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15/12/2009 | FRANCE | N°08PA01152

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 15 décembre 2009, 08PA01152


Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2008, présentée pour Mme Marie Christine A, demeurant ...), par Me Tolouis ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604534/5 du 9 janvier 2008 en tant que le Tribunal administratif de Paris n'a fixé qu'à 800 euros le montant de l'indemnité due par l'Etat en réparation du préjudice qu'il lui a causé en mettant fin illégalement à ses fonctions ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser à titre de dommages intérêts la somme de 137 623 euros avec les intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2006 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 588 euros au titre de l'article L. 761-...

Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2008, présentée pour Mme Marie Christine A, demeurant ...), par Me Tolouis ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604534/5 du 9 janvier 2008 en tant que le Tribunal administratif de Paris n'a fixé qu'à 800 euros le montant de l'indemnité due par l'Etat en réparation du préjudice qu'il lui a causé en mettant fin illégalement à ses fonctions ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser à titre de dommages intérêts la somme de 137 623 euros avec les intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2006 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 588 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu le décret n° 60-389 du 22 avril 1960 modifié sur les rapports entre l'Etat et les établissements d'enseignement privé et sur les contrats d'association à l'enseignement public passés par les établissements d' enseignement privé ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er décembre 2009 :

- le rapport de M. Rousset, rapporteur,

- les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public,

- les observations de Me Laroche, pour Mme A,

- et connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 2 décembre 2009, présentée pour Mme A par Me Laroche ;

Considérant qu'aux termes d'un contrat définitif conclu le 9 mai 2005 avec effet au 1er juin 1993, Mme A a été recrutée par le recteur de l'académie de Paris en qualité de maître contractuel des établissements d'enseignement privé sous contrat, pour enseigner l'éducation artistique et les arts appliqués au lycée professionnel Saint Paul à Paris ; que par un arrêté du 16 novembre 2005, le recteur de l'académie de Paris a mis fin aux fonctions de l'intéressée, avec effet au 1er septembre 2005, pour convenance personnelle ; que par un jugement du 9 janvier 2008, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté susmentionné au motif que l'intéressée n'avait pas présenté de demande de cessation de fonctions pour convenance personnelle et a condamné l'Etat à lui verser une somme de 800 euros en réparation de son préjudice moral ; que Mme A fait appel de ce jugement en tant qu'il ne lui a alloué qu'une somme de 800 euros à titre d'indemnité et qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires ; que par la voie de l'appel incident, le ministre de l'éduction nationale conclut à la réformation du jugement du 9 janvier 2008 en tant que le Tribunal administratif de Paris l'a condamné à verser 800 euros à la requérante en réparation de son préjudice moral ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le juge administratif, saisi de conclusions mettant en jeu la responsabilité de la puissance publique, ne soulève pas d'office un moyen d'ordre public, et n'est, dès lors, pas tenu de procéder à la communication prescrite par les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, lorsqu'il constate au vu des pièces du dossier qu'une des conditions d'engagement de la responsabilité publique n'est pas remplie ; qu'il s'ensuit que, contrairement à ce que soutient la requérante, le tribunal n'a commis aucune irrégularité en estimant que la faute commise par l'Etat en licenciant à tort Mme A pour convenance personnelle ne constituait pas la cause directe du préjudice financier dont elle demandait réparation dès lors que ce licenciement était justifié par d'autres motifs ;

Sur le bien-fondé du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 du décret n° 60-389 susvisé du 22 avril 1960 en vigueur jusqu'au 31 août 2005 : Il est pourvu aux services vacants des classes sous contrat d'association, dans les conditions définies aux articles 8-1 à 8-4 ci-après, par la nomination de maîtres titulaires, de maîtres contractuels ou, à défaut, de délégués nommés par le recteur, conformément à l'article 2 bis du décret n° 64-217 du 10 mars 1964. Il ne peut être pourvu aux services qui cessent provisoirement d'être assurés dans les cas prévus à l'article 2 bis précité du décret du 10 mars 1964 que par la nomination d'un délégué nommé par le recteur ; qu'aux termes de l'article 8-1 du même décret en vigueur jusqu'au 31 aout 2005 : Aux dates fixées chaque année par un arrêté du recteur, les chefs d'établissement transmettent au recteur, s'il s'agit d'un établissement du 2e degré, ou à l'inspecteur d'académie, s'il s'agit d'un établissement du 1er degré : 1° La liste des services, complets ou incomplets, y compris les services nouveaux auxquels il y aura lieu de pourvoir à la rentrée scolaire ; 2° La liste des services supprimés. Les vacances survenant en cours d'année scolaire sont déclarées sans délai à l'autorité académique définie au 1er alinéa du présent article lorsqu'il y a lieu d'y pourvoir avant la rentrée suivante ; qu'aux termes de l'article 8-2 du même décret en vigueur jusqu'au 31 aout 2005 : La liste des services vacants est publiée par les soins de l'autorité académique compétente, avec l'indication du délai dans lequel les candidatures seront reçues. Les personnes qui postulent l'un de ces services font acte de candidature auprès de l'autorité académique. Elles en informent immédiatement le ou les chefs d'établissement intéressés. Les maîtres titulaires qui demandent pour la première fois une nomination dans un établissement d'enseignement privé justifient, à l'appui de leur candidature, de l'accord préalable du chef de l'établissement dans lequel ils sollicitent cette nomination ; qu'aux termes de l'article 8-3 du même décret en vigueur jusqu'au 31 août 2005 : L'autorité académique soumet les candidatures, accompagnées de l'avis des chefs d'établissement ou, à défaut d'avis, de la justification qu'ils ont été informés des candidatures par les intéressés, à la commission consultative mixte compétente en vertu de l'article 8-5. Sont présentées par priorité les candidatures des maîtres titulaires ou contractuels exerçant soit dans le même département ou dans un département limitrophe, pour le premier degré, soit dans le ressort de la même académie ou dans le ressort d'une académie limitrophe, pour le second degré, et privés de leur emploi à la suite de la résiliation totale ou partielle d'un contrat d'association. Au vu de l'avis émis par la commission consultative mixte, l'autorité académique notifie à chacun des chefs d'établissement la ou les candidatures qu'elle se propose de retenir pour pourvoir à chacun des services vacants dans l'établissement. Lorsque la candidature retenue par l'autorité académique n'est pas celle d'un maître titulaire justifiant de l'accord préalable du chef d'établissement, celui-ci dispose d'un délai de quinze jours pour faire connaître à l'autorité académique son accord ou son refus. A défaut de réponse dans ce délai, le chef d'établissement est réputé avoir donné son accord à la candidature qui lui est soumise ou, s'il a été saisi de plusieurs candidatures pour le même service, à la première de ces candidatures ;

