La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2008 | FRANCE | N°07PA00907

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8éme chambre, 22 septembre 2008, 07PA00907


Vu la requête et le mémoire, enregistrés les 5 mars et 24 septembre 2007, présentés pour M. Alain X demeurant ..., et l'ASSOCIATION DES RETRAITES DE LA CAISSE LOCALE DE RETRAITES, élisant domicile à la même adresse, par la SCP Bachellier-Potier de la Varde ; M. X et l'ASSOCIATION DES RETRAITES DE LA CAISSE LOCALE DES RETRAITES requérante demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600216 et n° 0600217 du 30 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du congrès de la N

ouvelle-Calédonie du 29 mars 2006 relatif au régime général de retraite ...

Vu la requête et le mémoire, enregistrés les 5 mars et 24 septembre 2007, présentés pour M. Alain X demeurant ..., et l'ASSOCIATION DES RETRAITES DE LA CAISSE LOCALE DE RETRAITES, élisant domicile à la même adresse, par la SCP Bachellier-Potier de la Varde ; M. X et l'ASSOCIATION DES RETRAITES DE LA CAISSE LOCALE DES RETRAITES requérante demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600216 et n° 0600217 du 30 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du congrès de la Nouvelle-Calédonie du 29 mars 2006 relatif au régime général de retraite des agents relevant des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie et à la caisse locale de retraite ;

2°) d'annuler la délibération en cause en ses articles 12 et 14 ;

3°) de condamner l'intimé à leur verser la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la loi organique 99-209 du 19 mars 1999 modifiée et la loi 99-210 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;

Vu le décret n° 54-48 du 4 janvier 1954 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 septembre 2008 :

- le rapport de M. Coiffet, rapporteur,

- les observations de Me Lazennec pour le Congrès de la Nouvelle-Calédonie,

- et les conclusions de Mme Desticourt, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la demande présentée par M. X et l'ASSOCIATION DES RETRAITES DE LA CAISSE LOCALE DES RETRAITES devant le tribunal administratif :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 421-6 du code de justice administrative : « Devant les tribunaux administratifs de Mamoudzou, de Papeete, de Mata-Utu et de Nouvelle-Calédonie, le délai de recours de deux mois prévu à l'article R. 421-1 est porté à trois mois » ; qu'il ressort des pièces du dossier que la délibération n° 169 du 29 mars 2006 relative au régime général de retraites des agents relevant des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie et à la caisse locale de retraites a été publiée au journal officiel de la Nouvelle-Calédonie du 31 mars 2006 ; que la demande présentée par M. X et l'ASSOCIATION DES RETRAITES DE LA CAISSE LOCALE DES RETRAITES tendant, en dernier lieu, à l'annulation des articles 12et14 de cette délibération a été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie le 30 juin 2006 et n'était pas, par application des dispositions précitées de l'article R. 421-6 du code de justice administrative, tardive ; que la première fin de non recevoir opposée en défense par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie doit dès lors être écartée ;

Considérant, d'autre part, que M. X a bien intérêt à contester les dispositions de l'article 14 de la délibération précitée n° 169 du 29 mars 2006 lesquelles ont trait aux modalités de calcul de la minoration affectant les pensions de réversion dès lors que les droits des bénéficiaires desdites pensions procèdent des droits ouverts au profit des retraités ; que par ailleurs, les statuts de l'ASSOCIATION DES RETRAITES DE LA CAISSE LOCALE DE RETRAITES qui lui donnent pour objet l'étude de la défense des droits, des intérêts matériels professionnels et moraux, collectifs ou individuels des personnes bénéficiant du régime de retraite organisé par le décret n° 54-48 du 4 janvier 1954 lui confèrent également intérêt pour contester les dispositions de l'article 14 de la délibération précitée ; qu'ils s'en suit que la seconde fin de non recevoir opposée par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie et tirée du défaut d'intérêt pour agir des demandeurs à l'encontre desdites dispositions ne peut qu'être écartée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le jugement attaqué répond précisément à chacun des moyens présentés par les demandeurs ; que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le dit jugement serait entaché d'une insuffisance de motivation ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que M. X et l'ASSOCIATION DES RETRAITES DE LA CAISSE LOCALE DE RETRAITES se bornent en appel à demander l'annulation des articles 12 et 14 de la délibération n° 169 du 29 mars 2006 relative au régime général de retraites des agents relevant des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie et à la caisse locale de retraites sans reprendre leurs conclusions initiales tendant à l'annulation de l'article 21 de ladite délibération ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la délibération n° 169 du 29 mars 2006 relative au régime général de retraites des agents relevant des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie et à la caisse locale de retraites : « L'article 13 du décret modifié n° 54-48 du 4 janvier 1954 est modifié comme suit : (...) Il est inséré un IX ainsi rédigé : IX - les pensionnés relevant du présent régime supportent sur le montant de leur pension, augmenté éventuellement de la majoration de pension pour enfants et de l'indemnité temporaire de résidence, une minoration dont le taux est fixé : - à 1 % à compter du 1er avril 2006 ; - à 2% à compter du 1er avril 2007 ; - à 3% à compter du 1er avril 2008 ; - à 4% à compter du 1er avril 2009 ; - à 5% à compter du 1er avril 2010. [...] » ; qu'aux termes de l'article 14 de cette délibération : « L'article 23 du décret modifié n° 54-48 du 4 janvier 1954 précité est modifié comme suit : II est inséré un III ainsi rédigé : « III- les bénéficiaires d'une pension de réversion, augmentée éventuellement de la majoration de pension pour enfants et de l'indemnité temporaire de résidence, supportent, lorsque le montant de leur pension excède le minimum vital prévu à l'article 43 du présent décret, une minoration dont le taux est fixé : -à 1% à compter du 1er avril 2006 ; - à 2% à compter du 1er avril 2007 ; - à 3% à compter du Ier avril 2008 ; - à 4% à compter du 1er avril 2009 ; - à 5% à compter du 1er avril 2010. A l'issue d'une période de 10 ans à compter de l'entrée en vigueur de cette mesure, le conseil d'administration de la caisse locale de retraites pourra proposer soit une modification, soit la suppression de la minoration visée à l'alinéa ci-dessus, sous réserve de disposer d'un taux de couverture au moins équivalent à 2,5 années de prestations. En aucun cas, le montant de la pension peut être inférieur au minimum vital prévu à l'article 43 du présent décret » ... » ; que l'article 21 de la même délibération dispose que : « Les articles 49 à 57 du décret modifié n° 54-48 du 4 janvier 1954 précité sont abrogés » ;

