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17/10/2006 | FRANCE | N°02PA00689

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4eme chambre, 17 octobre 2006, 02PA00689


Vu, enregistrés les 18 février et 29 mars 2002, la requête sommaire et le mémoire ampliatif, présentés pour la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS (CCIP), dont le siège est 27 avenue de Friedland à Paris (75008), par Me Cossa ; la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-1459 en date du 18 décembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire et conjointe de la société BEFS-TEC, de la compagnie d'assurance UNI-EUROPE, de la société CGEE Alstom,

de la société TNEE, de la société Weisrock Construction Bois SA, du Bur...

Vu, enregistrés les 18 février et 29 mars 2002, la requête sommaire et le mémoire ampliatif, présentés pour la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS (CCIP), dont le siège est 27 avenue de Friedland à Paris (75008), par Me Cossa ; la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-1459 en date du 18 décembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire et conjointe de la société BEFS-TEC, de la compagnie d'assurance UNI-EUROPE, de la société CGEE Alstom, de la société TNEE, de la société Weisrock Construction Bois SA, du Bureau Veritas, de la société Etablissements Dubost et de M. Dominique X, d'une première part, à lui verser la somme de 3 302 740 F (soit 503 499,47 euros) au titre des travaux de réfection et de remise en état nécessaires pour remédier aux désordres affectant un immeuble abritant l'école supérieure d'ingénieurs en électrotechnique et électronique, avec les intérêts de droit, d'une deuxième part, à lui verser la somme de 7 350 000 F (soit 1 120 500,30 euros) au titre du préjudice financier, des troubles et du préjudice moral, avec les intérêts de droit, d'une troisième part, à lui rembourser les frais d'expertise, ainsi qu'à voir ordonner un complément d'expertise sur certains désordres ;

2°) de faire droit à ses demandes indemnitaires, augmentées des intérêts de droit à compter de la requête introductive d'instance avec capitalisation ;

3°) de condamner les mêmes défendeurs à lui rembourser les frais d'expertise qui ont été mis à sa charge ;

4°) de condamner chacun des défendeurs à lui verser la somme de 2 500 euros par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) d'ordonner un complément d'expertise au titre des griefs n° 7 (ventilation-transformateur), n° 8 (bureaux façade et gélules), n° 27 (chauffage du couloir des salles blanches), n° 31 (pose des ancrages de charpente), n° 34 (absence de pente au sol de certains locaux techniques) et, en tant que de besoin, n° 30 (défaut de conception de l'assainissement des pelouses) ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2006 :

- le rapport de Mme Descours-Gatin, rapporteur,

- les observations de Me Damerval, pour la société Cegelec Paris, de Me Bonnet-Cerisier, pour la société Vinci Energies, et celles de Me Coulon, pour la société Weisrock Construction Bois,

- et les conclusions de M. Trouilly, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS, qui avait confié la maîtrise d'oeuvre de la construction sur le site de Marne-la-Vallée d'un immeuble destiné à abriter l'Ecole supérieure d'ingénieurs en Electrotechnique et électronique (ESIEE) à un groupement composé de M. X, architecte, et de la société BEFS-TEC remplaçant le BET BEFS ENGINEERING, a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner solidairement et conjointement la société BEFS-TEC et son assureur la société d'assurances UNI EUROPE aux droits de laquelle est venue la société Axa Global Risk, la société CGEE ALSTOM, la société TNEE, aux droits de laquelle est venue la société Tunzini Industrie puis la société GTIE Thermique, la société Weisrock Construction Bois SA, la société Bureau Veritas, la société Etablissement Dubost et l'architecte M. X à lui payer, d'une part, une somme de 3 302 740 F (503 499,47 euros) au titre des travaux de réfection et de remise en état nécessaires pour remédier aux désordres affectant le bâtiment, d'autre part, une somme de 7 350 000 F (1 120 500,30 euros), avec les intérêts de droit, au titre du préjudice financier, des troubles et du préjudice moral subis, ainsi que le remboursement des frais d'expertise ; que, par un jugement en date du 18 décembre 2001, le tribunal administratif a rejeté, d'une part, comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, les demandes dirigées contre la société d'assurances Axa Global Risk et, d'autre part, comme irrecevables, les demandes relatives à la réparation des désordres affectant le bâtiment pour défaut de motivation, ainsi que celles relatives aux préjudices immatériels pour défaut de demande préalable ; que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS demande l'annulation de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que la juridiction administrative est incompétente pour apprécier l'application d'un contrat d'assurance qui est une convention de droit privé ; qu'il s'ensuit qu'elle relève de la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire ; que la Chambre de commerce et d'industrie de Paris n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes dirigées contre la société d'assurances UNI EUROPE comme présentées devant une juridiction incompétente pour en connaître ; que le jugement attaqué n'est donc pas irrégulier sur ce point ;

