saisi par M. A, a annulé la décision ministérielle du 18 août 2006, confirmant ainsi le refus d'autorisation de licenciement pris par l'inspecteur du travail ; que la société AZUR NET relève régulièrement appel de ce jugement ;

Considérant qu'en vertu des articles L. 412-18 et L. 436-1 du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Considérant que, dans le courrier du 20 janvier 2006 de la société AZUR NET adressé à l'inspecteur du travail et par lequel celle-ci lui a demandé l'autorisation de licencier M. A, quatre griefs étaient formulés à l'endroit de celui-ci ;

Considérant en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 122-44 du code du travail, devenu l'article L. 1332-4 du même code dans sa nouvelle rédaction : Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; que l'employeur ne peut pas fonder une demande d'autorisation de licenciement sur des faits prescrits en application de cette disposition, sauf si ces faits relèvent d'un comportement fautif identique aux faits non prescrits donnant lieu à l'engagement des poursuites disciplinaires ; que s'agissant du premier grief relatif à la déformation du nom du supérieur hiérarchique de M. A, il n'est pas contesté que les reproches faits à celui-ci relativement à cette déformation datent du début de l'année 2005, et qu'une mesure de mise à pied lui avait été infligée les 10, 11 et 12 mai 2005 sur ce motif, alors que les différentes tentatives faites auprès du salarié pour obtenir ses excuses n'avaient pas abouti ; que par suite, à la date du 10 novembre 2005 à laquelle l'employeur lui fait à nouveau ce reproche par courrier, et lui notifie son intention de procéder à son licenciement notamment pour cette raison, la société requérante ne pouvait escompter encore recevoir les susdites excuses de son salarié, cependant qu'il n'est pas établi qu'à compter de cette dernière date, les faits fautifs aient été réitérés ; que dès lors, les faits relatifs à ce grief étaient prescrits à la date d'engagement de la procédure de licenciement, le 11 janvier 2006, et ne pouvaient être en tout état de cause retenus pour caractériser l'existence d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement de M. A ; qu'au surplus, il résulte du jugement du 4 septembre 2006 du conseil des prud'hommes de Paris, frappé d'un appel ayant fait l'objet d'un report, que de tels faits ne sauraient être considérés comme fautifs au regard du contexte dans lesquelles ils s'inscrivent ; qu'enfin, et en tout état de cause, le fait pour l'intéressé de ne pas avoir présenté d'excuses, ne peut davantage constituer une faute de nature à justifier son licenciement ; qu'il en résulte, que le premier grief sus-décrit doit être écarté ;

Considérant en deuxième lieu, qu'il est également fait reproche à M. A d'avoir aidé deux personnes à pénétrer sur le site d'un client de la société, le 28 décembre 2005, alors que la première personne s'était vue notifier un retrait d'habilitation le 23 décembre 2005 avec effet immédiat, et que le contrat à durée déterminée de la seconde personne était terminé ; que s'agissant de la première personne, si M. A admet l'avoir introduite sur le site en question, il fait cependant valoir qu'il l'a fait de bonne foi, n'étant nullement informé du retrait d'habilitation opéré quelques jours plus tôt, celui-ci ne lui ayant pas été communiqué, alors que par ailleurs la personne en question était son responsable même, et que des problèmes techniques d'accès par badge avaient été rencontrés à cette époque sur ledit site, au demeurant non sécurisé ; que d'ailleurs, dans un rapport du 24 juillet 2006, il est noté que la direction de la société AZUR NET elle-même a pu recommander l'utilisation d'un autre badge ; que dans ces conditions, ainsi que le note l'inspecteur du travail en son rapport daté du 8 juin 2006, ce fait n'est pas suffisamment grave pour justifier une mesure de licenciement, alors qu'en outre la société cliente n'a justifié d'aucun préjudice à ce propos et qu'il n'est pas allégué que ses relations avec la société AZUR NET en aient été affectées ; que s'agissant de la seconde personne, M. A conteste formellement avoir jamais reconnu l'aide portée à celle-ci pour accéder au site en question, dont l'inspecteur ne fait pas état, le ministre estimant le fait non établi ; que ce grief doit être écarté ;

Considérant en troisième lieu, que par la décision litigieuse du 18 août 2006, le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement reconnaît que les faits à l'origine du grief invoqué par la société AZUR NET et relatif à une rixe ayant eu lieu le 23 décembre 2005 sur le chantier SFR, ne peuvent être regardés comme établis, alors que par ailleurs l'inspecteur du travail note également que les circonstances pour le moins confuses autorisent, conformément aux dispositions de l'article L. 122-43 du code du travail, à faire bénéficier l'intéressé du doute quant à la matérialité des faits ; que par suite, il y a lieu d'écarter le grief fondé sur des faits de violence non avérée à l'occasion d'une rixe qui se serait déroulée le 23 décembre 2005, opposant trois salariés de la société, dont M. A ;

Considérant en quatrième lieu, que le dernier grief articulé à l'encontre de M. A, consiste en des menaces à mots couverts, proférées à l'encontre du directeur des affaires juridiques et sociales de la société, à l'issue de l'entretien préalable du 16 janvier 2006, grief formulé dans la demande de licenciement ; que toutefois, le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, qui écarte le qualificatif de menaces de mort, précise que la teneur des propos en question ne peut être retenue, quel qu'ait été le ton sur lequel ils ont été exprimés, à l'appui de la demande de licenciement, l'inspecteur du travail ayant en outre indiqué que les faits en question étant postérieurs à l'entretien préalable, les droits de la défense n'ont pu être respectés ; qu'en tout état de cause, ce grief étant écarté par la décision ministérielle litigieuse, il y a lieu par voie de conséquence de l'écarter également ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que les différents griefs articulés par la société AZUR NET à l'égard de M. A sont, soit prescrits, soit non établis dans leur matérialité, soit ne revêtent pas un caractère d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement, alors que par ailleurs, il résulte des nombreux écrits versés au dossier, que l'on ne peut écarter le lien entre les fonctions syndicales exercées par celui-ci et la mesure de licenciement litigieuse, compte tenu de la pression exercée sur ce dernier par sa direction, et de la vive tension qui marquait leurs relations ; que par suite, la société AZUR NET n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé à la demande du salarié la décision en date du 18 août 2006 du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement ; que, par voie de conséquence, il y a lieu d'accueillir les conclusions incidentes que présente M. A sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et de lui accorder à ce titre une somme de 1 500 euros, à la charge de la société AZUR NET ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société AZUR NET est rejetée.

Article 2 : La société AZUR NET versera à M. A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 09PA04601


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA04601
Date de la décision : 07/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: Mme SEULIN
Avocat(s) : HEIZMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-02-07;09pa04601 ?
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