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12/04/2010 | FRANCE | N°08PA05060

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 12 avril 2010, 08PA05060


Vu le recours, enregistré le 2 octobre 2008, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0422019/3-1 en date du 9 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé sa décision, en date du 13 août 2004, par laquelle il a infligé deux amendes de 5 000 euros à la société V. Ships ;

2°) de rejeter la demande de première instance de la société V. Ships ;

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Vu le recours, enregistré le 2 octobre 2008, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0422019/3-1 en date du 9 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé sa décision, en date du 13 août 2004, par laquelle il a infligé deux amendes de 5 000 euros à la société V. Ships ;

2°) de rejeter la demande de première instance de la société V. Ships ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique du Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France ;

Vu la loi n° 92-190 du 26 février 1992 portant modification de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le décret n° 93-180 du 8 février 1993 du 8 février 1993 pris pour l'application des articles 19, 20 bis et 22 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 92307 DC du 25 février 1992 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mars 2010 :

- le rapport de M. Luben, rapporteur,

- les conclusions de Mme Seulin, rapporteur public,

- et les observations de Me De Lajugie pour la société V. Ships ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société V. Ships a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler d'une part la décision, en date du 13 août 2004, n° R/04/576, par laquelle le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES lui avait infligé une amende de 5 000 euros du fait du débarquement sur le territoire français, le 15 mai 2004, du navire " African Sky ", de M. X se disant A et, d'autre part, la décision, en date du 13 août 2004, n° R/04/577, par laquelle le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES lui avait infligé une amende de 5 000 euros du fait du débarquement sur le territoire français, le 15 mai 2004, du navire " African Sky ", de M. X se disant B; que le jugement attaqué vise " la décision attaquée " et que l'article 1er de son dispositif décide que " la décision du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités locales en date du 13 août 2004 est annulée ", alors que sa motivation précise que la société V. Ships " est, par suite, fondée à demander l'annulation de la décision du 13 août 2004 par laquelle que le ministre de l'intérieur lui a infligé deux amendes de 5 000 euros ; " ; que le jugement contesté est ainsi entaché d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif ; que, par suite, il doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société V. Ships devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, applicable à la date de la décision attaquée : " I. - Est punie d'une amende d'un montant maximum de 5 000 euros l'entreprise de transport aérien ou maritime qui débarque sur le territoire français, en provenance d'un autre Etat, un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne et démuni du document de voyage et, le cas échéant, du visa requis par la loi ou l'accord international qui lui est applicable à raison de sa nationalité. (...) / Le manquement est constaté par un procès-verbal établi par un fonctionnaire appartenant à l'un des corps dont la liste est définie par décret en Conseil d'Etat. Copie du procès-verbal est remise à l'entreprise de transport intéressée. Le manquement ainsi relevé donne lieu à une amende prononcée par le ministre de l'intérieur. L'amende peut être prononcée autant de fois qu'il y a de passagers concernés. Son montant est versé au Trésor public par l'entreprise de transport. / L'entreprise de transport a accès au dossier et est mise à même de présenter ses observations écrites dans un délai d'un mois sur le projet de sanction de l'administration. La décision du ministre, qui est motivée, est susceptible d'un recours de pleine juridiction. (...) / II. - Les amendes prévues au I ne sont pas infligées : (...) / 2° Lorsque l'entreprise de transport établit que les documents requis lui ont été présentés au moment de l'embarquement et qu'ils ne comportaient pas d'élément d'irrégularité manifeste. (...) " ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article 20 bis ont été introduites dans l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée par la loi susvisée n° 92-190 du 26 février 1992 afin de transposer en droit interne certaines des stipulations de la convention d'application, signée à Schengen le 19 juin 1990, de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique du Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes ; que ladite convention d'application stipule, dans ses définitions liminaires, qu'un transporteur doit être entendu comme " toute personne physique ou morale qui assure, à titre professionnel, le transport de personnes par voie aérienne, maritime ou terrestre " ; que, par suite, seules les entreprises assurant le transport de personnes en vertu de contrats commerciaux doivent être regardées comme les entreprises de transport aérien ou maritime visées par les dispositions précitées de l'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le navire vraquier " Africa Sky ", sur lequel s'étaient glissés deux passagers clandestins démunis de documents de voyage et de visas, transportait des grumes de bois à destination de la France et n'avait pas passé de contrat de transport de passagers ; que, par suite, la société V. Ships, chargée d'assurer la gestion technique du navire, ne pouvait être regardée comme une entreprise de transport maritime au sens des dispositions précitées de l'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ; qu'elle est, par suite, fondée à demander l'annulation des deux décisions, n° R/04/576 et n° R/04/577, en date du 13 août 2004, par lesquelles que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES lui a infligé deux amendes de 5 000 euros ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société V. Ships et non compris dans les dépens en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 9 juillet 2008 est annulé.