Mais considérant, en premier lieu, que le tribunal administratif a soulevé d'office, sans en informer les parties, le moyen tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à la réparation des divers préjudices immatériels ;

Considérant, en second lieu, que, pour demander devant le tribunal administratif, la condamnation conjointe et solidaire de la société BEFS-TEC, de son assureur la société d'assurances UNI EUROPE, de la société CGEE Alstom, de la société TNEE, de la société Weisrock Construction Bois SA, de la société Bureau Veritas, de la société Etablissement Dubost et de M. X à lui verser une somme totale de 3 302 740 F au titre des travaux de réfection et de remise en état nécessaires pour remédier aux désordres, la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS s'est fondée « tant sur les principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil pour ce qui concerne les désordres et malfaçons liés aux travaux et prestations réceptionnés sans réserves ou pour lesquels les réserves ont été levées, que sur la responsabilité contractuelle des constructeurs pour ce qui concerne les désordres et malfaçons liés à des travaux et prestations n'ayant pas été réceptionnés définitivement et sans réserve » ;

Considérant que, si la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE s'est bornée à reprendre les 25 griefs retenus par l'expert dans son rapport, sans préciser, pour chacun de ces griefs, ni le fondement juridique sur lequel elle s'appuyait, ni les dates de réception des différents travaux ni celles de l'apparition des désordres, ni les travaux ayant fait l'objet de réserves, ni ceux pour lesquels les réserves avaient été levés, elle avait indiqué que des réceptions avaient pu être prononcées, en particulier le 13 janvier 1988 pour le lot n° 3, le 29 février 1988 pour le lot n° 15 et le 20 février 1988 pour les lots n° 17 et 18 ; qu'en outre, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise ainsi que des mémoires en défense présentés devant le tribunal par les différentes entreprises mises en cause, que, d'une part, les réserves affectant la réception du lot n° 3 ( gymnase ) avaient été finalement levées, d'autre part, que les lots n° 15 (chauffage-ventilation) et n°17 et 18 « électricité - courants forts et faibles » avaient fait l'objet de réceptions avec réserves ; qu'il suit de là que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté comme irrecevables l'ensemble de ses demandes indemnitaires tendant à la réparation des divers désordres ; que le jugement doit donc être annulé en tant que le tribunal a rejeté comme irrecevables les demandes de la chambre de commerce et d'industrie dirigées contre la société BEFS-TEC, la société CGEE Alstom, la société TNEE, la société Weisrock Construction Bois SA, la société Bureau Veritas, la société Etablissement Dubost et l'architecte M. X ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer dans cette mesure et de statuer immédiatement sur ces demandes ;

Au fond :

Sur la responsabilité décennale :

En ce qui concerne les désordres qui n'entrent pas dans le cadre de la garantie décennale :

Considérant que ne sont établis ni les désordres qui affecteraient la ventilation de la réserve du restaurant et des compresseurs d'air, ni ceux relatifs à l'insuffisance de pression et de débit du réseau incendie, ni ceux concernant la détérioration de câbles qui serait intervenue avant les opérations d'expertise ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la ventilation des groupes frigorifiques, qui bénéficient d'une ventilation naturelle, soit insuffisante ; que le local contenant le transformateur n'a fait l'objet d'aucun relevé contradictoire de températures permettant de mettre en évidence une ventilation insuffisante ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les réserves formulées lors de la réception des travaux du gymnase le 5 avril 1988, d'ailleurs à la suite de différentes mises en garde formulées par la société BEFS-TEC, relatives au niveau sonore des appareils de chauffage, ont été levées par le maître de l'ouvrage qui a soldé ce marché le 14 décembre 1990 ;

Considérant que les désordres consistant en une insuffisance de chauffage de la régie de l'auditorium et du bureau-bibliothèque, en une insuffisante évacuation - d'ailleurs contestée par le BEFS-TEC - ne rendent pas le bâtiment impropre à sa destination ;