Sur le moyen tiré de l'illégalité de la délibération attaquée en ce qu'elle déroge et porte atteinte au principe de la répartition :

Considérant, en premier lieu, que les requérants soutiennent que le congrès de la Nouvelle-Calédonie ne pouvait légalement, par l'article 21 de la délibération litigieuse, abroger, d'une part, l'article 49 en ce qu'il précise que : « la caisse fonctionne sous le régime de la répartition », d'autre part, l'article 52 du décret susvisé du 4 janvier 1954, en ce que cet article dispose que : « le traitement des fonctionnaires est payé sur le net » ;

Considérant, d'une part, que l'article 2 de la délibération contestée dispose que : « L'article 1er du décret modifié n° 54-48 du 4 janvier 1954 précité est réécrit comme suit : Art. 1er - Il est institué en Nouvelle-Calédonie un régime général de retraites des fonctionnaires relevant des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie. Sa gestion répond aux règles de fonctionnement d'un régime de répartition » ; qu'ainsi le congrès de la Nouvelle-Calédonie s'est borné à déplacer les dispositions anciennes de l'article 49 à l'article 1er du décret de 1954 ; que le moyen susvisé dans sa première branche manque ainsi en fait et a ainsi été écarté à bon droit par le tribunal ;

Considérant, d'autre part, que le moyen susvisé en tant qu'il conteste l'abrogation des dispositions susmentionnées de l'article 52 du décret de 1954 n'est pas davantage en appel qu'en première instance assorti des précisions suffisantes pour mettre la cour en mesure d'en apprécier son bien fondé, en particulier d'établir que par l'abrogation critiquée, le principe de répartition rappelé à l'article 1er modifié du décret n° 54-48 du 4 janvier 1954 serait mis en cause ;

Considérant, en second lieu, que les requérants soutiennent que la participation des retraités au financement de la caisse locale de retraites porte atteinte au principe de la retraite par répartition ;

Considérant que la délibération n° 169 du 29 mars 2006 qui institue un mécanisme d'abaissement du montant des pensions des agents relevant des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie selon un pourcentage progressif n'instaure aucun prélèvement obligatoire assis, dans la logique du système de financement des retraites par répartition, sur le traitement d'activité des agents et supporté par ces derniers et l'employeur public ; que les minorations de la pension instituées par les articles 12 et 14 de la délibération litigieuse supportées par les ex agents relevant du régime de retraite issu du décret n° 54-48 du 4 janvier 1954 qui ne peuvent être regardées comme constituant une cotisation sociale ne portent pas atteinte au principe réaffirmé à l'article 1er du décret de 1954 modifié par la délibération en litige selon lequel la gestion du régime général de retraites des fonctionnaires répond aux règles de fonctionnement d'un régime par répartition ; que c'est dès lors à bon droit que le tribunal a également rejeté le moyen susmentionné sur ce point ;

Sur le moyen tiré de l'illégalité de l'assujettissement des retraités à une contribution déguisée :

Considérant que les requérants soutiennent que le congrès de la Nouvelle-Calédonie a porté une atteinte illégale aux règles budgétaires de la caisse locale de retraites, dès lors que les mesures de minoration instituées par les articles 12 et 14 de la délibération ont pour but de diminuer les dépenses de la caisse pour compenser la baisse de ses recettes ce qui serait contraire aux dispositions de l'article 50 du décret de 1954 reprises par l'article 30 de la délibération en litige en vertu desquelles « il appartient au seul budget de la Nouvelle-Calédonie d'assumer l'équilibre financier de la caisse et non aux pensionnés » ;

