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06/03/2007 | FRANCE | N°04PA03032

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 06 mars 2007, 04PA03032


Vu la requête, enregistrée le 12 août 2004, présentée pour M. Jacques X demeurant ..., par Me Berquet ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0300449 du 27 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du président de Nouvelle-Calédonie en date du 21 août 2003 l'excluant temporairement de ses fonctions pour une durée de cinq mois ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) de mettre à la charge du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie une somm

e de 260 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ...

Vu la requête, enregistrée le 12 août 2004, présentée pour M. Jacques X demeurant ..., par Me Berquet ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0300449 du 27 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du président de Nouvelle-Calédonie en date du 21 août 2003 l'excluant temporairement de ses fonctions pour une durée de cinq mois ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) de mettre à la charge du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie une somme de 260 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 février 2007 :

- le rapport de M. Lelièvre, rapporteur,

- et les conclusions de M. Trouilly, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant que la fin de non-recevoir opposée par le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie tirée de ce que la requête de M. X ne serait pas suffisamment motivée manque en fait et doit être écartée ;

Considérant que M. X, qui avait soulevé devant le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie des moyens de légalité interne, est recevable, contrairement à ce que soutient le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie en défense, à soulever pour la première fois en appel des moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et du détournement de pouvoir qui relèvent de la même cause juridique ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que par le jugement attaqué du 27 mai 2004, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté la demande de M. X en se bornant à affirmer que l'intéressé avait commis des fautes professionnelles et que le rapport du conseil de discipline faisait état de faits précis justifiant sa comparution devant le conseil de discipline ; que le tribunal administratif, faute d'indiquer la nature de ces faits et de ces fautes professionnelles, n'a pas suffisamment motivé son jugement qui doit, par suite, être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif ;

Sur la demande de M. X devant le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens :

Considérant qu'à la suite de ses visites dans la classe de M. X, instituteur, ayant eu lieu le 10 mai et le 19 juin 2001, l'inspecteur de l'enseignement primaire en charge du secteur de l'île de Lifou a présenté un rapport sur la manière de servir du requérant faisant état, d'une part, d'un « travail nettement insuffisant et d'un manque évident de conscience professionnelle » et, d'autre part, de ce qu'il était confirmé que l'intéressé avait procédé à un « étiquetage » des élèves « dont les parents appartiendraient à une secte religieuse » ; que l'inspecteur a demandé que des « sanctions sévères » soient infligées à cet enseignant « pour la sauvegarde d'une école républicaine laïque » ; que le président de la province des Iles Loyautés a demandé le 26 février 2003 au président du Gouvernement de Nouvelle-Calédonie de traduire cet agent devant le conseil de discipline pour « insuffisance et manque de conscience professionnelle » et « pratique sournoise de la religion au sein de l'école » ; que l'analyse de l'inspecteur de l'enseignement primaire a été reprise dans le rapport soumis au conseil de discipline qui s'est prononcé sur le cas de M. X le 26 juin 2003 et a proposé de lui infliger une sanction d'exclusion temporaire de ses fonctions de cinq mois ; que par l'arrêté attaqué du 21 août 2003, le président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a décidé d'exclure temporairement M. X de ses fonctions pour une durée de cinq mois en raison, d'une part, de ses « insuffisances et manque de conscience professionnelle » et, d'autre part, du « non respect des règles déontologiques d'une école publique » ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient la Nouvelle-Calédonie en défense, l'arrêté attaqué doit être regardé comme n'étant pas uniquement fondé sur l'insuffisante qualité de l'enseignement de M. X et son absence de respect des instructions de sa hiérarchie mais également sur le fait qu'il aurait manqué à son obligation de neutralité religieuse à l'égard de ses élèves ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que le requérant aurait distingué ses élèves suivant leur croyance religieuse supposée et aurait ainsi manqué à son devoir de neutralité ; qu'ainsi, l'un des motifs de l'arrêté attaqué repose sur des faits matériellement inexacts ;

Considérant qu'eu égard notamment à la circonstance que des rapports d'inspection avaient déjà conclu en 1992 et 1996 à la très médiocre qualité de l'enseignement de M. X et que l'intéressé n'avait pour autant fait l'objet d'aucune sanction disciplinaire, il ne résulte pas de l'instruction que le président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, s'il n'avait retenu que l'autre motif de son arrêté, aurait pris la même sanction à l'égard de l'intéressé ; que, par suite, l'arrêté précité ne peut qu'être annulé ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la Nouvelle-Calédonie à verser à M. X une somme globale de 120 000 francs CFP au titre des dispositions susvisées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 27 mai 2004 et l'arrêté du 21 août 2003 par lequel le président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a exclu M. X de ses fonctions pour une durée de cinq mois sont annulés.

Article 2 : Le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie versera à M. X une somme de 120 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jacques X, au Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et au ministre de l'outre-mer.

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N° 04PA03032


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 04PA03032
Date de la décision : 06/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MERLOZ
Rapporteur ?: M. Francois LELIEVRE
Rapporteur public ?: M. TROUILLY
Avocat(s) : BERQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2007-03-06;04pa03032 ?
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