Considérant qu'il résulte des dispositions des articles 8 et suivants du décret n° 60-389 du 22 avril 1960 susvisés dans leur rédaction applicable à l'espèce, que l'autorité académique n'a pas le pouvoir d'imposer la candidature d'un maître à un chef d'établissement privé sous contrat d'association ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que le directeur du lycée professionnel Saint Paul a, en application de l'article 8-1 du décret n° 60-389 du 22 avril 1960 alors en vigueur, informé, le 31 mars 2005, le recteur de l'académie de Paris de la suppression à compter de la rentrée 2005-2006, en raison d'un changement de structure pédagogique, du service de Mme A et, en conséquence de sa remise à disposition des autorités académiques ; que si l'intéressée fait valoir, en invoquant les dispositions de l'article 8-1 du décret n° 60-389 du 22 avril 1960 entrées en vigueur le 1er septembre 2005, qui ne lui étaient pas applicables, que son service aurait été irrégulièrement supprimé par le directeur de l'établissement, une telle illégalité, à la supposer même établie, ne conférait pas au recteur le pouvoir d'imposer sa réintégration au sein du lycée Saint Paul ; que, d'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que Mme A, qui avait informé l'autorité académique le 31 mars 2005 de son intention de présenter une demande de mutation, aurait été candidate sur les services déclarés vacants dans les conditions définies à l'article 8-2 du décret n° 60-389 du 22 avril 1960 susvisé alors en vigueur ; que si l'intéressée soutient, toutefois, sans l'établir, qu'elle aurait participé au mouvement de mutation, il est constant qu'elle n'a recueilli l'accord d'aucun chef d'établissement et qu'en vertu des dispositions combinées des articles 8, 8-1, 8-2 et 8-3 du décret n° 60-389 du 22 avril 1960 susvisé alors en vigueur, l'autorité académique n'avait, en tout état de cause, pas le pouvoir d'imposer sa candidature à un chef d'établissement d'enseignement privé sous contrat d'association ; que, dans ces conditions, Mme A n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande, dirigée à l'encontre de l'Etat, tendant à l'indemnisation du préjudice matériel et financier causé par la perte de son emploi qui n'est pas imputable à l'arrêté du 16 novembre 2005 par lequel le recteur de l'académie de Paris a illégalement résilié son contrat ;

Considérant, en second lieu, que contrairement à ce que soutient le ministre de l'éducation nationale par la voie de l'appel incident, le recteur de l'académie de Paris, en résiliant illégalement par l'arrêté du 16 novembre 2005 le contrat de Mme A, a commis une faute qui a causé, de manière directe et certaine, à l'intéressée un préjudice moral ; qu'il résulte de l'instruction que le tribunal, en allouant à la requérante une somme de 800 euros, a procédé à une appréciation insuffisante de son préjudice moral qui, dans les circonstances de l'espèce, doit être porté à 1 500 euros tous intérêts compris à la date du présent arrêt ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que Mme A est seulement fondée à demander que l'Etat soit condamné, sans qu'il y ait lieu de fixer une astreinte, à lui verser, à titre d'indemnité, 1 500 euros, tous intérêts compris à la date du présent arrêt, et, d'autre part, que l'appel incident du ministre de l'éducation nationale tendant à la réformation du jugement attaqué doit être rejeté ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que Mme A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Laroche renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : L'Etat est condamné à verser à titre d'indemnité à Mme A la somme de 1 500 euros tous intérêts compris à la date du présent arrêt.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 9 janvier 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Laroche la somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Laroche renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et l'appel incident du ministre de l'éducation nationale sont rejetés.

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N° 08PA01152


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 08PA01152
Date de la décision : 15/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MERLOZ
Rapporteur ?: M. Olivier ROUSSET
Rapporteur public ?: Mme DESCOURS GATIN
Avocat(s) : TOLOUIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2009-12-15;08pa01152 ?
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