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30/01/2007 | FRANCE | N°04PA02184

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 30 janvier 2007, 04PA02184


Vu le recours, enregistré le 24 juin 2004, du MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES ; le MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0016928/5-1 et n° 0101559/5-1 du 27 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 11 mai 2000 par laquelle le ministre a informé M. X qu'il serait mis fin à ses fonctions à compter du 10 novembre 2000 et a condamné l'Etat à réparer le préjudice subi par l'intéressé ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Paris ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code...

Vu le recours, enregistré le 24 juin 2004, du MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES ; le MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0016928/5-1 et n° 0101559/5-1 du 27 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 11 mai 2000 par laquelle le ministre a informé M. X qu'il serait mis fin à ses fonctions à compter du 10 novembre 2000 et a condamné l'Etat à réparer le préjudice subi par l'intéressé ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Paris ;

……………………………………...………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le décret n° 69-697 du 18 juin 1969 portant fixation du statut des agents contractuels de l'Etat et des établissements publics de l'Etat à caractère administratif, de nationalité française, en service à l'étranger ;

Vu l'arrêté interministériel du 18 juin 1969 portant application du décret n° 69-697 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 janvier 2007 :

- le rapport de M. Lelièvre, rapporteur,

- et les conclusions de M. Trouilly, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par le jugement attaqué du 27 mai 2004, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé la décision du 11 mai 2000 par laquelle le MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES a indiqué à M. X, agent affecté à l'ambassade de France à N'Djamena, que son engagement ne serait pas renouvelé au-delà du 10 novembre 2000, d'autre part, condamné l'Etat à l'indemniser pour le préjudice moral et les pertes de revenus subis par l'intéressé et enfin, rejeté les conclusions indemnitaires de M. X relatives à l'attribution d'une prime de consul-adjoint, à ses troubles dans les conditions d'existence et aux travaux qu'il avait effectué dans sa maison à N'Djamena ;

Sur l'appel principal du MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES :

Sur la légalité de la décision du 11 mai 2000 et la faute de l'administration :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret susvisé du 18 juin 1969 portant fixation du statut des agents contractuels de l'Etat et des établissements publics de l'Etat à caractère administratif, de nationalité française, en service à l'étranger : « La durée minimale du contrat est de trois ans lorsque l'agent est recruté dans le pays où il est affecté. La durée minimale de contrat est de trente mois majorée de la durée du congé administratif lorsque l'agent est recruté en France ou lorsqu'il est recruté dans un pays étranger différent de celui où il est affecté » ; qu'aux termes de l'article 10 du même décret, le contrat est résilié « 2° A tout moment s'il est dénoncé par l'administration ; moyennant un préavis de trois mois en cas de licenciement par suite de suppression d'emploi ou d'insuffisance professionnelle ; en cas de licenciement par mesure disciplinaire ; lorsque la cessation d'activité est demandée par le gouvernement du pays d'affectation ou lorsqu'elle est motivée soit par la sécurité du poste, soit par la rupture des relations diplomatiques » ; qu'aux termes de l'article 9 de l'arrêt interministériel susvisé du 18 juin 1969 portant application du décret précité : « Le lieu de recrutement des agents visés par le présent arrêté est déterminé par le domicile tel qu'il est défini par les articles 102 à 108 du code civil » et qu'aux termes de l'article 106 du code civil : « Le citoyen appelé à une fonction publique temporaire ou révocable conservera le domicile qu'il avait auparavant, s'il n'a pas manifesté d'intention contraire » ;

Considérant qu'en application des dispositions précitées, d'une part, M. X, qui, depuis sa mise à la retraite du ministère de la défense en 1987 a occupé à titre temporaire plusieurs postes en qualité d'agent contractuel dans différents pays doit être regardé comme n'ayant pas manifesté l'intention contraire de conserver le domicile qu'il avait en France, nonobstant la circonstance que l'intéressé ne résidait pas en France lorsqu'il a conclu le 24 juin 2000 le contrat l'affectant à compter du 10 novembre 1999 à l'ambassade de France au Tchad en tant que rédacteur bilingue ; qu'ainsi, le MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES est fondé à soutenir qu'en estimant que les dispositions du décret du 18 juin 1969 précitées relatives à la durée des contrats des agents recrutés dans les pays où ils sont affectés étaient applicables à la situation de M. X, le Tribunal administratif de Paris a commis une erreur de droit ;