Considérant que l'absence de chauffage du couloir des salles blanches, d'ailleurs résultant d'un choix délibéré du maître de l'ouvrage, était apparente à la réception des travaux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner le complément d'expertise demandé par la chambre de commerce et d'industrie, celle-ci n'est donc pas fondée à mettre en cause la responsabilité décennale des constructeurs sur ces différents types de désordres ;

En ce qui concerne les désordres qui entrent dans le cadre de la garantie décennale :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal de réception du lot n° 4 « étanchéité », que l'étanchéité des locaux d'extraction n'a pas fait l'objet de réserves ; que M. Y, premier expert nommé par le Tribunal de grande instance de Paris, a constaté l'absence d'étanchéité de ces locaux ainsi que des coulures d'eau sur les armoires électriques ; que ces désordres, qui mettent en cause la sécurité du bâtiment, sont de nature à rendre celui ci impropre à sa destination ; que sont intervenus en qualité de constructeurs M. X, architecte, concepteur, et le Bureau Veritas, chargé du contrôle ; qu'il y lieu de condamner M. X, conjointement et solidairement avec la société Bureau Veritas à réparer les conséquences dommageables de ces désordres ; qu'il résulte du rapport de l'expert qu'il pourra être remédié à ces désordres par des travaux s'élevant à 5 716,83 euros (37 500 F) ; qu'il sera faite une juste appréciation de la responsabilité de chacun des constructeurs en condamnant, d'une part M. X, architecte, à garantir la société Bureau Veritas à hauteur de 80% du montant de l'indemnité mise à leur charge conjointe et solidaire, d'autre part, le Bureau Veritas, à garantir M. X à hauteur de 20% de ladite indemnité ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'installation nécessaire à l'évacuation des gaz dangereux des laboratoires transférés des locaux de la rue Falguière sur le site de Marne-la-Vallée n'a été effectuée que tardivement ; qu'est intervenue en qualité de constructeur la société BEFS-TEC qui assurait la maîtrise d'oeuvre ; qu'il ressort du rapport de l'expert, qui mentionne notamment divers comptes-rendus de réunions et correspondances datant des mois de mai à juillet 1987, que la société BEFS-TEC ne pouvait ignorer l'utilisation de gaz dangereux par les laboratoires de l'école d'ingénieurs ; que ces désordres, qui mettent en cause la sécurité du bâtiment, sont de nature à rendre celui-ci impropre à sa destination ; qu'il y a donc lieu de condamner ladite société à réparer intégralement les conséquences dommageables de ces désordres ; qu'il résulte du rapport de l'expert que la réalisation tardive de l'installation nécessaire à l'évacuation des gaz dangereux a entraîné un surcoût évalué par l'expert à 20% de la somme de 49 980 F exposée par la chambre de commerce et d'industrie ; qu'il y a donc lieu de condamner le BEFS-TEC à verser la somme de 1 523, 88 euros (9 996 F) à la chambre de commerce et d'industrie ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que l'architecte a omis de prévoir la ventilation des trémies d'ascenseur ; que ce désordre est de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ; qu'il a été réparé pour un coût de 4 949,10 euros (32 464 F), l'expert évaluant à la moitié de cette somme le surcoût pour exécution tardive de ces travaux ; qu'il y a donc lieu de condamner M. X, architecte, à verser à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE la somme de 2 474,55 euros (16 232 F) ;

Sur la responsabilité contractuelle :

En ce qui concerne les désordres n'entrant pas dans le cadre de la responsabilité contractuelle :

Considérant, en premier lieu, que la réalité des dommages résultant d'un court-circuit entre les gaines d'aspiration, d'un défaut de conception de l'assainissement des pelouses, ainsi que de l'absence de pente au sol de certains locaux techniques, n'a pas été établie par l'instruction, les travaux relatifs aux désordres allégués ayant été réalisés avant l'expertise ; que, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner le complément d'expertise demandé par la chambre de commerce et d'industrie, les demandes relatives à ces désordres doivent donc être rejetées ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, qui n'a pas relevé de défaut de conception sur ce point, que le mauvais fonctionnement du chauffage et du rafraîchissement des bureaux situés en façade est du bâtiment principal et des deux édicules, dits « gélules », résulte uniquement de l'insuffisante maîtrise par le maître d'ouvrage d'installations complexes et devrait pouvoir être résolu sans dépenses supplémentaires ; que, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner le complément d'expertise demandé par la chambre de commerce et d'industrie, les demandes relatives à ces désordres doivent donc être rejetées ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aucune clause du marché ne prévoyait que la déclaration de classement, qui ne peut être rattachée à la « gestion administrative des pièces contractuelles », incombait au BEFS-TEC ; que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE n'est donc pas fondée à demander que le BEFS-TEC soit condamné à lui payer la somme de 17 700 F qu'elle a dû verser au Bureau Veritas pour accomplir cette démarche ;