Article 2 : Les deux décisions, n° R/04/576 et n° R/04/577, en date du 13 août 2004, du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES sont annulées.

Article 3: La somme de 2 000 euros est mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la société V. Ships est rejeté.

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N° 08PA05060


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 08PA05060
Date de la décision : 12/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ÉTRANGERS - ENTRÉE EN FRANCE - TRANSPORT DE PASSAGERS CLANDESTINS NON RESSORTISSANTS D'UN ETAT MEMBRE DE L'UNION EUROPÉENNE - DÉMUNIS DE DOCUMENTS DE VOYAGE ET DE VISAS - FAIT PASSIBLE D'UNE AMENDE D'UN MONTANT MAXIMUM DE 5 000 EUROS (ARTICLE 20 BIS DE L'ORDONNANCE DU 2 NOVEMBRE 1945 MODIFIÉE) - NOTION D'ENTREPRISE DE TRANSPORT DE PERSONNES (CONVENTION D'APPLICATION DE L'ACCORD DE SCHENGEN DU 14 JUIN 1985).

335-005 L'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée par la loi du 26 février 1992, codifié à l'article L. 625-1 du C.E.S.E.D.A., confère au ministre de l'intérieur le pouvoir d'infliger des amendes d'un montant maximum de 5 000 euros par passager transporté, aux entreprises de transport aérien ou maritime qui débarquent sur le territoire français, en provenance d'un autre Etat, des étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne et démunis de documents de voyage et de visas de circulation transfrontière.,,Cette disposition transpose en droit interne certaines des stipulations de la convention, signée à Schengen le 19 juin 1990, d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique du Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes.,,D'après les définitions liminaires de cette convention, un transporteur doit être entendu comme « toute personne physique ou morale qui assure, à titre professionnel, le transport de personnes par voie aérienne, maritime ou terrestre ». Par suite, seules les entreprises assurant le transport de personnes en vertu de contrats commerciaux doivent être regardées comme les entreprises de transport aérien ou maritime visées par l'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée.,,Dès lors que le navire vraquier, sur lequel s'étaient glissés deux passagers clandestins démunis de documents de voyage et de visas, transportait des grumes de bois à destination de la France et n'avait pas passé de contrat de transport de passagers, la société chargée d'assurer la gestion technique du navire ne pouvait être regardée comme une entreprise de transport maritime au sens de l'article 20 bis. Elle était donc fondée à demander la décharge des amendes.

RÉPRESSION - DOMAINE DE LA RÉPRESSION ADMINISTRATIVE RÉGIME DE LA SANCTION ADMINISTRATIVE - LÉGALITÉ INTERNE - TRANSPORT DE PASSAGERS CLANDESTINS NON RESSORTISSANTS D'UN ETAT MEMBRE DE L'UNION EUROPÉENNE - DÉMUNIS DE DOCUMENTS DE VOYAGE ET DE VISAS - FAIT PASSIBLE D'UNE AMENDE D'UN MONTANT MAXIMUM DE 5 000 EUROS (ARTICLE 20 BIS DE L'ORDONNANCE DU 2 NOVEMBRE 1945 MODIFIÉE) - NOTION D'ENTREPRISE DE TRANSPORT DE PERSONNES (CONVENTION D'APPLICATION DE L'ACCORD DE SCHENGEN DU 14 JUIN 1985).

59-02-02-03 L'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée par la loi du 26 février 1992, codifié à l'article L. 625-1 du C.E.S.E.D.A., confère au ministre de l'intérieur le pouvoir d'infliger des amendes d'un montant maximum de 5 000 euros par passager transporté, aux entreprises de transport aérien ou maritime qui débarquent sur le territoire français, en provenance d'un autre Etat, des étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne et démunis de documents de voyage et de visas de circulation transfrontière.,,Cette disposition transpose en droit interne certaines des stipulations de la convention, signée à Schengen le 19 juin 1990, d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique du Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes.,,D'après les définitions liminaires de cette convention, un transporteur doit être entendu comme « toute personne physique ou morale qui assure, à titre professionnel, le transport de personnes par voie aérienne, maritime ou terrestre ». Par suite, seules les entreprises assurant le transport de personnes en vertu de contrats commerciaux doivent être regardées comme les entreprises de transport aérien ou maritime visées par l'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée.,,Dès lors que le navire vraquier, sur lequel s'étaient glissés deux passagers clandestins démunis de documents de voyage et de visas, transportait des grumes de bois à destination de la France et n'avait pas passé de contrat de transport de passagers, la société chargée d'assurer la gestion technique du navire ne pouvait être regardée comme une entreprise de transport maritime au sens de l'article 20 bis. Elle était donc fondée à demander la décharge des amendes.


Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme SEULIN
Avocat(s) : AVOCATS ASSOCIES HOLMAN FENWICK WILLAN

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-04-12;08pa05060 ?
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