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09/07/2009 | FRANCE | N°07PA00597

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 09 juillet 2009, 07PA00597


Vu la requête, enregistrée le 14 février 2007, présentée pour la SAS BOISSONS SERVICES, dont le siège est 68 allée Guy Moquet, Le Perreux sur Marne (94170), par Me Grosman ; la SAS BOISSONS SERVICES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0000031/2-1, 0110541/2-1, 0210937/2-1, 0910243/2-1 du 16 janvier 2007 lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de retenue à la source auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995, 1996, 1997 et 1998 ;

2°) de p

rononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de...

Vu la requête, enregistrée le 14 février 2007, présentée pour la SAS BOISSONS SERVICES, dont le siège est 68 allée Guy Moquet, Le Perreux sur Marne (94170), par Me Grosman ; la SAS BOISSONS SERVICES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0000031/2-1, 0110541/2-1, 0210937/2-1, 0910243/2-1 du 16 janvier 2007 lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de retenue à la source auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995, 1996, 1997 et 1998 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 juin 2009 :

- le rapport de M. Vincelet, rapporteur,

- et les conclusions de M. Niollet, rapporteur public ;

Considérant que la SAS BOISSONS SERVICES, qui exerce une activité de négoce en gros de boissons et spiritueux, a déduit de ses bénéfices imposables des années 1995 à 1998 le montant des commissions qu'elle avait versées à une société ayant son siège à Jersey ; qu'à l'occasion des vérifications de sa comptabilité ayant porté sur ces années, le vérificateur a estimé que la contrepartie de ces versements effectués au profit d'une société établie dans un territoire sis hors de France et y bénéficiant d'un régime fiscal privilégié au sens de l'article 238 A du code général des impôts n'était pas établie ; qu'il en a réintégré le montant aux résultats déclarés par la contribuable et lui a notifié les redressements correspondants ; qu'il a également estimé que ces commissions constituaient pour leur bénéficiaire un revenu distribué et a en conséquence assujetti la SAS BOISSONS SERVICES à la retenue à la source prévue par l'article 119 bis du même code ; qu'enfin il a réintégré aux résultats de la société de l'année 1996 le montant d'une provision constituée en vue du versement d'une prime à un membre de son personnel ; que la requérante demande l'annulation du jugement du 16 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de retenue à la source auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995 à 1998 en conséquence de ces redressements ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L .57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ; que la notification du 6 novembre 1998, afférente aux redressements des années 1995 et 1996, énonce qu'aucune pièce ne justifie la réalité des prestations effectuées par la société Comen Limited , dont le siège est à Jersey, laquelle a facturé des commissions à la contribuable, et que la justification du montant de ces commissions n'est pas avantage établie ; que cette notification ajoute qu'en vertu de l'article 238 A du code général des impôts, les rémunérations payées par une personne morale établie en France à des personnes morales établies dans un territoire situé hors de France et qui y sont soumises à un régime fiscal privilégié ne sont déductibles que si le débiteur prouve que les dépenses correspondent à des opérations réelles et qu'elles ne présentent pas un caractère anormal ; que cette notification, qui mentionne les années et les catégories d'imposition, et qui indique les considérations de fait et de droit à la base des redressements, est suffisamment motivée ; que le vérificateur, qui a expressément fait référence à l'article 238 A relatif aux territoires à fiscalité privilégiée, a régulièrement pu ajouter sans davantage de précisions qu'en application de la doctrine administrative, le régime fiscal est considéré comme privilégié lorsque le niveau de prélèvement fiscal global des entreprises est inférieur d'au moins un tiers au taux normal de l'impôt français sur les sociétés ;

Considérant, en second lieu, s'agissant des impositions des années 1997 et 1998, que par mandat du 16 janvier 2001, le président directeur général de la SAS BOISSONS SERVICES a donné tous pouvoirs à son conseil pour assister et représenter la société dans le cadre de la vérification de sa comptabilité, et notamment répondre aux notifications de redressements et demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, et a élu domicile au cabinet de son conseil ; que la circonstance que, nonobstant ce mandat dont elle avait accusé réception le 18 janvier 2001 l'administration a notifié ses réponses du 9 octobre suivant aux observations du contribuable sur les notifications à l'adresse du siège de la société est toutefois demeurée sans incidence sur la régularité de ces notifications dès lors que ces documents ont été effectivement réceptionnés par la société requérante ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 238 A du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : Les intérêts, arrérages et autres produits des obligations, créances, dépôts et cautionnements, les redevances de cession ou concession de licences d'exploitation, de brevets d'invention, de marques de fabrique, procédés ou formules de fabrication et autres droits analogues ou les rémunérations de services, payés ou dus par une personne physique ou morale domiciliée ou établie en France à des personnes physiques ou morales qui sont domiciliées ou établies dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France et y sont soumises à un régime fiscal privilégié, ne sont admis comme charges déductibles pour l'établissement de l'impôt que si le débiteur apporte la preuve que les dépenses correspondent à des opérations réelles et qu'elles ne présentent pas un caractère anormal ou exagéré. Pour l'application du premier alinéa, les personnes sont regardées comme soumises à un régime fiscal privilégié dans l'Etat ou le territoire considéré si elles n'y sont pas imposables ou si elles y sont assujetties à des impôts sur les bénéfices ou les revenus notablement moins élevés qu'en France (...) ;