Considérant, en quatrième lieu, que le cahier des clauses techniques particulières n'a pas prévu de scellement des ancrages de la charpente principale du bâtiment ; que, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner le complément d'expertise demandé par la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE, celle-ci n'est donc pas fondée à demander la condamnation du BEFS-TEC à lui verser la somme relative à ces travaux ;

Considérant, en cinquième lieu, que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE fait valoir que les retards dans la construction de l'école lui ont occasionné divers préjudices, soit 1 150 000 F au titre des retards sur le chantier, de 285 785 F au titre des frais liés directement au retard du transfert de l'école, de 681 432 F au titre des charges supplémentaires de personnel pour faire face à une rentrée scolaire retardée, de 1 000 000 F au titre des pertes d'exploitation du fait de la mise en service retardée des salles de micro-électronique, de 647 450 F au titre des frais de personnel supplémentaire affecté à la maîtrise d'oeuvre supportés par le maître d'ouvrage et de 885 862, 94 F au titre de la privation de jouissance de certains locaux ;

Mais considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de M. Z, expert désigné par ordonnance de référé du président du Tribunal de grande instance de Paris, que, si l'ouvrage, dont la livraison était contractuellement prévue au 30 avril 1987 n'a été finalement livré que le 31 octobre 1987, ce retard, qui a d'ailleurs eu pour corollaire des délais de paiement différés, a été essentiellement provoqué par les intempéries et par l'augmentation significative du volume des travaux commandés et exécutés, réduisant le retard réel à environ 2 mois, lequel s'explique pour une large part par le caractère très exceptionnel des ouvrages commandés en toute connaissance de cause par la chambre de commerce et d'industrie ;

Considérant, en sixième lieu, que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE ne justifie pas les sommes de 125 000 F au titre de la surveillance particulière de la fin de chantier lors du transfert d'une partie de son personnel administratif à partir du mois de juillet 1987, de 500 000 F au titre des troubles de jouissance résultant de la poursuite du chantier pendant les activités scolaires et de 200 000 F au titre du préjudice moral ;

Considérant, en septième lieu, qu'il appartenait à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE de recouvrer auprès des entreprises les sommes qu'elle aurait avancées au titre de divers frais de chantier pour un montant de 178 292,25 F ;

En ce qui concerne les désordres entrant dans le cadre de la responsabilité contractuelle :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la réception des lots n° 17 et 18 « électricité - courants forts et faibles », dont la société CGEE était titulaire, a été prononcée le 20 février 1988 avec réserves, lesquelles n'ont pas été levées ; qu'il résulte du rapport d'expertise, que les chemins de câbles effectivement installés ne comportent pas la réserve de 30 % demandée par le cahier des clauses techniques particulières en vue d'extensions futures ; que ce défaut incombe pour partie à la société BEFS-TEC, maître d'oeuvre, et pour partie à l'entreprise CGEE, aux droits de laquelle vient la société Cegelec Paris, qui a réalisé l'installation ; que, dès lors, il y a lieu de condamner la société BEFS-TEC conjointement et solidairement avec la société Cegelec Paris, à réparer les conséquences dommageables de ces désordres ; qu'il sera remédié à ces désordres par des modifications dont le coût est évalué par l'expert à 17 043 euros ; qu'eu égard à la part de responsabilité incombant respectivement au maître d'oeuvre et à l'installateur, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en condamnant d'une part, la société BEFS-TEC à garantir l'entreprise CGEE, aux droits de laquelle vient la société Cegelec Paris, à hauteur de 50 % du montant de l'indemnité mise à leur charge conjointe et solidaire, d'autre part, la société Cegelec Paris, à garantir la société BEFS-TEC à hauteur de 50 % de ladite indemnité ; qu'il résulte également du rapport d'expertise que le niveau d'éclairage des locaux d'enseignement est insuffisant ; que ces désordres incombent pour partie à M. X, architecte, pour partie à la société BEFS-TEC, maître d'oeuvre, et enfin, à la société CGEE, aux droits de laquelle vient la société Cegelec Paris, en sa qualité d'installateur ; que, dès lors, il y a lieu de condamner M. X conjointement et solidairement avec la société BEFS-TEC et la société Cegelec Paris, à réparer les conséquences dommageables de ces désordres ; qu'il sera remédié à ces désordres par des travaux dont le coût est évalué par l'expert à 126 856 euros ; qu'eu égard à la part de responsabilité incombant respectivement aux maîtres d'oeuvre et à l'installateur, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en condamnant, d'une première part, M. X à garantir la société BEFS-TEC et l'entreprise CGEE, aux droits de laquelle vient la société Cegelec Paris, à hauteur de 45 % du montant de l'indemnité mise à leur charge conjointe et solidaire, d'une deuxième part, la société BEFS-TEC à garantir M. X et la société Cegelec Paris à hauteur de 45 % du montant de ladite indemnité, d'une troisième part la société Cegelec Paris à garantir M. X et la société BEFS-TEC à hauteur de 10 % de la même indemnité ;

