Vu la requête, enregistrée le 9 mars 2009, présentée pour M. Mohamed A, demeurant ..., par Me Lepage-Roussel ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0811698 en date du 7 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 juin 2008 du préfet de police rejetant sa demande de titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de destination ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte, à l'autorité préfectorale de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le code de justice administrative ;
Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 4 février 2009, statuant sur la demande de M. A du 20 novembre 2008, admettant celui-ci au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, et l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2010 :
- le rapport de M. Privesse, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Seulin, rapporteur public ;
Considérant que M. A, né le 26 juillet 1962 et de nationalité marocaine, a sollicité en dernier le 14 mars 2008 un titre de séjour en faisant valoir notamment la durée et les conditions de son séjour en France depuis son arrivée ; que, par un arrêté en date du 9 juin 2008, le préfet de police lui a opposé un refus à sa demande de titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. A relève régulièrement appel du jugement du 7 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté susmentionné ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du même code : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 313-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que M. A est entré en France en février 1998, sous couvert d'un visa de 90 jours délivré par le consulat général de France à Casablanca ; que les justificatifs de présence en France qu'il présente sont assez nombreux, diversifiés et probants pour toutes les années postérieures à 1999, comprise, l'intéressé ayant notamment bénéficié de 24 contrats à durée déterminée avec le même employeur ; qu'en outre, l'année 1998 peut également être admise à ce titre en raison des documents certes moins nombreux, mais précis, probants et non contestés ; que M. A justifie ainsi d'une résidence habituelle sur le territoire français depuis au moins dix ans, à la date de la décision litigieuse ; que par suite, en s'abstenant de saisir la commission du titre de séjour avant de se prononcer sur la demande d'admission au séjour de l'intéressé, le préfet de police a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-10 ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de la violation des dispositions de cet article doit être accueilli ; que dès lors, le jugement attaqué ne peut qu'être annulé de même que la décision litigieuse ;
Sur les conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution, par la même décision juridictionnelle ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ;
Considérant que la présente décision qui, faute de pouvoir retenir un autre moyen d'annulation, est uniquement fondée sur la violation par le préfet de police des termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en raison de l'irrégularité de la procédure préalable à la décision litigieuse, n'appelle d'autre mesure d'exécution que la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour à l'intéressé, le temps de prendre les mesures nécessaires au réexamen de son dossier ; qu'il y a lieu en conséquence, d'enjoindre au préfet de police de délivrer à M. A, dans un délai maximum de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une autorisation provisoire de séjour ce, durant le temps nécessaire au réexamen de son dossier ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 : L'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de mettre à la charge de, dans les conditions prévues à l'article 75, la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à une somme au titre des frais que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Il peut, en cas de condamnation, renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre le recouvrement à son profit de la somme allouée par le juge et qu'aux termes du 3ème alinéa de l'article 76 de la même loi : Les bureaux d'aide juridictionnelle se prononcent dans les conditions prévues par les textes en vigueur à la date à laquelle les demandes ont été présentées et les admissions produiront les effets attachés à ces textes (...) ; que M. A ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, son conseil peut se prévaloir des dispositions sus-rappelées des articles 37 et 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à payer à Me Lepage-Roussel, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 7 novembre 2008 est annulé, de même que l'arrêté du préfet de police en date du 9 juin 2008.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. A, le temps de prendre les mesures nécessaires au réexamen de son dossier, dans le délai maximum de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Le préfet de police tiendra le greffe de la Cour (service de l'exécution) immédiatement informé des dispositions prises pour répondre à cette injonction.
Article 3 : L'Etat versera à Me Lepage-Roussel une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.
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N° 09PA01297