Considérant qu'au cours des années 1995 à 1998, la requérante a versé des commissions de montants respectifs de 444 770 F, 386 380 F, 354 931 F et 47 000 F à la société Comen LTD établie dans l'île de Jersey ; qu'il n'est pas contesté que cette société y bénéficie d'un régime fiscal privilégié au sens des dispositions précitées ; qu'à l'effet d'établir, ainsi qu'il lui incombe, que ces commissions rémunèrent des prestations réellement effectuées à son profit et que leur montant est normal, la requérante produit, d'une part, la copie d'un contrat de coopération signé le 27 juillet 1988 pour une durée indéterminée avec la société Comen LTD dont le représentant n'est au demeurant pas identifié et en vertu duquel cette dernière s'engage à lui présenter des acheteurs ou des vendeurs de marchandises, en contrepartie du versement d'honoraires de recherche de clientèle, qui s'ajoutent à une commission forfaitaire de 1,5 % du montant hors taxes des facturations effectuées, d'autre part divers documents dont la grande majorité est rédigée en anglais, le surplus consistant en des correspondances émanant de la société Comen LTD qui annoncent l'envoi de factures de commissions rémunérant l'apport d'affaires nouvelles ; que toutefois ces pièces, en raison de leur caractère vague et imprécis, et dont la cohérence avec le contrat n'est pas établie ainsi que l'ont pertinemment relevé les premiers juges, sont insuffisantes pour établir la réalité des prestations effectuées par la société Comen LTD ; que par ailleurs la requérante, alors que le service conteste également ce point, ne donne aucune précision sur le montant et le mode de calcul de la part non forfaitaire des commissions ; qu'elle n'établit dès lors pas davantage la normalité du montant de ces commissions ; que c'est en conséquence à bon droit que nonobstant l'enregistrement du contrat à la recette des impôts, le vérificateur a réintégré les sommes versées dans les résultats imposables de la société sur le fondement des dispositions précitées du code général des impôts ; que la requérante ne peut utilement arguer de l'absence de redressements dont elle aurait bénéficié à raison des versements identiques qu'elle aurait effectués au cours des années antérieures en exécution de la même convention ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : 1 Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment : 1° ) les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre (...) 5°) les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables (...) ;

Considérant qu'au titre de l'année 1996, la société a constitué une provision dont le montant de 35 000 F correspondait aux primes dues au personnel ; que le vérificateur n'en a admis la déduction qu'à concurrence de 14 000 F, au motif que le reliquat de 21 000 F correspondait à une prime destinée à une salariée âgée de moins de vingt ans et embauchée depuis une date extrêmement récente dans l'entreprise ; que la contribuable, à qui il incombe d'établir le bien-fondé de ses écritures de charges, au nombre desquelles figurent les provisions, se borne à faire état du faible salaire de l'intéressée ainsi que des éminents services qu'elle rendrait aux dirigeants de l'entreprise ; que ces circonstances, fussent-elles établies, ne peuvent suffire à expliquer le versement d'une telle somme à une secrétaire administrative sous contrat de qualification et sans aucune ancienneté dans l'entreprise, alors qu'il est constant que des salariés plus anciens et qualifiés percevaient des primes dont les montants étaient très inférieurs ;

En ce qui concerne les retenues à la source :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1) Sont considérés comme revenus distribués : 1°) Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ; qu'aux termes du 2 de l'article 119 bis du même code : Sous réserve des dispositions de l'article 239 B, les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187-1 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France ;

Considérant que la société requérante n'a pu justifier l'existence d'une contrepartie aux commissions versées à la société Comen LTD ; que, dès lors, ces commissions n'étaient pas des charges déductibles au sens de l'article 39-1° du code et ont constitué pour la société bénéficiaire des revenus distribués ; que cette société n'ayant pas son domicile fiscal en France, les revenus correspondants ont été, à bon droit, soumis à la retenue à la source établie au nom de la société requérante, partie versante ; que l'intéressée ne peut davantage invoquer, pour faire échec aux retenues, l'absence de redressements dont elle aurait bénéficié au titre des années antérieures à raison des commissions versées sur le fondement du même contrat ;

Considérant, en outre, que les cotisations de retenue à la source sont fondées, ainsi qu'il a été dit, sur les dispositions de l'article 119 bis 2 du code général des impôts et non sur celles de l'article 182 B du même code ; que, par suite, le fait que l'intégralité des conditions d'application de ce dernier article ne seraient pas remplies est sans incidence ;

Considérant, enfin, que si, devant le tribunal, la société requérante s'est prévalue d'une réponse faite le 26 juin 1995 par un agent de l'administration fiscale à une demande qu'elle lui aurait adressée au sujet de son éventuel assujettissement à la retenue à la source à raison du versement des commissions litigieuses, ladite réponse, au demeurant adressée à une société tierce, se référait à l'instruction 5 B 7124 de la direction générale des impôts qui commente la mise en oeuvre de la retenue à la source prévue à l'article 182 A du code général des impôts ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, cet article n'est pas le fondement légal du redressement ; que l'invocation de la réponse susmentionnée était dès lors inopérante et que le tribunal a régulièrement pu s'abstenir de répondre à ce moyen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SAS BOISSONS SERVICES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ; que, par voie de conséquence, les conclusions de la requête tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS BOISSONS SERVICES est rejetée.

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N° 07PA00597

Classement CNIJ :

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 07PA00597
Date de la décision : 09/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Alain VINCELET
Rapporteur public ?: M. Niollet
Avocat(s) : GROSMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2009-07-09;07pa00597 ?
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