Considérant que la réception du lot n° 15 « chauffage-climatisation », dont la société Tunzini Nessi Entreprises d'équipement (TNEE) était titulaire, a été prononcée avec réserves à compter du 29 février 1988 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, et notamment de la visite de levée de réserves du 14 mars 1988 que les réserves émises aient été levées ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert commis par le juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris, que les odeurs nauséabondes qui affectent les extrémités des couloirs de circulation des « épis » sont imputables, pour partie à la société BEFS-TEC, seul concepteur du circuit d'extraction de l'air vicié inadapté aux locaux, et, pour partie, à la société TNEE, qui a installé ce circuit sans attirer l'attention du maître d'oeuvre sur son caractère inadapté ; que, dès lors, il y a lieu de condamner la société BEFS-TEC conjointement et solidairement avec la société TNEE à réparer les conséquences dommageables de ces désordres ; que la réparation de ces désordres nécessite l'installation d'un procédé d'extraction dont le coût est évalué par l'expert à 16 935, 86 euros (111 092 F) ; qu'eu égard à la part de responsabilité incombant respectivement au concepteur et à l'installateur, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en condamnant d'une part, la société BEFS-TEC à garantir la société TNEE, aux droits de laquelle vient la société Vinci Energie, à hauteur de 90 % du montant de l'indemnité mise à leur charge conjointe et solidaire, d'autre part, la société TNEE, aux droits de laquelle vient la société Vinci Energie, à garantir la société BEFS-TEC à hauteur de 10 % de ladite indemnité ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que les appareils « Rotoclone » ne peuvent être considérés comme répondant à la réglementation en vigueur qui exige une résistance à 400 degrés pendant une heure et qu'aucune dérogation n'a été obtenue pour les appareils installés ; que ces désordres sont imputables, pour partie à la société BEFS-TEC, qui a conçu l'installation sans s'assurer des exigences réglementaires, et pour partie à la société TNEE, aux droits de laquelle vient la société Vinci Energie, qui a installé des appareils non conformes à la réglementation en vigueur, car non agréés par un laboratoire français ; que dès lors, il y a lieu de condamner la société BEFS-TEC conjointement et solidairement avec la société TNEE à réparer les conséquences dommageables de ces désordres ; que la réparation de ces désordres nécessite l'installation d'appareils agréés pour une tenue à 400 degrés pendant une heure dont le coût est évalué par l'expert à 16 575, 62 euros (108 729 F) ; qu'eu égard à la part de responsabilité incombant respectivement au concepteur et à l'installateur, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en condamnant d'une part la société BEFS-TEC à garantir la société TNEE, aux droits de laquelle vient la société Vinci Energie, à hauteur de 90 % du montant de l'indemnité mise à leur charge conjointe et solidaire, d'autre part la société TNEE, aux droits de laquelle vient la société Vinci Energie, à garantir la société BEFS-TEC à hauteur de 10 % de ladite indemnité ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que 93 clapets coupe-feu sont inaccessibles et doivent être réarmés à distance ; que ces désordres sont imputables pour partie à la société BEFS-TEC, qui a conçu l'installation des clapets coupe-feu sans s'assurer de leur accessibilité, et, pour partie à la société Veritas, contrôleur technique, qui n'a pas attiré l'attention du BEFS-TEC sur ce point ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu de retenir la responsabilité de l'architecte, M. X, qui, par une lettre du 8 juillet 1987, avait attiré l'attention du BEFS-TEC sur l'inaccessibilité de certains clapets coupe-feu ; que dès lors, il y lieu de condamner la société BEFS-TEC, conjointement et solidairement avec la société Veritas à réparer les conséquences dommageables de ces désordres ; qu'il sera remédié à ces désordres par l'équipement en dispositifs de réarmement automatique comprenant les commandes correspondantes dont le coût est évalué par l'expert à 69 442,72 euros (455 521 F) ; qu'eu égard à la part de responsabilité incombant respectivement au concepteur et à l'installateur, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en condamnant d'une part, la société BEFS-TEC à garantir la société Bureau Veritas à hauteur de 90 % du montant de l'indemnité mise à leur charge conjointe et solidaire, d'autre part, le Bureau Veritas à garantir la société BEFS-TEC à hauteur de 10 % de ladite indemnité ;