Considérant toutefois que conformément aux dispositions susmentionnées de l'article 8 du décret du 18 juin 1969 relatives aux agents recrutés en France, la durée minimale du contrat conclu par M. X était légalement de trente mois majorée de la durée du congé administratif, alors même que l'article 10 dudit contrat signé par l'intéressé précisait qu'il était souscrit pour une durée d'un an ; que la décision du 11 mai 2000, qualifiée par le ministre de non renouvellement de contrat, doit dès lors être regardée en réalité comme procédant à la résiliation dudit contrat ; que le MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES ne soutient pas que cette résiliation serait intervenue pour un des motifs limitativement prévus par le 2° de l'article 10 du décret précité ; que, par suite, le ministre n'est fondé à se plaindre, ni de ce que le tribunal administratif a annulé cette décision, ni de ce qu'il a estimé qu'elle était constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Sur le préjudice :

En ce qui concerne la perte de rémunération :

Considérant qu'en l'absence de service fait, l'indemnité qui est due à ce titre à M. X pour la période commençant le 10 novembre 2000 et expirant dix-huit mois après cette date majorée de la durée des congés administratifs, date à laquelle son contrat aurait normalement dû expirer, doit correspondre, à la différence entre, d'une part, le traitement net calculé en fonction du niveau indiciaire qui aurait été celui de M. X en France, majoré des indemnités qui en constituent l'accessoire et, d'autre part, les allocations pour perte d'emploi et les revenus tirés d'éventuelles activités professionnelles qu'il a perçus au cours de cette période, ainsi que l'indemnité de fin de fonctions qu'il a éventuellement perçue en application de l'article 11 du décret du 18 juin 1969 ; que, contrairement à ce que soutient le MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES, l'indemnité de résidence 1ère zone prévue à l'article 3 du contrat de M. X est au nombre des indemnités accessoires au traitement de cet agent ; que l'état du dossier ne permettant pas au juge de déterminer le montant des sommes dues à M. X au titre de la perte de rémunération, il y a lieu de renvoyer celui-ci devant l'administration, pour qu'il soit procédé à la liquidation de sa créance ;

En ce qui concerne la réalité du préjudice moral :

Considérant que M. X a subi un préjudice moral du fait de la décision illégale de l'administration ; que, par suite, le MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a fait partiellement droit à la demande présentée par M. X au titre de ce chef de préjudice ;

Sur l'appel incident de M. X :

Sur le préjudice :

En ce qui concerne l'évaluation du préjudice moral :

Considérant que le Tribunal administratif de Paris a fait une exacte appréciation du préjudice moral de M. X en l'évaluant à la somme de 1 500 euros ;

En ce qui concerne les troubles dans les conditions d'existence :

Considérant que dans sa lettre du 20 novembre 2000 adressée au MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES, M. X n'a pas demandé la réparation d'un préjudice se rapportant à ses troubles dans les conditions d'existence ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté les conclusions qu'il a présenté à ce titre comme étant irrecevables faute de demande préalable ;

En ce qui concerne le remboursement des frais de travaux effectués dans la maison que M. X occupait à N'Djamena :

Considérant que M. X n'établit pas qu'il n'aurait pas entrepris ces travaux, dont il souligne à nouveau en appel le caractère d'urgence, s'il avait su qu'il serait mis fin à ses fonctions au bout d'un an ; que, par suite, les conclusions susmentionnées de M. X doivent également être rejetées ;

En ce qui concerne l'indemnité d'exercice des fonctions de consul-adjoint :

