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22/05/2008 | FRANCE | N°07PA03936

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 22 mai 2008, 07PA03936


Vu la requête, enregistrée le 11 octobre 2007, présentée pour M. Y X demeurant chez Z ..., par Me Dandaleix ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0708845, en date 20 septembre 2007, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions en date du 2 avril 2007 par lesquelles le préfet de police a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire « étudiant », lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il pourra être r

envoyé ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir lesdites décisions ;
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Vu la requête, enregistrée le 11 octobre 2007, présentée pour M. Y X demeurant chez Z ..., par Me Dandaleix ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0708845, en date 20 septembre 2007, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions en date du 2 avril 2007 par lesquelles le préfet de police a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire « étudiant », lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration du délai de
15 jours à compter de la notification de la présente décision ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Dandaleix de la somme de
2 000 euros au titre des frais exposés et con compris dans les dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 17 janvier 2008 accordant l'aide juridictionnelle totale à M. X ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2008 :

- le rapport de M. Pommier, rapporteur,

- et les conclusions de M. Bachini, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que la décision par laquelle le préfet de police a refusé de délivrer à M. X un titre de séjour mention « étudiant » comporte l'exposé des faits et des considérations de droit sur lesquels elle se fonde et est ainsi suffisamment motivée ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ne saurait être accueilli ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « I. La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention « étudiant ». En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée et sous réserve d'un entrée régulière en France (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : « Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour « compétences et talents » sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois » ; que l'article R. 311-2 dudit code dispose que : « La demande est présentée par l'intéressé dans les deux mois de son entrée en France. S'il y séjournait déjà , il présente sa demande (…) 4°) soit dans le courant des deux derniers mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire (…)
A l'échéance de ce délai et en l'absence de présentation de demande de renouvellement de sa carte de séjour, il justifie à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national lorsque la possession d'un visa est requise pour la première délivrance de la carte de séjour » ;

Considérant que M. X, ressortissant camerounais entré en France en 1998, s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire « étudiant » renouvelée jusqu'au 30 octobre 2005 ; qu'il a obtenu le 19 décembre 2005 un récépissé de demande de renouvellement de titre de séjour valable jusqu'au 18 mars 2006 ; qu'il n' a pas poursuivi ses démarches et est rentré dans son pays d'où il a regagné la France en juin 2006 ; qu'il a sollicité à nouveau le
21 novembre 2006 une demande de carte de séjour « étudiant » ;

Considérant que lorsque le préfet est saisi d'une demande de renouvellement d'un titre de séjour après l'expiration du délai mentionné au 4° de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cette demande doit être regardée comme tendant à la première délivrance d'un titre de séjour de même nature ; qu'ainsi le préfet de police n'a commis aucune erreur de droit en estimant que la demande dont M. X l'avait saisi alors qu'il ne justifiait plus d'un titre de séjour en cours de validité devait être examinée au regard de la condition de visa posée par l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant que si l'autorité administrative peut accorder une carte de séjour temporaire « étudiant », notamment en cas de nécessité liée au déroulement des études, sans que la condition de visa de long séjour soit exigée, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police, qui a tenu compte de ce que l'intéressé n'avait obtenu aucun diplôme universitaire depuis plusieurs années, se serait cru en l'espèce en situation de compétence liée en opposant à l'intéressé la condition de visa ;

Considérant que si M. X justifie avoir été inscrit au cours de l'année universitaire 2004-2005 en master 1ère année d'économie technologie territoires-études internationales, il n'a pas été admis à la session d'examen ; qu'il s'est inscrit pour l'année universitaire 2006-2007 en licence 2 d'économie et gestion, alors qu'il avait déjà pris antérieurement cinq inscriptions à ce même niveau d'études sans avoir obtenu de diplôme ; que par suite en estimant que M. X ne pouvait plus se voir délivrer un nouveau titre en qualité d'étudiant en l'absence de motifs susceptibles d'expliquer ses échecs universitaires répétés au cours des cinq années précédentes, le préfet de police n'a entaché son appréciation ni d'erreur de fait ni d'erreur de droit ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des termes mêmes de la demande présentée le 21 novembre 2006 qu'elle tendait à la délivrance d'une carte de séjour « étudiant » ; que le préfet de police n'était pas tenu d'examiner si l'intéressé pouvait prétendre à une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » ; que par suite le requérant ne peut utilement soutenir que la décision attaquée aurait été prise en méconnaissance des dispositions des articles L. 313-11 6° et 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui sont relatifs à la délivrance d'une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » ;

Considérant, en quatrième lieu, que lors de l'instruction d'une demande de titre de séjour en qualité d'étudiant, l'administration a seulement à porter une appréciation sur la réalité et le sérieux des études poursuivies ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes desquelles toute personne a droit au respect d'une vie familiale normale et des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 faisant obligation à l'autorité administrative d'accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur de l'enfant dans les décisions le concernant sont inopérants ;

Considérant enfin qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de M. X ;


Sur les conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire et la fixation du pays de destination :

Considérant que l'obligation de quitter le territoire français dont le préfet peut en application de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé, assortir le refus ou le retrait d'un titre de séjour est une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées, pour l'ensemble des décisions administratives, par l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ; que si la motivation de cette mesure se confondant avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement, n'appelle pas d'autre mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, c'est toutefois à la condition que le préfet ait rappelé dans sa décision les termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui l'habilite à assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire ;

Considérant qu'en se bornant en l'espèce à viser le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police a méconnu cette exigence ; que la décision par laquelle il a fait obligation à M. X de quitter le territoire français est ainsi entachée d'illégalité ; que cette illégalité entraîne par voie de conséquence celle de la décision fixant le pays à destination duquel M. X pourra être renvoyé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que, d'une part, la présente décision qui rejette la requête de
M. X en tant qu'elle porte sur le refus de séjour qui lui a été opposé n'appelle aucune mesure d'exécution ; que d'autre part, l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination n'étant pas la conséquence de l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, elle n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de délivrer à
M. X une carte de séjour mention « vie privée et familiale » doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Dandaleix renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat, pour le compte de Me Dandaleix, une somme de 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 0708845 en date du 20 septembre 2007 du Tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. X dirigées contre les décisions du préfet de police portant obligation de quitter le territoire et fixation du pays de destination.
Article 2 : Les décisions du préfet de police en date du 2 avril 2007 faisant obligation à
M. X de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays de destination sont annulées.
Article 3 : L'Etat versera à Me Dandaleix, avocat de M. X, une somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Dandaleix renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l 'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

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N° 07PA03936


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 07PA03936
Date de la décision : 22/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: M. Joseph POMMIER
Rapporteur public ?: M. BACHINI
Avocat(s) : DANDALEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2008-05-22;07pa03936 ?
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