Considérant, enfin, que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE demande le versement d'une somme de 1 815 843 F au titre des frais liés à la nécessité de recourir à une assistance complémentaire et à la maîtrise d'oeuvre pour suppléer à la carence du BEFS-TEC dans les derniers mois du chantier ; que l'expert a évalué le montant des travaux finalement dirigés par la société SETEC Planitec pour pallier cette carence à une somme de 44 166 223 F et que les honoraires à retenir à ce titre se monteraient donc à la somme de 231 872, 88 F, sur la base de 0,525 % du coût des travaux ; que, si la société BEFS-TEC a fait valoir que les honoraires versés pour l'intervention de la société SETEC Planitec ont été compensés par une diminution des honoraires payés à la société BEFS-TEC, elle ne l'établit pas ; qu'il y a donc lieu de condamner la société BEFS-TEC à verser à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE la somme de 35 348 euros ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

Considérant que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE a droit aux intérêts au taux légal afférents aux différentes indemnités mentionnées ci-dessus à compter du 1er avril 1997, date d'enregistrement de sa demande introductive d'instance devant le Tribunal administratif de Melun ;

Considérant, par ailleurs, que la capitalisation des intérêts a été demandée par la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS le 18 février 2002, date à laquelle il était dû plus d'une année d'intérêts ; qu'il y a lieu, dès lors, de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS a demandé la condamnation conjointe et solidaire des constructeurs à lui rembourser les frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris ; que toutefois, la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS n'a pas justifié avoir avancé ces frais, dont elle n'a d'ailleurs pas précisé le montant ; que ces conclusions doivent donc être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à la société BEFS-TEC, à M. X, à la société Bureau Veritas et à la société GTIE Thermique, la somme que ceux-ci demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que les mêmes dispositions font obstacle à ce que la société Weisrock Construction Bois, la compagnie AXA Corporate Solutions venant aux droits du GIE UNI EUROPE et la société Etablissements Dubois, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, soient condamnées à verser à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS à verser à la société Weisrock Construction Bois, à la compagnie AXA Corporate Solutions, venant aux droits du GIE UNI EUROPE et à la société Cegelec Paris les sommes que celles-ci demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, par application des mêmes dispositions, de condamner la société BEFS-TEC, M. X, la société Bureau Veritas, la société Cegelec Paris, venant aux droits et obligations de la société CGEE Alsthom et la société Vinci Energies, venant aux droits et obligations de la société Tunzini Nessi Entreprises d'Equipements - TNEE, à payer chacun la somme de 2 500 euros à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun en date du 18 décembre 2001 est annulé en tant qu'il a rejeté comme irrecevables les demandes de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS tendant à la condamnation de M. X, de la société BEFS-TEC, de la société CGEE Alsthom, de la société TNEE, aux droits de laquelle est venue la société Tunzini Industrie, puis la société GTIE Thermique, de la société Weisrock Construction Bois SA, de la société Bureau Veritas et de la société Etablissement Dubost.