Considérant que dans la lettre susmentionnée du 20 novembre 2000 que M. X a adressée au MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES, l'intéressé avait demandé le paiement des indemnités de fonction de consul-adjoint ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir qu'en estimant que ces conclusions étaient irrecevables faute de réclamation préalable, le Tribunal administratif de Paris a entaché sur ce point son jugement d'irrégularité et doit être annulé ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur cette demande de M. X devant le tribunal administratif ;

Considérant que le contrat de M. X précisait qu'il était recruté pour exercer les fonctions de rédacteur bilingue ; que s'il a pu être chargé en tout ou partie des fonctions de consul-adjoint, il n'a pas été nommé à ce poste, qu'il ne pouvait d'ailleurs exercer en sa qualité d'agent contractuel ; qu'au surplus, il résulte de l'instruction que le MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES s'est opposé à ce que l'intéressé soit affecté à ce poste au sein de l'ambassade de France au Tchad et que l'intéressé n'a jamais été habilité à les exercer, même par intérim ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions susmentionnées de M. X devant le Tribunal administratif de Paris doivent être rejetées ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant que M. X peut prétendre, sur les indemnités auxquelles il a droit, aux intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2000, jour de la réception par le MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES de sa demande préalable du 20 novembre 2000 valant sommation de payer, pour les sommes dues jusqu'à cette date et, pour le reste des revenus qu'il aurait dû percevoir jusqu'à l'expiration de son contrat, à compter de chaque échéance de versement ;

Considérant que M. X a demandé la capitalisation des intérêts le 29 décembre 2004 ; qu'à cette date, les intérêts étaient dus pour une année entière ; qu'il y a lieu, dès lors, de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X une somme globale de 1 500 euros au titre des dispositions susmentionnées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 27 mai 2004 est annulé en tant qu'il a rejeté comme irrecevables les conclusions de M. X tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser les indemnités de fonction de consul-adjoint.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. X, pour la période commençant le 10 novembre 2000 et expirant dix-huit mois après cette date majorée de la durée des congés administratifs, une somme correspondant à la différence entre, d'une part, le traitement net calculé en fonction du niveau indiciaire qui aurait été celui de l'intéressé en France, majoré des indemnités qui en constituent l'accessoire, y compris l'indemnité de résidence 1ère zone et le supplément familial de traitement, à l'exclusion des indemnités représentatives de frais et des éléments de rémunération liés à l'exercice effectif des fonctions et, d'autre part, les allocations pour perte d'emploi et les revenus tirés d'éventuelles activités professionnelles qu'il a perçus au cours de cette période, ainsi que l'indemnité de fin de fonctions qu'il a éventuellement perçue en application de l'article 11 du décret du 18 juin 1969. M. X est renvoyé devant le MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES pour qu'il soit procédé à la liquidation de cette somme dans ces conditions. Ladite somme portera intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2000 pour la part due jusqu'à cette date et, pour le surplus, à compter de chacune des échéances auxquelles les traitements auraient dus être versés.

Article 3 : L'article 2 du jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 27 mai 2004 est réformé en ce qu'il est contraire à l'article 2 du présent arrêt.

Article 4 : La somme mentionnée à l'article 2 du présent arrêt ainsi que la somme de 1 500 euros assortie des intérêts à compter du 24 novembre 2000 que l'Etat a été condamné à verser à M. X en application de l'article 3 du jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 27 mai 2004 seront capitalisées à la date du 29 décembre 2004 et à chaque échéance à compter de cette date.

Article 5 : L'Etat est condamné à verser la somme de 1 500 euros à M. X au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions du recours du MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES et des conclusions de M. X est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES et à M. Gaston X.

2

N° 04PA02184


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 04PA02184
Date de la décision : 30/01/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MERLOZ
Rapporteur ?: M. Francois LELIEVRE
Rapporteur public ?: M. TROUILLY
Avocat(s) : SECRETANT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2007-01-30;04pa02184 ?
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