Considérant que l'article 30 de la délibération en litige dispose : « L'article 27 de la délibération modifiée n° 365/CP du 17 novembre 1994 précitée est réécrit comme suit : « article 27-1. I- Les recettes de l'établissement sont principalement constituées par : 1°/ la retenue prélevée sur le traitement des bénéficiaires ; 2°/la contribution supportée par le budget qui à la charge du traitement ; 3°/ la part attribuée à la caisse locale de retraites dans le produit des amendes, saisies et confiscations, en matière de douanes ou de contributions indirectes ; 4°/ les revenus du portefeuille et des autres livres appartenant à la caisse ; 5°/ les capitaux provenant de l'aliénation des biens immobiliers ; 6°/ les dons, legs et subventions faits à titre gracieux à la caisse locale de retraites par des particuliers ou des personnes de droit public ; 7°/ les ressources accidentelles ; 8°/ les emprunts ; 9°/ les contributions éventuelles d'organismes privés. II - En cas d'insuffisance des ressources définies ci-dessus : 1°/ il pourra être fait aliénation des valeurs constituant le portefeuille ; 2 / le budget de la Nouvelle-Calédonie est astreint à une contribution obligatoire et proportionnelle au. nombre des particuliers entretenus par elle jusqu 'à concurrence du chiffre total de ces dépenses. » ;

Considérant, d'une part, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que les minorations instituées par les dispositions des articles 12 et 14 de la délibération attaquée qui s'inscrivent dans un mécanisme d'abaissement du montant des pensions des agents relevant des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie selon un pourcentage progressif ne constituent pas une « cotisation sociale » et ne sauraient être regardées comme une « retenue prélevée sur le traitement des bénéficiaires » au sens des dispositions précitées de l'article 27-1 nouveau de la délibération modifiée n° 365/CP du 17 novembre 1994 ; que, d'autre part, les dispositions instaurant des minorations n'ont ni pour objet ni pour effet de porter atteinte au principe selon lequel il appartient au Budget de la Nouvelle-Calédonie d'assurer l'équilibre de la caisse locale de retraite sous forme d'une contribution obligatoire et proportionnelle au nombre de particuliers entretenus par elles en cas d'insuffisances de ressources ; que c'est ainsi à bon droit que le tribunal a rejeté le moyen susmentionné ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance du principe de non rétroactivité :

Considérant que, sauf disposition législative contraire, il est procédé au calcul de la pension d'un fonctionnaire en fonction des circonstances de fait et des dispositions en vigueur à la date à laquelle cette pension lui est concédée ; que les dispositions de l'article 12 de la délibération n° 169 du 29 mars 2006, divisibles des autres dispositions, modifiant le paragraphe IX de l'article 13 du décret n° 54-48 du 4 janvier 1954 qui instaurent une minoration à caractère progressif affectant le montant de la pension servie à tous les pensionnés du régime issu du décret précité s'appliquent ainsi aux pensions des agents retraités dont les droits ont été ouverts antérieurement à l'entrée en vigueur de cette délibération; qu'elles présentent ainsi un caractère rétroactif pour ces agents ; qu'il s'en suit que M. X et l'ASSOCIATION DES RETRAITES DE LA CAISSE LOCALE DES RETRAITES sont ainsi fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leur demande tendant à l'annulation des articles 12 et 14 de cette délibération pour méconnaissance du principe de non rétroactivité ; que le jugement attaqué doit, en conséquence, être annulé dans cette mesure ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.X et de l'ASSOCIATION DES RETRAITES DE LA CAISSE LOCALE DE RETRAITE, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande le congrès de la Nouvelle-Calédonie au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de condamner le congrès de la Nouvelle-Calédonie et le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie à verser à chacun des requérants la somme de 1 500 euros en application des dispositions précitées ;

D E C I D E :

Article 1er : La délibération n° 169 du 29 mars 2006 est annulée, en tant que par ses articles 12 et 14, divisibles des autres dispositions, elle s'applique aux pensions des agents retraités dont les droits ont été ouverts antérieurement à l'entrée en vigueur de cette délibération.

Article 2 : Le jugement n° 0600216 et n° 0600217 du 30 novembre 2006 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie est annulé en tant qu'il a rejeté la demande d'annulation de la délibération n° 169 du 29 mars 2006 en ce qu'elle s'appliquait de façon rétroactive aux agents dont les droits avaient été antérieurement ouverts à son entrée en vigueur.

Article 3 : Le congrès de la Nouvelle-Calédonie et le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie sont condamnés à verser à chacun des requérants la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête de M. X et de l'ASSOCIATION DES RETRAITES DE LA CAISSE LOCALE DE RETRAITES est rejeté.

2

N° 07PA00709


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8éme chambre
Numéro d'arrêt : 07PA00907
Date de la décision : 22/09/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: Mme DESTICOURT
Avocat(s) : SCP BACHELLIER - POTIER DE LA VARDE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2008-09-22;07pa00907 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award