Article 2 : M. X et la société Bureau Veritas sont condamnées conjointement et solidairement à verser à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS la somme de 5 716, 83 euros.

Article 3 : M. X garantira la société Bureau Veritas à hauteur de 80% des condamnations prononcées à l'article précédent. La société Bureau Veritas garantira M. X à hauteur de 20% du montant de ces mêmes condamnations.

Article 4 : La société BEFS-TEC est condamnée à verser à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS les sommes de 1 523,88 euros et de 35 348 euros.

Article 5 : M. X, architecte, est condamné à verser à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE la somme de 2 474,55 euros.

Article 6 : La société BEFS-TEC et la société Cegelec Paris, venant aux droits de la société CGEE, sont condamnées conjointement et solidairement à verser à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS la somme de 17 043 euros.

Article 7 : La société BEFS-TEC garantira la société Cegelec Paris, venant aux droits de la société CGEE, à hauteur de 50% des condamnations prononcées à l'article précédent. La société Cegelec Paris, venant aux droits de la société CGEE, garantira la société BEFS-TEC à hauteur de 50 % du montant de ces mêmes condamnations.

Article 8 : M. X, la société BEFS-TEC et la société Cegelec Paris, venant aux droits de la société CGEE, sont condamnés conjointement et solidairement à verser à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS la somme de 126 856 euros.

Article 9 : M. X garantira la société BEFS-TEC et la société Cegelec Paris, venant aux droits de la société CGEE, à hauteur de 45% des condamnations prononcées à l'article précédent. La société BEFS-TEC garantira M. X et la société Cegelec Paris, venant aux droits de la société CGEE, à hauteur de 45% des mêmes condamnations. La société Cegelec Paris, venant aux droits de la société CGEE, garantira M. X et la société BEFS-TEC à hauteur de 10% desdites condamnations.

Article 10 : La société BEFS-TEC et la société Vinci Energies, venant aux droits de la société TNEE, sont condamnées à verser conjointement et solidairement à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS la somme de 16 935,86 euros.

Article 11 : La société BEFS-TEC garantira la société Vinci Energies, venant aux droits de la société TNEE, à hauteur de 90 % des condamnations prononcées à l'article précédent. La société Vinci Energies, venant aux droits de la société TNEE, garantira la société BEFS-TEC à hauteur de 10 % du montant de ces mêmes condamnations.

Article 12 : La société BEFS-TEC et la société Vinci Energies, venant aux droits de la société TNEE, sont condamnées conjointement et solidairement à verser à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS la somme de 16 575,62 euros.

Article 13 : La société BEFS-TEC garantira la société Vinci Energies, venant aux droits de la société TNEE, à hauteur de 90 % des condamnations prononcées à l'article précédent. La société Vinci Energies, venant aux droits de la société TNEE, garantira la société BEFS-TEC à hauteur de 10 % du montant de ces mêmes condamnations.

Article 14 : La société BEFS-TEC et la société Bureau Veritas sont condamnées à verser conjointement et solidairement à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS la somme de 69 442, 72 euros.

Article 15 : La société BEFS-TEC garantira la société Bureau Veritas à hauteur de 90 % des condamnations prononcées à l'article précédent. La société Bureau Veritas garantira la société BEFS-TEC à hauteur de 10 % du montant de ces mêmes condamnations.

Article 16 : Les sommes mentionnées aux articles 2, 4, 5, 6, 8, 10, 12 et 14 porteront intérêts au taux légal à compter du 1er avril 1997. Les intérêts échus le 18 février 2002 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 17 : Le surplus de la demande de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS présentée devant le Tribunal administratif de Melun est rejeté.

Article 18 : Les conclusions de la société BEFS-TEC , de M. X, de la société Bureau Veritas, de la société GTIE Thermique, de la société Weisrock Construction Bois, de la compagnie AXA Corporate Solutions, venant aux droits du GIE UNI EUROPE et de la société Cegelec Paris tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 19 : La société BEFS-TEC , M. X, la société Bureau Veritas et la société Vinci Energies, venant aux droits de la société TNEE, verseront chacun à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE PARIS la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 02PA00689


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 02PA00689
Date de la décision : 17/10/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MERLOZ
Rapporteur ?: Mme Chantal DESCOURS GATIN
Rapporteur public ?: M. TROUILLY
Avocat(s) : COSSA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-10-17;02pa00689 ?
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